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Alaric Nordan
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La nuit était tombée depuis longtemps, drapant la route d’un voile d'obscurité que seule une lune pleine peinait à percer. Encore une fois, quelle idée stupide il avait eue de prendre la route en milieu de journée ! Dans son impatience, il n'avait pas voulu passer une nuit de plus à l'auberge du dernier village dans lequel il s'était posé quelques jours. Un malheureux jour de plus, rien de plus. Il en aurait eu les moyens, et bien assez en plus. Le temps de se poser, il avait proposé de menus services de soins, passant pour un simple guérisseur itinérant, juste de quoi se payer quelques bons repas chauds et plusieurs autres pas trop infâmes en bouche. Traîner dans le coin ne lui plaisait pas trop. C'était nécessaire pour écouter quelques ragots, afin de vérifier leurs sources et y remédier si cela s'avérait vrai. Mais ce soir, il ne se préoccupait pas de sa tâche du moment, seulement d'essayer de garder le moral dans cette purée de pois !
Quelle idée il avait eue, vraiment. Il prit le temps de s'arrêter sur le bord de la route, s'appuyant sur son bâton de marche, un long bâton bien droit et surtout, bien solide. Ça pouvait être plus utile qu'une simple dague… pour peu qu'il sache s'en servir correctement. Il maugréa dans sa barbe, sentant la brûlure de la fatigue mordre ses jambes. Il avait l'impression d'être une âme en peine errant dans un monde à l'agonie, tant le voile brumeux était épais. La pleine lune n'arrivait toujours pas à percer tout cela. Pas même une petite brise de vent ou une trouée pour y voir plus clair. Non, juste cette brume qui semblait décidée à l'embêter. La prochaine auberge ne devait plus être très loin… enfin, il l’espérait.
Il aurait dû y arriver depuis quoi... une heure ? Moins ? Plus ? Une question le tarauda alors : et s'il avait pris le mauvais chemin à l’intersection précédente ?
*Je serais vraiment pas dans la merde...*
Clairement, il se retrouverait dans la mouise, et il n'avait aucune envie de dormir dehors. Avec l'humidité du brouillard, impossible d'allumer un feu convenable. Bon... il ne restait plus qu'à marcher. Cette route finirait bien par le mener quelque part.
Il réajusta sa capuche et sa cape, car mine de rien, il ne faisait pas chaud cette nuit. Puis, il se remit en route, gardant un œil vigilant. Tout lui paraissait un peu trop endormi autour de lui. Pas un oiseau, pas un bruissement de feuille. Juste le silence du brouillard et l'ombre des arbres qui s'étiraient en formes étranges, presque menaçantes, au bord de la route. Est-ce que c'était normal au moins ? Évidemment que oui ! Il n'avait juste pas l'habitude de traîner ses bottes dans cette région !
Alors qu'il avançait d’un pas traînant, un bruit de pas retentit dans la brume devant lui. D’abord faible, le son se fit plus distinct à mesure que deux silhouettes se dessinaient, sombres et floues dans l’épaisseur du brouillard. Alaric ralentit sa marche, serrant son bâton de marche un peu plus fermement entre ses doigts.
Les deux inconnus, visiblement humanoïdes, se rapprochaient. L'un d’eux était grand et massif. Un long manteau sombre aux bords usés traînait derrière lui, et une capuche cachait en partie son visage. Un reflet métallique révélait qu'il portait une arme à sa ceinture. À ses côtés marchait un homme plus petit. Quand ils furent suffisamment proches, le mage crut voir, le temps de quelques secondes, un bien étrange sourire. Il prit le temps de s'écarter pour leur céder le passage.
Les deux hommes s'arrêtèrent à quelques mètres de lui, veillant à lui barrer le passage pour la poursuite de son voyage. Ça sentait les ennuis. Les doigts d'Alaric enserraient son bâton un peu plus fermement. Le plus petit du duo prit la parole, et il y avait un ton de moquerie dans le timbre de sa voix.
« Eh bien, regardez qui voilà… Un voyageur perdu en pleine nuit, bien loin de toute sécurité. N'est-ce pas un peu dangereux de se promener seul par ici ? »
"Le danger peut être partout, et là où on s'y attend le moins. Mais je n'ai pas à me plaindre. J'aime bien la solitude. Mais si vous me le permettez, j'aimerais bien reprendre la route..."
Il fit alors un pas de côté, espérant pouvoir les contourner, mais l'homme massif bougea aussitôt pour lui barrer le passage.
« Allons, l’ami, » reprit l'autre, un poil plus narquois. « Tu pourrais bien nous dire ce que tu fais sur cette route à une heure aussi tardive. Peut-être même que tu pourrais partager quelques provisions pour qu'on se tienne chaud… Et pourquoi pas un peu d'argent, tant qu’on y est. »
*Et merde*
Il répondit d’une voix calme mais ferme :
"Humble voyageur que je suis, je n'ai rien qui pourra vous convenir."
« Ils disent tous ça. Au mieux, on te laisse repartir, mais à poil... »
Les deux inconnus échangèrent un rire gras et amusé, avant de voir leur cible saisir son bâton de manière plus agressive. Eux, sortirent de courtes épées. Alaric soupira. Tout ce qu'il souhaitait, c'était de trouver l'auberge.
Il recula d'un pas, et les deux coupe-jarrets lui bondirent dessus avant de percuter un mur invisible. Ahuris par cette surprise, ils clignèrent plusieurs fois des yeux, avant de sentir la frappe vive et forte d'un coup de bâton bien placé sur leurs crânes.
*Que je songe à remercier Kilaea pour ses leçons*
À moitié dans les vapes, les deux brigands gémissaient à terre.
"Je vous invite à poursuivre votre route, messires. Tentez une quelconque action contre moi, et vous le sentirez passer."
De sa main, Alaric remit sa cape en place, ainsi que sa capuche. Tiens, une goutte d'eau... bordel, s'il se mettait à pleuvoir, il serait trempé. Cela aurait cependant l'avantage de faire tomber le brouillard. Peut-être verrait-il les lumières de l'auberge, si elle n'était pas loin. Ces deux saloperies de brigands devaient bien venir d'un endroit proche, non ? En toute logique ?
Il se remit en route, n'accordant pas un seul regard aux deux gredins. Et soudainement :
"A l'aide, on nous a battus pour nous détrousser !"
Ni une ni deux, Alaric se mit à accélérer le pas, pour mettre le plus de distance possible entre lui et ces imbéciles qui cherchaient encore à lui attirer des ennuis.
Quelle idée il avait eue, vraiment. Il prit le temps de s'arrêter sur le bord de la route, s'appuyant sur son bâton de marche, un long bâton bien droit et surtout, bien solide. Ça pouvait être plus utile qu'une simple dague… pour peu qu'il sache s'en servir correctement. Il maugréa dans sa barbe, sentant la brûlure de la fatigue mordre ses jambes. Il avait l'impression d'être une âme en peine errant dans un monde à l'agonie, tant le voile brumeux était épais. La pleine lune n'arrivait toujours pas à percer tout cela. Pas même une petite brise de vent ou une trouée pour y voir plus clair. Non, juste cette brume qui semblait décidée à l'embêter. La prochaine auberge ne devait plus être très loin… enfin, il l’espérait.
Il aurait dû y arriver depuis quoi... une heure ? Moins ? Plus ? Une question le tarauda alors : et s'il avait pris le mauvais chemin à l’intersection précédente ?
*Je serais vraiment pas dans la merde...*
Clairement, il se retrouverait dans la mouise, et il n'avait aucune envie de dormir dehors. Avec l'humidité du brouillard, impossible d'allumer un feu convenable. Bon... il ne restait plus qu'à marcher. Cette route finirait bien par le mener quelque part.
Il réajusta sa capuche et sa cape, car mine de rien, il ne faisait pas chaud cette nuit. Puis, il se remit en route, gardant un œil vigilant. Tout lui paraissait un peu trop endormi autour de lui. Pas un oiseau, pas un bruissement de feuille. Juste le silence du brouillard et l'ombre des arbres qui s'étiraient en formes étranges, presque menaçantes, au bord de la route. Est-ce que c'était normal au moins ? Évidemment que oui ! Il n'avait juste pas l'habitude de traîner ses bottes dans cette région !
Alors qu'il avançait d’un pas traînant, un bruit de pas retentit dans la brume devant lui. D’abord faible, le son se fit plus distinct à mesure que deux silhouettes se dessinaient, sombres et floues dans l’épaisseur du brouillard. Alaric ralentit sa marche, serrant son bâton de marche un peu plus fermement entre ses doigts.
Les deux inconnus, visiblement humanoïdes, se rapprochaient. L'un d’eux était grand et massif. Un long manteau sombre aux bords usés traînait derrière lui, et une capuche cachait en partie son visage. Un reflet métallique révélait qu'il portait une arme à sa ceinture. À ses côtés marchait un homme plus petit. Quand ils furent suffisamment proches, le mage crut voir, le temps de quelques secondes, un bien étrange sourire. Il prit le temps de s'écarter pour leur céder le passage.
Les deux hommes s'arrêtèrent à quelques mètres de lui, veillant à lui barrer le passage pour la poursuite de son voyage. Ça sentait les ennuis. Les doigts d'Alaric enserraient son bâton un peu plus fermement. Le plus petit du duo prit la parole, et il y avait un ton de moquerie dans le timbre de sa voix.
« Eh bien, regardez qui voilà… Un voyageur perdu en pleine nuit, bien loin de toute sécurité. N'est-ce pas un peu dangereux de se promener seul par ici ? »
"Le danger peut être partout, et là où on s'y attend le moins. Mais je n'ai pas à me plaindre. J'aime bien la solitude. Mais si vous me le permettez, j'aimerais bien reprendre la route..."
