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Citoyen du monde
Sylas
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"Alors, avez-vous trouvé quelqu'un ?"
Le garde opina, malgré une expression subtilement désapprobatrice qui laissait entendre qu'il ne cautionnait toujours pas l'idée. Plus il passait de temps près de cet ange, plus il découvrait des détails de sa personnalité que les rumeurs à Melorn n'avaient jamais dépeints.
L'entité monstrueuse née des Titans devenait une personne, avec des objectifs, des idées, des valeurs, et pourquoi pas des rêves enfouis quelque part sous une couche opaque de civilité. Au bal, il l'avait vu rigoureux, attentif, alerte, et très concerné par l'ange brune. Ce qui s'était passé entre eux n'avait pas dépassé des barrières qu'ils avaient bien voulu s'imposer, mais ce Sylas-là était plus accessible que celui de la Cité du Savoir.
Avec le forgeron, il s'était montré plus exigeant, implacable et un brin compréhensif. Une posture nécessaire pour le travail qu'il avait à accomplir, mais encore différente.
Et soudain, alors que le départ pouvait être annoncé à n'importe quel moment, il voulait faire un dernier crochet. En fait non, il était celui qui donnerait le signal de départ et retardait celui-ci encore un peu volontairement. Par altruisme ?
"Si vous n'êtes pas trop regardant sur la manière et l'individu, oui."
L'ambassadeur suspendit sa lecture pour croiser son regard. Il s'attendit à lire de la surprise dans ces yeux abyssaux, mais il n'en fut rien. Cet aspect-là de l'ange demeurait inconnu et il ignorait s'il avait bien fait ou non. Trouver un guide capable et disponible à la dérobée sans attirer non plus l'attention plus que nécessaire s'était révélé un exercice assez compliqué, mais en s'y prenant en groupe, les soldats y étaient parvenus.
"Néanmoins je préfèrerais rester avec vous. A deux ou trois ce serait encore mieux. La misère là-bas peut attirer les risques...
-Ces gens n'ont plus rien n'est-ce pas ?
-En effet.
-Qu'ai-je qui pourrait les attirer ? Nous n'utilisons pas d'or, c'est l'ambassade qui s'occupe de négocier les échanges de frais entre nations. Mon épée ? Je pourrais m'en servir avant qu'ils ne me la prennent. Je diminue mon escorte volontairement et je viens les voir pour prendre connaissance de leurs besoins. Ce serait idiot de leur part de tenter quelque chose. Ils y ont bien plus à perdre.
-Mais vous êtes bien bâti et en bonne santé. Ce qui sous-entend nourri, blanchi, riche au regard des plus désespérés. Et un animal acculé réfléchit plus à ce qu'il pourrait obtenir qu'à l'étendue des risques qu'il prend.
-C'est juste."
Les yeux de l'ange partirent dans une direction invisible tandis qu'il songeait à comment palier le gain qu'il pourrait représenter contre la menace de sa bonne santé. Le garde redoutait une nouvelle demande farfelue, lui souhaitait simplement reprendre la route pour rentrer au plus vite dans les terres nordiques.
"J'aimerais bien leur donner des vivres comme aux Veilleurs, mais il me faudrait l'aval du Conseil.
-Si je peux me permettre, je pense que nous arrivons au terme des fonds accordés pour le voyage. C'est ce que vous déclariez après le forgeron."
C'est gentil de votre part. Pourquoi les Shoumeiens l'intéressaient-ils autant ? L'ange recelait décidément bien des mystères. Avait-il une idée précise en tête ou s'agissait-il tout simplement de son caractère naturel ? Difficile à dire.
"Bien, ce sera mon dernier détour alors.
-Puis-je vous demander ce que vous attendez précisément ?
-Je souhaite voir l'état du monde. Je resterai discret pour ne pas vous rendre la tâche impossible.
-Merci de votre compréhension, ambassadeur.
-Je reste "bien bâti et en bonne santé", j'espère que cela ne sera pas de trop.
-C'est là que notre travail devient important !"
Il se surprit à sourire, sans réaction notable de Sylas. Là, il retrouvait l'indescriptible homme politique des hautes sphères. Une attitude qui aurait pu paraître plus froide à d'autres, mais bien plus facile à gérer. Il appréciait de pouvoir converser avec son supérieur pour obtenir de petits compromis. Certains n'en faisaient qu'à leur tête.
A l'heure dite, ils se retrouvèrent donc devant l'ambassade mélornoise à deux gardes et l'ange, ailes cachées comme à son habitude en-dehors de leur patrie. Les tabards apparents soulignaient bien qu'ils n'auraient aucune monnaie valable sur eux si l'on cherchait à les dérober. Sylas avait opté pour une simple cape de voyage élimée en plus, histoire d'avoir l'air d'un homme un peu moins haut placé dans la hiérarchie. Ils devaient retrouver là le guide chargé de leur montrer les zones de refuges shoumeiens, un tour des lieux sans prétentions avant de quitter Liberty.
"C'est le borgne là-bas."
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Hiraeth
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Pfff, ces soldats qui se croient tout permis.
Hiraeth les observe, ces gros lourdauds, interroger un pauvre type qui est venu là chercher des médocs pour sa femme.
D'autres se sont barrés discrètement quand ils les ont vu arriver. Pourtant ce sont des gardes d'ambassade, pas des officiers républicains, lesquels se gardent bien de foutre un panard ici.
Mais les pauvres gens ne font pas forcément la différence. Pour eux, c'est l'Autorité.
Celle qui les défend, mais aussi celle qui sépare soigneusement les beaux quartiers des bouges misérables où il vivent.
Déchargeant une nouvelle caisse de son chariot, il s'approche de la responsable du refuge qui observe la scène, et désigne les marioles en tabard.
« Ils vous ennuient, M'dame Bacri ? »
Elle tourne vers lui un regard un peu myope, en repliant nerveusement un vêtement qu'elle pose sur une pile.
« C'est pas vraiment qu'ils m'ennuient, mon garçon, c'est que mes petites ouailles ne viendront pas tant qu'ils seront là... »
Hiraeth dépose sa caisse et vient lui donner son bordereau de livraison.
« Qu'est-ce qu'ils veulent ? »
« Ils veulent un guide pour un de leurs supérieurs. Comme qui dirait une huile qui voudrait visiter le quartier shouméien... »
« Pourquoi faire ? »
La vieille femme hausse les épaules, tamponne le bordereau et lui rend.
« Qu'est-ce que j'en sais ? Si c'était autre chose qu'une ambassade, j'espérerais des subventions pour le refuge, des aides pour les plus misérables mais là... L'a p't'être envie de se faire peur. »
Elle reprend sa pile de vêtements pour la confier à une femme avec un enfant au bras et un autre accroché à sa jupe, qui la remercie dans un dialecte auquel le borgne ne pipe mot.
Intrigué, il fait un signe à Oko Jero qui supervise le déchargement en bossant un minimum (comme à son habitude) et s'avance vers les soldats, qui n'ont manifestement pas trouvé chaussure à leur pied et traînent du leur sur les pavés.
« B'soir, messieurs. J'peux vous aider ? »
Il touche son chapeau et utilise son air le plus amène, en espérant que ce soit suffisant.
« Bouge-toi, on est en retard. »
« Pfff, qu'est-ce que tu dis, on est pile à l'heure ! »
« C'est déjà trop tard, pour ce genre de poisson. »
Hiraeth s'avance vers l'ambassade de Melorn, un sac à l'aspect assez lourd sur l'épaule. Oko Jero le suit avec le même attirail. Si le Caravanier a conservé son manteau de cuir classique à l'aspect républicain, le Mage Noir est vêtu à la shouméienne, du moins selon les critères de sa tribu d'origine. Tunique noire, pantalon et bottes souples, tresses et colifichets, et encore il n'a pas abusé des peintures tribales.
Le Nomade aperçoit deux gardes qu'il reconnaît vaguement, encadrant un type qui les dépasse de deux têtes aisément. L'un des tabards le désigne au grand type, lequel pose sur leur arrivée des yeux d'une profondeur saisissante, d'un bleu profond peu courant. A l'avenant, silhouette athlétique, visage bien dessiné, cheveux dorés, bref, une très belle bête, reconnaît le Caravanier.
C'est lui le gratin qui veut se faire les bas-fonds ? C'est quoi au fait le bail, avec ces oreilles pointues et cette gueule d'ange ? Y'a clairement pas que de l'humain, sous cette cape incongrue qui ne colle pas avec le personnage.
Parvenu à portée du trio melornois, Hiraeth les salue d'un mouvement de tête et d'une courbette plus policée que sa tenue de baroudeur ne le laisse supposer.
« Salutations, messieurs ! Je suis à votre disposition. Nous partons quand vous le désirez.
J'ai même eu la chance de dégotter un interprète, qui saura faire le lien si nécessaire.
Ne faites pas trop attention à lui, il est un peu bougon mais c'est un homme de bien. »
Oko Jero darda sur lui un regard noir de ses yeux trop verts en grommelant. Hiraeth se tourna vers le spécimen particulièrement bien découplé et s'inclina derechef.
« Qu'est-ce que je vous avais dit. Je suis Hiraeth, embauché par la Fondation Liberté pour venir en aide aux démunis. Et lui, c'est Oko, shouméien d'origine. Enchanté. »
La sensation d'être proprement découpé en tranches fines par le regard de son presque-oncle n'avait pas de prix. Le mage détestait que l'on écourte son nom. Hiraeth conserva son grand sourire en s'imaginant sa tronche furibarde.
« Comment dois-je vous appeler ? »
Hiraeth râle en #ff9900
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Sylas
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"Un interprète ?"
Sylas laisse le drôle de larron soigner son entrée à sa manière, le détaille tandis qu'il semble jouer avec son comparse tout en mettant des formes assez naturelles dans sa présentation. D'aucuns pourraient dire que c'est un citoyen intégré qui a recruté un indigène ou quelque chose du même acabit, mais l'ange reconnaît le même procédé qu'il a utilisé chez Matthew. Ces deux-là travaillent régulièrement ensemble, peut-être même se connaissent plus que cela, et il sait jusqu'où il peut parler sans le froisser. Ce n'est pas un hasard s'ils sont venus à deux.
Pour le moment, ni l'un ni l'autre ne représente une menace ou un embarras quelconque, alors le diplomate ne relève pas mais il garde en mémoire de se méfier d'eux quand même. Ce sont des humains après tout. Sont-ils comme ceux d'autrefois, ou plus proches des suivants de X'o-rath ?
Les gardes sont dans l'attente de la réaction de leur mandataire. Ils avaient prévenu : ils ont trouvé qui ils pouvaient, et l'homme présente un minimum de manières appréciable. Leurs critères sont-ils suffisants, ça c'est une autre histoire. Alors ils ne disent rien, le temps que Sylas examine le duo face à lui. Respectant sa parole de ne pas mettre les elfes dans une posture délicate, fut-elle simplement un manque de crédibilité, l'ange ne souligne pas qu'il n'a aucun besoin de traduction. Même sans cela, ces gens savent-ils au moins que les anges sont omniglottes ? Les Melornois eux-mêmes sont-ils au courant ? Improbable.
"Salutations à vous deux. Je suis Sylas, ambassadeur de Melorn, et voici Lindon et Lorien. Se peut-il que les Shoumeiens soient si démunis qu'ils ne parlent même pas le langage Commun ? Et ces sacs que vous transportez... A quel usage sont-ils destinés ?
-Vous verrez. Je vous emmène sur ma tournée du matin.
-Votre tournée..."
Hiraeth avait esquissé un sourire en répondant, et son acolyte dans une moindre mesure semblait se réjouir du petit suspense qu'ils suscitaient. Ils avaient l'air quand même très chargés pour un guide et un interprète recrutés à l'improviste. Il faudrait faire attention, juste au cas où.
"Bien, messieurs, je vais aller à l'essentiel : c'est moi qui ai demandé votre collaboration, et je comprendrais parfaitement que vous demeuriez surpris par son contenu. Je souhaite observer de mes propres yeux les conditions de vie des réfugiés Shouméiens accueillis suite aux différents aléas de l'année passée. Je n'ai pour ainsi dire aucune légitimité à gérer leurs conditions de prise en charge, et même si je le voulais, ma délégation est présentement sur le départ, dans le cadre d'une autre entreprise que venons d'achever. Il ne faudra donc pas s'attendre à ce que subitement ma venue déclenche une prise de conscience ou quelque chose de cet ordre. Mais..."
Il fallait qu'il sache si les anges étaient les seuls dépositaires de la haine du monde à cause de leur descendance titanide, ou si la nature humaine était ainsi égoïste qu'elle refusait même à ses frères et sœurs des pays voisins le droit à la dignité et au secours. Il y avait certainement dans le lot de tous ces gens des Divinistes. Certains qui croyaient dans la parole encore pure d'avant les guerres. Certains qui s'en servaient pour rejeter leur impuissance et leur colère sur une cible toute désignée, afin d'espérer trouver dans cet exutoire un soulagement moral. Et d'autres gens... qui n'avaient absolument rien à voir avec tout cela.
"... j'aimerais constater par moi-même. Ne pas être influencé par les ragots et les communiqués officiels. J'espère que vous comprenez ma démarche et je compte sur vous."
Il y eut un instant de flottement, les gardes ne s'attendant pas nécessairement à une déclaration juste là, dans la rue devant l'ambassade. Ils n'objectèrent cependant rien du tout, attendant l'ordre de mise en marche.
"Bien, si tout le monde est d'accord je propose d'avancer dans ce cas. Après vous messieurs."
