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  • Ven 27 Sep 2024 - 0:59
    PA - Le Convoi du Berceau
    Tour 1


    Ile du Berceau


    - Ne cherche jamais à approcher de sa cellule, gamin.

    La voix du Gardien est sèche, mais il faut dire qu’il est un vieux de la vieille. Il fait partie de ceux qui sont présents depuis cinq longues années au Berceau, et si ses géôliers ont la réputation d’être incorruptibles, Sylas est de ceux qui sont les plus méfiants sur la nature humaine. Sur la nature des races humanoïdes tout court, en fait. Toutes sont sujettes à la faiblesse, et dans leurs cas, leur mission est trop importante pour qu’ils se permettent de faillir. Non seulement les Reikois sur l’île gardent des prisonniers hautement dangereux pour le peuple du désert, mais en plus, ils gardent une entité titanide, qui est la plus sournoise de toute, avec le Maître de la Mort et le monstre Puantrus. Rares sont ceux sur qui Zeï a pu avoir une emprise sur ce coin du Sekai, mais la seule fois où cela a eu lieu, le sang a coulé et le traître s’est échappé. Le Gardien en est encore amer – lui qui était en mission au moment des faits – et c’est à cause de cela qu’il parle aussi sèchement à un  nouveau Drakyn qui a récemment été promu par le couple royal. Le pauvret n’est pas un gamin, contrairement à ce que Sylas affirme, mais pour ce dernier, il est un bleu, un novice qui doit prendre ses marques le plus rapidement possible pour devenir insensible aux suggestions de la Chuchoteuse.

    - Il paraît que, depuis quelques jours, elle chante sans cesse un refrain incompréhensible... C’est ce que j’ai entendu, du moins, ajoute rapidement son homologue, en voyant l’air rembruni de Sylas. Je n’ai pas été dans la zone où elle est prisonnière.

    - Et cela vaut mieux, où je t’envoie mon poing dans la gueule, rétorque du tac au tac son interlocuteur. Mais ouais, crache-t-il, cette putain marmonne une chansonnette depuis qu’on a reçu la lettre du couple royal. Sa fidèle va partir pour la capitale.

    - Et vous partez avec le reste des gardes.

    Un soupçon de désapprobation flotte dans la voix du nouveau, ce qui attire un sourire au lycanthrope.

    - On y peut rien, mon gars. Les ordres sont les ordres, et je suis habitué à sortir à l’extérieur. Faut croire que l’Empereur est sacrément vénère. T’seras pas affecté à la geôle de Zeï, d’toute façon. C’est à l’Akkelanach septentrional de s’en occuper, et c’est ni mon job, ni le tien. Tu m’as pris les menottes en adamantine ? Un hochement de tête lui répond et il approuve. Bien. La mégère paraît inoffensive, mais on la laissera pas prendre ses aises durant le voyage. Retiens qu’on privilégie toujours ce minerai pour les prisonniers dans son genre.

    - Pourquoi ne pas prendre des menottes en barre noire du roi ?

    - Parce que c’est trop précieux et parce que cette Fae en vaut pas la peine. On la droguera continuellement avec des médicaments. Ca la mettra dans les vapes, et l’adamantine l’empêchera d’utiliser inconsciemment ses pouvoirs.
    - Et une fois sur place ?

    Un haussement d’épaules indifférent.

    - Probablement que le roi la tuera, après avoir eu la réponse à ses questions. On s’en plaindra pas, ma foi. Allez, passe-moi ça et va voir Aldebaran. Il doit aller nourrir des prisonniers dans un coin de la prison.

    Son compagnon s’exécutera sans mot dire – il faut dire qu’il n’a pas trop le choix – et Sylas continue son chemin un moment alors qu’il se reconcentre sur la mission qu’il va bientôt accomplir. Ils seront dix, dix pour accompagner la diviniste, mais aussi pour récupérer des ressources alimentaires et utilitaires une fois qu’ils seront arrivés à la capitale. Leurs inventaires refaits, ils ne seront pas de trop pour protéger la marchandise jusqu’au Berceau, sachant que le désert comporte encore quelques racailles ainsi que d’autres monstruosités bien voraces. Peut-être aussi recevront-ils des instructions de l’Esprit. Ce qui est sûr, c’est que la coordination devra aller de pair, et puis, il sera toujours possible de récupérer un ou l’autre prisonnier que l’armée aura coffré dans les geôles de la ville.  

    Mégère, de son côté, aura connu une détention austère, sans aucun confort dû à sa vieillesse. Même pas la torture menée par leurs confrères n’aura suscité la pitié des Gardiens. Ils s’en seront occupés pour qu’elle vive, mais leurs paroles auront été aussi rares que glaciales. Outre la faim, jamais totalement rassasiée, et la soif, la vieille dame aura eu à souffrir de la solitude sept mois durant, sans aucune nouvelle du monde extérieur. Même ses alliés ne pouvaient l’aider, et compte-tenu de son esprit particulièrement retors – ainsi que sa participation retors à un sombre rituel – elle avait été isolée des autres détenus. Quant à l’étrange sphère qu’elle possédait, elle avait été scellée, le temps qu’on décidât de son sort. Pour l’occasion, toutefois, elle serait aussi transportée jusqu’à Ikusa dans un coffre fermé par des chaines en adamantine. Puisqu’elle avait une vénération particulièrement féroce pour sa maîtresse, on l’avait éloignée le plus possible de celle-ci durant son emprisonnement, afin que la vieille folle n’en retire aucune consolation. Mais quand l’esprit est brisé, même se retrouver dans la forteresse de sa déesse peut paraître un honneur suprême…

    - Qu’elle crève, ça nous fera des vacances, marmonne Sylas.

    Au moins, ils seraient rapidement à la capitale une fois qu’ils auraient mis pied à terre.
    Et peut-être qu’il obtiendrait même la permission d’aller chasser Qultarn, qui sait.
    Cet enfoiré méritait de crever, lui qui avait tué ses frères et trahi les siens.

    ***

    - Ils vont bientôt arriver, affirma la douce voix de Valeria.

    C’était une voix cristalline, qui tranchait pourtant avec la physionomie de la Valkyrie. Protectrice de la cité de Bénédictus, elle avait été désignée par l’Entité Sombre pour mener et protéger un groupe de fidèles sur les terres du Reike. Ils devaient libérer une pauvre sœur prisonnière de l’Empire. Du moins, c’était ce que l’Entité Sombre lui avait demandé et c’était ainsi que le Maître de la cité avait présenté les choses aux cardinaux. Malazach et Siame avaient alors appelé des volontaires pour remplir cette mission et depuis, la jeune femme s’était retrouvée avec cinq compagnons. Le premier était un être affreux, mi-homme mi-chèvre, du nom de Sublime, une véritable réussite de la part de son Créateur, il fallait le dire. Le deuxième était un disciple du cardinal en personne, peut-être était-ce même ce dernier qui l’avait motivé à aller sur place. Il y avait encore la sœur de la Prophétesse, qui avait tenu à récupérer l’une des leurs. Et puis – ô doux fait cocasse – il y avait parmi eux un ancien ennemi qui connaissait bien les environs. Et pour cause, ils se trouvaient près d’un chemin qui conduisait au Berceau. Qultarn plus que tout autre devait être familier de ces terres désertiques, tout comme il connaissait les habitudes de ses anciens confrères. Leurs manières de fonctionner, leurs formations, peut-être même connaîtraient-ils quelques anciens collègues et alors…

    Un sourire malsain naquit sur le visage de la Valkyrie, qui reprit.

    - Les cardinaux veulent que nous récupérions la fille de Zeï. La méthode importe peu et je n’ai pas mon mot à dire là-dessus. Je vous laisse donc agir, mes frères, ma soeur, pour que la Volonté des Divins soit accomplie. Conformément à la demande de l’Entité Sombre et de leurs Eminences, je vous protégerai au péril de ma vie. Cependant… La jeune femme laisse parcourir son regard sur les dunes alentours, sur les masses rocheuses qui peuvent leur fournir un abri et leur permettre d’élaborer une embuscade. Cependant, je ne peux pas tout faire. Il nous faudra agir vite et bien. Retenir les Gardiens. Les tuer pour rendre hommage à X’Orath. Aider notre sœur à récupérer ses esprits, prendre les quelques ressources qu’ils possèdent, sans handicaper notre retraite, et revenir à Bénédictus. Je vous soutiendrai, mais je vous laisse décider de la marche à suivre.

    En attendant, le groupe est en retrait par rapport à l’un des chemins tracés dans le désert. Mais il doit rapidement se décider car déjà, un convoi commence à se dessiner au loin, et les divinistes ne seront pas dupes : il s’agit là de Mégère et de ses géôliers. Encore un peu, et ils seront à portée.

    ***

    C’était sans ménagement que Mégère avait été emprisonnée dans une cage en bois, qui laissait passer aussi bien la pluie, que la sable et le vent. Droguée par des substances médicamenteuses, destinées à brouiller son esprit, la vieille femme n’avait pas eu beaucoup l’occasion d’analyser ce qu’il se passait. Ce dont elle était certaine, c’était qu’on l’avait forcé à ingérer des produits douteux, qui l’avaient rendue aussi docile qu’un agneau. On avait également ficelé ses mains dans des menottes en adamantine, mais, compte-tenu de l’exiguïté de sa cage et de son comportement amorphe, on ne lui avait pas enchainé les pieds, puisqu’elle était contrainte d’être assisse la majorité du voyage.

    Sa prison était assez simple, car composée de matériaux en bois, mais ces derniers avaient naturellement été renforcées par des barres métalliques, et l’entrée était également fermée par un cadenas en fer. Une précaution inutile, puisqu’elle était une mage et non une guerrière, mais les Gardiens avaient préféré mettre toutes les chances de leurs côtés.

    - Faudra qu’on fasse bientôt halte, observe l’un des guerriers.
    - Je sais bien, mais j’aime pas cette zone, lâche Sylas. Elle est éloignée de tout et on n’est pas encore aux heures les plus chaudes de la journée. Faut qu’on en profite pour avancer vers le Nord, où on sera plus en sécurité. M’enfin, il faut redonner à boire à la prisonnière et aux chevaux. Retenir son nom ne vaut même pas la peine. Les drogues vont bientôt cesser de faire effet, il faut lui en redonner avant qu’elle ne s’agite et qu’elle ne commence à me gueuler ses fichus « Soyez témoins ! », grogne-t-il.

    Informations HRP:

    Objectifs:

    Fin du tour : dimanche 29 septembre à 20h.
    Prochaine résolution : lundi 30 septembre à 22h (grand max).

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  • Ven 27 Sep 2024 - 10:37
     
    Le convoi du Berceau
    Feat. L'équipe de sauvetage

    Endors-toi, Gardien, jusqu’à ce que les astres
    aient passé la barrière du couchant
    Alors je me tiendrai devant toi, souriant de toute mes dents.
    D’autres étoiles se lèveront dans l’axe céleste,
    Celles qui bénissent et celles qui maudissent
    Avec leur lumière pour témoin, je mettrai fin à ton supplice



    ***

    Un brouillard perpétuel régnait dans l’esprit de la vielle Fae, recroquevillée dans un coin de sa cage, son corps brinqueballé au gré du mouvement du convoi et du relief de la route. Impossible de penser clairement, pas moyen de réfléchir à un moyen de s’échapper, les pensées de Mégère étaient embrouillées par les drogues qu’on l’avait forcé à ingérer. La morsure des chaines en adamantine attestait de la prévoyance extrême de ses geôliers, qui prenaient la menace d’une acolyte de Zeï avec le plus grand sérieux.

    « Endors-toi, Gardien, jusqu’à ce que les astres
    aient passé la barrière du couchant
    Alors je me tiendrai devant toi, souriant de toute mes dents.
    D’autres étoiles se lèveront dans l’axe céleste,
    Celles qui bénissent et celles qui maudissent
    Avec leur lumière pour témoin, je mettrai fin à ton supplice »


    Un refrain qui passait en boucle depuis des mois, depuis ce jour fatidique où l’ancienne avait craqué, où les tortionnaires du Reike avaient fini par briser ses défenses et lui arracher des informations capitales sur ses Maitres Divins. Des mois infernaux, pendant lesquels de nombreuses émotions s’étaient succédé dans l’esprit de la vieille Fae : Culpabilité, déni, haine envers soi-même, …, un savant mélange pour pousser n’importe qui vers la folie. Et cette faim cruelle, qui tiraillait sans cesse l’acolyte de Zeï ! Cette envie irrésistible de chair humaine qu’elle ne pouvait pas satisfaire était un véritable calvaire !