Il fit alors un pas de côté, espérant pouvoir les contourner, mais l'homme massif bougea aussitôt pour lui barrer le passage.
« Allons, l’ami, » reprit l'autre, un poil plus narquois. « Tu pourrais bien nous dire ce que tu fais sur cette route à une heure aussi tardive. Peut-être même que tu pourrais partager quelques provisions pour qu'on se tienne chaud… Et pourquoi pas un peu d'argent, tant qu’on y est. »
*Et merde*
Il répondit d’une voix calme mais ferme :
"Humble voyageur que je suis, je n'ai rien qui pourra vous convenir."
« Ils disent tous ça. Au mieux, on te laisse repartir, mais à poil... »
Les deux inconnus échangèrent un rire gras et amusé, avant de voir leur cible saisir son bâton de manière plus agressive. Eux, sortirent de courtes épées. Alaric soupira. Tout ce qu'il souhaitait, c'était de trouver l'auberge.
Il recula d'un pas, et les deux coupe-jarrets lui bondirent dessus avant de percuter un mur invisible. Ahuris par cette surprise, ils clignèrent plusieurs fois des yeux, avant de sentir la frappe vive et forte d'un coup de bâton bien placé sur leurs crânes.
*Que je songe à remercier Kilaea pour ses leçons*
À moitié dans les vapes, les deux brigands gémissaient à terre.
"Je vous invite à poursuivre votre route, messires. Tentez une quelconque action contre moi, et vous le sentirez passer."
De sa main, Alaric remit sa cape en place, ainsi que sa capuche. Tiens, une goutte d'eau... bordel, s'il se mettait à pleuvoir, il serait trempé. Cela aurait cependant l'avantage de faire tomber le brouillard. Peut-être verrait-il les lumières de l'auberge, si elle n'était pas loin. Ces deux saloperies de brigands devaient bien venir d'un endroit proche, non ? En toute logique ?
Il se remit en route, n'accordant pas un seul regard aux deux gredins. Et soudainement :
"A l'aide, on nous a battus pour nous détrousser !"
Ni une ni deux, Alaric se mit à accélérer le pas, pour mettre le plus de distance possible entre lui et ces imbéciles qui cherchaient encore à lui attirer des ennuis.
Dragon du Razkaal
Kieran Ryven
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Info personnage
Race: Drakyn
Vocation: Guerrier combattant
Alignement: Neutre Bon
Rang: C
Protéger… Protéger, quand on est un Limier, c’est tout sauf simple. Oh, ça peut paraître héroïque, noble même, pour ceux qui rêvent d’aventures bien au chaud derrière leurs comptoirs. Ils s'imaginent un Limier comme un foutu chevalier qui fend la brume avec une bravoure scintillante et le cœur prêt à tout sacrifier pour la veuve et l’orphelin. Ce qu’ils ne savent pas, c'est que ce boulot-là, il n’a rien d'héroïque. C'est de la sueur, du sang, et une tonne d'ombre qui vous colle aux bottes.
Je suis perché sur un toit, à moitié accroupi dans le noir, l’humidité me ronge les genoux. En bas, la brume rampe dans les ruelles comme une vieille bête fatiguée, masquant les pavés luisants de crasse et de secrets. Je me fonds dans la nuit, ou bien est-ce elle qui me ronge un peu plus chaque fois ? On ne sait jamais trop. Dans mon métier, la différence entre l’ombre et soi-même finit par se brouiller. On devient une ombre, pour survivre… ou pour oublier, c'est selon.
Les yeux scrutent, toujours à l’affût du moindre mouvement, du moindre souffle qui trahirait l’émergence d’une menace. Parce qu'ici, protéger ne se fait jamais à visage découvert. Ce n’est pas de la belle garde d’honneur, ce n’est pas de la lumière et des acclamations. C’est des coins sombres, des escaliers humides, et des toits aussi glacés que mon cœur endurci. Protéger, c’est agir sans bruit, sans merci, et sans illusions. Croire que ça vaut encore la peine. Et espérer, parfois, que ça suffira.
Je ne suis pas en mission, pourtant, je guette. Vieille habitude, sans doute. On dit que les Limiers finissent par guetter même leur propre ombre, même leur propre souffle dans le noir. Peut-être qu’on a tous cette fêlure dans la caboche, une sorte de déformation d’esprit, de tic de l’âme. Quand on a passé trop d’années à traquer dans les ruelles sordides, ou les couloirs du Razkaal, à jouer du couteau et des poings dans des alcôves humides, le silence lui-même devient suspect. L’inertie, une ennemie.
Alors je me tiens là, planté sur ce toit branlant, le cuir de mes bottes qui glisse un peu sur les tuiles froides et humides. La brume s’enroule autour de moi comme une vieille amie perfide, m’offrant la couverture idéale pour fondre dans la nuit. Je devine les ombres qui rôdent en bas, les silhouettes furtives des ivrognes et des bandits, les rumeurs étouffées des conspirations invisibles. Je pourrais m’en détourner, me dire que ce n’est pas mon affaire ce soir. Que ce n’est pas ma ruelle, pas mon problème. Perché là, c'est également ruminer. Tourner en boucle les derniers évènements. Je devrais être dans mes bureaux, en train de faire de l'administratif, comme un bon Prévôt digne de ce nom doit le faire.
Mais, j'avais besoin de sortir, prendre de la hauteur sur les choses. Chercher une sorte de tranquillité dans les murmures de la nuit.
Mais les murmures vont devenir des cris, un peu plus loin. Des hommes. Alors, je m'envole.
***
Je les ai trouvés là, au détour d’un chemin faiblement éclairé par la lune blafarde. Deux silhouettes à terre, frottant leurs crânes avec des gémissements étouffés. Des brigands, visiblement. Ça se sent à cent pas à la ronde, cette odeur de lâcheté et de faiblesse mal cachée derrière de pauvres tentatives d’intimidation. Vu leur posture, l'un d'eux crachant un juron à voix basse et l'autre essuyant son nez en sang, ils ne devaient pas avoir prévu de tomber sur plus coriace qu’eux.
Je me baisse pour les examiner sans bruit, mon regard fouillant l'obscurité qui les entoure. Pas d’armes étincelantes, pas de corps mutilés. Rien qu’une paire de coupe-jarrets terrassés par quelque chose ou quelqu'un de plus malin ou plus puissant qu’eux. De l'ouvrage propre, sec et précis. Pas de blessures mortelles, juste de quoi leur donner une sacrée leçon.
Ils râlent encore, pestent à propos d'un colporteur qui les aurait surpris. Un coup de bâton ? Je garde mes distances, observant en silence, caché dans la brume. La route est tranquille à présent, mais elle a quelque chose de menaçant dans son silence. Qui que soit ce type, il n’a pas voulu perdre du temps à en découdre plus que nécessaire. Et vu sa précipitation à disparaître, il doit se sentir aussi étranger ici que moi. Intéressant.
Le plus grand des deux s’agite et commence à hurler à l’injustice, gueulant dans la nuit que lui et son compère ont été battus et détroussés par un inconnu. La voix se répercute dans la brume, sans réponse. Un cri perdu, désespéré, mais qui pourrait bien finir par alerter des oreilles qui traînent dans le coin. Je m’en désintéresse. De toute façon, ces crétins finiront par attirer des ennuis bien plus gros qu’eux, et ça sera mérité. Quant à leur mystérieux agresseur... il est déjà loin, mais je devine qu'il n’est pas du genre à se mêler des affaires des autres.
Je quitte mon perchoir, mes bottes quittant les tuiles avec une force contrôlée, mon corps tout entier en suspens dans l'obscurité. Une seconde, deux peut-être. Puis je retombe lourdement, atterrissant à leur niveau dans un grondement sourd. Une onde de choc s’étend autour de moi, ébranlant le sol, les feuilles mortes et leurs crânes vides tout à la fois.
L’ombre de ma cape les engloutit entièrement, et mes yeux, eux, les fixent. Glacés. Sans pitié. Le regard d'un Limier qui sait ce qu’ils valent : moins que rien.
Les deux fouines lèvent les yeux vers moi, paniqués. Pour une fois, les mots leur manquent, la bouche ouverte comme deux poissons échoués. Mais le plus hardi des deux, celui avec le nez en sang, fait un pas en avant et tente de balbutier quelques mots de justification, sa voix aussi fuyante que lui :
« On… on nous a attaqués, l'ami ! Un homme, là… un voyageur… il nous a détroussés, il a pris… »
Mon regard cloué sur lui l’étouffe à moitié, l'obligeant à baisser la tête. Je n’ai pas besoin de parler pour qu'il sente que je ne crois pas un mot de ses mensonges. Ce type n’a rien de la victime — un prédateur usé, mais prédateur tout de même. Il voit que je ne suis pas dupe. L’ombre de mes mains se pose sur mes armes. Je me contente d’un grognement :
« Suffit. »
Ils échangent un regard apeuré, puis l'un d’eux jette une œillade prudente vers le chemin, comme pour jauger la distance à parcourir pour s’enfuir. Un instant plus tard, ils décident de jouer les durs. Mauvais calcul.
Avec un cri rauque, ils tentent une charge. Pathétique. Je les arrête net en avançant de deux pas seulement. Mon ombre suffit à les figer, et en un claquement sec, mon bras se tend, mes phalanges fermées s'écrasent contre sa mâchoire, le décollant du sol pour mieux s'écraser contre des caisses le long du mur. L'autre recule en trébuchant, et avant même qu’il ne touche le sol, je tourne déjà les talons, les laissant là comme les débris insignifiants qu’ils sont. Leurs piaillements ne me concernent plus.
Ce qui m'intéresse, c'est le fuyard.
Je reprends le chemin qu’il a pris, à pas lents, les narines attentives. Une odeur persiste dans la brume, un parfum ténu, différent des relents de peur et de sueur qui s’échappent des deux brigands à présent haletants. C'est quelque chose de... plus ancien. Plus marqué. L'odeur, à peine perceptible, me frappe comme un souvenir enterré. Poussière, sable brûlé et une pointe d’aromates âcres.