C'est donc ainsi que les cinq hommes se mirent en marche, empruntant d'abord les petites rues parallèles aux grandes places et aux avenues marchandes, avant de chevaucher petit à petit des endroits moins neufs, moins propres. On voyait progressivement l'état des bâtisses se dégrader, ainsi que celui de leurs occupants : du noble bien mis à son compère bourgeois auquel il manquait un bouton de chemise, puis au travailleur aux vêtements usés mais encore présentables, jusqu'aux mendiants assis à même le sol ou sur une nappe tellement trouée que cela revenait au même. Et tout cela, c'était Liberty, ils arrivaient tout doucement vers l'extérieur de la ville, où Sylas soupçonnait un agglomérat encore plus rudimentaire de cabanes aux matériaux récupérés.
A aucun moment il ne fit de commentaire. Son visage n'exprimait rien : ni dégoût, ni tristesse, ni supériorité, ni fierté. Rien qu'une expression lisse et vierge. Les elfes n'en furent pas surpris. Eux-mêmes préféraient s'abstenir de tout commentaire qui ternirait l'image de leur belle nation, même si par moments ils avaient des temps d'arrêt ou les dents serrées.
Sylas laisse le drôle de larron soigner son entrée à sa manière, le détaille tandis qu'il semble jouer avec son comparse tout en mettant des formes assez naturelles dans sa présentation. D'aucuns pourraient dire que c'est un citoyen intégré qui a recruté un indigène ou quelque chose du même acabit, mais l'ange reconnaît le même procédé qu'il a utilisé chez Matthew. Ces deux-là travaillent régulièrement ensemble, peut-être même se connaissent plus que cela, et il sait jusqu'où il peut parler sans le froisser. Ce n'est pas un hasard s'ils sont venus à deux.
Pour le moment, ni l'un ni l'autre ne représente une menace ou un embarras quelconque, alors le diplomate ne relève pas mais il garde en mémoire de se méfier d'eux quand même. Ce sont des humains après tout. Sont-ils comme ceux d'autrefois, ou plus proches des suivants de X'o-rath ?
Les gardes sont dans l'attente de la réaction de leur mandataire. Ils avaient prévenu : ils ont trouvé qui ils pouvaient, et l'homme présente un minimum de manières appréciable. Leurs critères sont-ils suffisants, ça c'est une autre histoire. Alors ils ne disent rien, le temps que Sylas examine le duo face à lui. Respectant sa parole de ne pas mettre les elfes dans une posture délicate, fut-elle simplement un manque de crédibilité, l'ange ne souligne pas qu'il n'a aucun besoin de traduction. Même sans cela, ces gens savent-ils au moins que les anges sont omniglottes ? Les Melornois eux-mêmes sont-ils au courant ? Improbable.
"Salutations à vous deux. Je suis Sylas, ambassadeur de Melorn, et voici Lindon et Lorien. Se peut-il que les Shoumeiens soient si démunis qu'ils ne parlent même pas le langage Commun ? Et ces sacs que vous transportez... A quel usage sont-ils destinés ?
-Vous verrez. Je vous emmène sur ma tournée du matin.
-Votre tournée..."
Hiraeth avait esquissé un sourire en répondant, et son acolyte dans une moindre mesure semblait se réjouir du petit suspense qu'ils suscitaient. Ils avaient l'air quand même très chargés pour un guide et un interprète recrutés à l'improviste. Il faudrait faire attention, juste au cas où.
"Bien, messieurs, je vais aller à l'essentiel : c'est moi qui ai demandé votre collaboration, et je comprendrais parfaitement que vous demeuriez surpris par son contenu. Je souhaite observer de mes propres yeux les conditions de vie des réfugiés Shouméiens accueillis suite aux différents aléas de l'année passée. Je n'ai pour ainsi dire aucune légitimité à gérer leurs conditions de prise en charge, et même si je le voulais, ma délégation est présentement sur le départ, dans le cadre d'une autre entreprise que venons d'achever. Il ne faudra donc pas s'attendre à ce que subitement ma venue déclenche une prise de conscience ou quelque chose de cet ordre. Mais..."
Il fallait qu'il sache si les anges étaient les seuls dépositaires de la haine du monde à cause de leur descendance titanide, ou si la nature humaine était ainsi égoïste qu'elle refusait même à ses frères et sœurs des pays voisins le droit à la dignité et au secours. Il y avait certainement dans le lot de tous ces gens des Divinistes. Certains qui croyaient dans la parole encore pure d'avant les guerres. Certains qui s'en servaient pour rejeter leur impuissance et leur colère sur une cible toute désignée, afin d'espérer trouver dans cet exutoire un soulagement moral. Et d'autres gens... qui n'avaient absolument rien à voir avec tout cela.
"... j'aimerais constater par moi-même. Ne pas être influencé par les ragots et les communiqués officiels. J'espère que vous comprenez ma démarche et je compte sur vous."
Il y eut un instant de flottement, les gardes ne s'attendant pas nécessairement à une déclaration juste là, dans la rue devant l'ambassade. Ils n'objectèrent cependant rien du tout, attendant l'ordre de mise en marche.
"Bien, si tout le monde est d'accord je propose d'avancer dans ce cas. Après vous messieurs."
C'est donc ainsi que les cinq hommes se mirent en marche, empruntant d'abord les petites rues parallèles aux grandes places et aux avenues marchandes, avant de chevaucher petit à petit des endroits moins neufs, moins propres. On voyait progressivement l'état des bâtisses se dégrader, ainsi que celui de leurs occupants : du noble bien mis à son compère bourgeois auquel il manquait un bouton de chemise, puis au travailleur aux vêtements usés mais encore présentables, jusqu'aux mendiants assis à même le sol ou sur une nappe tellement trouée que cela revenait au même. Et tout cela, c'était Liberty, ils arrivaient tout doucement vers l'extérieur de la ville, où Sylas soupçonnait un agglomérat encore plus rudimentaire de cabanes aux matériaux récupérés.
A aucun moment il ne fit de commentaire. Son visage n'exprimait rien : ni dégoût, ni tristesse, ni supériorité, ni fierté. Rien qu'une expression lisse et vierge. Les elfes n'en furent pas surpris. Eux-mêmes préféraient s'abstenir de tout commentaire qui ternirait l'image de leur belle nation, même si par moments ils avaient des temps d'arrêt ou les dents serrées.
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Hiraeth
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Eh ben, encore un beau bourge plein de belles intentions.
Le Nomade entama son travail d'un pas vif, entraînant dans son sillage les deux gardes elfes, le beau mec beaucoup trop grand pour passer inaperçu et un Oko Jero bougonnant qui crache un peu les abus de fumette. Tant mieux.
Alors comme ça, il voulait voir les conditions réelles de vie des réfugiés shouméiens, hein ?
Ça tombe bien, y'avait du gratiné ce matin.
Sortant une liste de sa poche, il la consulte en descendant vers une place ornée d'une fontaine vide, au fond gelé. Il oblique dans les ruelles étroites, à droite, et réfléchit à son itinéraire.
Puis il replie sa liste et ralentit le pas pour laisser l'ambassadeur, ce...Sylas, parvenir à portée d'oreille.
« Liberty n'est peut-être pas exactement représentative de l'accueil des shouméiens en république. Elle a subi une lourde attaque du Titan Kaiyo cette année, comme vous en êtes sans doute informé, et il lui a fallu des mois de reconstruction et de misère, si bien que même les plus riches libertéens ont vu leurs conditions de vie dégradées.
Tout le monde en a subi les affres, et il demeure encore des endroits de la cité où les fondations ont pu être fragilisées. Les maladies dues à l'eau stagnante ont proliféré, les ressources sont devenues chères, ceux qui ne pouvaient pas partir se sont retrouvés logés n'importe où.
Les blessés, les malades ont rempli les refuges, comme celui de Madame Bacri, où vos gardes m'ont recruté.
Ceux en bonne santé, eh bien... Ils ont rempli les taudis à la sortie de la ville.
Heureusement, la reconstruction a employé énormément de ces gens, leur fournissant un salaire suffisant pour survivre cette année, et pourvoir aux besoins de leurs proches.
Mais la reconstruction est finie... »
A force d'emprunter des rues étroites, ils ne voient plus le soleil. L'odeur est devenu piquante, mélange d'urine âcre, de moisi et de déchets en décomposition. L'un des soldats fait un écart lorsqu'un rat sort d'un carton tout près de ses bottes.
Hiraeth reprend, obliquant à nouveau dans une ruelle en pente, dont la déclivité est ponctué par les marches pavées d'un escalier glissant.
« Après, beaucoup ont dû faire par eux-même. Malgré tout, l'événement a laissé pas mal d'invalides derrière lui. Heureusement qu'en République on a pas mal d'organismes, de fondations, d'organisations à but non-lucratif qui sont là uniquement pour venir en aide aux plus démunis. Mais bon, les bénévoles ne sont pas nombreux et s'épuisent vite, et l'argent se dépense plus vite que ce qu'il ne rentre dans les caisses. »
Il s'arrête sous un linteau bas, frappe à la porte et entre au signal donné par une voix féminine.
Ils entrent dans une pièce presque borgne, comportant une fenêtre étroite, probablement une ancienne cave à en juger par les étagères encore présentes le long des murs. Un âtre brûle une bûche presque en cendres, auprès de laquelle se réchauffe une vieille endormie dans un fauteuil usé, sous une couverture.
Une table, trois chaises complètent l'ameublement, où une gamine éthique épluche des navets fripés pendant qu'une femme remue un bouillon sur le feu. Tout est propre, mais dans un état d'usure avancé. Des grappes d'ail et d'herbes pendent en bouquet, au plafond.
Dans un coin, sur un matelas posé sur un châlit bas, deux gamins se chamaillent et l'arrivée de tout ce monde les fait sursauter et se rencogner dans un coin, chuchotant entre eux avec de petits rires.
Elle a un geste de recul en voyant entrer l'être si grand qu'il doit rester courbé sous son plafond.
Oko Jero la rassure en se rapprochant d'elle, lui passant la main dans le dos et lui chuchotant quelque explication. Hiraeth dépose son sac sur la table, et les gamins s'approchent. Il l'ouvre et fait rouler quelques pommes sur la table, dont ils s'emparent en riant, suivi par leur sœur qui lâche son couteau pour mordre dans un fruit.
« Jessenaï a perdu son mari sur un des chantiers de reconstruction. Son frère a été emporté par le choléra, et sa mère a failli mourir d'une infection de poitrine. La voilà à tenir la famille avec son aîné, qui doit être au travail à cette heure-ci. Le gosse a quoi, seize ans, mais c'est un bosseur. Avec Madame Bacri, on a réussi à lui trouver un apprentissage, histoire qu'il finisse pas comme son père.
Tous n'ont pas cette chance, malheureusement. »
Il sort un flacon de son sac, quelques boîtes en carton. Un gilet un peu chaud, qu'il confie à la gamine rougissante. La femme s'approche, s'essuyant les mains sur son tablier, et inspecte les boîtes. Elle parle un Commun hésitant, ils échangent manifestement des consignes pour l'utilisation des médicaments.
Oko Jero ausculte la mémé, qui s'est réveillée et dont le regard farouche s'est croché sur Sylas avec une acuité dérangeante. Il lui adresse quelques paroles lénifiantes dans un dialecte shouméien, elle lui répond dans un discours un peu décousu, quelques mots qui n'ont guère de sens ici et ne seront compris que par le Mage Noir, Jessenaï et l'Ambassadeur :
« Le Servant de nos Dieux... L'Originel... Oh, mes pauvres dieux, comme on traite notre Foi ici... »
Elle lève un doigt tremblant vers Sylas.
« Vous devez savoir... Vous devez savoir !... »
Jessenaï intervient, calmant la vieille femme, lui confiant un verre d'eau et quelques pilules, et s'excuse auprès de l'ambassadeur.
« Excusez-la, Monseigneur, elle n'a... elle n'a plus toute sa tête, depuis la mort de son fils. »
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Sylas
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Les Titans. Encore et toujours. Sylas ne pouvait pas y échapper, même s'il ne leur accordait plus aucun crédit, même si sa vie avait été un enfer de torture par leur seule réputation. De fait, il s'intéressait d'assez près à ce qui les concernait, pas pour s'en féliciter ou approuver, bien au contraire. C'était presque une façon de se renouveler le dégoût et le mépris qu'il nourrissait à leur encontre, de garder la plaie ouverte afin de se remémorer la douleur et les erreurs à ne pas commettre. Oui, il savait pour Kaiyo. Peut-être pas tous les détails exacts sur le nombre de morts, l'étendue des dégâts, les maladies, mais il avait lu ce qui avait pu lui tomber sous la main. Et c'était pour compléter ces informations lacunaires qu'il voulait poser un regard sur ces gens que d'autres ignoraient.
"J'imagine que d'autres y ont déjà pensé, mais ne serait-il pas possible de déblayer une parcelle fertile pour créer une sorte de potager collectif, où en plus d'employer quelques personnes, ils pourraient produire de la nourriture et ne pas dépendre de la loi du marché ?"
Pour l'eau c'était plus compliqué. Des élémentalistes pouvaient éventuellement la filtrer, mais y en avait-il parmi les réfugiés ? Et même en admettant que oui, la quantité de mana et de fatigue ne couvrirait pas tous les bas-fonds pour sûr. Il faudrait penser à un moyen plus naturel et conventionnel de purifier l'eau pour abreuver la population.