    « Endors-toi, Gardien, jusqu’à ce que les astres
    aient passé la barrière du couchant
    Alors je me tiendrai devant toi, souriant de toute mes dents.
    D’autres étoiles se lèveront dans l’axe céleste,
    Celles qui bénissent et celles qui maudissent
    Avec leur lumière pour témoin, je mettrai fin à ton supplice »


    Un refrain qui était apparu de lui-même, la seule défense que la psyché de la vieille Fae avait trouvé pour garder un semblant de lucidité, un petit îlot de clarté luttant contre un océan de démence ! Une chansonnette qui parvenait à passer outre les drogues débilitantes et les injures de ses gardiens. La promesse d’une vengeance éclatante, si Mégère arrivait à se sortir de ce pétrin. Malheureusement pour l’ancien, les bons prisonniers engendraient souvent de bons geôliers, et les Gardiens du Berceau faisaient partie des meilleurs du Sekai.

    « Endors-toi, Gardien, jusqu’à ce que les astres
    aient passé la barrière du couchant
    Alors je me tiendrai devant toi, souriant de toute mes dents.
    D’autres étoiles se lèveront dans l’axe céleste,
    Celles qui bénissent et celles qui maudissent
    Avec leur lumière pour témoin, je mettrai fin à ton supplice »


    Le corps de Mégère commençait à s’agiter, des petits soubresauts indiquant que les effets de la drogue commençaient à s’évanouir. Le brouillard qui obscurcissait ses pensées allait bientôt se lever, laissant place aux suppliques adressées aux habitants du Royaume Divin. Mégère avait failli, seul lui restait maintenant la capacité à implorer le pardon de ses maitres, à prier pour obtenir une seconde chance !

    Restait à voir si ce voyage allait être son dernier, ou si la Volonté des Titans exaucerait son souhait.

    Résumé:

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  • Ven 27 Sep 2024 - 16:09


    Qui aurait cru qu'une senteur puisse devenir une arme ? Les parfums boisés portés par un vent de fraîcheur devraient parvenir jusqu'aux marcheurs du Berceau et pourtant, seuls des remugles nauséabonds accompagnent désormais leur progression. Cela fait quelques minutes que des parasites supposément rares en cette saison les assaillent et les guerriers se voient contraints de chasser des nuisibles vrombissant à leurs esgourdes. L'un remarque que l'air ambiant empeste et s'il ne semble pas y prêter plus d'attention que cela, d'autres Gardiens plus méfiants trouvent curieux qu'une ou deux dépouilles animales laissées à l'abandon puissent produire une si ignoble fragrance. C'est trop poignant, trop concentré pour n'être qu'un ours malade ayant rendu l'âme. Il y a quelque chose d'autre, quelque chose dont la léthale aura gangrène tout.

    Une abrupte secousse s'empare d'un corps dont le cœur ne bat pourtant plus depuis des lustres. Infatigables ouvrières, des mouches grasses s'accumulent aux commissures de lèvres rendues curieusement humides par delà le trépas. Excréments et chair putréfiée chutent parfois en monceaux depuis un cadavre pendu à la hâte à la cime d'un arbre mort. Ceux qui escortent le convoi abritant en son sein l'adoratrice de Zeï découvrent dans l'horreur la plus totale l'origine de ces mortels parfums et comprennent sans mal qu'il s'agit là d'une sinistre mise en scène visant sans doute à insinuer l'effroi en eux.

    Hissés comme de vulgaires pièce de viande pourrie, les corps décapités sont érigées en figures décoratives et exposées à la vue des vaillants. Tordues comme de simples marionnettes, les silhouettes dénudées ont été ainsi abandonnées par le mystérieux tortionnaire à l'origine de ce supplice dans de suggestives postures laissant entrevoir toute la perversion de l'artiste. L'un des hommes du Berceau lève la tête, se trouve face à l'intimité profanée d'une femme dont le bas-ventre est dévoré tant par la ruine que par les insectes grouillants qui s'y amoncellent en un bacchanale sanglant. Ses fripes sont déchirées mais on reconnaît néanmoins, sous une épaisse couche de boue et malgré la rouille, les contours d'une armure reikoise. Ces victimes n'ont pas été sélectionnées au hasard, tout a été mis en place ici, en ce jour, à une fin précise.

    La vue de ceux que le Malin a décidé de tourmenter même dans la mort est insupportable, difficile même à ceux et celles dont l'esprit est taillé dans les rocs les plus solides de l'Empire. On voit quel sort a été réservé à ces pauvres âmes et l'empathie toute naturelle des conscients vient empiéter sur la rigueur militaire. On se voit à leur place, on s'interroge sur les aspirations et sur l'étendue de la sauvagerie du grossier barbare ayant cru bon de mettre en œuvre une si macabre exposition. Plus important que tout le reste, on se demande surtout où il se trouve.

    Malheureusement, il n'est pas loin.

    Les adorateurs des Titanides créatrices ont fait route jusqu'ici pour retrouver leur sœur perdue et pour donner une radicale leçon aux arrogants impériaux ayant jugé bon de faire taire la prêcheuse aux paroles sucrées. Leur noblesse est toute relative mais leur foi, inébranlable malgré des décennies d'infernale souffrance, fait d'eux de féroces adversaires à l'inaltérable esprit belliqueux. La haine de l'infidèle nourrit les actes de certains, l'amour des Dieux en animent d'autres. Tous ont leurs allégeances, nul ne se ressemble et si beaucoup ressentent à l'égard du Paladin du Monstre des sentiments partagés, il est indéniable qu'il a su se rendre utile jusqu'à présent et puisque même les Cardinaux l'encensent, il se sent légitime dans sa folle croisade.

    Pour son plus grand plaisir, ses douteuses méthodes ne sont que rarement remises en question. Les miliciens sur lesquels il s'est jeté dans ce qui ne parut qu'être un accès de rage fiévreuse constituent finalement un ingrédient dans cette minutieuse composition qu'il s'est évertué à mettre en place depuis de longues heures. Marmonnant pour lui-même tout en ricanant dans sa barbe poisseuse, l'être aux cornes recourbées a répondu à des ombres que lui seul distingue et ce n'est que lorsque la Valkyrie leur a donné ordre de reprendre position dans les dunes environnantes qu'il a consenti à abandonner son œuvre funèbre.

    Les yeux grands ouverts et la démence aux lèvres, le satyre aux pattes fendues s'applique à effectuer une dernière retouche. Une main qu'il ne devrait plus avoir ajuste les épaulières d'un impérial au cœur perforé et à la gorge à demi mâchée. Le chevalier de la pourriture susurre aux oreilles fondues de sa pièce maîtresses quelques mots porteurs de magie tout en massant son ventre grisâtre et les arcanes obscures viennent alors se frayer un chemin jusqu'aux veines tièdes du corps sans vie. La carcasse change de teinte, tirant subitement sur le verdâtre tandis que des boursouflures se forment et que les plaies ayant causé sa déchéance s'entourent de bubons toxiques. Du fait de l'accumulation de gaz, les vêtements se tendent et un fin sifflement commence à émaner depuis ce ballon organique qui se forme. Une rune fluorescente symbolisant le Monstre se manifeste alors pour parfaire le rituel et la bombe toxique, finalement, se voit prête et complète.

    Au milieu de ce carnage, ceux qui portent la marque de la décadence passeront peut être inaperçus...

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  • Ven 27 Sep 2024 - 19:26
    Voyager avec Sublime était aussi pénible que de se déplacer dans un chariot à bestiaux, sauf qu’eux avaient le mérite de ne pas sentir la pourriture en plus de la merde. Et ni Laune, ni le nouveau venu n’était venu adoucir ses tourments. Le premier parce qu’ils ne parlaient guère, le second parce qu’elle s’en méfiait comme de la peste. Reikois, tout comme elle -tout comme Eris- il était arrivé depuis peu dans leur rang, leur avait raconté -ou du moins à Siame et Malazach- comment il avait tenté de libérer Zeï, échoué et prit la fuite jusqu’à eux. D’une certaine manière, Phèdre pouvait le comprendre. Bien qu’elle n’eut pas essayé de faire échapper un titan de la prison Reikoise, elle avait été forcée de fuir une nation qui, sans le savoir, voulait sa mort. Ce qui n’avait pas le mérite de lui offrir une once de sa confiance pour autant. Peut-être était-il un menteur, un infiltré, un de ces ennemis qui se glisse dans vos rangs pour mieux le dissoudre, membres après membres. Aussi, c’était Laune qui avait eut la chance -ou pas- de la supporter la plus grande partie du trajet et à qui elle avait évoqué les questions qui avaient germés dans son esprit durant les deux jours de trajets qu’ils avaient entamés sur le dos de la Bête avant de la laisser à la frontière pour ne pas se faire repérer.

    Sublime à défaut d’être regardable avait au moins le mérite d’être foutrement utile, d’abord parce que la Bête était là grâce à lui -elle ne pouvait lui retirer cela- mais également parce qu’il avait une créativité morbide qui la fascinait autant qu’elle l’effrayait. En vérité, c’était Eris qui était terrifié par lui. Phèdre, elle, était seulement dégoutée. Penchée sur l’épaule de la créature, le nez caché dans un mouchoir blanc qui avait viré à l’ocre à cause du sable, elle avait observé son labeur avec attention. Elle en avait fait de même lorsqu’il s’était échiné à suspendre les cadavres qui s’étaient mis à goutter d’un sang visqueux sur le sol puis avait pris soin de s’écarter aussi loin que possible quand la puanteur avait été portée par le vent dans sa direction. Le temps de battement de cil, Eris avait repris le contrôle et elle avait tout juste retenu un haut le cœur avant de battre en retraite, laissant la créature à ses murmures doucereux.

    De sa démarche assurée et délicate malgré le sable qui glissait sous ses chaussures, les pans de sa robe en bronze céleste claquant contre ses jambes fines, elle lança un regard soupçonneux à Qultarn, un de ceux qui disaient : “Je ne te fais pas confiance” puis elle s’en alla rejoindre Laune.

    — Je vais patienter ici, indiqua-t-elle au guerrier en lui désignant le couvert d’une épaisse roche. — J’attendrais qu’ils tombent dans le piège de Sublime et lorsque ce sera fait, je décuplerai leurs émotions. Elle frissonna à cette idée ; elle ferait vomir la peur par tous les pores de leur peau, ferait dégueuler la paranoïa qui en découlerait et laisserait sagement les deux autres guerriers faire ce qu’ils faisaient de mieux : tuer. Qu’Ils te protègent. Lui glissa-t-elle en conclusion avant de lui tapoter gentiment l’épaule. Peut-être les avait-il empêchés, Siame et elle,  de récupérer la chambre la plus confortable du temple et peut-être lui ferait-elle payer en temps voulu, mais elle ne le détestait pas complètement.

    Comme promis, elle alla se placer à l’ombre de la roche pour attendre son heure. Pendant ce temps, elle songea à ce que Siame lui avait dit avant son départ et à la manière dont Eris s’était agitée, joyeuse, à l’idée d’approcher à ce point du Reike. L’idée avait déplu à Phèdre, s’en était suivit un débat interne houleux qu’elle avait remporté, unique raison pour laquelle Eris restait si silencieuse malgré la proximité avec sa terre natale. Mais l’ancienne ange la sentait tout de même roder à la frontière de son esprit.

    Ce fut un nuage de poussière au loin qui attira son attention ; ils arrivaient. Un sourire étira ses lèvres parfaites. Siame l’avait envoyé avec les autres pour lui ramener l’une de leurs sœurs depuis trop longtemps perdue et l’idée d’infliger une telle humiliation au Reike la faisait vibrer jusqu’au plus profond de ses entrailles.

    Patiente, elle prépara sa magie qui ne frapperait qu’au moment opportun : après avoir découvert la macabre mise en scène de Sublime.