... Taisen ?
Non, c’est quelqu’un d’autre, et cette odeur – presque disparue mais encore assez forte pour ramener des souvenirs désagréables de guerres lointaines – m’en dit bien plus long que n’importe quel rapport d’espion. Elle me ramène à ce désert oublié, où le soleil cuisait la peau et les tempêtes de sable balayaient les carcasses de ceux tombés dans les dunes.
J’accélère le pas. S'il pense être hors de vue... Il se trompe.
***
Je m'élève dans l'air comme une ombre dérangée par un souffle de vent. Mes ailes battent lentement, un bruit sourd et lourd qui semble faire vibrer la brume elle-même. Là, en bas, je l'aperçois enfin. Capé, encapuchonné. La pluie s’abat d’un coup, froide et drue, transformant le brouillard en une chape glacée qui colle à la peau et alourdit chaque pas. L’eau ruisselle sur mes épaules, dégouline de mes ailes et tape sur mon manteau dans un rythme lourd, presque cérémonial.
Sous la lumière pâlotte de la lune, je plonge. Mes ailes s’étendent bien au-delà de lui, une ombre noire qui s’abat, sans pitié, sans échappatoire. Une vision de cauchemar, faite pour réveiller la peur brute qui couve au fond de tous les hommes. La peur de ce qu’ils ne peuvent ni voir ni fuir. La peur d’un Limier en chasse.
Alors, je fonce droit sur lui, plus bas, jusqu’à atterrir brutalement sur le chemin. L'impact envoie un petit nuage de poussière et fait vibrer le sol. Je reste là, silencieux, bien droit, mes ailes pliées dans l’ombre, le fixant comme on regarde une proie qui n’a plus d’issue. Mes prunelles glacées traversent mon masque de Vouivre, arrivant comme une sale mauvaise nouvelle de 240 kilos.
« Alors, perdu ? »
Ma voix sort comme un grognement dans la cacophonie de ce déluge. Le grondement du ciel, meuble ce silence entre nous que je refuse de combler... Attendant patiemment, pourquoi cet homme éveille en moi de sombres choses. Est-ce que je perds finalement la tête ? Mon esprit finalement fracturé à tout jamais ?
Ou bien, il y a quelque chose de plus concret, qui vient encore confirmer que... Je ne suis pas tout à fait perdu.
Je suis perché sur un toit, à moitié accroupi dans le noir, l’humidité me ronge les genoux. En bas, la brume rampe dans les ruelles comme une vieille bête fatiguée, masquant les pavés luisants de crasse et de secrets. Je me fonds dans la nuit, ou bien est-ce elle qui me ronge un peu plus chaque fois ? On ne sait jamais trop. Dans mon métier, la différence entre l’ombre et soi-même finit par se brouiller. On devient une ombre, pour survivre… ou pour oublier, c'est selon.
Les yeux scrutent, toujours à l’affût du moindre mouvement, du moindre souffle qui trahirait l’émergence d’une menace. Parce qu'ici, protéger ne se fait jamais à visage découvert. Ce n’est pas de la belle garde d’honneur, ce n’est pas de la lumière et des acclamations. C’est des coins sombres, des escaliers humides, et des toits aussi glacés que mon cœur endurci. Protéger, c’est agir sans bruit, sans merci, et sans illusions. Croire que ça vaut encore la peine. Et espérer, parfois, que ça suffira.
Je ne suis pas en mission, pourtant, je guette. Vieille habitude, sans doute. On dit que les Limiers finissent par guetter même leur propre ombre, même leur propre souffle dans le noir. Peut-être qu’on a tous cette fêlure dans la caboche, une sorte de déformation d’esprit, de tic de l’âme. Quand on a passé trop d’années à traquer dans les ruelles sordides, ou les couloirs du Razkaal, à jouer du couteau et des poings dans des alcôves humides, le silence lui-même devient suspect. L’inertie, une ennemie.
Alors je me tiens là, planté sur ce toit branlant, le cuir de mes bottes qui glisse un peu sur les tuiles froides et humides. La brume s’enroule autour de moi comme une vieille amie perfide, m’offrant la couverture idéale pour fondre dans la nuit. Je devine les ombres qui rôdent en bas, les silhouettes furtives des ivrognes et des bandits, les rumeurs étouffées des conspirations invisibles. Je pourrais m’en détourner, me dire que ce n’est pas mon affaire ce soir. Que ce n’est pas ma ruelle, pas mon problème. Perché là, c'est également ruminer. Tourner en boucle les derniers évènements. Je devrais être dans mes bureaux, en train de faire de l'administratif, comme un bon Prévôt digne de ce nom doit le faire.
Mais, j'avais besoin de sortir, prendre de la hauteur sur les choses. Chercher une sorte de tranquillité dans les murmures de la nuit.
Mais les murmures vont devenir des cris, un peu plus loin. Des hommes. Alors, je m'envole.
***
Je les ai trouvés là, au détour d’un chemin faiblement éclairé par la lune blafarde. Deux silhouettes à terre, frottant leurs crânes avec des gémissements étouffés. Des brigands, visiblement. Ça se sent à cent pas à la ronde, cette odeur de lâcheté et de faiblesse mal cachée derrière de pauvres tentatives d’intimidation. Vu leur posture, l'un d'eux crachant un juron à voix basse et l'autre essuyant son nez en sang, ils ne devaient pas avoir prévu de tomber sur plus coriace qu’eux.
Je me baisse pour les examiner sans bruit, mon regard fouillant l'obscurité qui les entoure. Pas d’armes étincelantes, pas de corps mutilés. Rien qu’une paire de coupe-jarrets terrassés par quelque chose ou quelqu'un de plus malin ou plus puissant qu’eux. De l'ouvrage propre, sec et précis. Pas de blessures mortelles, juste de quoi leur donner une sacrée leçon.
Ils râlent encore, pestent à propos d'un colporteur qui les aurait surpris. Un coup de bâton ? Je garde mes distances, observant en silence, caché dans la brume. La route est tranquille à présent, mais elle a quelque chose de menaçant dans son silence. Qui que soit ce type, il n’a pas voulu perdre du temps à en découdre plus que nécessaire. Et vu sa précipitation à disparaître, il doit se sentir aussi étranger ici que moi. Intéressant.
Le plus grand des deux s’agite et commence à hurler à l’injustice, gueulant dans la nuit que lui et son compère ont été battus et détroussés par un inconnu. La voix se répercute dans la brume, sans réponse. Un cri perdu, désespéré, mais qui pourrait bien finir par alerter des oreilles qui traînent dans le coin. Je m’en désintéresse. De toute façon, ces crétins finiront par attirer des ennuis bien plus gros qu’eux, et ça sera mérité. Quant à leur mystérieux agresseur... il est déjà loin, mais je devine qu'il n’est pas du genre à se mêler des affaires des autres.
Je quitte mon perchoir, mes bottes quittant les tuiles avec une force contrôlée, mon corps tout entier en suspens dans l'obscurité. Une seconde, deux peut-être. Puis je retombe lourdement, atterrissant à leur niveau dans un grondement sourd. Une onde de choc s’étend autour de moi, ébranlant le sol, les feuilles mortes et leurs crânes vides tout à la fois.
L’ombre de ma cape les engloutit entièrement, et mes yeux, eux, les fixent. Glacés. Sans pitié. Le regard d'un Limier qui sait ce qu’ils valent : moins que rien.
Les deux fouines lèvent les yeux vers moi, paniqués. Pour une fois, les mots leur manquent, la bouche ouverte comme deux poissons échoués. Mais le plus hardi des deux, celui avec le nez en sang, fait un pas en avant et tente de balbutier quelques mots de justification, sa voix aussi fuyante que lui :
« On… on nous a attaqués, l'ami ! Un homme, là… un voyageur… il nous a détroussés, il a pris… »
Mon regard cloué sur lui l’étouffe à moitié, l'obligeant à baisser la tête. Je n’ai pas besoin de parler pour qu'il sente que je ne crois pas un mot de ses mensonges. Ce type n’a rien de la victime — un prédateur usé, mais prédateur tout de même. Il voit que je ne suis pas dupe. L’ombre de mes mains se pose sur mes armes. Je me contente d’un grognement :
« Suffit. »
Ils échangent un regard apeuré, puis l'un d’eux jette une œillade prudente vers le chemin, comme pour jauger la distance à parcourir pour s’enfuir. Un instant plus tard, ils décident de jouer les durs. Mauvais calcul.
Avec un cri rauque, ils tentent une charge. Pathétique. Je les arrête net en avançant de deux pas seulement. Mon ombre suffit à les figer, et en un claquement sec, mon bras se tend, mes phalanges fermées s'écrasent contre sa mâchoire, le décollant du sol pour mieux s'écraser contre des caisses le long du mur. L'autre recule en trébuchant, et avant même qu’il ne touche le sol, je tourne déjà les talons, les laissant là comme les débris insignifiants qu’ils sont. Leurs piaillements ne me concernent plus.
Ce qui m'intéresse, c'est le fuyard.
Je reprends le chemin qu’il a pris, à pas lents, les narines attentives. Une odeur persiste dans la brume, un parfum ténu, différent des relents de peur et de sueur qui s’échappent des deux brigands à présent haletants. C'est quelque chose de... plus ancien. Plus marqué. L'odeur, à peine perceptible, me frappe comme un souvenir enterré. Poussière, sable brûlé et une pointe d’aromates âcres.
... Taisen ?
Non, c’est quelqu’un d’autre, et cette odeur – presque disparue mais encore assez forte pour ramener des souvenirs désagréables de guerres lointaines – m’en dit bien plus long que n’importe quel rapport d’espion. Elle me ramène à ce désert oublié, où le soleil cuisait la peau et les tempêtes de sable balayaient les carcasses de ceux tombés dans les dunes.