Ils poursuivirent en silence et Sylas ne fit aucun commentaire sur l'odeur, bien qu'elle le dérangeait. Il n'avait pas le droit de se plaindre alors que les gens ici crevaient dans cette atmosphère insalubre, quand lui profitait d'un foyer isolé bien au chaud dans une bulle difficilement accessible au reste du monde. Melorn avait été dure et il avait longuement travaillé, mais il se rendait compte qu'il jouissait à présent d'un confort bien supérieur à beaucoup d'endroits. Lorsqu'il s'était rendu compte de cette réalité, il avait conclu qu'il fallait qu'il quitte un peu le dôme protecteur pour aller voir le monde à l'extérieur, pour être réellement utile. Et depuis quelques mois qu'il entretenait ces multiples voyages, il confirmait son jugement. La ville des elfes passait en priorité, mais il faudrait ensuite regarder dans toutes les nations pour apercevoir les contours noircis de pourriture apportés par la civilisation.
Entrés dans cette nouvelle demeure, l'ange constata au premier coup d’œil les faiblesses de la structure, l'usure, la pauvreté. Il serra discrètement le poing sous sa cape.
Pendant que l'interprète expliquait le pourquoi de leur apparition, il resta près de l'entrée flanqué des deux elfes, esquissa un petit geste de la main envers les têtes curieuses et rieuses retranchées dans leur petit coin. Puis cette femme, faible et recroquevillée. Il dut se faire violence pour attendre la traduction d'Oko Jero, alors qu'il avait pertinemment saisi chacun des mots avec une terrible authenticité.
Perçoit-elle ma nature angélique ? Il faut que je fasse attention. Que je la traite comme une vieille dame à moitié sénile. Pardonnez-moi, enfant à la foi si pure.
Parce qu'il avait perdu toute confiance dans les Titans, le déchu ne se risqua pas à citer un texte sacré ou une prière diviniste, mais il lui sembla injuste de poignarder le regard de la vieille qui cherchait seulement la lumière. S'il n'y avait jamais eu ces batailles, peut-être se serait-il retrouvé face à elle en figure d'adoration plutôt que de la fuir. Qu'il le voulût ou non, les anges véhiculaient toujours cette image. Alors, il s'approcha doucement, s'agenouilla de toute sa haute taille à son niveau, prit la main qu'elle tendait vers lui entre les siennes et l'embrassa en toute humilité. D'un regard, il lui adressa une sincère prière de rétablissement, ou au minimum, de paix. Qu'elle puisse partir le cœur plus léger quand viendrait le moment.
"Vous avez des mains magnifiques, Madame. Je sens qu'elles ont beaucoup travaillé, et je devine que ce fut pour vos enfants et le reste de votre famille. Cela ne fut pas en vain. Votre fils parti avant vous doit être extrêmement fier là où il est. Je souhaite que chacun d'entre vous trouve la force de se battre encore, et parvienne à une vie décente et digne, entouré des siens."
Il garda encore un peu ses paumes dans les siennes, la mémé s'accrochant à lui avec un soudain espoir bien qu'elle n'ait vraisemblablement pas tout compris. Oko Jero traduisit et alors le visage ridé s'étira en un sourire auquel il manquait des dents. Il se sépara alors d'elle, et en tournant la tête vers Jessenai qui s'excusait, son regard surprit les cordons d'une bourse rapidement passée de main en main. Un pot-de-vin pour avoir joué la comédie ? Une aide réelle à la famille ? Peu importait en fin de compte, tant qu'elle avait un peu d'argent pour essayer de se tirer de sa situation actuelle.
"Nul besoin de donner du Monseigneur, je ne suis pas si important. Je crois que vous avez fort à faire, alors si tout est en ordre pour Hiraeth nous allons vous laisser tranquilles. Merci de nous avoir reçus quelques instants."
Il s'inclina -un peu plus que la hauteur de plafond le forçait déjà à le faire-, eut un dernier signe de tête pour la mémé, puis sortit ainsi que ses gardes, songeurs. Un coup de tonnerre gronda et presque aussitôt des gouttes fines se mirent à tomber en un rideau de pluie continue. Allons bon.
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Hiraeth
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Ah bah ça alors.
Le Nomade et le Mage échangèrent un regard dans le dos de l'ambassadeur, alors qu'il courbait sa haute stature pour sortir de la pièce. Jessenai avait l'air inquiet. Oko Jero la rassura rapidement, alors que le Nomade passait la porte, après avoir chargé de nouveau son sac sur l'épaule.
Son humeur changea lorsqu'il constata la pluie battante qui lavait le pavé.
« Allons-y ! »
Il enchaîna au bas de la rue, s'engouffrant à droite pour suivre l'irrégularité d'un chemin de terre en hauteur, rejoignant un entassement de bric et de broc, planches, murets en pierres sèches, toiles coupant de la pluie les silhouettes vivant dessous. Sa silhouette dégingandée s'amusa à suivre le bord du chemin, en surplomb du vide, pour zieuter le chantier en-dessous.
Des gens s'activaient malgré la pluie à monter un mur, apparemment ici un nouveau quartier allait bientôt émerger du sol. Hiraeth siffle et salue du bras, et ils abandonnent leur ouvrage pour se rassembler sous une toile épaisse tendue entre trois pans de mur, où sont groupés quelques bancs, deux tables et un fourneau à bois. Ça semble être leur cantine. Deux vieilles femmes dans un coin touillent une soupe épaisse et y ajoutent des légumes malgré l'heure matinale. Ça sent le poireau, le café et la poussière.
Hiraeth échange quelques poignées de main tandis que le reste du groupe le rejoignit.
« C'est l'heure de la distrib' les gars ! »
« Tu veux un cafton, Nomade ? »
« Volontiers, ça pèle. »
« Hé Nomade ! Tu viendras voir les travaux plus loin ? On a fini les fondations. »
« Plus tard ! Faudra que vous me disiez si vous avez encore besoin de toiles. Aujourd'hui, j'ai autre chose à gérer. Je vous présente Sylas, un ambassadeur melornois. Il voudrait connaître un peu votre situation de visu, Alors si vous voulez bien répondre à ses questions... C't'un chic type. »
Les yeux se levèrent vers la silhouette haute, pendant qu'Hiraeth distribue d'autres boîtes en carton, des sacs de charpie médicale, des flacons. On leur apporte à chacun d'entre eux une tasse toute simple contenant un liquide noir et amer.
Il y a là des hommes et des femmes de tout âge, assez valides pour les travaux de chantiers, malgré des extrémités manquantes à quelques-uns. Quelques dents noires, des fringues pas bien couvrantes, mais dans l'ensemble ils sont tous chaussés et équipés correctement pour faire leur job.
Le terrain vague à l'entrée duquel ils se trouvent semble avoir été un bout de quartier démoli après le drame de janvier. Des amoncellements de pierre sont réemployés pour permettre l'émergence de nouveaux murs. Des empilements de tuiles sont couverts par des bâches à quelques mètres d'eux.
Un peu plus loin, des baraquements provisoires, des tentes sur la terre battue semble accueillir leurs familles. Une troupe de gamins passe en courant, tapant dans ce qui ressemble à une boule de chiffons.
Ils n'ont que faire de la pluie, et rient en jouant, boue aux pieds et ciel ouvert sur leurs nuques.
Hiraeth adresse un sourire encourageant à Sylas, tandis qu'un homme carré, dans la cinquantaine, à la moustache tombante et au regard solide, se démarque du groupe pour prendre la parole.
« Bienvenue aux futurs Vergers, Monsieur l'Ambassadeur. Ici on construit un espace pour nos familles, grâce à l'aide de la commune et des organisations caritatives. Un nouveau foyer. Vous voulez savoir quoi, au juste ? »
Le Nomade et le Mage échangèrent un regard dans le dos de l'ambassadeur, alors qu'il courbait sa haute stature pour sortir de la pièce. Jessenai avait l'air inquiet. Oko Jero la rassura rapidement, alors que le Nomade passait la porte, après avoir chargé de nouveau son sac sur l'épaule.
Son humeur changea lorsqu'il constata la pluie battante qui lavait le pavé.
« Allons-y ! »
Il enchaîna au bas de la rue, s'engouffrant à droite pour suivre l'irrégularité d'un chemin de terre en hauteur, rejoignant un entassement de bric et de broc, planches, murets en pierres sèches, toiles coupant de la pluie les silhouettes vivant dessous. Sa silhouette dégingandée s'amusa à suivre le bord du chemin, en surplomb du vide, pour zieuter le chantier en-dessous.
Des gens s'activaient malgré la pluie à monter un mur, apparemment ici un nouveau quartier allait bientôt émerger du sol. Hiraeth siffle et salue du bras, et ils abandonnent leur ouvrage pour se rassembler sous une toile épaisse tendue entre trois pans de mur, où sont groupés quelques bancs, deux tables et un fourneau à bois. Ça semble être leur cantine. Deux vieilles femmes dans un coin touillent une soupe épaisse et y ajoutent des légumes malgré l'heure matinale. Ça sent le poireau, le café et la poussière.
Hiraeth échange quelques poignées de main tandis que le reste du groupe le rejoignit.
« C'est l'heure de la distrib' les gars ! »
« Tu veux un cafton, Nomade ? »
« Volontiers, ça pèle. »
« Hé Nomade ! Tu viendras voir les travaux plus loin ? On a fini les fondations. »
« Plus tard ! Faudra que vous me disiez si vous avez encore besoin de toiles. Aujourd'hui, j'ai autre chose à gérer. Je vous présente Sylas, un ambassadeur melornois. Il voudrait connaître un peu votre situation de visu, Alors si vous voulez bien répondre à ses questions... C't'un chic type. »
Les yeux se levèrent vers la silhouette haute, pendant qu'Hiraeth distribue d'autres boîtes en carton, des sacs de charpie médicale, des flacons. On leur apporte à chacun d'entre eux une tasse toute simple contenant un liquide noir et amer.
Il y a là des hommes et des femmes de tout âge, assez valides pour les travaux de chantiers, malgré des extrémités manquantes à quelques-uns. Quelques dents noires, des fringues pas bien couvrantes, mais dans l'ensemble ils sont tous chaussés et équipés correctement pour faire leur job.
Le terrain vague à l'entrée duquel ils se trouvent semble avoir été un bout de quartier démoli après le drame de janvier. Des amoncellements de pierre sont réemployés pour permettre l'émergence de nouveaux murs. Des empilements de tuiles sont couverts par des bâches à quelques mètres d'eux.
Un peu plus loin, des baraquements provisoires, des tentes sur la terre battue semble accueillir leurs familles. Une troupe de gamins passe en courant, tapant dans ce qui ressemble à une boule de chiffons.
Ils n'ont que faire de la pluie, et rient en jouant, boue aux pieds et ciel ouvert sur leurs nuques.
Hiraeth adresse un sourire encourageant à Sylas, tandis qu'un homme carré, dans la cinquantaine, à la moustache tombante et au regard solide, se démarque du groupe pour prendre la parole.
« Bienvenue aux futurs Vergers, Monsieur l'Ambassadeur. Ici on construit un espace pour nos familles, grâce à l'aide de la commune et des organisations caritatives. Un nouveau foyer. Vous voulez savoir quoi, au juste ? »
Hiraeth râle en #ff9900
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- Agilité & Précision P2, Vue Augmentée P2, Pétrification, Invisibilité, Nyctalopie
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Sylas
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Le trio mélornois suivait ses guides de près, tâchant d'éviter les trous dans la route et les dalles mal positionnées. L'ange alla jusqu'à longer la bordure de muret à la manière d'Hiraeth, le vide ne l'ayant jamais effrayé ou fait vaciller. Au contraire, c'était en quelque sorte son domaine, son royaume : un territoire qu'anges, oiseaux et autres créatures ailées parcouraient sans cesse en toute liberté. Les soldats, un peu plus prudents avec leurs armures, se contentèrent de suivre Oko Jero en parallèle.
"Un "cafton" ?"
Intrigué, Sylas se rapprocha du caravanier de façon à ne pas avoir à hausser la voix pour couvrir le bruit de la pluie. Il comprenait le mot, et savait qu'il ne pouvait en être autrement grâce au don de langage inné accordé aux anges. Mais sa signification profonde aux yeux de ses gens lui échappait, fait suffisamment rare pour qu'il s'y intéresse de plus près.
"Pourquoi vous appellent-ils tous Nomade ? Est-ce une façon de se reconnaître que d'appeler les gens par leur fonction ici ? Ou un moyen de retenir votre visage sans avoir besoin de votre nom ?"
Le grand blond se demanda en toute innocence s'il allait se faire appeler "Ambassadeur" à tous bouts de champ, puis réalisa que c'était quelque part déjà le cas, comme marque de respect et de distinction entre élites, voire classes supérieures et moyennes. Mais de la part des petites gens ? Voilà qui contrastait étrangement avec l'image qu'il s'en faisait. Il réalisa alors qu'il suivait un stéréotype qu'on avait intégré à son inconscient -à l'inconscient collectif-, et résolut de le briser aussi net en discutant avec les ouvriers aussi naturellement que possible.
Se laissant guider tout en évaluant les risques innombrables de chutes, de blessures, d'attaques en tous genres, de maladies, il fut de nouveau étonné lorsque le borgne le qualifia de "chic type". C'était... gentil. Depuis le début de leur petite escapade, Hiraeth avait semblé le considérer avec défiance, probablement comme un noble arrogant et excentrique, de la façon que Sylas avait méjugé les résidents des lieux sur leur image véhiculée dans tout Sekai. Force était de constater qu'il révisait son opinion, tout comme le blond la sienne. Alors, toujours à l'affût de découvertes et d'authenticité, l'ange prit la tasse qu'on lui tendait avec circonspection tout d'abord, pensif.