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  • Sam 28 Sep 2024 - 11:30

    Le trajet avait été morne et, en tout cas pour Qultarn, empreint du mélange de tension, d’impatience, et de peur inhérent à tout affrontement à venir. Il était impossible de savoir ce qui pouvait se passer dans le chaos du combat, une flèche pouvait vous cueillir de loin, une lance pouvait surgir d’un angle mort, ou un sort, même allié, pouvait vous découper. La réalité était qu’une bataille comprenait une part d’injustice, et qu’il fallait l’accepter et la minimiser le plus possible.

    C’est pour cela qu’il avait profité du calme qui lui était imposé pour préparer son équipement : son armure avait été réparée et soigneusement entretenue, et il ne pouvait s’empêcher d’aiguiser le fil de son épée jusqu’à pouvoir se raser avec. Le bruit répétitif de la pierre, son mouvement de va-et-vient avaient quelque chose d’apaisant qui lui rappelait les pillages et la Conquête. Les autres fidèles avaient profité du calme et d’être arrivés les premiers sur le lieu de l’embuscade pour procéder à des préparations qui lui semblaient parfaitement adaptées, et son rôle de nouvel arrivant faisait que, de toutes les manières, il ne se permettrait pas de faire autre chose que suivre les ordres et fournir les informations qu’il possédait.

    « Bientôt, bientôt, bientôt... semblait susurrer la lame, ou Zeï elle-même. »

    Evidemment, à leur place, il n’aurait eu qu’une confiance toute relative en lui : son arrivée un peu récente, ses tatouages qui étaient enfin partie mais l’identifaient clairement comme un reikois et, en plus, un Gardien du Berceau, conjugués de son attitude toute militaire, suffisaient à provoquer la méfiance. Pourtant, la protection de l’Arbre-Monde s’étendait à lui, en tant que véritable fidèle, ce qui avait constitué le meilleur argument de tous.

    Le message de l’Entité Sombre et la connaissance de Qultarn des procédures du Berceau pour le transfert de prisonniers et les itinéraires privilégiés par les Gardiens n’excluaient pas un piège élaboré, mais cela revenait à croire que leur divinité protectrice s’était fourvoyée. Etait-ce du blasphème ? Les dieux étaient-ils faillibles ? Il poserait la question en rentrant. Pour l’instant, l’hybride avait placé soigneusement ses cadavres piégés, et ils s’étaient accordés sommairement. Son regard parcourut rapidement son voisin direct, un paladin de Xo’Rath en armure intégrale, alors même qu’ils étaient allongés sur la terre dure du désert.

    L’air commençait à peine à se réchauffer, une prêtresse préparait sa magie, et les corps sans vie des miliciens qu’ils avaient croisés et exécutés étaient prêts. Sa mana circulait également dans ses membres, et si son souffle était lent et régulier, les battements de son coeur n’attendaient que de s’emballer dans la frénésie du combat. D’un mouvement habitué de l’épaule, il fit glisser son bouclier sur son bras gauche. L’ancien, trop abîmé, avait été jeté, mais il n’avait pas eu de difficultés à s’en procurer un nouveau.

    Sur celui-là, un symbole d’arbre établissait clairement sa nouvelle allégeance. Portant la main à sa ceinture, il attrapa le haume adapté à la forme de ses cornes, et le plaça soigneusement sur son crâne, puis resserra les lanières pour qu’il ne glisse pas. Déjà, la chaleur du début de journée le faisait suer dans son armure de plates, mais il valait mieux ça que se faire transpercer par la première arme venue. Puis, doucement, il dégaina son épée, laissant son fourreau vide, avant d’en embrasser la lame.

    Si, auparavant, il le faisait pour se porter chance avant l’affrontement, c’était désormais en signe de salut aux Titans qu’il goûtait le métal ferreux qui devait récolter le sang des impies. Il chercha une prière à murmurer, mais son instruction ne l’avait pas encore menée jusque-là, et celles qu’il avait entendues se mélangeaient dans un méli-mélo brouillon au sein de son esprit. Il se contenta donc de concentrer sa volonté pour leur faire sentir qu’il était prêt à tout pour leur avènement. Et ce que certains appelaient à tort la Corruption de Shoumeï et du Monde apparaîtrait alors comme la véritable Purification, par la mort et le sang, dont le Sekai avait besoin.

    Et, bien entendu, il s’agirait de montrer au-delà de la prière. Il faudrait agir plus loin que la piété, tapi à Bénédictus.

    Le nuage de poussière proche présageait de l’échauffourée à venir, il avait indiqué l’effectif moyen d’une expédition de transport du Berceau, et deux ou trois autres charrettes accompagnaient vraisemblablement les gardiens de la prison. La première priorité était de libérer l’adepte de Zeï. Peut-être même aurait-il pu y parvenir, mais Zeï n’en avait touché mot à l’époque, et l’occasion se présentait maintenant.

    L’occasion de libérer une soeur de coeur, et celle de prouver à sa nouvelle famille qu’ils pouvaient lui faire confiance, et qu’il serait là pour oeuvrer au service des Titans.

    La super-vitesse brûlait presque désormais dans ses jambes, mais il savait que le plan était clair : attendre les effets des pièges empoisonnés, en esquiver les conséquences, potentiellement dangereuses y compris pour eux, puis laisser la prêtresse semer le chaos parmi les reikois. Et, enfin, aller au contact pour faire ce qu’il faisait de mieux.

    Tuer.

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  • Dim 29 Sep 2024 - 13:01
    - Pourquoi craindre l’œuvre de notre frère ?

    Qu’il demandait en tournant lentement l’acier rougi de son heaume vers Phèdre qui venait de lui parler. C’était la première fois en de nombreuses heures qu’il venait de parler. Sa voix enrouée, d’outre-tombe, semblait lui être douloureuse, comme si l’acte en lui-même était si rare qu’il lui nécessitait un effort considérable. Si Qultarn était taciturne, Launegisiles lui était une véritable pierre tombale. C’était si rare qu’il parle en dehors de sa propre congrégation d’écuyers de la Rose Noire qu’il aurait pu jurer que sa Divine Sœur ait sursauté en l’entendant parler.

    - Pestilence et Mort sont divins... Frères honnis du Panthéon. Indispensables pour autant... Trouvez-y la beauté de la Mère, essayez de voir la perfection de l’œuvre de notre frère.... Qui fait de la mort un temple où grandit une nouvelle vie… Fidèle et dévouée.

    Il était si rare, que Launegisiles ne parle en l’absence de Malazach qu’il ne s’étonna même pas de l’air peut-être incrédule de Phèdre, pour qui il n’avait eu jusqu’ici que des hochements de têtes, des oui et des non à peine soufflés quand elle posait ses questions et lui confiait ses suspicions. Peut-être était-ce à cause de sa proximité avec Celui qui avait été un Père pour les deux filles d’Aurya ? Que la bienveillance du Père ne déteigne sur le Fils et que par extension, elle cherche le même réconfort auprès de lui ? Hélas, le chevalier de la Rose Noire, le seul qui n’avait pas eu besoin de titulature lors de l’investiture de ses frères et de ses sœurs, était incomplet là où Malazach était entier. Car par sa nature intrinsèque, il était l’incarnation même de ce que la Mort devait être ; non pas quelque chose à craindre, mais à aimer. Le chevalier, lui, était incomplet, imparfait. Teinté de la corruption de la vie qui battait dans sa poitrine et dont le sang, bien rouge et vif, inondait ses veines et ses artères. Même sa peau pourtant blême et ses joues creuses avaient de la chaleur qu’on pouvait toucher du bout des doigts.

    Et même son âme, morcelée par le phantacier, était vive et corrompue par des émotions qu’il étouffait sous la montagne de sa dévotion. On aurait pu croire que de ceux qui étaient présent, c’était Sublime le fanatique et Launegisiles qui était le plus modéré. Mais non, car Mort et Pestilence sont sœurs et marchent dans les pas de l’un et de l’autre. Les cadavres sont le foyer de bien des maladies, et les maladies sont semeuses de bien de morts. Leurs fois s’exprimaient différemment, de façon joviale et bubonique pour l’un. De façon morne et sépulcrale pour l’autre.

    - Nous marchons ensemble, divine mère... Qu’il dit. Notre nouveau frère a marché dans les flammes de la colère de l’arbre monde... Il nous est revenu purifié... Laissez-lui la chance de faire ses preuves…

    Qu’il termine dans un soupir, presque comme s’il était essoufflé. Trop longtemps silencieux, cordes vocales bien trop noueuses, voix asséchée par le soleil cruel qui le faisait suer à grandes gouttes, le rappelait à son impureté. Sa main se glissa à sa ceinture pour dénouer l’outre faite avec la panse d’un porc, pour lever la visière de son heaume. Tout juste ce qu’il faut pour qu’on puisse apercevoir la peau blème lâche qui semblait à peine tenir à sa mâchoire et qu’il ne jette la tête en arrière pour boire une grande gorgée d’eau et qu’il ne rattache le cordon de tendons à sa ceinture. Et enfin, seulement, il reprend la parole.

    - Je frapperais les impies avec le Renié. Qu’il dit. Semez la terreur, je récolterais la mort.

    Puis, il attend, patiemment en tirant à son tour l’énorme lame qui lui a été confiée par Malazach, il passe ses doigts sur la gemme d’une noirceur infinie qui serti le pommeau de cette grande épée dont la lame semble gelée même par les températures ambiantes. Du phantacier pur, et une gemme de Xoratite. L’étoile de la mort, avec laquelle il ne cessait jamais de s’entraîner, pour être digne de la confiance accordée par son père.

    Il tourna la tête ensuite vers les volutes de poussière soulevée par les sabots de chevaux et les essieux de chariots, estimant difficilement la distance. En tant qu’ancien gardien des catacombes il était bien plus à l’aise pour estimer les distances à l’oreille plus qu’aux yeux. Mais dans les dunes, le son porte bien plus loin et sur ce terrain bien peu familier le chevalier de la Rose Noire allait, non, devait se reposer sur ses frères et sœurs d’armes pour parvenir à enfin libérer la prophétesse des griffes du Dragon. Il ignorait beaucoup de choses sur celles qu’on surnommait « La Mégère » ou « La Grand-Mère », si ce n’est qu’elle était celle qui parlait avec la voix de la mère de tous les secrets. Launegisiles s’était tenu de poser trop de questions à Qultarn qui semblait être plus dévoué à ce titan là qu’aux autres. Il ignorait beaucoup de choses du culte des secrets et sa curiosité, bien trop vive à son propre goût, avait été muselée. Il aurait des questions à poser à la grand-mère et à Qultarn, en temps et en heure. Peut-être eux pourraient ils expliquer comment un titan avait pu être tué ?


    Quoi qu’il en soit, l’heure de frapper arrivait. Et dans sa main, dansaient des ombres solides.


    Résumé a écrit:Launegisiles se prépare à frapper de concert avec Qultarn une fois que le convoi soit tombé dans le piège. Paré à fondre sur eux avec toute sa magie. Des ombres, de sa vitesse et de sa force.


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  • Dim 29 Sep 2024 - 20:33
    PA - Le Convoi du Berceau
    Tour 2


    Telle mère, telle fille, avait envie de dire Sylas. Il avait eu le temps de le retenir, ce couplet que la prisonnière reprenait sans cesse. Elle le prononçait peut-être à voix basse, d’une voix éteinte, qui plus est, mais il l’avait entendu à bon nombre reprise depuis que leur voyage avait commencé. L’esprit détraqué de la diviniste se focalisait sur ce refrain, comme s’il était un phare qui l’éclairait dans la nuit. Seulement, Mégère était sur un navire qui allait bientôt s’échouer sur des récifs : jamais elle n’attendrait le port, se promit le Gardien, et jamais elle ne rejoindrait les siens.

    Il était cocasse que Zeï ait créé une chansonnette au Berceau, et que sa disciple ait fait de même sans aucune concertation avec la titanide. Pour peu, cela aurait fait froid dans le dos, mais la barre noire du roi apposée sur la créature gigantesque empêchait tout lien entre la déesse et ses suppôts. C’était cette certitude qui avait rassuré le géôlier, qui aurait pu voir en ce concours de circonstances un sinistre présage. Bien sûr, il aurait été possible de bâillonner la vieille femme et ils le feraient sans doute d’ici ce soir, si elle les énervait avec cela, mais puisque ses paroles étaient davantage un murmure qu’un cri hystérique, la patience de ces guerriers d’élite n’étaient pas encore émoussée, et ils pouvaient encore le supporter.