J’accélère le pas. S'il pense être hors de vue... Il se trompe.
***
Je m'élève dans l'air comme une ombre dérangée par un souffle de vent. Mes ailes battent lentement, un bruit sourd et lourd qui semble faire vibrer la brume elle-même. Là, en bas, je l'aperçois enfin. Capé, encapuchonné. La pluie s’abat d’un coup, froide et drue, transformant le brouillard en une chape glacée qui colle à la peau et alourdit chaque pas. L’eau ruisselle sur mes épaules, dégouline de mes ailes et tape sur mon manteau dans un rythme lourd, presque cérémonial.
Sous la lumière pâlotte de la lune, je plonge. Mes ailes s’étendent bien au-delà de lui, une ombre noire qui s’abat, sans pitié, sans échappatoire. Une vision de cauchemar, faite pour réveiller la peur brute qui couve au fond de tous les hommes. La peur de ce qu’ils ne peuvent ni voir ni fuir. La peur d’un Limier en chasse.
Alors, je fonce droit sur lui, plus bas, jusqu’à atterrir brutalement sur le chemin. L'impact envoie un petit nuage de poussière et fait vibrer le sol. Je reste là, silencieux, bien droit, mes ailes pliées dans l’ombre, le fixant comme on regarde une proie qui n’a plus d’issue. Mes prunelles glacées traversent mon masque de Vouivre, arrivant comme une sale mauvaise nouvelle de 240 kilos.
« Alors, perdu ? »
Ma voix sort comme un grognement dans la cacophonie de ce déluge. Le grondement du ciel, meuble ce silence entre nous que je refuse de combler... Attendant patiemment, pourquoi cet homme éveille en moi de sombres choses. Est-ce que je perds finalement la tête ? Mon esprit finalement fracturé à tout jamais ?
Ou bien, il y a quelque chose de plus concret, qui vient encore confirmer que... Je ne suis pas tout à fait perdu.
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Alaric Nordan
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Le mage maintenait son allure depuis sa confrontation avec les autres imbéciles. Il avait cru percevoir encore des voix, mais l'épaisseur de la brume avait tout étouffé, tout absorbé. Ou alors, son imagination lui jouait des tours. Il était agacé et harassé. Il n'avait qu'une envie : trouver une auberge, boire quelque chose de chaud et se foutre dans un pieu ! C'était peut-être pour cela qu'il avait cru entendre des voix lointaines... son cerveau jouait sur ses envies de se poser. Mais pourquoi les aurait-il perçues derrière lui ? Elles auraient dû être autour ou devant lui, même si amoindries par la densité de l'air alourdi de brouillard.
Tout en gardant une bonne foulée, suivant toujours cette route dont il se demandait s'il en verrait le bout, une réflexion sur les conséquences de tantôt lui vint à l'esprit. Les voix perçues ne pouvaient être que celles des bandits qu'il avait neutralisés, qui pleurnichaient leurs douleurs. Ils avaient dû réussir à trouver une ou plusieurs personnes pour gober leur histoire, en retournant leur chemise pour imputer l'attaque à ce qu'ils avaient cru être une proie facile. Cela ne pouvait être que cela, vu comment ils avaient braillé leur appel à l'aide. Bordel ! Il était bien en veine !
Bon ! Que faire ? Sortir de la route et se planquer ? On le penserait coupable direct. Courir ? Même risque. Continuer à marcher vite et bien et attendre ce qui se produirait ? Il n'aimait pas cette perspective, mais il n'avait pas d'autre solution. Faire demi-tour, c'était un non catégorique. Cela ne l'empêcha pas de tourner la tête par-dessus son épaule pour s'assurer qu'aucune silhouette inquiétante ne s'était lancée à ses trousses. C'était peut-être trop loin pour réussir à la discerner. Ou avec un peu de chance, personne ne s'était lancé à sa poursuite. Dans l'incertitude, il préféra demeurer vigilant. Ses doigts se serrèrent pour chercher un contact plus franc avec son bâton.
Combien de temps demeurerait-il tendu de prudence ? Il sourcilla lorsqu'il entendit un étrange son régulier, comme si quelque chose brassait l'air. Il cessa de marcher, saisissant son bâton à deux mains. Bon sang, ça venait d'où ? Le brouillard l'atténuait trop pour qu'il puisse localiser la source. Il fit un tour sur lui-même, sondant les brumes grises qui l'entouraient. Puis, soudain, une pluie drue tomba des cieux.
*Manquait plus que ça !*
Alaric grimaça. La brume, elle, s'était étiolée si vite au contact des gouttes de pluie qu'il se demandait s'il n'avait pas halluciné. L'eau s'égouttait déjà des bords de sa capuche. Il grommela. Il allait finir trempé à ce rythme ! Il n'était même pas certain que sa cape huilée résisterait à une telle intensité pluvieuse. Et avec le vacarme que cela produisait, il n'entendait plus cet étrange brassage rythmé.
Il n'aimait pas cette situation, avec cette impression d'être épié. Deux immenses ombres alaires prirent naissance à la base de la sienne, comme cherchant à l'englober. Hypnotisé par la surprise, il se figea, les contemplant dans leur croissance, devenant menaçantes... Elles dégageaient une aura sombre et effrayante. Il voulut lever la tête. La source de ces ombres se montra plus vive que lui.
Le mage écarquilla les yeux lorsqu'il vit une masse ténébreuse piquer sur lui. Il ne put s'empêcher de reculer, manquant de trébucher. Son bâton tenu à deux mains, porté à hauteur de torse, parut bien pathétique comme protection, même comme moyen de défense, quand l'ombre monstrueuse rencontra le sol avec puissance. Le sol vibra à son atterrissage brutal. Alaric recula encore d'un pas, pris dans l'étau de la frayeur que provoquait le nouveau venu, qui se redressa pour dévoiler toute l'immensité de sa grandeur. La crainte qui tambourinait dans la poitrine du géomancien enfla lorsque ses yeux bruns se fixèrent sur le masque du Drakyn.
*Un Limier !*
Le songe était presque désespéré. Quand ces chiens étaient lâchés, ils ne lâchaient pas leur proie. Était-ce à cause des deux crétins qu'il était là, lui ? La coïncidence serait plus que cocasse. Et si c'était encore son passé qui le rattrapait ? Il se mit sur la défensive, le souffle accéléré par cette peur que provoquait cet écailleux, qui ressemblait plus à l'ombre de la mort vengeresse qu'à un clébard républicain.
Une voix profonde et caverneuse brisa le chant morne de la forte pluie. C'était une farce, sa courte question ? Ses mâchoires se crispèrent, car cette voix, déformée par le son de la pluie et le port de ce masque reptilien, lui évoquait quelque chose. Un souvenir de la guerre. Pourquoi, quand tout dérapait subitement, devait-il se remémorer la guerre ? Bon, que faire ? Fuir ? Un Limier n'était jamais à sous-estimer. Se mettre à genoux et supplier de le laisser partir ? Jamais ! Il pouvait se brosser si cet écailleux cherchait ça. Et allez, une bonne suée froide dans le dos, comme si cela ne suffisait pas... Ah bon, c'était sa cape qui avait percé à cause de la flotte.
Il serra sa prise sur son bâton, toujours en posture défensive. Lentement, il attrapa les trames de sa magie, juste au cas où.
"Non, trempé..."
Quelle réponse débile et merdique.
"Éreinté, affamé, et je me permettrai de rajouter... hum, agacé aussi. Parce que je prends encore plus la flotte sur la tronche à rester là comme un crétin qui se demande ce qu'on lui veut."
Et hop, du sarcasme maintenant. Il tenait vraiment à attirer les problèmes.
"Qu'est-ce que tu m'veux, Limier ?"
Tout en gardant une bonne foulée, suivant toujours cette route dont il se demandait s'il en verrait le bout, une réflexion sur les conséquences de tantôt lui vint à l'esprit. Les voix perçues ne pouvaient être que celles des bandits qu'il avait neutralisés, qui pleurnichaient leurs douleurs. Ils avaient dû réussir à trouver une ou plusieurs personnes pour gober leur histoire, en retournant leur chemise pour imputer l'attaque à ce qu'ils avaient cru être une proie facile. Cela ne pouvait être que cela, vu comment ils avaient braillé leur appel à l'aide. Bordel ! Il était bien en veine !
Bon ! Que faire ? Sortir de la route et se planquer ? On le penserait coupable direct. Courir ? Même risque. Continuer à marcher vite et bien et attendre ce qui se produirait ? Il n'aimait pas cette perspective, mais il n'avait pas d'autre solution. Faire demi-tour, c'était un non catégorique. Cela ne l'empêcha pas de tourner la tête par-dessus son épaule pour s'assurer qu'aucune silhouette inquiétante ne s'était lancée à ses trousses. C'était peut-être trop loin pour réussir à la discerner. Ou avec un peu de chance, personne ne s'était lancé à sa poursuite. Dans l'incertitude, il préféra demeurer vigilant. Ses doigts se serrèrent pour chercher un contact plus franc avec son bâton.
Combien de temps demeurerait-il tendu de prudence ? Il sourcilla lorsqu'il entendit un étrange son régulier, comme si quelque chose brassait l'air. Il cessa de marcher, saisissant son bâton à deux mains. Bon sang, ça venait d'où ? Le brouillard l'atténuait trop pour qu'il puisse localiser la source. Il fit un tour sur lui-même, sondant les brumes grises qui l'entouraient. Puis, soudain, une pluie drue tomba des cieux.