"Le cafton ?"
Il n'avait aucun besoin de boire ni de manger, mais cela les humains ne le savaient pas. Le liquide était brûlant, rendant la tasse de même, mais c'était agréable avec ce temps. Et puis, les gardes attendaient son signal. S'ils s'étaient fait duper, c'était l'occasion parfaite pour les achever. Mais y avait-il un intérêt à cela ? Melorn n'avait rien infligé aux Shoumeiens. C'était même l'occasion de s'en rapprocher. Et en même temps...
"Vous aimez pas ça ? 'Pouvez le dire, on le filera à quelqu'un d'autre, hein.
-N-Non, en fait je n'en ai jamais goûté...
-Ah ben c'pas banal ça ! Q'u'est-c'qu'vous attendez alors ?? Y va refroidir !
-"C'est juste que... récemment à Melorn..."
Des ambassadeurs se sont fait empoisonner. Sauf que c'étaient des ambassadeurs Reikois, empoisonnés par des elfes. Il était donc plutôt indiqué de ne pas mentionner cette anecdote.
"Bon, je me lance."
Mobiliser tous ses sens pour saisir au mieux l'expérience. Le toucher, pas de problème. La vue aussi. L'ouïe a priori c'était inutile. Restait donc à humer le breuvage, puis à le boire et savourer toutes les nuances qui viendraient se poser sur la langue et le palais. Sylas procéda.
"C'est effroyablement amer !"
Plusieurs personnes éclatèrent de rire, néanmoins par égard pour leurs maigres ressources, le grand blond fit l'effort de poursuivre sa dégustation, un peu grimaçante par moments. Fort heureusement un homme s'avança pour en revenir au sujet de sa visite, lui laissant un temps de pause et de réflexion mérité. Sylas avait réfléchi en chemin à ce qu'il pourrait dire si on lui demandait ses intentions, étoffer la réponse qu'il avait donnée aux deux guides en tout début de rencontre, puis dans la maison de la mémé. Ses yeux s'ouvraient déjà sur la misère et le dénuement de ces personnes, sur les efforts qu'elles déployaient à survivre dans un monde qui les négligeait, voire les méprisait.
"Eh bien, il y a des raisons un peu égoïstes. Melorn a subi une attaque récemment, et pour être tout à fait honnête, je cherche un exemple à suivre pour orienter la reconstruction dans le bon sens. M'inspirer d'un endroit qui connaît une situation un peu similaire pour en tirer les meilleurs enseignements. Mais ce n'est pas le but principal. J'ai fait la connaissance des Veilleurs de l'aube, peut-être en avez-vous entendu parler ? Ce sont des Shoumeiens comme vous. Ils se battent pour repousser l'influence de la corruption dans le monde, et reprendre leurs droits sur le territoire dévasté par les Titans. Pour le peu que j'en ai vu, c'est une lutte à long terme profitable et souhaitable pour tous. Je me demandais cependant ce qu'il en était des Shoumeiens qui avaient choisi de quitter leurs foyers d'origine. Avez-vous été bien reçus en République ? Y a-t-il eu des mauvais traitements à votre égard ? Plus particulièrement auprès des éventuels pratiquants du divinisme... Venus du pays d'où a émergé l'Arbre-Monde, dans une région sinistrée par Kaiyo... Ce doit être une situation forcément difficile et compliquée à vivre. Comment l'appréhendez-vous ? Au-delà du matériel, quelles sont vos conditions de vie morales, sociales, religieuses ? J'ai conscience d'être à vos yeux un parfait étranger dont la visite n'arrangera en rien les choses, et je ne cache pas que mes moyens en ce sens sont limités. De même, si mes questions trop indiscrètes, je comprendrais que vous refusiez d'y répondre. J'essaie juste... de voir les choses telles qu'elles sont réellement. Sans filtre ni barrière."
Suis-je le seul à porter un fardeau aussi écrasant ?
"Un "cafton" ?"
Intrigué, Sylas se rapprocha du caravanier de façon à ne pas avoir à hausser la voix pour couvrir le bruit de la pluie. Il comprenait le mot, et savait qu'il ne pouvait en être autrement grâce au don de langage inné accordé aux anges. Mais sa signification profonde aux yeux de ses gens lui échappait, fait suffisamment rare pour qu'il s'y intéresse de plus près.
"Pourquoi vous appellent-ils tous Nomade ? Est-ce une façon de se reconnaître que d'appeler les gens par leur fonction ici ? Ou un moyen de retenir votre visage sans avoir besoin de votre nom ?"
Le grand blond se demanda en toute innocence s'il allait se faire appeler "Ambassadeur" à tous bouts de champ, puis réalisa que c'était quelque part déjà le cas, comme marque de respect et de distinction entre élites, voire classes supérieures et moyennes. Mais de la part des petites gens ? Voilà qui contrastait étrangement avec l'image qu'il s'en faisait. Il réalisa alors qu'il suivait un stéréotype qu'on avait intégré à son inconscient -à l'inconscient collectif-, et résolut de le briser aussi net en discutant avec les ouvriers aussi naturellement que possible.
Se laissant guider tout en évaluant les risques innombrables de chutes, de blessures, d'attaques en tous genres, de maladies, il fut de nouveau étonné lorsque le borgne le qualifia de "chic type". C'était... gentil. Depuis le début de leur petite escapade, Hiraeth avait semblé le considérer avec défiance, probablement comme un noble arrogant et excentrique, de la façon que Sylas avait méjugé les résidents des lieux sur leur image véhiculée dans tout Sekai. Force était de constater qu'il révisait son opinion, tout comme le blond la sienne. Alors, toujours à l'affût de découvertes et d'authenticité, l'ange prit la tasse qu'on lui tendait avec circonspection tout d'abord, pensif.
"Le cafton ?"
Il n'avait aucun besoin de boire ni de manger, mais cela les humains ne le savaient pas. Le liquide était brûlant, rendant la tasse de même, mais c'était agréable avec ce temps. Et puis, les gardes attendaient son signal. S'ils s'étaient fait duper, c'était l'occasion parfaite pour les achever. Mais y avait-il un intérêt à cela ? Melorn n'avait rien infligé aux Shoumeiens. C'était même l'occasion de s'en rapprocher. Et en même temps...
"Vous aimez pas ça ? 'Pouvez le dire, on le filera à quelqu'un d'autre, hein.
-N-Non, en fait je n'en ai jamais goûté...
-Ah ben c'pas banal ça ! Q'u'est-c'qu'vous attendez alors ?? Y va refroidir !
-"C'est juste que... récemment à Melorn..."
Des ambassadeurs se sont fait empoisonner. Sauf que c'étaient des ambassadeurs Reikois, empoisonnés par des elfes. Il était donc plutôt indiqué de ne pas mentionner cette anecdote.
"Bon, je me lance."
Mobiliser tous ses sens pour saisir au mieux l'expérience. Le toucher, pas de problème. La vue aussi. L'ouïe a priori c'était inutile. Restait donc à humer le breuvage, puis à le boire et savourer toutes les nuances qui viendraient se poser sur la langue et le palais. Sylas procéda.
"C'est effroyablement amer !"
Plusieurs personnes éclatèrent de rire, néanmoins par égard pour leurs maigres ressources, le grand blond fit l'effort de poursuivre sa dégustation, un peu grimaçante par moments. Fort heureusement un homme s'avança pour en revenir au sujet de sa visite, lui laissant un temps de pause et de réflexion mérité. Sylas avait réfléchi en chemin à ce qu'il pourrait dire si on lui demandait ses intentions, étoffer la réponse qu'il avait donnée aux deux guides en tout début de rencontre, puis dans la maison de la mémé. Ses yeux s'ouvraient déjà sur la misère et le dénuement de ces personnes, sur les efforts qu'elles déployaient à survivre dans un monde qui les négligeait, voire les méprisait.
"Eh bien, il y a des raisons un peu égoïstes. Melorn a subi une attaque récemment, et pour être tout à fait honnête, je cherche un exemple à suivre pour orienter la reconstruction dans le bon sens. M'inspirer d'un endroit qui connaît une situation un peu similaire pour en tirer les meilleurs enseignements. Mais ce n'est pas le but principal. J'ai fait la connaissance des Veilleurs de l'aube, peut-être en avez-vous entendu parler ? Ce sont des Shoumeiens comme vous. Ils se battent pour repousser l'influence de la corruption dans le monde, et reprendre leurs droits sur le territoire dévasté par les Titans. Pour le peu que j'en ai vu, c'est une lutte à long terme profitable et souhaitable pour tous. Je me demandais cependant ce qu'il en était des Shoumeiens qui avaient choisi de quitter leurs foyers d'origine. Avez-vous été bien reçus en République ? Y a-t-il eu des mauvais traitements à votre égard ? Plus particulièrement auprès des éventuels pratiquants du divinisme... Venus du pays d'où a émergé l'Arbre-Monde, dans une région sinistrée par Kaiyo... Ce doit être une situation forcément difficile et compliquée à vivre. Comment l'appréhendez-vous ? Au-delà du matériel, quelles sont vos conditions de vie morales, sociales, religieuses ? J'ai conscience d'être à vos yeux un parfait étranger dont la visite n'arrangera en rien les choses, et je ne cache pas que mes moyens en ce sens sont limités. De même, si mes questions trop indiscrètes, je comprendrais que vous refusiez d'y répondre. J'essaie juste... de voir les choses telles qu'elles sont réellement. Sans filtre ni barrière."
Suis-je le seul à porter un fardeau aussi écrasant ?
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Hiraeth
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Alignement: Chaotique neutre
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Hiraeth décocha son grand sourire de renard à l'ambassadeur, constatant qu'il se dégèle, qu'il laisse sourdre sa curiosité, et la question du grand baraqué l'amuse fort.
« Disons que c'est plutôt un titre. J'en possède plusieurs, mais celui-ci est mon préféré. Parce que les gens qui le prononcent ont le sourire. Il existe même une comptine à mon nom quelque part, que les gamins racontent pour quelques piécettes. »
Oko Jero derrière l'ambassadeur lève les yeux au ciel d'un air blasé. Il a encore du mal à se faire aux largesses du fameux Nomade envers les populations défavorisées. Il en reconnaît la valeur, mais ça coince quand arrive l'heure du budget et que le navire attendu est toujours aussi loin.
Peu importe. Hiraeth croise le regard de Mamandra, la cantinière la plus âgée, qui lui fait un doux sourire et lui amène un petit pot de sucre et une cuillère. Elle sait qu'il adore son café très noir et très sucré. Ça vaut presque un bateau.
Il rit quand il voit Sylas se faire charrier par les hommes, et goûter son café d'un air peu convaincu. Il rit lorsque le grand blond se fait gentiment moquer, poussant une exclamation de surprise à la découverte de l'amertume du breuvage. La réticence de l'ambassadeur l'a laissé songeur, quelques instants, mais il découvre un être plus proche des gens, et le mec sans expression qui lui semblait d'une rigidité froide devient peu à peu plus accessible, malgré sa beauté et sa stature qui semblent d'office le mettre à part du commun des mortels.
Par compassion pour les papilles de son client, il s'approche et verse un peu de sucre dans la tasse, lui dédicaçant sa cuillère. Le fils de Mamandra, Danvers, sort du groupe pour se placer en porte-parole. C'est un homme solide et sûr, qui connaît un éventail plus large des compétences d'Hiraeth et d'Oko Jero.
Quelqu'un sur qui les siens peuvent compter.
Lorsqu'à l'invitation de l'homme, le... (c'est quoi d'ailleurs ? Un demi-elfe ? Ces oreilles pointues... cette taille inhabituelle... Un elfe ? Plutôt baraqué. Vraiment très grand. Du sang de chépaquoi. Intéressant...) le grand costaud, faute d'un meilleur terme, s'exprima longuement, le Nomade tordit le nez, buvant son café d'un air pensif.
Melorn... Voilà une autre partie du monde soigneusement évitée jusqu'alors. De toute façon, on y entrait pas comme dans un moulin, et y'avait assez de fric à se faire entre Kyouji et Courage sans aller se peler jusqu'à des terres nordiques pourries de trucs un peu bizarres, on savait même pas trop quoi.
Pour le plaisir, Hir aurait bien aimé y aller. Sa curiosité toujours en alerte s'éveille lorsqu'il entend parler d'attaque, de reconstruction. Des Veilleurs de l'Aube...
Songeur, il se plonge dans d'autres pensées, appartenant à d'autres moments, qui restent gravés en lui dans le marbre d'une promesse qu'il s'est faite et n'ose s'avouer, n'ose avouer à ses proches, à la Caravane.
Soudain, il a envie d'aller voir Melorn de ses propres yeux, de comprendre, de savoir, d'aider comme il a pu le faire à Liberty ou Courage. Existe-t-il seulement des défavorisés chez les Elfes ?
Il n'en a aucune idée.
Les travailleurs discutent entre eux. La mention des Veilleurs et de leurs buts ont réveillé en eux de vieilles blessures, une antique motivation, celle de rentrer chez eux. Certains regards s'animent d'une flamme combative, d'autres sont inquiets. Le Nomade en veut presque à Sylas. A peine ces gens commencent à se créer une situation, et ils partiraient de nouveau sur les sentiers de poussière ?
Il n'est rien pour les en empêcher.