    « Endors-toi, Gardien, jusqu’à ce que les astres
    aient passé la barrière du couchant
    Alors je me tiendrai devant toi, souriant de toute mes dents.
    D’autres étoiles se lèveront dans l’axe céleste,
    Celles qui bénissent et celles qui maudissent
    Avec leur lumière pour témoin, je mettrai fin à ton supplice »


    - Cette idiote ne sait pas que les étoiles sont aussi nos gardiennes, tout autant que le Soleil et la Lune, déclare subitement un de ses confrères.
    - Laisse-la dans ses délires, elle ne fera plus long feu une fois qu’elle sera arrivée.
    - J’aurais presque espéré voir la fin de sa misérable existence.
    - Et si cela avait été possible, j’aurais bien demandé sa tête pour la présenter à Zeï, histoire qu’elle comprenne ce qu’on fera à tous ses protégés, ricane Sylas en éloignant distraitement une mouche qui vient se poser sur son bras. Mais nous devrons nous contenter de la livrer. Après avoir contourné les dunes, là-bas, nous arrêterons le convoi.
    - D’ailleurs, tu ne trouves pas que ça pue depuis un moment ?

    Sylas lève la tête, utilise ses sens augmentés, et arrête aussitôt d’utiliser son odorat.

    - Ca ne pue pas, ça schlingue, tu veux dire. Soyez prudents en avançant ! tonne-t-il d’une voix plus forte. Devant, ça sent la mort et la pourriture !

    Il ne croit pas si bien dire. Car si les dunes obstruent sa vue et l’empêche de voir un sinistre spectacle, quelques instants plus tard, rien ne l’empêche de lever la main pour arrêter le convoi. Impossible pour lui de continuer la route sans contourner plusieurs cadavres qui ont été sciemment déposés sur leur chemin pour leur faire obstacle. Ce sont des dépouilles humaines, dont la tête a été arrachée, et dont la dignité a tout simplement été arrachée. L’un n’a plus de mains, et celles-ci ont été attachées sur sa poitrine avec une corde grossière. Une autre femme a été transpercée tout le long de son bas-ventre, pour que des insectes répugnants y élisent leur demeure. Un autre encore a été manipulé pour avoir une attitude bouffonne et moqueuse même dans la mort.  Impossible pour le groupe d’être indifférent à ce spectacle, et impossible pour Sylas de ne pas y voir automatiquement une menace pendant que les montures des chariots renâclent.

    - Toi, aboie-t-il, va redonner les drogues à la sorcière tout de suite ! Qu’on soit sûr que ce ne soit pas une de ses illusions sordides. Les autres, calmez les chevaux, sondez les environs, et préparez-vous à… Le chef de la troupe s’interrompt quand un cri effrayé ne résonne et qu’il ne pose son regard vers un de ses hommes. Ce dernier eu l’outrecuidance d’inspecter les défunts sans attendre les ordres, et en conséquence, un des pièges de poison s’est déclenché, le piégeant dans un nuage toxique qu’il inhale malgré lui.

    Naturellement, c’est un guerrier, et il a des vifs réflexes. Sa première pensée est donc de s’écarter sans attendre – réaction légitime et ô combien naturelle – sauf que sa précipitation les dessert. Déjà, ses mouvements deviennent moins coordonnés, mais surtout, il bouge par inadvertance un autre cadavre, qui en bouge un autre dans sa chute. Cela déclenche aussitôt une réaction en chaine : les chausse-trappes de Sublime s’activent à leur tour, et ce n’est plus un, mais bien trois Gardiens qui sont touchés par les toxines.

    Ce ne serait pas si dramatique s’ils n’étaient pas en proie à une panique aussi soudaine qu’injustifiée. Et quand Sylas dissipe le nuage de poison en canalisant sa magie du vent, la peur qui se lit sur leurs visages continue malgré tout à se voir sur leurs visages.

    Le vétéran jure donc en bas-parlé alors qu’il dégaine ses lames jumelles.

    - Elevez vos protections psychiques ! ordonne-t-il. Restez lucides et faites voir à ces chiens la fureur du Reike !

    Lui-même est déjà prêt à riposter, et forcément, tous ceux qui sont encore sains d’esprit et encore vivants lui obéissent, alors que les premières têtes tombent déjà grâce à l’effet de surprise.

    L’instant d’après, le combat commence.
    Et le chaos s’installe de manière violente.

    ***

    Valerya avait observé le groupe avec un intérêt non feint tout le long de leur voyage. Elle avait vu Phèdre se rapprocher de Laune, le protégé du cardinal. Elle avait constaté que le Paladin du Monstre et la fille d’Aurya ne se parlaient pas. Elle avait remarqué aussi que le membre de la Rose noire était aussi muet qu’une tombe : Phèdre avait donc réussi un exploit en le faisant parler aussi longtemps durant leur voyage. Quant à Qultarn, il n’avait pu totalement dissimuler son impatience à l’approche des combats. Un sentiment que la valkyrie pouvait comprendre, étant elle-même le bras armé d’Exia. Il était doux de faire exercer la justice des Titans – une justice que les croyants comme elle jugeaient bons d’exercer selon leur bon vouloir, en acceptant les directives de quelques âmes, seulement, comme celles de Siame et Malazach.

    Il était apparu que Laune et le Drakyn iraient au front, pendant que la sœur de Siame resterait à l’arrière. Et étrangement, pour le début des hostilités, Valéria ne s’invite pas dans la danse. Elle aimerait bien, cela la démange, mais elle est aussi sournoise que mauvaise, et elle se rapproche donc d’une démarche ondulante vers sa sœur dans la foi.

    - Les chevaux… vient-elle murmurer à Phèdre. Quand le convoi s’arrêtera, avant le combat, augmente la nervosité de l’un d’eux au maximum afin de les distraire. Un animal qui s’agite est difficile à maîtriser. Concentré sur leur monture, ils seront des proies d’autant plus faciles à tuer. Une fois que tu ne peux faire plus, arrête tout, et concentre-toi sur les Gardiens quand les poisons se déclenchent. Ton travail, combiné à celui de Sublime, sera magnifique.

    Et il le sera d’autant plus que les poisons augmentent les sensations du plaisir et de la douleur. La peur n’est pas une souffrance physique en soi, mais elle peut être une torture mentale infiniment pire que tout le reste.

    Laissant la mage noire agir, Valeria lui demande simplement de la rejoindre dès qu’elle aura jugé son œuvre satisfaisante. Et la jeune femme se tourne d’ailleurs résolument vers la cage de Mégère. Assassiner les Gardiens, c’est bien ; libérer la fille de Zeï, c’est mieux. Elle ne jette qu’un coup d’œil aux imbéciles qui déclenchent l’un après l’autre les pièges, et elle ne cherche même pas à écouter les ordres du chef de la troupe, qui a invoqué sa magie du vent pour disperser les vapeurs. C’est trop tard, le mal est fait. Déjà, elle s’aperçoit que trois hommes sont tombés sous la fureur du Drakyn et du membre de la Rose noire. Un autre est encore vivant et agonise au sol.

    - Et si tu t’occupais de leur faire justice, Sublime, avant de me venir auprès de Mégère ? susurre-t-elle d’une voix douce.

    Elle n’attend pas de réponses : au contraire, déployant ses ailes, elle s’envole pour atterrir l’instant d’après à côté de la cage de la grand-mère. Ce n’était qu’un déplacement court, mais bien pratique pour éviter la moindre trace de poison et elle plante son regard sur la vieille Fae devant elle.

    - Mégère, Mégère, il va falloir te réveiller et aider tes frères, l’invite-elle d’une voix langoureuse. L’Entité Sombre et les cardinaux nous envoient.

    Malheureusement, elle n’a pas le temps de dire autre chose. Elle sent une menace dans son dos, et elle a le réflexe de dégainer son épée avant de parer intuitivement la lame d’un Gardien, qui a vu sa progression jusqu’à la cage. Elle grogne et se contente de regarder très brièvement si Sublime et Phèdre l’ont suivie.

    - Trouvez quelque chose pour le cadenas et ses menottes. Phèdre, aide-la à revenir parmi nous. Je suis impuissante face aux dégâts de l’esprit.

    Après tout, on ne peut être doué en tout.

    Un nouvel estoc, une nouvelle parade.

    - Il faut aussi s’intéresser à ce dernier coffre dans le dernier chariot, siffle-t-elle. Vos frères n’auront pas le temps de le faire.

    Et pour cause, ceux-ci continuent leur carnage. Pour autant, ils s’en rendront compte, passé l’effet de surprise, les Gardiens ont repris la discipline de fer qu’ils ont apprises au Reike. Qultarn n’en sera pas surpris – l’inverse aurait même été décevant – mais sa vitesse est un avantage de taille, qui lui permet de mettre en difficulté ses adversaires. Leurs réactions sont à la traîne, faute de ne pas avoir les mêmes réflexes, et la pression que le Drakyn entraîne n’est pas sans conséquence sur leurs corps comme sur leur santé mentale.

    Le disciple de Malazach n’est pas en reste non plus plus. Moins rapide que son confrère, le guerrier a cependant un autre atout : sa force surhumaine. Or, quand on plie un corps en deux, et qu’on le projette trois mètres plus loin à cause de la force de ses bras ou de ses poings, cela dissuade même inconsciemment de se frotter à ce genre de personnage. Il pourrait l'envoyer directement rejoindre son divin Maître l'instant suivant, sauf qu'un nouveau-venu ne s'interpose avant le coup fatal et ne pare avec aisance le coup du chevalier de la Mort.

    Sylas ne regardera pas les siens mourir aussi facilement après tout.
    Il a bien compris que, si les deux guerriers étaient à terre, cela pourrait les aider à reprendre l'ascendant dans cette embuscade mortelle.
    Mais en conséquence, il faut les tuer et le plus tôt serait le mieux.
    Sans compter que parmi eux, il y a…

    - QULTARN !!!

    Difficile de dire un nom de façon plus méprisante.
    Ce traitre à la nation ne mérite pas de respirer l’air du Sekai et il ordonne à ses confrères pris en pleine rixe avec les deux guerriers d’aller vers le milieu du cortège.

    - Eliminez-moi les deux filles et l’abomination près du haut du cortège ! Allez aider Filheim ! Je m’occupe de ce traître et de son sbire.

    Malheureux serait celui qui le contredirait, mais les divinistes ne sont pas obligés de rester sur place. L’un d’eux peut aller épauler le reste de leur équipe pendant que l’autre enchaine avec un duel contre le gardien. Ce dernier, dans tous les cas, canalisera sa magie pour augmenter sa vitesse et sa force. Il faudra faire plus que ça pour rompre sa ténacité et l’envie de détruire les fidèles des Titans.

    Etat des Gardiens:

    Note HRP:

    Objectifs:

    Fin du tour : mercredi 2 octobre à 22h.
    Prochaine résolution : jeudi 3 septembre à 22h.

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  • Lun 30 Sep 2024 - 15:39
    Tout se passait merveilleusement bien. Les cadavres piégés avaient explosés en une avalanche de viscères immonde dont l’odeur nauséabonde se propageait jusqu’à elle. Heureusement les toxines, plus lourdes, restaient à leurs places. C’était un spectacle étrange et morbide bientôt suivi par le ballet tout aussi lugubre des armes de Launegisiles et Qultarn. Phèdre serait volontiers restée au couvert de son abri pour les observer un peu plus longtemps, la manière qu’ils avaient de se mouvoir malgré leur physique avait quelque chose de fascinant qui forçait le respect. Hélas, la Valkyrie ne tarda pas à la rappeler doucement à l’ordre, comme un diable sur son épaule.

    Les chevaux.

    D’un coup d'œil, elle aperçut les bêtes qui bien qu’agités restaient parfaitement maîtrisables. Il s’agissait d'animaux entraînés à guerroyer, des coursiers que l’on effrayait pas si aisément. Malgré ce que semblait penser Valeria. Ses yeux s’attardèrent sur les montures un instant de plus puis passèrent aux combattants. Il fallait agir vite.