*Manquait plus que ça !*
Alaric grimaça. La brume, elle, s'était étiolée si vite au contact des gouttes de pluie qu'il se demandait s'il n'avait pas halluciné. L'eau s'égouttait déjà des bords de sa capuche. Il grommela. Il allait finir trempé à ce rythme ! Il n'était même pas certain que sa cape huilée résisterait à une telle intensité pluvieuse. Et avec le vacarme que cela produisait, il n'entendait plus cet étrange brassage rythmé.
Il n'aimait pas cette situation, avec cette impression d'être épié. Deux immenses ombres alaires prirent naissance à la base de la sienne, comme cherchant à l'englober. Hypnotisé par la surprise, il se figea, les contemplant dans leur croissance, devenant menaçantes... Elles dégageaient une aura sombre et effrayante. Il voulut lever la tête. La source de ces ombres se montra plus vive que lui.
Le mage écarquilla les yeux lorsqu'il vit une masse ténébreuse piquer sur lui. Il ne put s'empêcher de reculer, manquant de trébucher. Son bâton tenu à deux mains, porté à hauteur de torse, parut bien pathétique comme protection, même comme moyen de défense, quand l'ombre monstrueuse rencontra le sol avec puissance. Le sol vibra à son atterrissage brutal. Alaric recula encore d'un pas, pris dans l'étau de la frayeur que provoquait le nouveau venu, qui se redressa pour dévoiler toute l'immensité de sa grandeur. La crainte qui tambourinait dans la poitrine du géomancien enfla lorsque ses yeux bruns se fixèrent sur le masque du Drakyn.
*Un Limier !*
Le songe était presque désespéré. Quand ces chiens étaient lâchés, ils ne lâchaient pas leur proie. Était-ce à cause des deux crétins qu'il était là, lui ? La coïncidence serait plus que cocasse. Et si c'était encore son passé qui le rattrapait ? Il se mit sur la défensive, le souffle accéléré par cette peur que provoquait cet écailleux, qui ressemblait plus à l'ombre de la mort vengeresse qu'à un clébard républicain.
Une voix profonde et caverneuse brisa le chant morne de la forte pluie. C'était une farce, sa courte question ? Ses mâchoires se crispèrent, car cette voix, déformée par le son de la pluie et le port de ce masque reptilien, lui évoquait quelque chose. Un souvenir de la guerre. Pourquoi, quand tout dérapait subitement, devait-il se remémorer la guerre ? Bon, que faire ? Fuir ? Un Limier n'était jamais à sous-estimer. Se mettre à genoux et supplier de le laisser partir ? Jamais ! Il pouvait se brosser si cet écailleux cherchait ça. Et allez, une bonne suée froide dans le dos, comme si cela ne suffisait pas... Ah bon, c'était sa cape qui avait percé à cause de la flotte.
Il serra sa prise sur son bâton, toujours en posture défensive. Lentement, il attrapa les trames de sa magie, juste au cas où.
"Non, trempé..."
Quelle réponse débile et merdique.
"Éreinté, affamé, et je me permettrai de rajouter... hum, agacé aussi. Parce que je prends encore plus la flotte sur la tronche à rester là comme un crétin qui se demande ce qu'on lui veut."
Et hop, du sarcasme maintenant. Il tenait vraiment à attirer les problèmes.
"Qu'est-ce que tu m'veux, Limier ?"
Dragon du Razkaal
Kieran Ryven
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crédits : 2205
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Info personnage
Race: Drakyn
Vocation: Guerrier combattant
Alignement: Neutre Bon
Rang: C
Il a du répondant, le rat. Je le vois se tenir là, trempé jusqu’aux os, son bâton levé comme si ça allait suffire à me tenir à distance. Un bout de bois contre un Limier. Un rire sourd me gratte la gorge, mais je ne le laisse pas sortir. Pas encore. Pas quand je le vois jeter des coups d’œil autour de lui, comme s’il cherchait une échappatoire qui n’existe pas. Il le sait, au fond de lui, qu’il est pris. Mais ce qu’il dégage, c’est pas de la résignation. Pas encore. C’est un mélange bancal de défiance et de fatigue, une tension dans ses épaules qui me hurle qu’il ne va pas se rendre gentiment.
Il me balance son sarcasme comme un chien qui grogne pour impressionner. "Non, trempé… Éreinté, affamé… agacé aussi." Ça pourrait être drôle, s’il n’était pas si pathétique à le dire. Mais y a autre chose, derrière ses mots. Un truc qu’il essaie de masquer, et pas seulement avec sa capuche. De la peur, oui. Mais aussi une colère, enfouie juste assez profond pour ne pas éclater, pas encore.
Mon regard descend sur lui, comme un marteau prêt à frapper. Je sens la magie. Subtile, mais présente. Ça flotte dans l’air, à peine plus fort que l’odeur de la pluie. Ce petit malin essaie de préparer quelque chose, doucement, en cachette. Il veut me tester. Voir si je vais le laisser faire. Voir si je suis assez stupide pour ne pas remarquer qu’il tend une embuscade dans ses propres tripes. Je fais un pas en avant, un seul, mais ça suffit à faire craquer le bois mouillé sous mes bottes. Ma silhouette se penche légèrement, comme une ombre vivante qui va l’engloutir.
« Ce que je te veux ? » Ma voix est basse, rauque, assez pour résonner même sous l’averse. « Je ne suis pas là pour partager cette pluie avec toi, si c’est ce que tu te demandes. »
Je le fixe encore, mes yeux glissant sur sa cape trempée, ses mains crispées sur son bâton. Un peu trop crispées. Mon ton durcit.
« Mais toi, t’as l’air du genre à marcher entre les lignes. C’est quoi ton histoire, hein ? Ces deux pignoufs que t’as laissés gémir dans leur crasse, c’était quoi ? La légitime défense d’un pèlerin ou— »
Je m’arrête net. Pas à cause de lui. À cause d’un souvenir. Sa voix. Les mots qu’il vient de prononcer, l’intonation, la façon dont il a presque craché son sarcasme tout à l’heure. Et puis cette odeur, perçue sous la pluie battante, plus tenace qu’elle n’en a le droit. Une odeur familière qui me fait reculer dans le temps, loin d’ici, dans un désert brûlant, sous un ciel pesant, là où les cris résonnaient comme des coups de tonnerre.
C’est comme si le vent lui-même s’était figé, là, autour de nous. Tout ce que je vois maintenant, c’est un fragment de ce passé que j’ai enterré. Et pourtant…
Je le fixe à nouveau, mais plus de la même manière. Mes yeux percent son visage, comme s’ils cherchaient à arracher ce qu’il y a dessous. Une certitude commence à me brûler l’esprit. C’est lui. Ou quelque chose de lui.
« Toi. » Ma voix est basse, mais l’impact dans le mot est lourd. « Tu étais là, dans le désert… Pas vrai ? »
La foudre éclaire à nouveau, et je distingue une partie de son visage. La guerre me revient comme un coup de masse : ce désert brûlant, les cris étouffés par le sable, le piège qui nous a enterrés vivants. Lui, debout, dominant les survivants d’un geste. Et pourtant, épargnant.
Il n’a pas changé. Pas assez pour que je l’oublie.
Je m’approche encore, mais une douleur fulgurante traverse mes côtes, montant jusqu’au creux de mon nez. Une vieille blessure, une relique de ma dernière mission. Ildrekyhr. Je grogne malgré moi, mes griffes pressant mon flanc dans un geste instinctif. La pluie masque la sueur froide qui me colle, mais pas la raideur de mon souffle.
Je ralentis, vacille une seconde avant de reprendre pied. Pas question de lui montrer une faiblesse. Pourtant, mes mots sortent plus rauques, teintés d’une confusion que je ne peux ignorer.
« Je te reconnais. Pas ton nom. Juste ce visage. Cette aura. Tu étais là. Dans le désert. À la guerre. »
Je redresse la tête, mes ailes s’ouvrant légèrement dans un geste plus protecteur que menaçant. Le poids de la pluie alourdit leur envergure, mais elles me gardent ancré. La douleur pulse encore, mais je la repousse. Je serre les dents, mes griffes frôlant mon masque. La pluie s’écoule de son bec comme si elle cherchait à laver mes souvenirs. Elle n’y arrivera pas.
« Je croyais que ça s’arrêterait là. Mais voilà que tu réapparais, comme un fantôme, en pleine nuit. »
Un silence. Une foudre, encore.
« Alors dis-moi, mage. Ce que tu fais ici. Si tu es une menace pour la République. Parce que si tu l’es… »
Je m’avance, mon ombre l’engloutissant, plus lourde que la pluie. Ma voix tombe, basse et tendue, comme si je me parlais autant qu’à lui.
« Si tu l’es, alors je n’aurai plus le luxe de te reconnaître. »
La douleur me rappelle son existence, sourde et pressante. Mon souffle ralentit pour se caler sur le sien, mais une part de moi n’écoute plus. Parce qu’une autre question tourne en boucle, plus silencieuse et plus tenace que toutes les autres : Pourquoi maintenant ?
Il me balance son sarcasme comme un chien qui grogne pour impressionner. "Non, trempé… Éreinté, affamé… agacé aussi." Ça pourrait être drôle, s’il n’était pas si pathétique à le dire. Mais y a autre chose, derrière ses mots. Un truc qu’il essaie de masquer, et pas seulement avec sa capuche. De la peur, oui. Mais aussi une colère, enfouie juste assez profond pour ne pas éclater, pas encore.
Mon regard descend sur lui, comme un marteau prêt à frapper. Je sens la magie. Subtile, mais présente. Ça flotte dans l’air, à peine plus fort que l’odeur de la pluie. Ce petit malin essaie de préparer quelque chose, doucement, en cachette. Il veut me tester. Voir si je vais le laisser faire. Voir si je suis assez stupide pour ne pas remarquer qu’il tend une embuscade dans ses propres tripes. Je fais un pas en avant, un seul, mais ça suffit à faire craquer le bois mouillé sous mes bottes. Ma silhouette se penche légèrement, comme une ombre vivante qui va l’engloutir.