Danvers répond à l'ambassadeur, efficace, comme toujours :
« Pour ça, des mauvais traitements, pas de la part des autorités, mais des mecs qui détestent les étrangers, oui ça on en a vu. Y'a eu des débordements. Y'a eu des trucs pas nets ; après vous savez, pour ceux qu'étaient vraiment pauvres avant, ça a pas fait une énorme différence. »
Certains rechignent, et il ajoute :
« Sauf qu'avant, on avait nos champs et la vie était rude, on avait pas les autres qui lorgnent sur nous, sur nos femmes, et puis on priait les Divins librement... »
« Parle-lui de la taxe, Danvers ! »
« ...La taxe. Oui. Ici, en République, pour venir prier nos dieux dans les églises divinistes qui existent, faut payer. De manière générale, ceux qui étaient riches ont pas eu de problème, ils ont pu s'établir, acheter des domaines ou ché pas quoi... Nous, on a fait avec ce qu'on a pu, et maintenant, on doit payer pour prier. Y disent que c'est pour l'entretien des églises, vu qu'elles ont été construites pour nous... »
« C'est pour faire du fric ! »
« Y'a que ça qui les intéresse ici ! »
Danvers stoppe les récriminations d'un signe de main.
« J'en sais rien, et les types ici savent pas non plus. Mais c'est pas facile à accepter, voyez ? Et puis on a bien compris que le président, il veut qu'on devienne rapidement aussi républicain que peut l'être un shouméien. Pour la cohésion du peuple, un truc comme ça...
La vérité, c'est qu'on pourra pas cesser d'être ce qu'on est, voyez ? Et les républicains, y'en a qui pourront pas arrêter de voir en nous des types qui veulent invoquer des Titans à tous les coins de rue...
Chais pas comment on va faire, Monsieur. On va pas arrêter de prier, on va pas arrêter de respirer pour leur plaire. Heureusement, y sont pas tous comme ça. On a beaucoup de gens qui nous aident, aussi, et pi qui nous respectent. Des gens qui font la part des choses avec le Divinisme, les Gardiens, tout ça...
Y'a assez d'place pour tous, en vérité, ici. On leur enlève rien. On travaille dur, on touche pas à ce qui leur appartient. A force, ils s'en rendront compte. »
Il hoche la tête, ses comparses silencieux approuvent, certains ont les dents serrées, d'autres le regard dur, mais ils approuvent. Leur résolution est presque tangible, et Hiraeth pince les lèvres, un doigt recueillant le sucre poisseux au fond de sa tasse pour se le fourrer dans le cornet.
Tant qu'il y aura des types comme Danvers, les choses peuvent aller dans le bon sens.
Pourvu qu'il vive aussi longtemps que s'il avait du sang d'elfe.
Hiraeth râle en #ff9900
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Sylas
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Des réminiscences d'un lointain passé se superposaient par moments au présent tandis que le discours du représentant des Shoumeiens progressait. Il y avait là des valeurs profondément humaines, profondément universelles et pérennes qui traversaient le temps comme l'immortalité d'un ange.
Liberté.
Toutes les espèces cherchaient un territoire. Un refuge pour s'abriter de la pluie et des flammes, du danger et de l'ennui. Certaines, plus vindicatives que d'autres, désiraient étendre le leur indéfiniment jusqu'à asservir l’entièreté de leurs voisins et même de la Nature souveraine. Les Titans en étaient un exemple éloquent, et à leur image les Hommes poursuivaient leur insatiable lutte. Pour survivre ou pour conquérir, en fin de compte même si les motifs variaient, les méthodes revenaient au même, cycle par cycle.
Foi.
Ébranler quelqu'un jusque dans les fondations de son être était un travail de longue haleine, où violence et patience devaient soigneusement s'équilibrer. Assez pour faire perdre tout repère à l'individu visé, mais pas trop afin que son esprit reste juste assez lucide, juste assez cohérent. En ce sens la foi avait ceci de délicat qu'elle pouvait changer, mais se fondait avant tout sur un amour aveugle, des croyances pas toujours vérifiées.
Argent.
Et il y avait bien sûr les vautours des nouvelles époques, dans lesquelles le nouveau dieu ne parlait pas, ne bougeait pas, ne vivait pas, mais envahissait tous les endroits et toutes les sociétés. En ce sens Melorn avait ceci de fabuleux qu'elle dérogeait complètement à la règle, rendant la valeur des choses aux choses, la notion d'échange bien plus concrète et immédiate. On pouvait accumuler autant d'argent que possible sans jamais voir la couleur d'une miche de pain, alors que le poids d'un de farine dans une balance était parfaitement réel.
Les mots tombaient comme des sentences, et pendant ce temps Sylas se vit offrir de quoi adoucir sa boisson, avec l'impression étrange que c'était très exactement ce que la République cherchait à faire vis-à-vis des réfugiés. Des temples pour alléger l'amertume de leurs pertes. Des quartiers délaissés pour leur éviter la froideur de nuits d'hiver à la pleine lune. Des promesses pour distiller l'espoir de lendemains meilleurs dans la désillusion de vies déchirées et éparpillées au sein du Sekai. Combien y en avait-il dans le tas qui auraient préféré rester là-bas s'ils avaient été assez braves et assez forts ?
Un signe de tête pour remercier le caravanier, une gorgée pour se rendre compte qu'effectivement le cafton goûtait bien mieux, et l'ambassadeur médita le compte-rendu quelques instants sans répondre.
On leur enlève rien. On travaille dur, on touche pas à ce qui leur appartient.
Vivre, tout simplement.
"Je pense que j'entends les deux points de vue."
Après tout, il était bien placé pour cela, non ? Il avait été, plus qu'un diviniste, un symbole vivant, tout aussi vivant que les entités géantes qui avaient foulé les terres, façonné les montagnes, rempli les océans, attisé les volcans et gelé les plaines nordiques. Mais aussi, le fruit de leur chute et de leurs conséquences. Pouvait-on blâmer les Républicains d'avoir peur et de tout faire afin que cela ne recommence pas ?
"D'un côté, des gens qui ont tout perdu, et dont les valeurs, les croyances et les familles sont tout ce qui leur reste. Des gens qui ne demandent qu'à repartir de zéro et, sans forcément acquérir monts et merveilles, espèrent rebâtir et prospérer comme toute personne à peu près sensée. Cela s'est gravé dans votre essence à l'instant où vous avez pris la décision de quitter le Shoumei.
De l'autre, des gens qui ont tout à perdre, qui ont peur et protègent leur système contre les perturbations extérieures car ils pensent qu'il fonctionne, même améliorable, et qu'ils sont en accord avec la façon dont leurs racines se sont entichées de leurs règles communes. Des gens qui voient en vous les responsables de l'attaque de Kaiyo. C'est vrai, qui mieux que les fidèles des Titans pour faire appel à eux et profiter des retombées ? Et puis, si ce n'est Kaiyo, n'importe quel autre Titan ferait l'affaire. Ce qui compte est d'avoir un responsable. De le punir. Qui voudrait croire aux Titans après ce qu'ils ont fait au monde, sinon ceux qui les vénèrent ?"
Naître, grandir et mourir. Naître, oublier et recommencer sans cesse. Pauvres Hommes.
"Personne n'a jamais fondamentalement tort ou raison quand deux peuples s'opposent, car il faut toujours prendre en compte le point de vue de celui qui déclame. Et les exceptions qui ne définissent pas l'ensemble."
L'ange soupira. Ces ouvriers n'avaient pas l'air méchant mais ils étaient divinistes. Les Républicains non plus mais ils vouaient trop d'intérêt à l'argent. Et le Reike, Melorn, Aquaria, Shoumei, tous devaient avoir leur part d'ombre comme de lumière.
Une goutte s'écrasa sur le front du blondinet, qui leva la tête pour constater que la toile gorgée d'eau de leur abri de fortune atteignait ses limites. Dans le même temps, l'averse se calmait et un mince arc-en-ciel teinta le ciel au loin de ses éclats iridescents. Il avait obtenu des réponses qui soulevaient d'autres questions. Quel était son rôle dans tout cela ? Pouvait-il incarner ce pont entre les peuples comme il l'avait souhaité autrefois ?
Il leva un doigt.
"J'entrevois deux solutions à court terme à votre problème. La première : réformer votre religion. Ou au moins y faire croire. Pourquoi avez-vous besoin de lieu de culte ? Si votre foi est authentique, que vous vous trouviez dans une église ou dans votre logis de fortune, vous pourrez toujours prier. Abattez symboliquement les murs qu'ils ont bâtis pour vous. Si plus personne ne s'y rend, plus personne ne paiera la taxe. Et ils n'auront plus d'emprise sur vos rites, n'est-ce pas ?"
Un second doigt.
"S'il vous faut vraiment un endroit, pourquoi ne pas le construire vous-même ? Vous parliez de vergers je crois. Plantez vos arbres, cultivez vos fruits, vendez-les pour gagner cet argent si précieux, continuez de vous étendre. Et le soir venu, changez un entrepôt en salle de prière, en autel, en lieu de rassemblement. Cachez votre sanctuaire en pleine vue."
Sylas coula un regard vers les deux elfes au repos. Toujours attentifs, les Melornois se demandaient s'ils étaient vraiment en train d'assister à des messes basses pour encourager les divinistes. Et en même temps, les conditions de vie déplorables des Shoumeiens justifiaient ces pratiques. C'était à la fois terrible et nécessaire.
Liberté.
Toutes les espèces cherchaient un territoire. Un refuge pour s'abriter de la pluie et des flammes, du danger et de l'ennui. Certaines, plus vindicatives que d'autres, désiraient étendre le leur indéfiniment jusqu'à asservir l’entièreté de leurs voisins et même de la Nature souveraine. Les Titans en étaient un exemple éloquent, et à leur image les Hommes poursuivaient leur insatiable lutte. Pour survivre ou pour conquérir, en fin de compte même si les motifs variaient, les méthodes revenaient au même, cycle par cycle.
Foi.
Ébranler quelqu'un jusque dans les fondations de son être était un travail de longue haleine, où violence et patience devaient soigneusement s'équilibrer. Assez pour faire perdre tout repère à l'individu visé, mais pas trop afin que son esprit reste juste assez lucide, juste assez cohérent. En ce sens la foi avait ceci de délicat qu'elle pouvait changer, mais se fondait avant tout sur un amour aveugle, des croyances pas toujours vérifiées.
Argent.
Et il y avait bien sûr les vautours des nouvelles époques, dans lesquelles le nouveau dieu ne parlait pas, ne bougeait pas, ne vivait pas, mais envahissait tous les endroits et toutes les sociétés. En ce sens Melorn avait ceci de fabuleux qu'elle dérogeait complètement à la règle, rendant la valeur des choses aux choses, la notion d'échange bien plus concrète et immédiate. On pouvait accumuler autant d'argent que possible sans jamais voir la couleur d'une miche de pain, alors que le poids d'un de farine dans une balance était parfaitement réel.
Les mots tombaient comme des sentences, et pendant ce temps Sylas se vit offrir de quoi adoucir sa boisson, avec l'impression étrange que c'était très exactement ce que la République cherchait à faire vis-à-vis des réfugiés. Des temples pour alléger l'amertume de leurs pertes. Des quartiers délaissés pour leur éviter la froideur de nuits d'hiver à la pleine lune. Des promesses pour distiller l'espoir de lendemains meilleurs dans la désillusion de vies déchirées et éparpillées au sein du Sekai. Combien y en avait-il dans le tas qui auraient préféré rester là-bas s'ils avaient été assez braves et assez forts ?
Un signe de tête pour remercier le caravanier, une gorgée pour se rendre compte qu'effectivement le cafton goûtait bien mieux, et l'ambassadeur médita le compte-rendu quelques instants sans répondre.
On leur enlève rien. On travaille dur, on touche pas à ce qui leur appartient.
Vivre, tout simplement.
"Je pense que j'entends les deux points de vue."
Après tout, il était bien placé pour cela, non ? Il avait été, plus qu'un diviniste, un symbole vivant, tout aussi vivant que les entités géantes qui avaient foulé les terres, façonné les montagnes, rempli les océans, attisé les volcans et gelé les plaines nordiques. Mais aussi, le fruit de leur chute et de leurs conséquences. Pouvait-on blâmer les Républicains d'avoir peur et de tout faire afin que cela ne recommence pas ?
"D'un côté, des gens qui ont tout perdu, et dont les valeurs, les croyances et les familles sont tout ce qui leur reste. Des gens qui ne demandent qu'à repartir de zéro et, sans forcément acquérir monts et merveilles, espèrent rebâtir et prospérer comme toute personne à peu près sensée. Cela s'est gravé dans votre essence à l'instant où vous avez pris la décision de quitter le Shoumei.
De l'autre, des gens qui ont tout à perdre, qui ont peur et protègent leur système contre les perturbations extérieures car ils pensent qu'il fonctionne, même améliorable, et qu'ils sont en accord avec la façon dont leurs racines se sont entichées de leurs règles communes. Des gens qui voient en vous les responsables de l'attaque de Kaiyo. C'est vrai, qui mieux que les fidèles des Titans pour faire appel à eux et profiter des retombées ? Et puis, si ce n'est Kaiyo, n'importe quel autre Titan ferait l'affaire. Ce qui compte est d'avoir un responsable. De le punir. Qui voudrait croire aux Titans après ce qu'ils ont fait au monde, sinon ceux qui les vénèrent ?"
Naître, grandir et mourir. Naître, oublier et recommencer sans cesse. Pauvres Hommes.
