Tremblez mécréants & vilains ! Voici s'en venir le sieur Tadlos Onc'nnui, chercheur de vérité, pourfendeur des injustices, protecteur de la veuve et de l'orphelin...! Et ancien cavalier liche chevauchant des vagues de cauchemars atroces, assujetti à la volonté du divinement redouté X'o-Rath. Que voulez-vous... On ne choisit pas sa naissance, et sa renaissance encore moins.

PHYSIQUE | Cela n'échappera pas à quiconque Tadlos révélera la vérité : il est un on ne peut plus humble squelette. De chair, de tendons et de sang, que nenni, évanouis, pfiou ! Ne demeurent que les os, perpétuellement animés à travers les millénaires par la magie du Titan disparu. Jaunis et anciens, et pourtant vigoureux, affrontant tempête et sécheresse sans faiblir. Cela dit, l'absence de chair ne l'empêche pas de souffrir quand une épée vient à le traverser ou qu'il subit une vilaine chute. En un sens, il souffle du syndrome du 'membre fantôme', si ce n'est que toute sa chair est concernée. Un oeil disparu le gratte, une crampe lui prend parfois le fémur... Il n'a pas toujours besoin d'imiter les tics des vivants pour le paraître, sous les couches de tissus et de métal qui lui servent de rembourrage.

Nulle corne ou excroissance étrange n'atteste d'une nature autre qu'humaine ou elfe, peut-être. Quand à son sexe, il est incertain : selon les jours, son bassin lui parait féminin, d'autre fois masculin. Aucun souvenir ne vient corroborer l'un ou l'autre. Pas même sa voix ! En effet, faute de poumons, de gorge, et de tout ce qu'il faut, ce squelette est muet. Fort heureusement, la télépathie lui permet encore de communiquer... Avec le timbre et les modulations qui lui plaisent, de la délicate voix claire d'une fillette elfique au terrifiant gong d'un géant oni. De même, si un insistant exigeait de voir son visage, une illusion ferait apparaître le faciès lui seyant sur le moment.

Revêtant cuir ou métal selon les besoins, Tadlos avance avec le panache du chevalier allant au devant d'un objectif supérieur, la prochaine mission que lui accordera le destin pour ramener un peu de bien dans ce monde si obscur. Le heaume haut, le dos droit et les pieds battants le pavé comme la poussière, quand il ne chevauche pas avec prestance la belle bête que ses pérégrinations auront mise sur sa route. Une belle image de chevalier parcourant les routes et les villages désœuvrés... Quand sa 'justice' ne vient pas y ajouter un peu de l'obscurité dont il est issu.

MENTAL | Aussi morbide soit-il d'apparence, Tadlos se révèle bien souvent un joyeux luron. Appréciant la beauté d'un levé de soleil, le sourire d'un bambin comme une bonne chanson paillarde autour d'un bon feu, il enrichira le voyage de tout compagnon de route d'histoires fantastiques et de poèmes poussiéreux, comme d'acte de bravoure pour rassurer le quidam qu'il aurait décidé d'accompagner au village voisin dans une campagne réputée pour ses bandits. Sa compagnie des plus joviale et fichtrement optimiste en défrichera plus d'un, quand il n'en deviendra pas insupportable à conter toutes les fois où ce fut bel et bien pire, donc il n'y a rien à redouter voyons. Tantôt bien impulsif, tantôt plutôt réfléchi, il est un bon gars qui n'hésitera pas à aller au devant d'ennuis - dont il n'a parfois pas idée - pour rester fidèle à ses convictions altruistes et humanistes.

Cependant, cette belle facette a son revers : ses intentions de bien faire sont aussi fortes que ses limites pour y parvenir sont faibles. Ainsi, ses illusions de lièvres pelucheux se feront monstres cadavériques pour terrifier les mécréants, ses facétieuses malédictions visant à décourager le mensonge chez les enfants promettront une fin abrupte et atroce au meurtrier récidiviste, et sa lame tranchera les têtes de l'hydre autant de fois qu'il le faudra jusqu'à ce qu'elles ne repoussent plus, quand bien même celui lui prendrait encore une autre éternité. L'amusant protecteur devient quand il est nécessaire, un spectre de châtiment cruel.

Certains ajouteront qu'il a aussi comme une petite pointe de folie - vivre très longtemps quand on est mort, ce n'est pas forcément conseillé pour le bien-être mental -, mais ce n'est que mensonge et calomnie.

Mais qui suis-je ? Vous demandez-vous donc. Ah, je les vois de loin, ces petites frimousses s'éclairant à ma vue, inspiré par cette vision fantastique : celle du chevalier resplendissant, plume au vent et destrier fringuant. Sans doute vient-il de loin, pensent-ils. Il aura retrouvé et raisonné le sombre Valeryon avant le petit-déjeuner, défait une horde de bandits après le déjeuner, et aider une petite vieille à retrouver sa vache aux crépuscules. Cela, et bien plus, je vous l'assure ! Mais, puisque c'est vous, je vais me permettre une digression. Je vais commencer... Par le début.

Et les débuts du grand Tadlos Onc'nnui débutèrent... A la fin d'une guerre, vieille de plusieurs millénaires.