« Ce que je te veux ? » Ma voix est basse, rauque, assez pour résonner même sous l’averse. « Je ne suis pas là pour partager cette pluie avec toi, si c’est ce que tu te demandes. »
Je le fixe encore, mes yeux glissant sur sa cape trempée, ses mains crispées sur son bâton. Un peu trop crispées. Mon ton durcit.
« Mais toi, t’as l’air du genre à marcher entre les lignes. C’est quoi ton histoire, hein ? Ces deux pignoufs que t’as laissés gémir dans leur crasse, c’était quoi ? La légitime défense d’un pèlerin ou— »
Je m’arrête net. Pas à cause de lui. À cause d’un souvenir. Sa voix. Les mots qu’il vient de prononcer, l’intonation, la façon dont il a presque craché son sarcasme tout à l’heure. Et puis cette odeur, perçue sous la pluie battante, plus tenace qu’elle n’en a le droit. Une odeur familière qui me fait reculer dans le temps, loin d’ici, dans un désert brûlant, sous un ciel pesant, là où les cris résonnaient comme des coups de tonnerre.
C’est comme si le vent lui-même s’était figé, là, autour de nous. Tout ce que je vois maintenant, c’est un fragment de ce passé que j’ai enterré. Et pourtant…
Je le fixe à nouveau, mais plus de la même manière. Mes yeux percent son visage, comme s’ils cherchaient à arracher ce qu’il y a dessous. Une certitude commence à me brûler l’esprit. C’est lui. Ou quelque chose de lui.
« Toi. » Ma voix est basse, mais l’impact dans le mot est lourd. « Tu étais là, dans le désert… Pas vrai ? »
La foudre éclaire à nouveau, et je distingue une partie de son visage. La guerre me revient comme un coup de masse : ce désert brûlant, les cris étouffés par le sable, le piège qui nous a enterrés vivants. Lui, debout, dominant les survivants d’un geste. Et pourtant, épargnant.
Il n’a pas changé. Pas assez pour que je l’oublie.
Je m’approche encore, mais une douleur fulgurante traverse mes côtes, montant jusqu’au creux de mon nez. Une vieille blessure, une relique de ma dernière mission. Ildrekyhr. Je grogne malgré moi, mes griffes pressant mon flanc dans un geste instinctif. La pluie masque la sueur froide qui me colle, mais pas la raideur de mon souffle.
Je ralentis, vacille une seconde avant de reprendre pied. Pas question de lui montrer une faiblesse. Pourtant, mes mots sortent plus rauques, teintés d’une confusion que je ne peux ignorer.
« Je te reconnais. Pas ton nom. Juste ce visage. Cette aura. Tu étais là. Dans le désert. À la guerre. »
Je redresse la tête, mes ailes s’ouvrant légèrement dans un geste plus protecteur que menaçant. Le poids de la pluie alourdit leur envergure, mais elles me gardent ancré. La douleur pulse encore, mais je la repousse. Je serre les dents, mes griffes frôlant mon masque. La pluie s’écoule de son bec comme si elle cherchait à laver mes souvenirs. Elle n’y arrivera pas.
« Je croyais que ça s’arrêterait là. Mais voilà que tu réapparais, comme un fantôme, en pleine nuit. »
Un silence. Une foudre, encore.
« Alors dis-moi, mage. Ce que tu fais ici. Si tu es une menace pour la République. Parce que si tu l’es… »
Je m’avance, mon ombre l’engloutissant, plus lourde que la pluie. Ma voix tombe, basse et tendue, comme si je me parlais autant qu’à lui.
« Si tu l’es, alors je n’aurai plus le luxe de te reconnaître. »
La douleur me rappelle son existence, sourde et pressante. Mon souffle ralentit pour se caler sur le sien, mais une part de moi n’écoute plus. Parce qu’une autre question tourne en boucle, plus silencieuse et plus tenace que toutes les autres : Pourquoi maintenant ?
Affilié au Reike
Alaric Nordan
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L'envie de reculer d'un pas fut très tentante. Surtout quand une montagne de muscles se rapproche de vous d'un bon pas, et qu'il lui suffit juste de tendre son bras épais pour vous choper le col. Reculer serait une réaction naturelle face au danger... Mais c'était une preuve de faiblesse. Face à ce Limier, Alaric ne pouvait espérer avoir une chance de se barrer en un seul morceau. Tenant la trame de la magie du bout de sa concentration, il dut lever la tête pour fixer le masque de la grande ombre ténébreuse qu'était son interlocuteur reptilien. Son bâton ? Il le tenait toujours, dressé au cas où. Une arme bien dérisoire sur le coup. Une simple brindille qui se briserait d'un rien face à ce guerrier, menaçant et dominant.
À sa réplique, le mage eut envie de rire jaune. Il se mordit les lèvres pour taire son envie de répliquer de manière tout aussi piquante. Et pendant ce temps, il continuait toujours à prendre la flotte. Ah, enfin, il se décidait à apporter la raison de sa venue. Donc, c'était pour les deux autres crétins de tout à l'heure qu'il avait ramené sa truffe ici. Quelle déveine ! Il aurait dû les assommer un bon coup. Il aurait eu tout le loisir de se retrouver loin d'ici et mieux encore : de ne pas avoir ce limier saurien dans les pattes. Et pourquoi il s'arrêtait de causer ?
Face à cette coupure soudaine, la vigilance d'Alaric s'accrut quelque peu. Il savait les Limiers pas nets sous leur caboche parfois. Un Humain virait aisément à la folie. Alors imaginez un Drakyn, qui faisait le double voire le triple de votre masse.
Le silence était presque oppressant. Qu'est-ce qu'il avait à le scruter de la sorte ? Ah ! Il rouvrit la bouche.
Quoi, moi ? Il sourcilla.
Un éclair zébra les cieux, dévoilant toute la splendeur effroyable de la présence qu'était le Drakyn. Il recula d'un pas, cette fois. Pourquoi avait-il l'impression de revivre une scène passée ? Et voilà que l'autre avançait encore ! Qu'est-ce que... Son regard capta la très courte raideur du Limier, avant que celui-ci ne porte sa main griffue à son côté. Et ne venait-il pas vaciller ? L'immense gaillard n'était pas bien. L'ancien Mage d'État le voyait clairement. Il n'était plus Shekhikh, mais les habitudes restaient. L'écailleux là, il traînait quelque chose qui lui faisait mal.
Son auscultation visuelle stoppa net quand son interlocuteur, en quelques mots, sut lui raviver le passé de la guerre. Ses yeux s'ouvrirent un peu plus grands, pris par la surprise. Il manqua même d'en avoir la bouche ouverte. Le hasard se foutait vraiment de lui. Hé ho, il fait quoi avec ses serres là ? Ah, il les porte à son casque... sans doute pour se gratter ? Les mains toujours serrées sur son bâton, le Reikois ne sut que dire. À se demander qui était le fantôme dans l'histoire ! Il est même dans une apparence pire qu'un spectre là ! Et lui, il prend toujours la flotte... Hé ! Pourquoi il s'avance encore là ? Dans son souvenir, il ne se rappelait pas qu'il ait été si grand ! L'effet ténèbres de la nuit, sans doute.
Cette fois, Alaric ne recula pas, laissant le Drakyn l'englober dans sa propre ombre. Il était tel un prédateur prêt à fondre sur lui. Après une courte grimace, l'humain ne se fit pas languir pour répondre.
"C'est plus mon épaule qui te reconnaît en premier..." commença-t-il. Ouais, cette flèche que le Drakyn s'était plu à faire tourner dans son articulation durant la guerre, il s'en rappelait encore.
"Le hasard a l'air de bien se foutre de notre trogne...."
Quelles avaient les probabilités qu'ils se recroisent un jour ? Tout les avait opposés par le passé. Et là, sous cette pluie battante, pourquoi avaient-ils fallu que leurs routes se recroisent ?
"Serais-je un danger pour la République après avoir foutu à terre deux brigands qui ont cherché à me détrousser ? Ces deux crétins ont dû bien plaider leur cause en chialant, pensant que c'était moi le vil et méchant malandrin des routes... "
Il se redressa, tout en libérant une main de son bâton pour le mettre à la verticale, à sa droite. Ainsi, il voulait se montrer moins menaçant. Plus du tout surtout. Et il prenait toujours la flotte. Dans peu de temps, il ne serait plus un homme, juste une éponge bien chargée.
"Je ne suis que de passage dans le coin, un simple guérisseur itinérant. Et toi, clairement, tu as besoin que quelqu'un examine ton flanc. Ça pique toujours une blessure qui n'est pas totalement guérie."
Un autre éclair défit la nuit. L'orage grondait. Il y a longtemps que la guerre s'était terminée. Ce Drakyn aurait pu le faire prisonnier ou suivre les ordres de sa mère. Au lieu de cela, il se dressait en face de lui.
"Je peux y jeter un œil si tu veux, mais dans un endroit où je ne vais pas finir noyé par la pluie...."
Il n'avait pas détourné son regard brun, cherchant plus à se plonger dans le regard protégé par le masque du Limier.
À sa réplique, le mage eut envie de rire jaune. Il se mordit les lèvres pour taire son envie de répliquer de manière tout aussi piquante. Et pendant ce temps, il continuait toujours à prendre la flotte. Ah, enfin, il se décidait à apporter la raison de sa venue. Donc, c'était pour les deux autres crétins de tout à l'heure qu'il avait ramené sa truffe ici. Quelle déveine ! Il aurait dû les assommer un bon coup. Il aurait eu tout le loisir de se retrouver loin d'ici et mieux encore : de ne pas avoir ce limier saurien dans les pattes. Et pourquoi il s'arrêtait de causer ?