    Phèdre s’extirpa de sa cachette avec précaution, bien que son corps soit protégé par sa robe, elle ne tenait pas à ce que qui que ce soit décide de la passer au fil de son épée. Le sable s’égrainait sous ses pieds et le soleil tapait dur, avançant à reculons elle surveillait avec attention les gardiens. Affolés dans un premier temps, surprit dans un second, ils étaient néanmoins en train de reprendre leurs esprits et ils ne tarderaient pas à se rendre compte de sa présence mais aussi de celle de Valeria. Son regard passa à nouveau sur les chevaux, un en particulier, dont elle voyait l'œil marron rouler dans son orbite. Il était calme uniquement parce que les fers l’y forçait. La demi-sang plissa les yeux, concentrant son esprit sur lui uniquement.

    “Tu es cruelle…” Murmura la petite voix écoeurée d’Eris qu’elle ignora royalement avant de lancer une première salve d’attaque mentale sur le hongre qui émit un couinement avant de se mettre à piaffer puis à ruer. Est-ce que les chevaux pouvaient avoir mal au crâne au même titre qu’un humain ? Ou est-ce que la douleur se propageait différemment ? Une question dont elle était curieuse d’entendre la réponse mais sur laquelle elle ne tergiversa pas plus longtemps lorsque l’animal commença à gémir de douleur. Avait-elle déjà entendu un cheval gémir ? Sans demande son reste et tout en conservant la vue sur sa victime aussi longtemps qu’elle le pouvait, Phèdre progressa jusqu’au chariot où était détenue Mégère.

    Valeria y était déjà parvenue. Et pas qu’elle visiblement. Un gardien qui l’avait sans doute aperçu lorsqu’elle avait pris son envol était en train de la forcer à croiser le fer. Phèdre grimaça, l’idée de se glisser entre deux lames dont l’une voulait probablement sa mort ne lui disait rien. Cependant, rester en retrait n’était pas non plus une option. D’abord parce qu’un des gardiens finirait bien par venir la cueillir à un moment ou à un autre mais également parce qu’attendre que ses camarades meurent ne l'aiderait pas à rentrer en vie. Il ne lui restait désormais plus qu’à choisir quelle était sa priorité ; essayer d’atteindre l’esprit malade de la vieille fae ou trouver une solution pour la sortir de sa cage ? Le coffre, lui, attendrait.

    Phèdre profita du fait que les deux combattants se soient suffisamment éloignés du chariot où gisait Mégère pour s’en approcher. Glissant une main à travers les barreaux, elle toucha l’épaule de la vieille créature en murmurant :

    - Si l’un des gardes approche, faites moi tomber. Glissa-t-elle à l’attention de la détenue, sans savoir si elle l’entendait. Elle l’espérait en tout cas. La demi-fae s’assit sur le rebord de la prison, calant son corps du mieux qu’elle le pouvait puis quand elle fut certaine qu’il ne tomberait pas tout seul lorsqu'elle perdrait connaissance elle darda un regard assassin sur l’adversaire de Valeria et se rua sur son esprit ; se heurta de plein fouet à ses protections naturelles, celles que les années dans le berceau leur conférait, mais s’évertua à le malmener autant que faire se pouvait dans l’unique but d’en prendre possession.

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  • Lun 30 Sep 2024 - 19:33
    C’était la figure carmine d’un homme d’armes qui s’interposa alors entre Sylas et celui qui avait renié son allégeance à la tyrannie des dragons. Dans son armure rouge comme le sang de tous ceux qui avaient péri dans les flammes du Courroux et par le fer de leurs haches, se trouvait le dernier représentant d’un ordre ancestral. Le dernier chevalier de la Rose Noire, l’ultime Sentinelle des cryptes de Célestia, le protégé du Faucheur et son bras armé sur le champ de bataille.

    Launegisiles était un homme taciturne, bien plus depuis cette soirée funeste où, l’âme morcelée par un chat-à-neuf queues en phantacier, il avait prononcé son serment en la présence du plus méritant des fidèles. Aussi, silencieux comme une tombe, le chevalier avait laissé à son adversaire le temps de prononcer son serment, d’affirmer ses vœux de victoire et de vengeance à l’égard du plus récent de leurs compagnons. La main, dont la paume était posée sur le pommeau, glissa pour venir saisir la fusée de cette grande épée pour qu’elle quitte le fourreau de ses épaules et ne vienne se planter dans le sable. L’autre main venant se joindre à la première, alors qu’enfin, le chevalier ne brise son propre silence.

    - Soit.

    Sa voix, rauque et sépulcrale, s’anima le temps de ces mots en raclant douloureusement les cordes vocales trop peu utilisées pour que ce simple mot ne lui demande un certain effort. Il faisait trop sec, par ici de toute façon. Puis, il prit l’avantage. Le mouvement, explosif, commença dans ses jambes qui s’enfoncèrent dans le sable, les poignets se croisèrent et s’alignèrent ensuite pour tirer la pointe de la lame de phantacier du sable et la planter dans les étoiles. Puis, comme un bucheron qui s’apprêtait à fendre une buche, il frappa.

    L’air siffla alors qu’il fendit l’air, jusqu’à ce que soudain le phantacier ne se mette à chanter sa sérénade en rencontrant l’acier qui lui se mit à geindre et à se tordre sous la force du coup. Sylas était un guerrier talentueux, c’est certain, mais Launegisiles n’avait rien d’un sbire. Il était aussi fort que rapide, égalant voir peut-être même surpassant son adversaire, bien qu’il fût difficile de deviner qui allait avoir la main haute dans cette passe d’armes. Ramenant l’épée en garde d’un coup sec, le chevalier recula d’un pas, vif et économe de mouvement, pour éviter la contre-attaque de son adversaire. Un estoc qui visait les interstices de son armure, oui, à n’en pas douter les gardiens restaient de redoutables adversaires. Roulant doucement de son épaule en réajustant sa garde, levant ses mains à hauteur de son épaule droite pour baisser la pointe de son épée à deux mains vers l’adversaire, adoptant une garde qui lui donnait des airs de taureaux, prêt à empaler le Reikois dès sa prochaine attaque.

    - Laisse-le-moi, s'il te plaît, gronda Qultarn. Nous avons des comptes à régler.

    Lentement, le heaume du chevalier se pencha sur la droite. Ainsi, Sylas n’était pas le seul à être motivé par cette pieuses émotion qu’était la vengeance ? La fente du casque se redirigea sur celui des deux qui n’avait pas encore renié le dragon. Et le casque se pencha à nouveau.

    - Une ordalie, frère Qultarn ? Soit. Qu’il souffla lentement en se redressant et s’écartant d’un pas, puis d’un autre.

    Et avant que Sylas ne puisse interjecter, Qultarn s’élança à l’assaut. Captivant et capturant l’attention toute de son adversaire et laissant au chevalier de la mort le champ libre. Chevalier qui ne garda un intérêt que tout à fait relatif pour ce combat fratricide, ne serait-ce que pour éviter de se prendre un coup perdu. Contournant l’adversaire, il avança vers l’agonisant et planta la lame de phantacier entre ses omoplates sans même lui accorder un quelconque regard. A quoi bon ? C’était lui, là-bas, qui allait poser un problème. S’avançant et prenant une impulsion. Il s’élance pour rattraper les deux guerriers, plus rapide, plus vif, il fend le sable avec élégance et c’est in-extremis que les deux hommes se retournent. Le premier est trop lent et ne peut que lever un canon d’avant-bras pour arrêter la lame maniée par le chevalier. Avant-bras recouvert de cet acier qui se fends contre le phantacier, sectionne les chairs et entaille l’os jusqu’à le casser. Le second, lui, lève son épée en hurlant quelque chose dans cette langue du désert que Launegisiles ne comprends pas. Qu’importe.

    Le chevalier tire sur la lame pour gagner en longueur d’acier et bloquer l’attaque avec la garde de cette grande épée à deux mains. Un chevalier de la rose noire contre deux gardiens du berceau, un combat équitable, se surprit il à penser.


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  • Mar 1 Oct 2024 - 16:31

    L’embuscade démarra en leur faveur. Jusque-là, tout était normal, et Qultarn éprouvait une satisfaction féroce à voir ses anciens confrères et consœurs en proie au chaos et à la désorganisation. C’était la juste rétribution de leurs erreurs. Il regrettait simplement de ne pas avoir eu l’occasion de les convaincre de rejoindre la vraie Foi, abandonnant derrière eux les mensonges de Tensai et du Reike. Les lourds nuages de poison restaient plus ou moins stationnaires après avoir été déclenchés, et il traça soigneusement son chemin pour qu’un ennemi soit toujours placé entre les effluves de Puantrus et lui-même. La panique qui saisit subitement les Gardiens fut la contribution de la Sœur d’Aurya à leur mission, et il était grand-temps qu’il fasse la sienne.

    Les premiers échanges furent plein de sauvagerie contrôlée : ses années d’expérience lui disaient que c’était au moment où le piège s’actionnait qu’il fallait faire peser le plus d’efforts possible pour achever de renverser la situation en leur faveur, donc il se précipita sur le soldat le plus proche. Un brusque coup de bouclier encaissa la frappe d’une hache à une main, et déséquilibra suffisamment le reikois pour lui permettre un coup d’estoc qui visait initialement la gorge son adversaire. Hélas, la distance qui les séparait et un changement d’appui permirent au guerrier humain, plus petit, de faire simplement crisser la lame de Qultarn sur l’épaule de son armure.

    Renforçant sa magie de vitesse, le drakyn accéléra brusquement, se retrouvant sur la droite de sa cible. Le bord de son bouclier frappa juste sous les côtes du Gardien, tandis que son épée s’abattait sur les doigts gantés d’acier qui tenaient la hache. La frappe ne parvint pas à tous les trancher sec, ne faisant tomber que l’auriculaire au sol, mais cela fut suffisant pour lui faire lâcher son arme. Alors qu’il tentait de s’éloigner pour dégainer le large coutelas qu’il portait à la ceinture, le zélote maintint le contact, et, dans un grognement d’effort, fit glisser le tranchant de son épée contre l’arrière du genou de l’humain.

    Il tomba au sol en serrant les dents, le bruit de sa douleur couvert par celui de l’affrontement, et un nouveau coup de bouclier suivi d’un revers de lame mit fin à sa souffrance.

    Un cri couvrit le champ de bataille, et Qultarn, entendant son nom, tourna la tête en direction de Sylas. La voix ne laissait aucun doute possible, de même que son armure, une relique de la Conquête à laquelle ils avaient participé ensemble. Elle avait la patine des objets utilisés tous les jours, des séries d’égratignures dessus, pour la plupart bénignes, et quelques colifichets attachés dessus en souvenir du bon vieux temps. Ils appartenaient à des tribus différentes, mais Tensai les avaient fait entrer dans le rang au sein de sa horde, et si les rapports étaient généralement compliqués entre bandes initialement rivales et subitement devenues alliées, la puissance de leur meneur et la richesse des rapines avaient suffi pour juguler le plus gros des rancœurs.

    Ils avaient même combattu côte à côte à plusieurs occasions.

    Un rapide échange avec Launegisiles permit de diviser les responsabilités, lui laissant celle du chef de l’expédition des Gardiens. Ne laissant derrière lui que l’écho de sa voix croassante, le paladin de Xo’rath partit mener le combat ailleurs. Concentrant son attention sur Sylvas, Qultarn raffermit sa prise sur son bouclier et son épée. Une ordalie ? Peut-être était-ce bien le cas. Mais c’était également l’occasion pour lui de montrer sa dévotion et sa fidélité aux Titans, en éliminant la tête de l’expédition pour libérer l’Adepte de Zeï. Cela leur donnerait également davantage confiance en lui, et permettrait possiblement de le sortir de la chape de mutisme qui l’encerclait et le suivait partout.

    Pour avoir droit à la camaraderie de sa nouvelle famille, il fallait le mériter, et il y comptait bien.

    Précautionneusement, Qultarn se mit à tourner autour de Sylas, et chacun se jaugea mutuellement. Les premiers coups conduisirent simplement à ce que les épées s’entrechoquent, le drakyn en profitant pour estimer la distance qui le séparait du guerrier. Un coup de pied dans le sable projeta des grains à un mètre et demi de haut, loin d’être suffisant pour aveugler son adversaire, mais suffisant cependant pour le distraire. Sylas tressaillit, ses muscles se gonflèrent, et le brusque mouvement de son épée fit siffler l’air juste devant le nez du nouveau zélote.