"Personne n'a jamais fondamentalement tort ou raison quand deux peuples s'opposent, car il faut toujours prendre en compte le point de vue de celui qui déclame. Et les exceptions qui ne définissent pas l'ensemble."
L'ange soupira. Ces ouvriers n'avaient pas l'air méchant mais ils étaient divinistes. Les Républicains non plus mais ils vouaient trop d'intérêt à l'argent. Et le Reike, Melorn, Aquaria, Shoumei, tous devaient avoir leur part d'ombre comme de lumière.
Une goutte s'écrasa sur le front du blondinet, qui leva la tête pour constater que la toile gorgée d'eau de leur abri de fortune atteignait ses limites. Dans le même temps, l'averse se calmait et un mince arc-en-ciel teinta le ciel au loin de ses éclats iridescents. Il avait obtenu des réponses qui soulevaient d'autres questions. Quel était son rôle dans tout cela ? Pouvait-il incarner ce pont entre les peuples comme il l'avait souhaité autrefois ?
Il leva un doigt.
"J'entrevois deux solutions à court terme à votre problème. La première : réformer votre religion. Ou au moins y faire croire. Pourquoi avez-vous besoin de lieu de culte ? Si votre foi est authentique, que vous vous trouviez dans une église ou dans votre logis de fortune, vous pourrez toujours prier. Abattez symboliquement les murs qu'ils ont bâtis pour vous. Si plus personne ne s'y rend, plus personne ne paiera la taxe. Et ils n'auront plus d'emprise sur vos rites, n'est-ce pas ?"
Un second doigt.
"S'il vous faut vraiment un endroit, pourquoi ne pas le construire vous-même ? Vous parliez de vergers je crois. Plantez vos arbres, cultivez vos fruits, vendez-les pour gagner cet argent si précieux, continuez de vous étendre. Et le soir venu, changez un entrepôt en salle de prière, en autel, en lieu de rassemblement. Cachez votre sanctuaire en pleine vue."
Sylas coula un regard vers les deux elfes au repos. Toujours attentifs, les Melornois se demandaient s'ils étaient vraiment en train d'assister à des messes basses pour encourager les divinistes. Et en même temps, les conditions de vie déplorables des Shoumeiens justifiaient ces pratiques. C'était à la fois terrible et nécessaire.
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Hiraeth
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Les travailleurs parlent entre eux, la casserole de café circule à nouveau, et moi, ancien shouméien au passé douteux, j'ai bu ses paroles comme les autres.
Je suis resté en retrait autant que faire se peut, le type n'a pas besoin de moi et un truc curieux remue mes entrailles en constatant l'attachement, le cœur qu'il met dans ses paroles.
Déjà avec la mamie tout à l'heure...
Quelque chose me dit, dans son maintien, dans son partage, que si d'ambassadeur il possède la fonction, ce n'est pas ce qui l'amène ici aujourd'hui. Il est hors de ce monde, et pourtant il lui appartient. Cette aura étrange, cette beauté lumineuse se manifeste dans son message.
Moi, ancien shouméien au passé douteux, j'ai prié les divins comme eux, je me suis souillé du mentorat de titanides, j'ai réchappé à la mort et m'en suis repenti, mais il demeure en moi les réminiscences, les excroissances d'une magie et d'une foi auxquelles j'ai substitué l'amour de ceux qui ont cru en moi assez pour m'offrir une vie nouvelle.
Je lève mes yeux beaucoup trop clairs de demi-elfe sur Hiraeth, méditatif, et je lis certaines de mes conclusions sur son visage.
Mon presque-neveu, résultat de l'amour de ceux qui m'ont sauvé, avec la trogne de son père et le regard de sa mère. Je ne sais pourquoi, les paroles de Sylas ont éveillé en moi cette émotion de vouloir protéger, défendre, construire, faire du beau et du bon avec de la terre et de la pluie, et autour de moi les réfugiés obtempèrent, réfléchissent, même si je sais qu'ils ont déjà songé à cette solution, ils ne l'ont pas attendu, le messager doré à la cape élimée, pour prier sous la pluie, sous l'astre clair, pour célébrer leurs cérémonies dans le secret de leurs taudis, pour ériger des oratoires à la gloire des Huit qui finissent inlassablement détruits...
Mais le message de l'ambassadeur a crédibilisé cette façon de faire. Sans le savoir, et ne portant pas même la responsabilité de donner droit à ces pratiques au regard de la loi, il a posé des mots dessus, il a légitimé leur façon de penser en allant dans le même sens. À leurs yeux il demeure une autorité, son lustre d'elfe le plaçant même au-dessus des politiques républicaines, Melorn revêtant le caractère un peu sacré des légendes du bout du monde, glorifiée pour sa sagesse et sa beauté.
Si même un Elfe le dit...
Ce mec-là, il leur a rendu de l'Espoir.
Les réfugiés ont renâclé, tout le discours de Sylas ne leur a pas fait plaisir, certains ont trop de ressentiment pour envisager les deux faces de la pièce, et certains ont du mal à imaginer qu'on puisse faire l'amalgame si facilement entre leur religion et le retour des Titans. Pourtant...
« Comment ne pas croire aux Titans ? Ils les ont vu ! »
« C'est comme ignorer une tornade ou un raz-de-marée... »
« Ce n'est pas en fermant les yeux qu'on voit la lumière. »
Il leur a proposé des solutions. Des cris se sont élevés à l'évocation de réformes. Mais ils ont écouté jusqu'au bout. Ce quelqu'il-soit possède un magnétisme en phase avec la foi de ce groupe de travailleurs, qui sont piliers de leur famille, force vive de leur quartier, décisionnaires du lendemain de tous ceux qui vivent ici.
Son quartier de cœur.
Son cœur qui se serre.
Est-ce qu'il regrette de l'avoir amené ici ?
Non. Ce mec-là, il leur a rendu de l'Espoir.
L'horizon se met au diapason des paroles du messager doré, et la pluie cesse, une goutte désagréable chutant lourdement sur l'oreille du Nomade. Il se la frotte, il a l'impression que ses tympans se débouchent d'un coup, et il se demande si stopper là l'entrevue ou pas. C'est qu'il a encore deux personnes à voir, d'ici midi.
Oko Jero a l'air assez remué, également. C'est rare que son mentor échange un tel regard avec lui sans nuance moqueuse ou sarcastique.
Hé, quoi, il va falloir embaucher ce Sylas dans la caravane. Convaincant, magnétique et beau comme un dieu. Sans compter qu'avec une stature pareille, plus besoin de s'emmerder pour caler les articles en hauteur.
La plaisanterie est un mécanisme de défense.
« Mais si on fait ça, ils vont croire qu'on s'écrase, non ? »
« Ouais, les célébrations secrètes, les O.R.s en ont arrêté une la dernière fois, ils ont vérifié toutes les identités pour voir si y'avait pas de mec lié aux attentats de Courage... »
« Mon père a juré par les huits la semaine dernière au marché, deux hommes sont venus lui mettre dessus... »
« Ma fille, dans cette taverne, un mec lui a dit qu'il savait qu'elle était diviniste et qu'il la dénoncerait aux autorités si elle refusait de... »
Ça discute, il y a des sceptiques, mais il y a aussi une sorte de communion, parce qu'une figure est présente. Un intermédiaire. Lui, Hir, il est trop proche de la base. Il peut aider sur d'autres plans, mais pas celui-là.
Intéressant.
Hiraeth râle en #ff9900
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"La question n'est pas de croire à l'existence des Titans, mais à Leurs motivations. S'Ils voulaient le bien du Sekai, pourquoi auraient-Ils introduit la Corruption via l'Arbre-Monde ? Pourquoi Kaiyo a-t-Il inondé Liberty ? Ce sont les réponses à ces questions qui font peur."
Pourquoi ont-ils voulu détruire leurs enfants ? Les débats de font plus vifs et les questions plus nombreuses. Eux aussi commencent à ouvrir les yeux sur leurs voisins, à cette relation proximité teintée d'inconnu qui les lie. Il faut que tous prennent conscience des clivages qui existent à cause d'un manque de dialogue. C'est une façon de gagner face à la volonté de destruction des Titans. On peut croire à eux mais pas en eux. On peut se rendre compte que les divinistes, au fond, cherchent une main secourable face à leurs difficultés. Puisque les Créateurs ne leur répondront pas sans effusion de sang et manipulation, peut-être que les autres Hommes pourraient s'y substituer, tout comme les elfes l'avaient fait pour l'ange.
"En toute franchise, la même défiance existe à Melorn. Pour la bataille d'il y a 5 ans comme celle d'il y a 5000 ans qui a fait tomber le prestigieux empire d'Azshary, les elfes détestent les Titans et ce qui leur est apparenté. La principale différence étant qu'ils savent pourquoi ils les détestent, il y a beaucoup d'histoires transmises et de faits avérés dans les archives. Prouvez-leur qu'ils généralisent un peu trop, et ils sont en capacité de faire la différence. Eh bien, c'est la même chose pour vous avec les Républicains."
Si vous cherchez sincèrement la lumière mais pas les Titans qui la répandent, vous avez une chance. Si seulement vous pouviez vous rendre compte de tout le mal qu'Ils ont perpétré par simple jeu ou plaisir par vous-mêmes. Ce n'est pas pour rien que le Sekai entier s'est ligué contre Eux.
Un regard sur l'étrange assemblée des petites gens, sur un Oko Jero manifestement remué aux tripes, sur un Hiraeth indécis. Peut-être est-il temps d'arrêter là la comparaison. Ces gens ne sont pas mauvais au fond. C'est ce qu'ils feront par la suite qui les rendra bons ou mauvais aux yeux de ceux avec qui ils traiteront, principalement la Nation Bleue donc. Mais il serait mesquin de partir simplement sur une conclusion aussi vague, et Sylas tient à ce que les choses soient claires :
"Comme je vous l'ai dit, je n'ai aucun pouvoir de décision en cet endroit, je ne suis qu'un visiteur. Ce que je vous suggère, c'est à vous d'en disposer, de tirer vos propres conclusions, de fournir vos propres efforts. Mais je ne peux m'empêcher de penser que vous êtes, avant des divinistes, un peuple d'Hommes accueilli par un autre peuple d'Hommes. Votre religion ne vous définit pas plus que les vêtements que vous portez. Agissez en conséquence. Vous pouvez choisir de vous cacher pour votre tranquillité. Vous pouvez choisir de vous montrer pour suivre vos croyances. Vous pouvez en changer. Vous pouvez partir en quête d'autre chose, ou rester pour rebâtir. C'est à chacun de vous de décider en son âme et conscience. Le seul véritable conseil que je peux vous donner, c'est d'y travailler en paix, si possible avec vos voisins. Qu'ils soient d'accord ou pas avec vous, les Républicains resteront bienveillants à votre égard si vous demeurez pacifistes. Votre vie vaut-elle votre orgueil ? Vaut-elle votre foi ? Vaut-elle votre liberté ? Il n'y a pas de bonne ou de mauvaise réponse à ces questions, seulement le sens que vous leur donnerez."
Les elfes échangèrent un regard, puis un sourire. Ragaillardis par ce qu'ils considéraient comme un mot de sagesse et une invitation au libre-arbitre, ils retrouvaient l'ange qui avait su convaincre de sa bonne foi le peuple elfique. Les Hommes étaient en comparaison bien éphémères et avaient besoin qu'on les guide un peu -voire beaucoup-, ils en convenaient, et Sylas s'y prenait non pas en donnant des idées creuses et des sermons à tout va mais avec du concret, des options et leurs contraires, dans le pur esprit de recherche critique de la cité du Savoir. Quand on savait de surcroît qu'il était plutôt d'affiliation au Culte des Ombres, cette bienveillance qui le caractérisait les rendait fiers de le servir, fût-ce le temps d'une brève mission.
Pourquoi la générosité s'embarrasserait-elle de frontières, de croyances ou d'interdits ?
Le déchu reposa sa tasse sur la table libre au milieu du brouhaha ambiant. Son œuvre ici accomplie, il se tourna vers le caravanier et son second.
"Je pense qu'ici est venu le temps de la réflexion. Nous pouvons poursuivre si vous le souhaitez."
Pourquoi ont-ils voulu détruire leurs enfants ? Les débats de font plus vifs et les questions plus nombreuses. Eux aussi commencent à ouvrir les yeux sur leurs voisins, à cette relation proximité teintée d'inconnu qui les lie. Il faut que tous prennent conscience des clivages qui existent à cause d'un manque de dialogue. C'est une façon de gagner face à la volonté de destruction des Titans. On peut croire à eux mais pas en eux. On peut se rendre compte que les divinistes, au fond, cherchent une main secourable face à leurs difficultés. Puisque les Créateurs ne leur répondront pas sans effusion de sang et manipulation, peut-être que les autres Hommes pourraient s'y substituer, tout comme les elfes l'avaient fait pour l'ange.
"En toute franchise, la même défiance existe à Melorn. Pour la bataille d'il y a 5 ans comme celle d'il y a 5000 ans qui a fait tomber le prestigieux empire d'Azshary, les elfes détestent les Titans et ce qui leur est apparenté. La principale différence étant qu'ils savent pourquoi ils les détestent, il y a beaucoup d'histoires transmises et de faits avérés dans les archives. Prouvez-leur qu'ils généralisent un peu trop, et ils sont en capacité de faire la différence. Eh bien, c'est la même chose pour vous avec les Républicains."
Si vous cherchez sincèrement la lumière mais pas les Titans qui la répandent, vous avez une chance. Si seulement vous pouviez vous rendre compte de tout le mal qu'Ils ont perpétré par simple jeu ou plaisir par vous-mêmes. Ce n'est pas pour rien que le Sekai entier s'est ligué contre Eux.