Face à cette coupure soudaine, la vigilance d'Alaric s'accrut quelque peu. Il savait les Limiers pas nets sous leur caboche parfois. Un Humain virait aisément à la folie. Alors imaginez un Drakyn, qui faisait le double voire le triple de votre masse.
Le silence était presque oppressant. Qu'est-ce qu'il avait à le scruter de la sorte ? Ah ! Il rouvrit la bouche.
Quoi, moi ? Il sourcilla.
Un éclair zébra les cieux, dévoilant toute la splendeur effroyable de la présence qu'était le Drakyn. Il recula d'un pas, cette fois. Pourquoi avait-il l'impression de revivre une scène passée ? Et voilà que l'autre avançait encore ! Qu'est-ce que... Son regard capta la très courte raideur du Limier, avant que celui-ci ne porte sa main griffue à son côté. Et ne venait-il pas vaciller ? L'immense gaillard n'était pas bien. L'ancien Mage d'État le voyait clairement. Il n'était plus Shekhikh, mais les habitudes restaient. L'écailleux là, il traînait quelque chose qui lui faisait mal.
Son auscultation visuelle stoppa net quand son interlocuteur, en quelques mots, sut lui raviver le passé de la guerre. Ses yeux s'ouvrirent un peu plus grands, pris par la surprise. Il manqua même d'en avoir la bouche ouverte. Le hasard se foutait vraiment de lui. Hé ho, il fait quoi avec ses serres là ? Ah, il les porte à son casque... sans doute pour se gratter ? Les mains toujours serrées sur son bâton, le Reikois ne sut que dire. À se demander qui était le fantôme dans l'histoire ! Il est même dans une apparence pire qu'un spectre là ! Et lui, il prend toujours la flotte... Hé ! Pourquoi il s'avance encore là ? Dans son souvenir, il ne se rappelait pas qu'il ait été si grand ! L'effet ténèbres de la nuit, sans doute.
Cette fois, Alaric ne recula pas, laissant le Drakyn l'englober dans sa propre ombre. Il était tel un prédateur prêt à fondre sur lui. Après une courte grimace, l'humain ne se fit pas languir pour répondre.
"C'est plus mon épaule qui te reconnaît en premier..." commença-t-il. Ouais, cette flèche que le Drakyn s'était plu à faire tourner dans son articulation durant la guerre, il s'en rappelait encore.
"Le hasard a l'air de bien se foutre de notre trogne...."
Quelles avaient les probabilités qu'ils se recroisent un jour ? Tout les avait opposés par le passé. Et là, sous cette pluie battante, pourquoi avaient-ils fallu que leurs routes se recroisent ?
"Serais-je un danger pour la République après avoir foutu à terre deux brigands qui ont cherché à me détrousser ? Ces deux crétins ont dû bien plaider leur cause en chialant, pensant que c'était moi le vil et méchant malandrin des routes... "
Il se redressa, tout en libérant une main de son bâton pour le mettre à la verticale, à sa droite. Ainsi, il voulait se montrer moins menaçant. Plus du tout surtout. Et il prenait toujours la flotte. Dans peu de temps, il ne serait plus un homme, juste une éponge bien chargée.
"Je ne suis que de passage dans le coin, un simple guérisseur itinérant. Et toi, clairement, tu as besoin que quelqu'un examine ton flanc. Ça pique toujours une blessure qui n'est pas totalement guérie."
Un autre éclair défit la nuit. L'orage grondait. Il y a longtemps que la guerre s'était terminée. Ce Drakyn aurait pu le faire prisonnier ou suivre les ordres de sa mère. Au lieu de cela, il se dressait en face de lui.
"Je peux y jeter un œil si tu veux, mais dans un endroit où je ne vais pas finir noyé par la pluie...."
Il n'avait pas détourné son regard brun, cherchant plus à se plonger dans le regard protégé par le masque du Limier.
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Kieran Ryven
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Race: Drakyn
Vocation: Guerrier combattant
Alignement: Neutre Bon
Rang: C
Un rire bas, presque imperceptible, m’échappe. Pas moqueur. Plutôt une tentative d’alléger ce mélange de tension et de souvenirs qui tournaient dans ma tête. La pluie s’écrasait toujours contre mon armure et mes ailes, lourde et gelée, mais ses mots, eux, faisaient mouche. Si c’était une menace, on aurait entendu parler de lui. Je pouvais presque sentir à nouveau la chaleur suffocante du désert, mêlée à la puanteur âcre du sang. Ce n’était pas seulement sa voix ou son odeur, mais aussi une image gravée dans ma mémoire : celle de mes hommes, pris au piège jusqu’à la taille dans une gangue de terre solide comme de la pierre. Leur rage impuissante. Le poids de la défaite qui menaçait.
Je dévisage l’humain sous la pluie battante, cherchant à trancher dans ce doute qui me tenaillait. Son ton, la posture qu’il avait prise en relâchant son bâton, la façon qu’il avait de ne pas fuir malgré la peur – tout criait qu’il disait vrai. Et cette fichue voix qui résonnait encore dans ma tête, me renvoyant aux dunes ensanglantées du désert. Ce qu’il dit sur son épaule – cette flèche que j’avais plantée, celle que j’avais tournoyée avec un mélange de méthode et de rage dans l’articulation d’un ennemi qui avait osé me défier – me frappe. Le souvenir surgit, brut et vif.
Je serre un instant les mâchoires, m’arrêtant pour ajuster ma cape imbibée d’eau, puis, je réponds, ma voix plus basse, presque rugueuse dans l’intimité que nous impose l’orage :
« Ton épaule, hein ? Je m’en souviens. Ce n’était pas un geste gratuit, mais c'est les aléas de la guerre, et j'en suis désolé. »
Je réprime une grimace lorsque la douleur dans mes côtes remonte à nouveau. Il a raison. Stupide blessure. Trop de surmenage. Ou alors, la pluie cherche à m’achever.
« Guérisseur itinérant, hein ? » Je lève une griffe pour appuyer mes mots. « Si tu l’étais pas, si t’étais une vraie menace, crois-moi : la République aurait pas eu besoin d’un Limier pour entendre parler de toi. »
Dans ma bouche, c'est un compliment, le prenant davantage au sérieux. Je souffle, plus pour chasser l’agacement que pour me convaincre, et fis un signe de tête vers la route, desserrant la tension qui pesait sur mes épaules.
« Suis-moi. »
Je me tourne légèrement, l’invitant d’un mouvement de la main à me suivre. La pluie martelait encore, mais à chaque pas, je sentais son poids sur mes épaules s’alléger. Une partie de la tension retombait. Peut-être parce que je l’avais sous les yeux et non comme une silhouette fuyante dans les ombres.
« Y’a une auberge pas loin. La Sirène Rousse. On pourra s’y poser le temps que tu joues les bons samaritains. Et peut-être sécher un peu avant de finir noyés. »
Je marche en silence pendant un moment, écoutant les éclaboussures de nos pas sur le chemin trempé, ponctuées par les grondements sourds de l’orage. La douleur dans mes côtes et sur mon nez s’apaisaient à peine, mais le simple fait de marcher sans avoir à jouer les menaces aidait à reprendre un souffle plus calme.
« Alors, un guérisseur itinérant qui traverse la République. Pourquoi ? Les Reikois ont-ils tellement bien fait leur boulot que t’as plus rien à rafistoler chez eux ? Tu boudes Ryssen finalement ? »
Un ton presque amusé, sarcastique, malgré moi. Un moyen comme un autre de lui poser la question qui m’avait traversé dès le début. Parce qu’au-delà de cette pluie et de nos vieilles cicatrices, je ne pouvais pas m’empêcher de me demander : qu’est-ce qu’il cherche ici ?
Je dévisage l’humain sous la pluie battante, cherchant à trancher dans ce doute qui me tenaillait. Son ton, la posture qu’il avait prise en relâchant son bâton, la façon qu’il avait de ne pas fuir malgré la peur – tout criait qu’il disait vrai. Et cette fichue voix qui résonnait encore dans ma tête, me renvoyant aux dunes ensanglantées du désert. Ce qu’il dit sur son épaule – cette flèche que j’avais plantée, celle que j’avais tournoyée avec un mélange de méthode et de rage dans l’articulation d’un ennemi qui avait osé me défier – me frappe. Le souvenir surgit, brut et vif.
Je serre un instant les mâchoires, m’arrêtant pour ajuster ma cape imbibée d’eau, puis, je réponds, ma voix plus basse, presque rugueuse dans l’intimité que nous impose l’orage :
« Ton épaule, hein ? Je m’en souviens. Ce n’était pas un geste gratuit, mais c'est les aléas de la guerre, et j'en suis désolé. »
Je réprime une grimace lorsque la douleur dans mes côtes remonte à nouveau. Il a raison. Stupide blessure. Trop de surmenage. Ou alors, la pluie cherche à m’achever.
« Guérisseur itinérant, hein ? » Je lève une griffe pour appuyer mes mots. « Si tu l’étais pas, si t’étais une vraie menace, crois-moi : la République aurait pas eu besoin d’un Limier pour entendre parler de toi. »
Dans ma bouche, c'est un compliment, le prenant davantage au sérieux. Je souffle, plus pour chasser l’agacement que pour me convaincre, et fis un signe de tête vers la route, desserrant la tension qui pesait sur mes épaules.
« Suis-moi. »
Je me tourne légèrement, l’invitant d’un mouvement de la main à me suivre. La pluie martelait encore, mais à chaque pas, je sentais son poids sur mes épaules s’alléger. Une partie de la tension retombait. Peut-être parce que je l’avais sous les yeux et non comme une silhouette fuyante dans les ombres.