Alors que des champs de batailles titanesques fumaient encore, je m'éveillais à moi même, et me découvrit squelette, parmi les innombrables victimes du passage des Titans. Comment cela était-il possible ? Qui étais-je ? Que faisais-je là ? Tant de questions essentielles qui ébranlaient mon être vide de tous souvenirs... Si ce n'est un seul : celui d'une charge cauchemardesque, d'un cavalier squelette au milieu des zombies et d'autres osseux chargeant les vivants, jetant ceux-ci dans une terreur indescriptible, par le biais d'illusions terribles. A travers cette vision apocalyptique, la réalisation la plus étrange fut celle-ci : le cavalier, c'était moi.

A ce moment-là j'étais encore bien trop confus pour le comprendre, mais je peux aujourd'hui simplement vous l'expliquer : une liche, voilà ce que je suis. Un pantin réveillé par le malveillant X'o-Rath, qui servit ses desseins avec une fidélité sans faille dans la tourmente de la guerre contre les mortels... Et qui se retrouva sans but ni raison au départ de son maître. Livré à moi-même, dans un monde que ma renaissance visait à détruire. Cette vérité si simple, et atroce dans sa nature, je n'en pris pleinement conscience que bien plus tard. D'abord, je fus livré aux égarements du survivant, sans nom auquel s'identifier, sans maison où s'en retourner, qui alla par delà le monde en cherchant une explication à son existence... Puis une nouvelle raison d'être.

Oui, je comprend votre désarroi. Une telle ignominie ne sied pas à un chevalier, vous direz-vous... Pourtant, venir des culs de basse-fosse titanide a cela de bon qu'il vous offre une belle pente à remonter.

L'on me poursuivit pour m'occire comme engeance des Titans; pour s'approprier mes ossements magiques pour quelques rituels douteux. L'on me maudit; l'on me lâcha des chiens aux trousse; l'on me jeta au visage la pitance que l'on venait de m'offrir, en découvrant ma nature. Ah, que les mortels eurent de cruauté envers moi. Je peux les comprendre : j'ai la figure de quelque chose que bien des leurs redoutent, parfois même sans s'en rendre compte. Cette peur, finalement, je ne leur en teins guère gré. Il me fallut quelques décennies de stratagèmes biscornus, de fuites ridicules et de dialogues de sourds pour trouver finalement la parade à votre inconfort, par le biais d'une rencontre quasi-divine tant elle m'inspira, et ma voie vers une 'non-vie' pleinement vécue : un déguisement. Un nom à vous offrir, qui ne vous effraierait point. Même !... Qui réveillerait en vous la flamme de l'espoir, qu'une vile adversité aura su faire faiblir. Ou une vilaine grippe.

Peaufinant mon apparence, mes sors d'illusion et mon discours au fil des âges, après qu'un malicieux et inspiré voyageur ait fait montre de bonté à mon égard, me suggérant ce stratagème, je découvris cette facette de l'humanité que ma nature m'avait jusque-là refusé : la bonté humaine. Votre innocence. Votre indiscutable don pour vous embourber dans des situations compliquées pour le simple profit d'un baiser d'oiselle. Ah, l'humanité, ses frasques et ses déboires, son exécrable égoïsme, et ses plus beaux gestes dans la plus sombre des nuits. Un panier de fruits à la douceur sans pareille, où la moindre mésaventure vous vaudra de croquer dans une chair pourrie et lâche.

Ainsi finit par naître l'incroyable Chevalier Onc'nnui, de l'Ordre de la Phalange Nocturne. Arpentant le Sekaï en tout temps, prêtant l'oreille aux plus démunis, se jetant à corps perdu dans les plus désespérées batailles, pour œuvrer à l'avènement d'un plus beau jour que le précédent. Si mon nom changea quelque fois, celui de l'Ordre resta le même, et son secret avec lui : que j'en étais le seul et immortel représentant, muet et sans visage.

Je fus là lors de la Guerre des Plumes, bataillant sur bien des routes pour protéger les civils victimes du conflit.
Je fus là quand les cultistes, purent finalement rentrer dans les villes... Que le sang coula entre ceux-ci et les Divinistes, ces âmes égarées au profit des Titans. Voisins et amis se dénoncèrent et s'étripèrent au nom de leur foi. Que je pare une lame, une autre jaillissait d'une porte voisine.
Je fus là, quand le Reike chargea les armées monstrueuses des Titans, une nouvelle fois déversées sur le Sekaï. A ma grande horreur, je rencontrai pour la première fois depuis des éons, des frères et sœurs de servitude... Et je les pourfendis sans faiblir, car je savais, qu'eux, étaient incapables de la moindre raison.

J’œuvre encore à libérer ceux qui restent, que X'o-Rath a - une nouvelle fois - abandonné en ce monde, sans pour autant que tous soient libérés de son emprise. Des mortels s'échinent simplement à les détruire pour libérer Shoumeï de leur présence mortelle. Moi, je ne puis m'y résoudre, s'il m'est permis une autre voie. Une où ils pourraient eux-aussi 'vivre', malgré la vie qui leur fut dérobée. Ce serait un beau pied de nez au Grand Manipulateur.

Ainsi, vous, vous connaissez mon secret. Que sous mon armure et mes kilos de tissus et de cuir, se trouve un squelette animé par une ancienne et sombre magie, capable lui-même de répandre une obscurité cauchemardesque... Mais que je n'en fais rien, auprès des innocents, réservant aussi dur traitement qu'à ceux ayant perdu toute leur humanité. Oui... J'aime faire rire les enfants à la vue d'un lièvre leur cueillant une fleur, ou un grand gaillard triste avec la vision de sa belle-mère poursuivie par des cochons.

Prenez garde, jours gris... Le Chevalier Onc'nnui arrive.