Un regard sur l'étrange assemblée des petites gens, sur un Oko Jero manifestement remué aux tripes, sur un Hiraeth indécis. Peut-être est-il temps d'arrêter là la comparaison. Ces gens ne sont pas mauvais au fond. C'est ce qu'ils feront par la suite qui les rendra bons ou mauvais aux yeux de ceux avec qui ils traiteront, principalement la Nation Bleue donc. Mais il serait mesquin de partir simplement sur une conclusion aussi vague, et Sylas tient à ce que les choses soient claires :
"Comme je vous l'ai dit, je n'ai aucun pouvoir de décision en cet endroit, je ne suis qu'un visiteur. Ce que je vous suggère, c'est à vous d'en disposer, de tirer vos propres conclusions, de fournir vos propres efforts. Mais je ne peux m'empêcher de penser que vous êtes, avant des divinistes, un peuple d'Hommes accueilli par un autre peuple d'Hommes. Votre religion ne vous définit pas plus que les vêtements que vous portez. Agissez en conséquence. Vous pouvez choisir de vous cacher pour votre tranquillité. Vous pouvez choisir de vous montrer pour suivre vos croyances. Vous pouvez en changer. Vous pouvez partir en quête d'autre chose, ou rester pour rebâtir. C'est à chacun de vous de décider en son âme et conscience. Le seul véritable conseil que je peux vous donner, c'est d'y travailler en paix, si possible avec vos voisins. Qu'ils soient d'accord ou pas avec vous, les Républicains resteront bienveillants à votre égard si vous demeurez pacifistes. Votre vie vaut-elle votre orgueil ? Vaut-elle votre foi ? Vaut-elle votre liberté ? Il n'y a pas de bonne ou de mauvaise réponse à ces questions, seulement le sens que vous leur donnerez."
Les elfes échangèrent un regard, puis un sourire. Ragaillardis par ce qu'ils considéraient comme un mot de sagesse et une invitation au libre-arbitre, ils retrouvaient l'ange qui avait su convaincre de sa bonne foi le peuple elfique. Les Hommes étaient en comparaison bien éphémères et avaient besoin qu'on les guide un peu -voire beaucoup-, ils en convenaient, et Sylas s'y prenait non pas en donnant des idées creuses et des sermons à tout va mais avec du concret, des options et leurs contraires, dans le pur esprit de recherche critique de la cité du Savoir. Quand on savait de surcroît qu'il était plutôt d'affiliation au Culte des Ombres, cette bienveillance qui le caractérisait les rendait fiers de le servir, fût-ce le temps d'une brève mission.
Pourquoi la générosité s'embarrasserait-elle de frontières, de croyances ou d'interdits ?
Le déchu reposa sa tasse sur la table libre au milieu du brouhaha ambiant. Son œuvre ici accomplie, il se tourna vers le caravanier et son second.
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La suite de son discours s'éloigne de leurs standards, mais il a gagné leur cœur. Ils ont vu sa sincérité, sa décision de vouloir aplanir les choses, aider à l'entente, trouver des solutions. Même si ses opinions diffèrent des leurs, même si ses solutions vont trop loin pour leurs cœurs de divinistes, c'est une voie montrée, un chemin marqué sur leurs cartes. Si cela ne germe que chez quelques-uns, ce sera toujours ça de gagné.
« Ce sont des dieux... Qui peut percer leurs motivations ? »
« La corruption... Est-ce un fléau ou une punition ? »
« Le Royaume Divin... Nos Créateurs... »
Des regards se sont fermés. Mamandra pince les lèvres. Oui, leurs dieux ont répandu des malheurs, et beaucoup ne comprennent pas, dans le secret de leurs cœurs. Mais c'est leur foi, leurs croyances, ils se sont bâtis avec et beaucoup n'ont jamais rien connu d'autre. Pour eux, ils sont dans la main des Titans, c'est eux qui les ont créé et ils ne se voient pas se défaire d'une emprise qui leur est aussi naturelle que la vie et la mort.
Hiraeth ne comprend pas bien le principe de religion. Tout comme celui de nationalisme. Finalement, le concept de vouloir appartenir à quelque chose de plus grand qui te dépasse et qui a barre sur toi, c'est pas son truc. Il en débat régulièrement avec ses rencontres, et Oko Jero a été son professeur pour ce qui est de la spiritualité, mais la forme ronde de son esprit refuse d'y faire entrer des croyances carrées.
Sylas fait un parallèle avec Melorn, et le Nomade admet qu'il a du mal à comprendre le lien. Par contre, il a de plus en plus envie de débattre avec le grand blond et de connaître son pays. La façon dont il termine son discours, en le détachant de la religion pour parvenir à des concepts plus universels, plus humanistes, ça lui plaît bien.
Pas sûr que ça plaise autant aux shouméiens, qui sont sommés déjà par les autorités et par Danvers et ses acolytes de se tenir braves et droits face aux brimades républicaines, et d'ailleurs quelques poings se serrent. D'autres se tapent sur l'épaule, échangent des regards.
Hiraeth sait que d'ici quelques semaines, quelques mois, il en verra rejoindre les bas-fonds, se couler dans la pègre, menés par une rage sourde et une envie de vengeance. Ou par l'appât du gain facile. Il sait qu'il continuera à voir des shouméiennes dans les maisons de putains, et des shouméiens se castagner avec des O.R.s.
Sylas a l'air de croire profondément en les êtres et leur capacité à se montrer fondamentalement bienveillant envers l'autre tant qu'il n'y a pas menace.
Hiraeth en doute, fortement, depuis longtemps et son cynisme repeint déjà les belles phrases de l'ambassadeur dans sa psyché en noir et feu.
Mais au fond, il voudrait tellement y croire. N'essaie-t-il pas de recréer, partout où il passe, ces microcosmes de bienveillance, d'équité, de bonheur ?
Tout en ayant peur, à chaque seconde, de les voir détruits.
Le mouvement du grand baraqué le sort de ses songes, et il parpelège pour accommoder sa vision.
Il a raison, il faut partir.
Le Nomade saute de son perchoir et fend la foule vers Danvers, pour lui serrer la main. Sans cérémonie, le moustachu l'attrape par l'épaule et lui donne une accolade rapide.
« Nomade. Merci. »
Le type est sérieux, et Hiraeth acquiesce gravement, avant de se coller de nouveau son sac sur le dos et de s'enfuir en saluant du bras comme un moulin à vent.
Les yeux lui brûlent et sa gorge est serrée, si bien qu'il passe quelques minutes à se concentrer sur la route. Retrouver les pavés, s'enfoncer dans les ruelles obliques. Passer une place dont les pavés déchaussés ont été réutilisés pour construire un petit poulailler, faire fuir quatre volailles cachectiques. Ici les ruelles étroites ont des murs aveugles, l'ortie festonne l'angle des bâtiments, et il hésite un peu à mener l'ambassadeur à sa prochaine destination.
…
S'il y a un endroit où on aurait besoin de ses paroles, c'est là-bas.
Alors, il emprunte une androne sombre et mène le groupe à la cour arrière d'un bâtiment dont la porte d'entrée, large et gardée par un homme peu avenant, est marquée d'une lanterne rouge.
« Tess ? C'est moi. »
Il a parlé bas, la femme qui leur ouvre a l'air apeuré en voyant les hommes. Il la calme d'un geste, et lui chuchote quelques phrases.
Elle semble prendre une décision, et le Nomade se tourne vers les hommes.
« C'est d'accord pour Sylas, mais pas pour les soldats. Y'a une écurie sur la gauche, à quelques mètres, s'ils veulent bien nous attendre là-bas. Ici, va falloir être un peu discrets et ne pas rester longtemps.
Mais si vous voulez connaître toutes les facettes de la vie des réfugiés, ça comprend également ce pan de misère.
A vous de voir, Sylas. Sinon, vous pouvez m'attendre ici, j'en ai pour quelques minutes. »
Malheur.
Il a décidé de le faire entrer là-dedans ?
En même temps, je comprends le raisonnement. Hiraeth a toujours été farouchement féministe, au point de refuser de se livrer à toute relation négociée. Le problème c'est que par extension, ça a fini par inclure toute relation. Bravo, Mâat : t'as voulu fait de ton fils un type respectueux des femmes, il les respecte tellement qu'il en est devenu moine.
Il doit sans doute vouloir sensibiliser le blondin à cette cause qui lui tient à cœur.
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Le doute et la remise en question traçaient leur chemin dans les esprits des Shoumeiens, tandis que le duo d'elfes doublé du "trio" d'humains avançaient de nouveau dans les ruelles plus miséreuses les unes que les autres. Sylas n'avait pas anticipé de se faire prêcheur d'un jour, et pour quelle cause ? Celle des divinistes ou celle du Culte ? Tout en méditant sur l'effet que ses mots auraient sur ce groupe de bonnes âmes, il fixait le dos du Nomade, lequel sembla hésiter à plusieurs reprises. Étant donnée l'aisance qu'il avait déployée jusque-là, et la "tournée" qui lui semblait routinière, l'ange déduisit que c'est par rapport à leur visite qu'il se posait des questions. Quelle pouvait donc être la prochaine étape ?
Après encore quelques minutes, ils s'immobilisèrent devant une minuscule arrière-cour, comme s'ils n'avaient pas à être là. Comme si le gorille à l'entrée se tenait prêt à les sortir de là s'il les repérait. Ce qui se confirma plus ou moins lorsque le borgne lui demanda d'entrer seul. A ce moment-là, les gardes rebiffèrent. Ils étaient là par prudence, mais il ne fallait pas exagérer pour autant.
"Nous devons avoir notre ambassadeur en ligne de mire ! Passent encore la petite famille dans le besoin et le groupe de civils aux abois, mais il est de notre devoir de garantir sa sécurité ! Vous ne pouvez pas nous...
-Moi je le peux.
-Mais... Monsieur...
-S'il vous arrive quoi que ce soit...
-Nous ne pouvons pas vous laisser seul en terre étrangère ainsi..."
L'ange pinça les lèvres, puis regarda la jeune femme qui se terrait à l'entrée. Les pauvres gardes allaient devenir chèvres s'il osait à chaque occasion, il pouvait le comprendre. Mais quelque chose le poussait à continuer. La volonté de comprendre. Il écarta légèrement un pan de sa cape, derrière lequel se cachait depuis le début du voyage une épée sagement rangée dans son fourreau. Elle eut un mouvement de recul, stoppé lorsqu'il leva les mains bien en évidence.
"Je ne vous veux aucun mal, pas plus qu'Hiraeth et Oko. Comprenez simplement que ma fonction m'engage à une certaine prudence, celle d'entrer seul dans un bâtiment inconnu en compagnie d'inconnus dansant déjà dangereusement avec la limite du convenable pour mes gardes. Je suis prêt à prendre le risque, mais par égard pour eux, puis-je garder mon arme ? Je sais m'en servir, qu'on se le dise, même si je n'en ai guère envie."
Les elfes retinrent leur souffle, et la dénommée Tess consulta ostensiblement son bienfaiteur du regard. Avant de finalement accepter. Rien n'obligeait le visiteur à lui dévoiler son arme, donc il faisait preuve de bonne foi. Juste assez pour être encadré par deux autres hommes que les siens. Sylas entendit les soupirs consternés dans son dos, puis les bruits de bottes tandis qu'ils s'orientaient vers l'écurie indiquée plus tôt. Il faudrait leur offrir, à leur retour à Melorn, un équipement neuf et l'une de ces grandes bouteilles des vignes du Nord pour les dédommager des frayeurs qu'il leur infligeait.
La question réglée, l'ange et ses gardiens s'engouffrèrent dans ce qui ressemblait à un garde-manger ou un cellier, puis une cuisine simple mais fonctionnelle. Il était évident que la visite revêtait un caractère semi-clandestin, voire clandestin tout court, mais la nature exacte de l'endroit le frappa de plein fouet lorsqu'ils pénétrèrent dans un salon aux rideaux rouges, légèrement délavés. Trois filles bavardaient là, l'une occupée à raccommoder une robe. Tess appela d'autres consœurs. Avec son physique rondouillard et sa petite taille, il n'avait pas été évident au premier abord de deviner la profession de Tess, mais les autres avaient très probablement été choisies en fonction de leurs formes bien dessinées, tantôt plantureuses, tantôt presque innocentes, et son sang s'était glacé. Des blondes, des brunes, des rousses, des Shoumeiennes à n'en pas douter, celles qui venaient du couloir caché par un rideau là-bas maquillées et apprêtées, à l'opposée de celles qui se détendaient là.
Une sinistre vision d'autrefois se superposa à la réalité lorsque, de gêne, les filles se tournèrent vers Hiraeth qui déballait son paquetage, chuchotant tout bas, puis vers lui.
C'est un beau morceau que tu nous amènes là ! Est-ce qu'il appartient à X'o-Rath ? Est-ce qu'on peut jouer avec ?
Des rires, des poignes qui le forçaient à s'agenouiller, le bruit des chaines maintenant ses mains dans son dos, l'odeur... L'odeur du musc et de la sueur, cette puanteur qui annonçait la souffrance et la luxure.
Des mains indécentes sur ses plumes, sur ses vêtements, sur son corps.
Des cris, leurs cris de plaisir, ses cris de douleur.
Des râles.
Combien de fois avait-il vécu cette scène ?
La douleur du fouet pour avoir été insolent. La douleur des griffes pour l'être plus.