    La frappe latérale suivante frôla à nouveau le plastron de Qultarn, qui leva le bras pour éviter que son bouclier ne soit touché : le moindre choc mal encaissé, quand Sylas était dans cette disposition, était l’assurance de voir sa défense brisée, voire son bras cassé. Momentanément sur la défensive, le drakyn dansa en arrière, restant le plus proche possible de l’arme de son adversaire, à la recherche d’une faille ou d’une ouverture.

    Quand celle-ci se présenta, il était prêt.

    D’une brusque impulsion du pied droit, Qultarn se propulsa en avant, épée en position d’estoc pointée vers l’ouverture dans le heaume du Gardien. D’une torsion du buste, Sylas opposa son épaule et se prépara à assener un revers dévastateur. A la faveur d’un changement d’appui, ils se retrouvèrent dos à dos alors que Qultarn crochetait le pied de son rival, sans parvenir à le déstabiliser complètement. Cela fut néanmoins suffisant pour pouvoir lui assener un coup de talon dans la rotule, le métal des bottes clinquant contre celui de son armure.

    Le drakyn roula en arrière pour éviter la contre-attaque, et baissa les yeux vers l’appui de Sylas. Il était difficile en l’état d’estimer si sa jambe était moins robuste qu’auparavant, mais il se sentait en confiance : après tout, il suffisait de ne pas se faire toucher. Il aurait presque gagné à ne même pas porter d’armure avant d’être encore plus vif et rapide. Et, pourtant, un accident était si vite arrivé, si bien qu’il ne pourrait jamais s’en défaire.

    « Alors, Sylas, regrettes-tu tes choix ? Comprends-tu ton erreur ? Es-tu fier d’être devenu le chien de garde d’un homme qui s’est acheté un palais, un trône et une femme avec le sang de nos frères et sœurs ? »

    La rage le reprit au cœur lorsqu’il cracha ses mots.

    Spoiler:
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  • Mar 1 Oct 2024 - 20:10
     
    Le convoi du Berceau
    Feat. L'équipe de sauvetage

    Les soubresauts agitant le corps de Mégère se faisaient de plus en plus intenses, signe que la drogue perdait son emprise sur l’esprit de l’acolyte de Zeï. Le cerveau de la vieille Fae recouvrait peu a peu le contrôle, reconnectant chaque synapse petit à petit, un processus long et douloureux, car la douleur revenait en même temps ! Tout cela s’accompagnait par le retour de ses sens : le bruit du cliquetis des armes et des hurlements parvenait à ses oreilles, l’odeur du sang versé et du poison agressait ses narines, la vision de serviteurs des Titans combattant les Gardiens s’offrait à ses yeux.

    Était-ce possible ? Était-ce réel ? Les maîtres du Royaume Divin n’avaient donc pas abandonné leur servante et près son échec ?

    « Endors-toi, Gardien, jusqu’à ce que les astres
    aient passé la barrière du couchant
    Alors je me tiendrai devant toi, souriant de toute mes dents.
    D’autres étoiles se lèveront dans l’axe céleste,
    Celles qui bénissent et celles qui maudissent
    Avec leur lumière pour témoin, je mettrai fin à ton supplice »


    Pas encore tout à fait sortie de sa torpeur, la prisonnière se balançait d’avant arrière dans sa cage, cognant faiblement ses chaînes contre les planches de bois, tout en scandant la même chansonnette, encore et encore. Devant elle, de l’autre côté des barreaux, une jeune femme à la chevelure mi-blanc mi-noir, prostrée contre le rebord de la cage, comme inconsciente. Elle avait murmuré quelque chose, mais Mégère n’avait rien entendu, la faute aux effets de la drogue, encore présents dans son système. Entourant la cage, une figure ailée, un homme en armure rouge et deux individus cornus se démenaient pour terrasser les soldats reikois.

    « Endors-toi, Gardien, jusqu’à ce que les astres
    aient passé la barrière du couchant
    Alors je me tiendrai devant toi, souriant de toute mes dents.
    D’autres étoiles se lèveront dans l’axe céleste,
    Celles qui bénissent et celles qui maudissent
    Avec leur lumière pour témoin, je mettrai fin à ton supplice »


    Mégère avait réussi à chanter un peu plus fort son refrain, un signe encourageant. La vieille Fae frappait maintenant ses chaînes sur les planches en suivant un rythme lent, mais régulier. Tout comme les divinistes se battaient pour réduire les geôliers au silence, l’acolyte de Zeï se battait pour reprendre le contrôle. Dans un coin de son esprit, une voix hurlait au loin, avec un zèle à tout épreuve. Une voix que l’ancienne commençait peu à peu a reconnaître : la sienne !

    Alors Mégère continuait de chanter son refrain avec de plus en plus d’enthousiasme, car c’était tout ce qu’elle pouvait faire pour le moment !

    « Endors-toi, Gardien, jusqu’à ce que les astres
    aient passé la barrière du couchant
    Alors je me tiendrai devant toi, souriant de toute mes dents.
    D’autres étoiles se lèveront dans l’axe céleste,
    Celles qui bénissent et celles qui maudissent
    Avec leur lumière pour témoin, je mettrai fin à ton supplice »

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  • Mer 2 Oct 2024 - 3:15


    Alors que s'élancent les plus fervents guerriers avec la prestance et la sauvagerie d'une véritable meute de loups enragés, il y a tout à fait derrière la silhouette aussi énorme qu'improbable du Paladin de Puantrus dont la caractéristique lenteur n'a d'égale que l'effroi qu'il inspire lors de son inexorable avancée. Se gaussant allègrement du traitement réservé aux infidèles, le monstre à la genèse hérétique abat ses lourds sabots sur le sol ensablés, progressant en laissant traîner derrière lui l'immense épée d'exécuteur qu'il manie avec brutalité.

    Ses yeux qui suintent filent d'un spectacle à l'autre, oscillant entre le massacre commis par le silencieux chevalier et le duel au sommet entre l'inflexible Drakyn et ses anciens compagnons. Il parachève son inspection du champ de bataille en s'attardant sur Phèdre dont les efforts, bien que plus discrets de prime abord, ne manquent pas d'être remarqués lorsque les bêtes des Gardiens s'affolent en poussant des hennissements endiablés. Perversement excité par la perspective d'un tel bain de sang, Sublime exulte lorsqu'il aperçoit les mouvements confus de ceux qui s'étranglent sur son poison et il vient marmonner des insanités dans sa barbe poisseuse pour vanter les mérites du Père dont il hérite les dons malvenus.

    Il les voit, mirant avec une envie malsaine ceux qui découvrent tout juste l'étendue de l'amour que peut porter le plus grand tous les maux. Il tâche de se remémorer ses premières infections, la naissance des tous jeunes bubons dans lesquels moussent et croissent les larves d'une portée grouillante. La bave caustique goutant de ses lèvres entre en ébullition, dévorant la victuaille encore fraîche qui macule ses crocs pour venir choir à terre dans de subtils grésillements. L'hybride a faim de chaos et d'horreur et malgré sa taille démesurée, son approche est si tranquille et désinvolte qu'il en vient à passer presque inaperçu l'espace de quelques instants. Ceux qui ont pour ordre de l'occire ne tarderont pas à s'en prendre à lui, mais il aura l'occasion d'effectuer une frappe en traître avant toute chose.

    Le Chevalier de la Rose Noire s'adonne quant à lui à un combat pouvant paraître injuste du fait du sous nombre mais en vue de ses extraordinaires aptitudes martiales, il ne s'agit pour lui que d'un défi à relever. Les malhabiles Gardiens croient pouvoir prendre l'avantage sur l'épéiste taciturne mais alors que la pointe d'un glaive semble pouvoir se trouver une faille à explorer, le protecteur du Berceau se voit assailli par une inqualifiable vague de douleur et se retrouve contraint de bondir de côté pour y réchapper, ce sans même comprendre l'origine d'une telle torture.

    Réalisant de quel mauvais sort il vient d'être victime, il porte tout naturellement sa dextre libre à son visage subitement endolori pour découvrir qu'il est entièrement recouvert d'une substance nauséabonde dont on vient de l'asperger de flanc. Se tournant par réflexe vers l'être répugnant qui en est responsable, il est accueilli par le rictus aliéné d'un Sublime railleur. Les commissures de la gueule couvertes d'écume jaunâtre, le Paladin de Puantrus lève son épée démesurée sans empressement quelconque, ce pour être évidemment puni par une brutale estocade.

    Là où une quelconque armure aurait peut être été transpercée, celle de Sublime demeure intacte du fait de sa résistance hors du commun. Le glaive se bloque dans les mailles d'une armure à la provenance tout simplement divine et si l'acier parvient tout de même à gratter la panse gonflée de l'hybride, la maigre plaie s'efface aussi prestement qu'elle a été creusée. Effaré par de si chimériques aptitudes chez une créature pourtant supposément mortelle, le Gardien demeure immobile pour une poignée de secondes et c'est tout le temps qu'il faut à Sublime pour empoigner le malheureux par le crâne, enfermant celui-ci dans un étau à la puissance écrasante pour ensuite venir le broyer à grands coups de crocs.

    La victime au cerveau fendu d'abord puis morcelé ensuite n'a l'occasion que de pousser d'incompréhensibles couinements, ce avant d'être dévoré sans plus de cérémonie par un adversaire traitant ses opposants comme de simples jouets.

    "Ce que le Monstre me donne, je le lui rends..."

    A mi-chemin, la voix déjà rauque de Sublime se fait gutturale. C'est en vomissant la cervelle fragmentée et imprégnée de son poison sur le fil de sa lame qu'il achève sa folle invective tout en bifurquant avec une terrible assurance en direction de l'ennemi suivant. Les chants de la Mégère se font désormais entendre même en dehors de sa geôle et c'est en ricanant avec entrain que l'hybride accourt dans sa direction. Telle une maladie choisissant à l'instinct un fertile terreau, c'est sans la moindre forme d'hésitation ou de recul que progresse l'abominable croisé.

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  • Jeu 3 Oct 2024 - 23:28
    PA - Le Convoi du Berceau
    Tour 3
    Le premier adversaire que Sylas voit, c’est Launegisiles.
    Impossible de ne pas prendre en compte ce guerrier qui semble avoir comme arme fétiche une lame en phantacier. Peut-être dégage-t-il un je-ne-sais-quoi menaçant, peut-être contient-il un potentiel qui peut se décupler, grandir au fil du temps, au point de devenir une menace pour n’importe quel citoyen de ce royaume. Ou alors est-ce son attitude qui interpelle, cette attitude qui est beaucoup trop calme pour un humain ordinaire ? Le Gardien l’entend : sa voix est rauque, morne, comme s’il ne pouvait lui insuffler des sentiments telle que la joie, la férocité ou la colère. Le Drakyn, pour sa part, n’a jamais vu les émotions comme un obstacle, et il se laisse habiter par elles. Le compagnon de ce fanatique est une de ses anciennes connaissances et il veut sa tête, il veut sa mort, non pas parce que cela changerait quelque chose aux meurtres qu’il a commis, mais parce que ses frères pourraient enfin reposer en paix auprès des Astres. Cette sombre histoire serait ainsi révolue, à jamais.

    Enragé, Sylas l’est. Il n’est cependant pas assez fou pour dédaigner la première offensive du disciple de Malazach. Grâce à sa force, le héraut de X’Orath s’élance : un trou léger, mais réel se creuse dès lors dans le sol et pour un temps, le soldat semble voler en direction du Reikois. Il lève sa lame de ses deux mains, comme s’il allait fendre son ennemi en deux. Et celui-ci pare.