« Y’a une auberge pas loin. La Sirène Rousse. On pourra s’y poser le temps que tu joues les bons samaritains. Et peut-être sécher un peu avant de finir noyés. »
Je marche en silence pendant un moment, écoutant les éclaboussures de nos pas sur le chemin trempé, ponctuées par les grondements sourds de l’orage. La douleur dans mes côtes et sur mon nez s’apaisaient à peine, mais le simple fait de marcher sans avoir à jouer les menaces aidait à reprendre un souffle plus calme.
« Alors, un guérisseur itinérant qui traverse la République. Pourquoi ? Les Reikois ont-ils tellement bien fait leur boulot que t’as plus rien à rafistoler chez eux ? Tu boudes Ryssen finalement ? »
Un ton presque amusé, sarcastique, malgré moi. Un moyen comme un autre de lui poser la question qui m’avait traversé dès le début. Parce qu’au-delà de cette pluie et de nos vieilles cicatrices, je ne pouvais pas m’empêcher de me demander : qu’est-ce qu’il cherche ici ?
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Alaric Nordan
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Le Drakyn le fixe, comme pour continuer à le cerner, malgré que le mage ait pris une posture plus posée. Comme s'il cherchait à vérifier que chacun de ses mots ne se perdait pas dans le mensonge. Alaric, la tête levée pour fixer les yeux qui luisaient derrière son masque de vouivre, attendait. Il voyait bien que son imposant interlocuteur devait se rappeler de leur rencontre. D'un rien, l'un des deux aurait péri lors de cette dernière, si leurs pensées n'avaient pas été au-delà de la haine que les ravages de la guerre avaient distillée dans bien des cœurs. D'un rien, le géomancien aurait pu tous les enterrer. D'un rien, ce Drakyn aurait pu le tuer sur place.
Patiemment, l'humain attendait que le Limier finisse sa propre introspection. Il ne pouvait faire que cela, maintenant qu'il était bien trempé. La pluie parachevait d'étendre son assaut humide aux autres parties vestimentaires sèches ; dans quelques minutes, elles ne le seront plus.
"Comme tu le dis, c'était la guerre... Réclamer réparation ou vengeance serait un peu puéril, non ?"
Et surtout une attitude complètement stupide. Tous les deux suivaient des causes qu'ils avaient crues être les meilleures à suivre, les meilleures à défendre. Maintenant, l'Empire était tenu par les Ryssen. Quelle ironie, n'empêche, d'avoir eu à croiser bien plus tard la route de Vaenys Draknys, qui eut provoqué sa déchéance... Comme si le destin lui avait imposé un avant-goût de ce qui aurait pu se passer s'il avait suivi la cause Draknys durant la guerre. Indirectement, Alaric effleurait la surface de ce que le puissant guerrier avait pu perdre... Oui, quel coup du sort. Il eut envie d'en rire jaune.
"Tu n'as pas à être désolé. Tu te battais pour tes idéaux. Il était normal de les défendre de toutes ses forces."
Et puis, la guerre s'était terminée, l'Empire s'était renforcé sous la poigne de fer de Tensaï. Les rebelles qui avaient tenté de poursuivre la lutte avaient été capturés ou tués...
"Et je pense qu'on ne serait surtout pas en train de se taper une bavette trempée..." Dit-il en souriant, se retenant de rire.
Ce qui n'était pas un mensonge en soi. Mais bon, il n'était pas venu en république pour faire du brigandage. Il était venu comme guérisseur itinérant, ce qui était parfait pour rester discret.
Quand le Limier lui demanda de le suivre, Alaric hésita. Le Drakyn était devenu Limier. Qu'avait-il fait de toutes ces années, depuis qu'il avait pris la décision de s'exiler ? Alaric leva les yeux vers les cieux, totalement orageux. Il s'était proposé de le soigner, non ? L'écailleux était républicain, il devait connaître le coin, logique ! Il se mit donc en marche après que l'invitation se fut renforcée d'un mouvement ample de la main du Drakyn. Il dut allonger la foulée pour le rattraper. Au nom de l'auberge, Alaric sentit l'espoir gonfler. Il n'y avait plus à espérer qu'elle n'était pas loin, cette providente auberge ! Son nom était aussi une belle invitation... chaleureuse. Le mage se sentit... ragaillardi. L'idée de pouvoir enfin se poser au sec, de manger chaud, de boire un alcool qui brûle bien les boyaux.
Un étrange silence, brisé par le tonnerre, s'était instauré entre les deux êtres. Le pas lourd du Drakyn brisait le son diffus de la pluie. L'humain lui jetait de temps en temps un coup d'œil, poussé par un minimum de vigilance, mais aussi pour s'assurer que la douleur qu'il subissait au flanc ne prenait pas de l'ampleur. Manquerait plus qu'il perde conscience. Transporter une masse comme la sienne ne serait pas de la tarte. Qu'il reste éveillé, qu'il reste éveillé... ! Ah, il reprit la parole. Cela avait l'air d'aller, sur sa façon de s'exprimer. Attends, il posait quoi comme question là ? Merde, il ne pouvait y réchapper !
"Disons que... c'est assez compliqué. J'ai fait certains choix qui m'ont poussé un peu en dehors de mon chemin."
Vite, qu'il rebondisse, avant que le Limier ne se pose trop de questions !
"Mais on pourra en parler quand on aura cessé de jouer les poissons dans cette flotte, avec une bonne bière pour se rincer le gosier."
Cela lui laissera le temps de trouver une bonne réponse, car le Drakyn, il avait la nette impression qu'il ne lâcherait pas le morceau aussi facilement.
"Au fait, je suis Alaric Nordan."
Il lui tendit une main, bien trempée, les gouttes tombant du bout de ses doigts. Ah, et tiens, était-ce cela, la lumière de l'auberge là-bas ?
"Dis-moi qu'on est arrivé, que c'est bien l'auberge que tu parlais. Que ce n'est pas une hallucination de mon cerveau noyé !"
Patiemment, l'humain attendait que le Limier finisse sa propre introspection. Il ne pouvait faire que cela, maintenant qu'il était bien trempé. La pluie parachevait d'étendre son assaut humide aux autres parties vestimentaires sèches ; dans quelques minutes, elles ne le seront plus.
"Comme tu le dis, c'était la guerre... Réclamer réparation ou vengeance serait un peu puéril, non ?"
Et surtout une attitude complètement stupide. Tous les deux suivaient des causes qu'ils avaient crues être les meilleures à suivre, les meilleures à défendre. Maintenant, l'Empire était tenu par les Ryssen. Quelle ironie, n'empêche, d'avoir eu à croiser bien plus tard la route de Vaenys Draknys, qui eut provoqué sa déchéance... Comme si le destin lui avait imposé un avant-goût de ce qui aurait pu se passer s'il avait suivi la cause Draknys durant la guerre. Indirectement, Alaric effleurait la surface de ce que le puissant guerrier avait pu perdre... Oui, quel coup du sort. Il eut envie d'en rire jaune.
"Tu n'as pas à être désolé. Tu te battais pour tes idéaux. Il était normal de les défendre de toutes ses forces."
Et puis, la guerre s'était terminée, l'Empire s'était renforcé sous la poigne de fer de Tensaï. Les rebelles qui avaient tenté de poursuivre la lutte avaient été capturés ou tués...
"Et je pense qu'on ne serait surtout pas en train de se taper une bavette trempée..." Dit-il en souriant, se retenant de rire.
Ce qui n'était pas un mensonge en soi. Mais bon, il n'était pas venu en république pour faire du brigandage. Il était venu comme guérisseur itinérant, ce qui était parfait pour rester discret.
Quand le Limier lui demanda de le suivre, Alaric hésita. Le Drakyn était devenu Limier. Qu'avait-il fait de toutes ces années, depuis qu'il avait pris la décision de s'exiler ? Alaric leva les yeux vers les cieux, totalement orageux. Il s'était proposé de le soigner, non ? L'écailleux était républicain, il devait connaître le coin, logique ! Il se mit donc en marche après que l'invitation se fut renforcée d'un mouvement ample de la main du Drakyn. Il dut allonger la foulée pour le rattraper. Au nom de l'auberge, Alaric sentit l'espoir gonfler. Il n'y avait plus à espérer qu'elle n'était pas loin, cette providente auberge ! Son nom était aussi une belle invitation... chaleureuse. Le mage se sentit... ragaillardi. L'idée de pouvoir enfin se poser au sec, de manger chaud, de boire un alcool qui brûle bien les boyaux.
Un étrange silence, brisé par le tonnerre, s'était instauré entre les deux êtres. Le pas lourd du Drakyn brisait le son diffus de la pluie. L'humain lui jetait de temps en temps un coup d'œil, poussé par un minimum de vigilance, mais aussi pour s'assurer que la douleur qu'il subissait au flanc ne prenait pas de l'ampleur. Manquerait plus qu'il perde conscience. Transporter une masse comme la sienne ne serait pas de la tarte. Qu'il reste éveillé, qu'il reste éveillé... ! Ah, il reprit la parole. Cela avait l'air d'aller, sur sa façon de s'exprimer. Attends, il posait quoi comme question là ? Merde, il ne pouvait y réchapper !
"Disons que... c'est assez compliqué. J'ai fait certains choix qui m'ont poussé un peu en dehors de mon chemin."
Vite, qu'il rebondisse, avant que le Limier ne se pose trop de questions !
"Mais on pourra en parler quand on aura cessé de jouer les poissons dans cette flotte, avec une bonne bière pour se rincer le gosier."
Cela lui laissera le temps de trouver une bonne réponse, car le Drakyn, il avait la nette impression qu'il ne lâcherait pas le morceau aussi facilement.
"Au fait, je suis Alaric Nordan."
Il lui tendit une main, bien trempée, les gouttes tombant du bout de ses doigts. Ah, et tiens, était-ce cela, la lumière de l'auberge là-bas ?
"Dis-moi qu'on est arrivé, que c'est bien l'auberge que tu parlais. Que ce n'est pas une hallucination de mon cerveau noyé !"
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