    Commence alors un ballet, où force brute, adresse, maîtrise du combat, et observation de son adversaire son les maîtres-mots de ce duel. Mais au premier impact, Sylas sent son épée gémir – alors qu’elle est naturellement de bonne facture – et il se dit intuitivement que la moindre erreur pourrait lui coûter la vie. Ironique, n’est-ce pas, quand on veut soi-même faire couler le sang et qu’on se dit que ce ne sera pas aussi simple que cela ? Mais les Gardiens sont des guerriers d’élite, nommés par le couple royal lui-même. Ce serait bien naïf de croire qu’ils vont renoncer à leur mission dès qu’il rencontre un peu d’adversité. Aussi l’homme-dragon s’adapte, il teste, il jauge, il cherche une faille. Il sait que son rival est doué, il sait aussi que tous deux sont vifs, et c’est de très peu qu’il ne réussit à s’immiscer dans l’armure de Launegisiles. C’est un échec, mais ce n’est pas bien grave. Ca ne l’aurait pas été s’ils n’avaient été que tous les deux et s’ils avaient continué leur affrontement jusqu’à ce que mort s’ensuive. Naturellement résolu, Sylas aurait été déterminé à trouver la faiblesse de son adversaire, qui pour sa part a cherché à mettre à mal son armure. Une de ses épaulières est d’ailleurs à deux doigts de tomber par terre, et c’est dans un geste simple, mais brusque que le Drakyn l’arrache alors qu’une étrange accalmie se pose dans son duel avec le fils de X’Orath. La faute à Qultarn, qui veut lui aussi croiser le fer, et Sylas le toise avec un mépris bien visible. Il n’objecte pas, mais après avoir croisé le fer avec son comparse, le fidèle de Tensai sait que ce Laune est une menace pour ses pairs. Ces derniers sont moins doués, moins rapides, que son ennemi. Cela l’arrangerait qu’ils restent tous les deux dans la même zone, mais… les affronter ensemble, est-ce envisageable ?

    « Ce sera difficile » lui souffle sa raison. « Ce sera compliqué », lui souffle encore une part plus pessimiste de lui. Car il sait que Qultarn est fort – tous deux se sont déjà affrontés de manière amicale et ils savent que soit ils rivalisent, soit l’un d’eux prend de temps à autres l’ascendant. Et si Sylas est déjà bien occupé avec un seul adversaire, les affronter ensemble est pure folie. Le combattant en a bien conscience puisqu’il a pu échanger avec Launegisiles. Il aurait fallu qu’un autre Gardien de sa trempe soit présent, mais trois – non, quatre des siens, le chevalier de la Rose noire vient d’achever un mourant – ont déjà rejoint les étoiles. Ils sont six et trois d’entre eux sont empoisonnés.

    L’issue du combat semble déjà jouée, pourtant…
    Il est hors de question de s’avouer vaincu et de plier l’échine.

    - Serions-nous dix à tomber que nous serions cent à nous lever, marmone-t-il en shierak qiya.

    Que son ancien frère l’entende ou pas, ça n’a pas d’importance. A dire vrai, Sylas ne cherche même pas à le convaincre qu’il a eu tort de trahir. Au Reike, le poids des armes compte bien plus souvent que le poids des mots – l’ascension de leur Empereur en est une preuve sanglante. Et si la rancœur habite bien le chef de la troupe, il considère également que son nouvel adversaire a sciemment fait son choix en tuant les leurs. Zeï, naturellement, a pu avoir son rôle, mais les Titans ne peuvent jamais avoir une influence directe sur la liberté de leurs fidèles. La discussion est donc inutile.

    Mais Sylas fait preuve d’une impudence et d’une audace déloyale qui pourra sembler indigne à son rang et à sa fonction. Car il n’oublie pas ses deux autres alliés qui doivent s’occuper des deux femmes, et du chevalier de la Rose noire qui les poursuit. Jetant un œil vers le diviniste, avant que le second combat ne commence, le Gardien canalise sa magie aérienne et trois lames d’une dimension respectable – en haut, au bas, et au milieu – se précipite dans la direction du fils de Malazach. Ce dernier sentira peut-être le danger, mais cela donnera peut-être une occasion aux autres Reikois de reprendre l’ascendant sur le combat.

    Ou bien cela les emmènera plutôt vers une mort inéluctable.

    Ce qui est sûr, c’est qu’une telle concentration a un prix, puisque cela le laisse de facto moins préparé pour son échange avec Qultarn. Mais qu’importe, il aura ainsi assumé son rôle jusqu’au bout. Encaisser les premières passes d’arme lui est plus difficile, eu égard à son attention portée sur Laune. Ses bras s’engourdissent étrangement plus vite, ses réflexes ne sont non plus ceux qu’il a directement adopté avec le disciple du cardinal. Mais l’expérience aidant, Sylas se reprend, leur combat continue, et devient de plus en plus une danse où chacun exprime sa rage. Dans d’autres circonstances, il aurait pu y prendre plaisir. Aujourd’hui, seule la colère flamboie dans les yeux du guerrier qui va mourir.

    Car un tel affrontement se joue dans les détails. Et le premier qui réussit à être plus adroit, c’est Qultarn. Sa rotule craque d’un coup sec, mais contrairement à ce qu’on pourrait le croire, ce n’est pas que l’avant du genoux qui est atteint. Le cartilage se brise en plein de morceaux, et cela est douloureux, mais les tendons qui maintiennent cette partie du corps ont été également touchés, et il lui sera beaucoup plus difficile de bien articuler sa jambe dans les prochaines minutes qui vont suivre. Il a une regénération, mais tellement mineure… Qu’elle ne sera pas assez rapide ici.

    Seule victoire manifeste, Sylas a assez de maîtrise de soi pour ne pas monter sa douleur, quand bien même Qultarn s’est mis hors de portée de sa contrattaque.

    - Moi, regretter de suivre l’Empereur ? siffle-t-il alors qu’il serre les dents face aux sensations qui irradient dans sa jambe. Ne te fais pas d’illusion, Qultarn. Tout en parlant, il essaie de tester son genou, y renonce de suite. Il s’écroulerait sur le champ et ferait une proie idéale pour son adversaire. Tu crois qu’il se dorlote dans son palais, alors qu’il mène la guerre contre ces pourritures que tu vénères ? Et tu crois que sa femme fait de même ? Tensai, le Reike, l’Empire les abattra tous, autant qu’ils sont et c’est toi qui contempleras les dépouilles de ces divinités odieuses qui t’ont détourné de ta mission. Peut-être qu’alors, c’est TOI qui comprendras ton erreur et que tu verras enfin les illusions que Zeï t’a murmuré à l’oreille, crache-t-il avec hargne.

    Evidemment, il est en position de faiblesse, mais il ne dit pas son dernier mot pour autant. S’il ne peut plus jouer sur sa mobilité, autant essayer de prendre son ennemi par surprise. Prenant une brusque inspiration, Sylas invoquera une dernière fois son mana ainsi que sa supervitesse. Et Qultarn, pour sa part, se sentira étrangement lourd, comme si ses mouvements étaient entravés par la pression de l’air. L’instant suivant, il verra l’une des épées jumelles de Qultarn foncer vers lui, dans le but de le transpercer de part en part, alors que le guerrier sera lui-même moins mobile.

    Sylas a toujours une épée, mais ne peut plus se déplacer et se défendre dans ses angles morts. Quant au Drakyn, il se doit d’être réactif et d’esquiver l’attaque qui vient vers lui.

    ***

    Filheim s’était attendu à tout.
    Sauf à être possédé par une garce.
    Le pire, peut-être, était qu’elle semblait inoffensive, avec sa gueule d’ange et ses cheveux bicolores. Il avait pensé, en se jetant sur elle, que ce serait une proie facile. Qu’il lui règlerait son compte. Que ce serait la deuxième à tomber sur le champ de bataille, après l’autre valkyrie qu’il avait approché par derrière. Mais non. L’autre avait riposté, avait marmonné des choses à l’attention de ses comparses et puis… puis les choses s’étaient précipités. Le Gardien n’eut même pas le temps de considérer ses deux autres collègues qui étaient censés venir à son secours. Il eut ironiquement le temps de se dire que la mégère chantait de plus en plus fort alors qu’il n’arrivait plus à bouger et à prendre le contrôle de ses membres. Puis, il sentit distinctement l’esprit de la mage noire oppresser le sien et l’instant d’après, tout devint noir, comme s’il devenait aveugle et qu’il était relégué dans les tréfonds du Sekai.

    - C’est une capacité remarquable, souffla Valeria. Pas vraiment mon genre, mais… Sa tête se tourna vers les deux gardiens qui se dirigeaient vers les deux filles et instinctivement, elle se raidit, près s’interposer entre le corps de Phèdre et la trajectoire des Reikois. Mais le Chevalier de la Rose noire n’avait pas usurpé son nom et se précipita à leur rencontre. Vite, trop vite au goût de la guerrière d’Exia qui aurait bien voulu en embrocher un quand même, juste pour son plaisir personnel. Son expression boudeuse se figea cependant alors qu’un cri s’échappait de sa bouche. Un « Attention ! » aussi bref que syllabin, destiné à Laune, en voyant les lames d’air de Sylas venir à sa rencontre. Le guerrier prenant ses dispositions, elle ne se détendit que lorsque son compagnon prit totalement l’ascendant sur leur ennemi, jusqu’à en finir avec lui. Mais c’est Sublime qui la surprit le plus.  D’abord contemplatif, observateur, presque, alors qu’il était un combattant redoutable, voilà qu’il s’approchait avec une lueur malsaine dans le regard, celle d’un homme fou, celle d’une créature entièrement dévoué à son Maître, celle qui n’avait aucune limite, aucune règle, aucun tabou. Tout était permis… même les pires fourberies. Y compris vomir sur ses adversaires. Si la fille ailée n’avait aucune compassion pour son ennemi, une part d’elle ne put s’empêcher de se dire que c’était dégoûtant. Néanmoins,  elle reconnut également que leur compagnon était terriblement efficace – aussi bien par ses poisons que par ses protections en bronze céleste. Il était extrêmement satisfaisant de voir la mine déconfite du Gardien, de voir son désarroi se changer en horreur quand la plaie de Sublime se referme. C’était cela, qu’ils devaient ressentir : le désespoir pour avoir osé se lever contre les favoris des Divins.

    Valeria détourna la tête au moment où l’hybride referma sa mâchoire sur le cerveau de sa victime. Ca, elle n’avait pas besoin de le voir, et de toute façon, elle avait trop tardé. Aussi, elle se tourna résolument vers Phèdre – non, pardon, vers le Gardien qui était contrôlé par Phèdre – et elle lui intima :

    - Je pense que c’est lui qui a les clés de la cage. Fouille-le, tu as un trousseau ? Il y a presque quelque chose de fascinant à voir la sœur de Siame contrôler un autre corps comme si c’était le sien, mais la Valkyrie ne se laisse pas distraire de sa mission.  Mégère chante plus fort, il y a plus d’intonation, de détermination, de folie dans sa voix, presque, et c’est très bon signe. Ce qui est sûr, c’est que quand Phèdre lui répondra – vocalement ou non – par l’affirmative, elle l’invitera à se déplacer jusqu’à la porte. Ouvre. Et après, mets-le à genoux. Il faut bien en finir, avec ce faiblard du désert. Mais contre toute-attente, ce n’est pas elle qui l’achèvera. On ne le tuera que quand tu auras regagné ton corps. Valéria ne voulait pas que Phèdre ait des séquelles en sentant le corps de sa victime mourir après tout. Juste au cas où. Sublime va faire le décompte. Ce dernier est après tout à côté d’eux désormais, et la fidèle d’Exia continue. Si tôt fini, tu repars dans ton corps. Et toi, continue la guide au paladin du Monstre, tu enchaines en tuant ce bâtard. Au bon moment. Oui, elle demandait à une fille d’Aurya et à un fils de Puantrus de collaborer, mais tout pouvait arriver dans ce monde effroyablement cruel, non ? J’aurais ensuite besoin de vous dans la cage.

    Quand ils la retrouvent, Valeria est déjà agenouillée près de Mégère. Elle semble indifférente au chant prononcé par la vieillarde, mais ce qui la préoccupe, c’est les menottes en adamantine.

    - Inspecte les clés, demande-t-elle à Phèdre. Il y en a deux non ? La diviniste espère sans doute que ça leur permettra de libérer les menottes, mais une moue apparaît sur son visage quand leur tentative échoue. C’est le chef des Gardiens qui doit l’avoir. Celle qui nous reste doit servir pour le coffre en adamantine, grogna-t-elle. Un peu frustrée, elle sort, et elle encourage ses deux acolytes à faire sortir leur nouvelle protégée.  

    - Je ne sais pas comment elle va réagir en récupérant toutes ses facultés magiques. Phèdre, je compte sur toi. Puis, elle inspire, et elle crie : Qultarn ! Il a les clés des menottes !

    Demandant les clés à Phèdre, elle se tourne enfin vers Launegisiles et Sublime :

    - Il y a encore les rescapés des poisons et le coffre à l’arrière, déclare-t-elle froidement. Qui s’en occupe ?




    Etat des Gardiens:

    Informations HRP:

    Objectifs:

    Fin du tour : dimanche 6 octobre à 22h.
    Prochaine résolution :   lundi 7 septembre à 22h.

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    Qultarn
    Qultarn
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    qui suis-je ?:
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  • Ven 4 Oct 2024 - 12:22

    De ce qu’il pouvait vaguement voir sur le reste du champ de bataille, la situation semblait résolument sous leur contrôle : les Gardiens ne pouvaient que retarder l’inévitable face à la magie des adorateurs des Titans, et leur prouesse martiale n’était pas en reste, grâce à l’intervention des trois paladins. Même la Valkyrie qui menait leur troupe s’était immédiatement rendue au chevet de Mégère, la Sœur qui vénérait Zeï, il ne restait qu’à se procurer la clé des menottes en adamantine pour libérer leur alliée et que la mission soit couronnée de succès.

    Et, bien entendu, éliminer les reikois restants pour ne laisser aucune trace de leur passage si ce n’est un joli tas de cadavres démembrés, pour faire passer le message que les Titans n’étaient pas à prendre à la légère, comme ils s’en rendraient amèrement compte d’ici peu.

    Son souffle avait goût de fer et de sang, chaud dans son heaume, et une goutte de sueur glissa le long de son arcade sourcilière pour se perdre dans le renforcement en tissu qui longeait sa mâchoire. Il savait que le combat n’était pas gagné d’avance, et si le chevalier de Xo’rath avait su faire jeu égal, rien ne garantissait qu’il aurait l’ascendant s’ils devaient recommencer. Mais, surtout, il ne comptait pas mourir ici. Il n’avait pas survécu à des dizaines et centaines d’affrontements pour échouer dans le premier duel de sa nouvelle vie de converti. Il puisa de la détermination dans la foi qu’il avait récemment trouvée, celle qu’au-delà du chaos de la guerre et de sa destruction, la vie jaillirait toujours. Et qu’elle serait meilleure.

    « Pour contempler les dépouilles des Titans, c’est que je survis. Si c’est le cas, alors tu meurs, ricana Qultarn. »

    Et il comptait bien s’y atteler.

    L’air se resserra autour de lui, une astuce que Sylas avait déjà utilisé lors de leurs duels d’entraînement, hors du Berceau et de son influence négative sur la magie. Concentrant sa force et sa propre mana, il accéléra contre la chape de plomb qui pesait sur lui, utilisant son épée pour dévier la lame lancée par l’autre drakyn. Le choc fit vibrer sa lame et lui déclencha une douleur sourde dans le poignet, l’écart de force rendant l’exercice malaisé. L’arme projetée glissa contre sa spalière, la délogeant partiellement en se plantant dedans, mais heureusement arrêtée par la cotte de maille qu’il portait dessous. Impossible hélas de prendre le temps de la retirer, fichée qu’elle était dans son armure.

    Car Sylas, d’un appui malaisé, s’approcha du pas nécessaire pour un coup de taille à deux mains, avec tout le poids de son corps. Toujours restreint par l’air qui l’empêchait de se mouvoir au loin, Qultarn ne put que mettre son bouclier en opposition. Le fracas de la lame contre le bois de l’écu résonna sur tout le champ de bataille, puis la protection craqua, tranchée au-dessus de son bras. Ralentie tout de même, la seconde arme de Sylas frappa le bras du zélote qui lâcha un bruit de mauvais augure alors qu’une forte douleur paralysait son côté gauche. Mais il avait sauté de quelques centimètres au moment de l’impact, laissant la force surnaturelle de son adversaire le projeter sur le côté, avec suffisamment de puissance pour que l’air qui le maintenait en place le laisse enfin filer.

    Qultarn tomba au sol avec un grognement de douleur, serra les dents pour ne pas se mordre la langue.

    « Puteborgne, quel enfant de chienne, grinça-t-il. »

    A la force de sa volonté, il se redressa d’une roulade pour voir que Sylas n’avait qu’à peine bougé de l’endroit où il se trouvait, le regard baissé sur sa jambe flageolante. Voyant l’occasion qui se présentait, Qultarn rassembla son énergie et sa mana. Avec son bras ballant -cassé ?- et les débris de son bouclier qui y était accroché, il ne lui restait plus que son épée. Ses pieds soulevèrent un petit nuage de poussière lorsqu’il se déplaça à une vélocité surhumaine, arrivant devant le Gardien. La vitesse de ce dernier, également améliorée magiquement, lui permit de réagir pour porter une estocade que le fanatique esquiva d’un mouvement du buste.

    Son épée balaya un arc qui attrapa le soleil, généra un reflet fugace, et vint trancher proprement la jambe de Sylas juste au niveau du genou, là où la genouillère avait déjà été abîmée. Le soldat reikois commença à tomber, déséquilibré, mais l’entraînement intensif auquel il avait été soumis au fil des années reprit immédiatement le dessus sur la souffrance. Avec un cri guttural, il arma un coup vertical qui devait trancher en deux son adversaire au niveau de l’épaule.

    Trop rapide pour ses réflexes, Qultarn s’était déjà décalé d’un bon mètre, laissant le sifflement de l’air et les remous provoqués par la magie élémentaire ne frapper que le vide. Tandis que Sylas tombait toujours au sol, le regard jaune du drakyn s’étrécit à travers le heaume pour ajuster un coup du tranchant de son épée en plein sur la jonction entre le haut de l’armure et le menton de son adversaire. La frappe s’avéra juste assez puissante pour couper jugulaire et carotide avant de crisser sur l’arrière de la cagoule de maille du Gardien.

    Ce dernier laissa échapper un borborygme ensanglanté au terme de la passe d’armes, son pied restant tressaillit alors qu’il tendait le bras en direction de Qultarn. Son expression ne laissait aucun doute sur le fait qu’il tentait encore de tuer son rival, celui qui avait trahi tout ce en quoi ils croyaient ensemble jusqu’à présent. Pourtant, les blessures s’avérèrent trop lourdes, en plus du choc des multiples hémorragies. Après quelques secondes, le drakyn se figea, alors que le sable du désert buvait une fois de plus la dîme de toute bataille reikoise.

    Qultarn jaugea le reste de l’échauffourée avant de baisser son bras droit pour reprendre son souffle, tandis que sa magie refluait doucement. Plantant son épée un peu ébréchée dans le sable, il s’accroupit à côté de Sylas pour glisser la main dans les bourses qu’il portait à sa ceinture, mais n’en retira que quelques pièces d’or et des colifichets ou souvenirs sans valeur. Avec un soupir de nostalgie, il retourna le cadavre pour le basculer sur le dos, et força ses doigts gantés d’acier autour de la gorge ensanglantée de sa victime, jusqu’à trouver une fine chaîne d’argent au bout de laquelle une petite clé en adamantite maintenant tachée de rouge faisait un mouvement de pendule.

    « Je l’ai, par les Titans. J’ai réussi… se murmura l’ex-pillard. »

    Spoiler:
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  • Ven 4 Oct 2024 - 16:24
    Sa psyché rongeait celle de son adversaire comme un rat un cadavre. Un sacrément gros cadavre. Entrer dans l’esprit du soldat c’était comme essayer de briser un mur de brique avec un cure-dent : long et fastidieux. De la sueur se mit à perler le long des tempes de Phèdre alors qu’elle ne ralentissait pas les assauts, toujours plus virulents, toujours plus fourbes et détestables. A un moment, elle pensa même qu’elle n’y parviendrait pas et ça n’aurait pas été une surprise. Les gardiens du berceau étaient réputés pour avoir les esprits les moins pénétrables du Sekaï et cette certitude à elle seule fit rugir le sang dans ses veines. De tout le poid de sa magie, elle pesa contre les défenses psychiques, encore et encore jusqu’à ce qu’elle les entendent craquer. Aussi distinctement que si elle lui avait brisé un os. Le Drakyn gémit en écho et Phèdre s'engouffra dans la brèche, l’éclipsant de sa propre tête.

    Quand la jeune femme rouvrit les yeux, il ne s’était écoulé qu’une poignée de seconde. Son corps lourd était tendu et ses doigts étaient encore fermés autour d’une lame gigantesque. Valéria lui faisait face, hésitante ; elle ne la reconnaissait pas. Et Phèdre non plus. Il lui fallut quelques secondes pour aviser de son corps, toujours calé entre les barreaux et le bord du chariot. Du coin de l’œil, elle aperçut du mouvement, tourna instinctivement la tête pour découvrir les combats. Qultarn face aux siens, Laune qui filait dans leur direction à la suite d’autres adversaires et Sublime qui… Faisait du Sublime. Elle grimaça avant de se redresser, faisant rouler ses épaules au moins deux fois plus larges que les siennes. Le brouillard de ses pensées était en train de s’éclaircir et lorsque son attention revint à Valeria, elle ne fit que hocher docilement la tête en se mettant à fouiller dans ses vêtements. La première poche ne donna rien, pas plus que celle à l’intérieur de son pourpoint et de son pantalon. Elle fourra ensuite ses gigantesques paluches dans les pochettes à sa ceinture et trouva enfin ce qu’elle cherchait : un trousseau.

    - Bien. Dit-elle d’un ton grinçant et pas seulement parce que sa voix était celle d’un bonhomme deux mètres. Alliées ou pas, Phèdre n’aimait guère les ordres et la seule raison pour laquelle elle ne les discutait pas était le chaos imminent ainsi que son corps en bien mauvaise posture. Le pas lourdaud, elle avança jusqu’à la grille, testa plusieurs clés jusqu’à tomber sur la bonne puis la glissa dans la serrure jusqu’à entendre le cliquetis caractéristique.  - C’est fait. Annonça-t-elle de sa voix caverneuse puis comme on le lui avait demandé, elle recula et tourna la tête vers son bourreau.

    -  Si tu me tues avant que j’ai regagné mon corps, je te jure sur ce que j’ai de plus cher Sublime, que je ferais en sorte que Puantrus ait honte de toi jusqu’à la fin de tes jours. Elle le gratifia d’un dernier regard de mise en garde et ploya le genou.

    L’hybride compta et une seconde avant qu’il n’ait terminé, Phèdre se rua sur son propre corps. Ce dernier se convulsa sous la précipitation et s’écrasa lourdement sur le sable dans un bruit mat. Il lui sembla entendre Eris pouffer mais elle n’en tint pas compte et se redressa aussi dignement que possible pour s’approcher de Mégère.

    - Je manie les émotions, pas la psyché. Se défendit Phèdre en posant un regard maussade sur la vieille fae. - Je ne connais pas l'étendue des tourments qui la traversent. Puis elle se tut, l’observant silencieusement. Il ne fallait pas sortir de la cuisse d’Aurya pour deviner qu’elle avait souffert et qu’elle souffrait encore. Quant à savoir ce que Phèdre pouvait bien y changer… C’était peine perdue. Elle n’avait d’autre choix que de le découvrir par elle-même. - Poussez-vous, allez chercher les clés, moi je vois ce que je peux faire d’elle.

    Phèdre prit la place de Valéria pour se glisser suffisamment proche de Mégère. Un sourire chaleureux, qu’elle se ressentait aucunement, vint habiller ses lèvres ainsi que son regard. Il fallait que sa cible se sente bien si elle espérait modeler et amplifier une telle émotion chez elle, ce qui était loin d’être le cas pour l’instant.

    - Mégère ? Mégère ? D’une main douce, elle vint secouer l’épaule de sa sœur. - Nous sommes venu te ramener chez toi, parmi les tiens. Et tout en parlant, elle laissa sa magie opérer ; celle qui la rendrait sympathique aux yeux de la vieille femme et qui lui donnerait l’impression qu’elle pouvait avoir foi en elle. Ce ne fut qu’en deuxième intention, lorsqu’elle fut certaine de l'avoir suffisamment enivrée, qu’elle commença à jouer sur la lyre de ses émotions pour en arracher toute la raison qu’elle pouvait.

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