Le goût immonde de leurs êtres pervers et pervertis par l'ambition démesurée de plaire à la Mort.
L'esprit qui se brise un peu plus à chaque coup de reins indésiré.
L'ange désormais déchu avait brutalement blêmi en réalisant. Elles aussi. Elles aussi elles... Le sang sourdait dans ses tempes, son esprit blanc, incapable de bouger. Son cœur avait brusquement accéléré et manquait des battements avec une cadence presque identique à ceux qu'il parvenait à donner malgré tout.
C'est fini maintenant. Ils ne me prendront plus.
Son visage s'était fermé, de nouveau vierge de toute émotion, lisse comme une pierre soigneusement polie, résultante de millénaires de poison, d'un réflexe devenu familier pour se protéger. Ne plus voir, pour ne plus savoir, pour ne plus souffrir. Compartimenter sa psyché dans un coin, tandis que son corps était offert à la lie de l'humanité.
C'est fini.
Certaines des cicatrices dans son dos le démangeaient à présent et l'envie urgente d'aller se laver lui donna un haut-le-cœur, mais rien, sur ses traits, ne transparut. Il avait repris pieds avec l'aide de Lidwen. Elle l'avait purifié à sa façon, avec son sourire, sa joie, son amour d'autrui.
J'admire cette part de toi. Tu es un ange de la rédemption. Un ange qui pardonne l'enfant qui vient de lui tirer dessus parce qu'on l'a éduqué à le faire.
Lidwen. Qui chantait parfois en changeant les fleurs près de son lit, sans se douter qu'il écoutait les yeux clos.
Lidwen et ses patients, qu'elle aimait comme sa famille.
Lidwen et ses cicatrices sur le visage, magnifiques.
Lidwen en train de placer une bourse discrètement entre les mains de Tess.
Lidwen et son œil borgne, se dirigeant vers lui.
Lidwen posant la main sur son épaule en appelant son nom. Le secouant fermement.
"... Hiraeth ?"
Son souffle avait retrouvé son rythme normal, et son cœur avait repris sa place au bon endroit dans sa poitrine, tout comme son esprit dans sa tête. Oko Jero s'était téléporté sur une banquette et parlait tranquillement avec les filles qui avaient fini par détourner leur attention de l'étrange visiteur. Tess s'approcha pour lui tendre timidement un verre d'eau. L'ange le prit avec mille précautions, but d'une traite.
"Vous traitent-ils bien ici ? L'homme à l'entrée... Vous défend-il convenablement ?"
Sa voix neutre lui parut lointaine, mais c'était bien sa voix. Froide.
"Vous avez le plus grand des courages."
D'où vient cette larme qui s'écrase au sol ?
Après encore quelques minutes, ils s'immobilisèrent devant une minuscule arrière-cour, comme s'ils n'avaient pas à être là. Comme si le gorille à l'entrée se tenait prêt à les sortir de là s'il les repérait. Ce qui se confirma plus ou moins lorsque le borgne lui demanda d'entrer seul. A ce moment-là, les gardes rebiffèrent. Ils étaient là par prudence, mais il ne fallait pas exagérer pour autant.
"Nous devons avoir notre ambassadeur en ligne de mire ! Passent encore la petite famille dans le besoin et le groupe de civils aux abois, mais il est de notre devoir de garantir sa sécurité ! Vous ne pouvez pas nous...
-Moi je le peux.
-Mais... Monsieur...
-S'il vous arrive quoi que ce soit...
-Nous ne pouvons pas vous laisser seul en terre étrangère ainsi..."
L'ange pinça les lèvres, puis regarda la jeune femme qui se terrait à l'entrée. Les pauvres gardes allaient devenir chèvres s'il osait à chaque occasion, il pouvait le comprendre. Mais quelque chose le poussait à continuer. La volonté de comprendre. Il écarta légèrement un pan de sa cape, derrière lequel se cachait depuis le début du voyage une épée sagement rangée dans son fourreau. Elle eut un mouvement de recul, stoppé lorsqu'il leva les mains bien en évidence.
"Je ne vous veux aucun mal, pas plus qu'Hiraeth et Oko. Comprenez simplement que ma fonction m'engage à une certaine prudence, celle d'entrer seul dans un bâtiment inconnu en compagnie d'inconnus dansant déjà dangereusement avec la limite du convenable pour mes gardes. Je suis prêt à prendre le risque, mais par égard pour eux, puis-je garder mon arme ? Je sais m'en servir, qu'on se le dise, même si je n'en ai guère envie."
Les elfes retinrent leur souffle, et la dénommée Tess consulta ostensiblement son bienfaiteur du regard. Avant de finalement accepter. Rien n'obligeait le visiteur à lui dévoiler son arme, donc il faisait preuve de bonne foi. Juste assez pour être encadré par deux autres hommes que les siens. Sylas entendit les soupirs consternés dans son dos, puis les bruits de bottes tandis qu'ils s'orientaient vers l'écurie indiquée plus tôt. Il faudrait leur offrir, à leur retour à Melorn, un équipement neuf et l'une de ces grandes bouteilles des vignes du Nord pour les dédommager des frayeurs qu'il leur infligeait.
La question réglée, l'ange et ses gardiens s'engouffrèrent dans ce qui ressemblait à un garde-manger ou un cellier, puis une cuisine simple mais fonctionnelle. Il était évident que la visite revêtait un caractère semi-clandestin, voire clandestin tout court, mais la nature exacte de l'endroit le frappa de plein fouet lorsqu'ils pénétrèrent dans un salon aux rideaux rouges, légèrement délavés. Trois filles bavardaient là, l'une occupée à raccommoder une robe. Tess appela d'autres consœurs. Avec son physique rondouillard et sa petite taille, il n'avait pas été évident au premier abord de deviner la profession de Tess, mais les autres avaient très probablement été choisies en fonction de leurs formes bien dessinées, tantôt plantureuses, tantôt presque innocentes, et son sang s'était glacé. Des blondes, des brunes, des rousses, des Shoumeiennes à n'en pas douter, celles qui venaient du couloir caché par un rideau là-bas maquillées et apprêtées, à l'opposée de celles qui se détendaient là.
Une sinistre vision d'autrefois se superposa à la réalité lorsque, de gêne, les filles se tournèrent vers Hiraeth qui déballait son paquetage, chuchotant tout bas, puis vers lui.
*
C'est un beau morceau que tu nous amènes là ! Est-ce qu'il appartient à X'o-Rath ? Est-ce qu'on peut jouer avec ?
Des rires, des poignes qui le forçaient à s'agenouiller, le bruit des chaines maintenant ses mains dans son dos, l'odeur... L'odeur du musc et de la sueur, cette puanteur qui annonçait la souffrance et la luxure.
Des mains indécentes sur ses plumes, sur ses vêtements, sur son corps.
Des cris, leurs cris de plaisir, ses cris de douleur.
Des râles.
Combien de fois avait-il vécu cette scène ?
La douleur du fouet pour avoir été insolent. La douleur des griffes pour l'être plus.
Le goût immonde de leurs êtres pervers et pervertis par l'ambition démesurée de plaire à la Mort.
L'esprit qui se brise un peu plus à chaque coup de reins indésiré.
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L'ange désormais déchu avait brutalement blêmi en réalisant. Elles aussi. Elles aussi elles... Le sang sourdait dans ses tempes, son esprit blanc, incapable de bouger. Son cœur avait brusquement accéléré et manquait des battements avec une cadence presque identique à ceux qu'il parvenait à donner malgré tout.
C'est fini maintenant. Ils ne me prendront plus.
Son visage s'était fermé, de nouveau vierge de toute émotion, lisse comme une pierre soigneusement polie, résultante de millénaires de poison, d'un réflexe devenu familier pour se protéger. Ne plus voir, pour ne plus savoir, pour ne plus souffrir. Compartimenter sa psyché dans un coin, tandis que son corps était offert à la lie de l'humanité.
C'est fini.
Certaines des cicatrices dans son dos le démangeaient à présent et l'envie urgente d'aller se laver lui donna un haut-le-cœur, mais rien, sur ses traits, ne transparut. Il avait repris pieds avec l'aide de Lidwen. Elle l'avait purifié à sa façon, avec son sourire, sa joie, son amour d'autrui.
J'admire cette part de toi. Tu es un ange de la rédemption. Un ange qui pardonne l'enfant qui vient de lui tirer dessus parce qu'on l'a éduqué à le faire.
Lidwen. Qui chantait parfois en changeant les fleurs près de son lit, sans se douter qu'il écoutait les yeux clos.
Lidwen et ses patients, qu'elle aimait comme sa famille.
Lidwen et ses cicatrices sur le visage, magnifiques.
Lidwen en train de placer une bourse discrètement entre les mains de Tess.
Lidwen et son œil borgne, se dirigeant vers lui.
Lidwen posant la main sur son épaule en appelant son nom. Le secouant fermement.
"... Hiraeth ?"
Son souffle avait retrouvé son rythme normal, et son cœur avait repris sa place au bon endroit dans sa poitrine, tout comme son esprit dans sa tête. Oko Jero s'était téléporté sur une banquette et parlait tranquillement avec les filles qui avaient fini par détourner leur attention de l'étrange visiteur. Tess s'approcha pour lui tendre timidement un verre d'eau. L'ange le prit avec mille précautions, but d'une traite.
"Vous traitent-ils bien ici ? L'homme à l'entrée... Vous défend-il convenablement ?"
Sa voix neutre lui parut lointaine, mais c'était bien sa voix. Froide.
"Vous avez le plus grand des courages."
D'où vient cette larme qui s'écrase au sol ?
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Hiraeth
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Info personnage
Race: Humain
Vocation: Guerrier assassin
Alignement: Chaotique neutre
Rang: D
Eh ben si j'avais su...
Mais comment aurais-je pu le savoir ?
Une fois de plus l'injustice du Sekai m'étreint. Comment, même à Melorn ce genre de violence existe ?
Parce que si l'ambassadeur avait blêmi au départ, j'ai mis ça sur le compte de la surprise. Se retrouver dans les coulisses d'une maison de passe, c'est pas le pur délire pour n'importe quel mec, a fortiori pour une huile des rouages diplomatiques. Y'en a qui se sont cassés pour moins que ça. Y'a un mec qui a été reconnu par une des filles et qui a fui sous les quolibets. Ça m'a coûté des thunes, mais c'était drôle et après, bizarrement, il leur a foutu la paix.
Moi ici, je suis toujours gêné par leur familiarité affectée, jamais sûr que c'est vraiment sincère et pas par habitude. Oko Jero ne comprend pas, il m'a assené plusieurs fois que c'était justement en ne faisant pas de différence qu'elles se sentaient acceptées et rassurées, et non pas en les mettant sur un piédestal. Mais je sais pas faire.
Du coup, elles me regardent en pouffant de rire, et elles s'amusent à me faire sortir de mes gonds. Un petit jeu entre elles. Cette fois c'est Myrrhe, la grande brune à l’œil liquide, mon point faible, qui s'y colle et vient poser ses bras sur mes épaules pour m'embrasser dans le cou. J'ai sursauté tellement fort que je me suis cogné à la poutre de traverse et elles ont explosé de rire. Oko Jero aussi. Connard.
En me massant le crâne furieusement, je me retourne et...
Malheur.
Je reconnais ce regard hanté. Ce visage qui redevient aussitôt lisse et froid, aussi imperméable que la peau d'un narval à toute atteinte extérieure. Cette posture tendue, cette animation qui quitte le corps pour gagner les ressources intérieures de l'esprit. Il ne dit rien, il reste là, s'il s'est décomposé quelques instants c'est tout, mais tout son être hurle son mal-être. M'approchant de Tess pour lui donner ma contribution bimensuelle au bien-être de ses ouailles, j'échange un regard avec elle. Elle sait, elle aussi. Elle en a vu bien plus que moi.
Qui l'aurait cru ?
Sylas, ce grand et beau baraqué, cet ambassadeur d'une nation admirée pour sa sagesse...
Cet homme a été abusé.
Reniflant, je m'approche avec précaution, tandis qu'une larme roule le long de sa joue, et cela me trouble, me poigne à un point incroyable. Comme quoi, y'a vraiment des salopards partout et personne n'est à l'abri. Ça me rend dingue...
« Sylas ? Sylas ! »
Je lui empoigne l'épaule, je lui parle mais ce n'est qu'après une bonne secousse qu'il redescend sur terre.
C'est comme si ses pupilles revenaient à la vie. Il est parti loin, et je devine quelque chose de profondément ancré. Tess lui amène un verre d'eau et il lui parle, quelques mots dérisoires qui n'expriment pas assez ce qu'il ressent, et une question dont la réponse ne lui plaira pas.
Tess jette un regard vers la porte et les filles, Jana et Myrrhe ont compris que quelque chose ne tournait pas rond. Dans l'expectative, elles nous observent de loin. Je me place devant Sylas et je fais signe à Oko de continuer la distribution, ce dont il s'acquitte de mauvaise grâce.
« Je... Oui, nous sommes protégées, ici. »
De l'extérieur. Des mecs trop saoulards ou trop braillards. De ceux qui ont les poches vides.
Ce sont surtout les intérêts de Rindo Belle-Tête qui sont protégés ici. Ce fabuleux salopard est imprenable. Un jour, les Eperviers placarderont sa tronche sur sa belle porte rouge. Un jour.
Mon regard sombre dérive sur les têtes qui défilent, à qui je distribue des soins, des médicaments, de quoi éviter les maladies vénériennes ou les grossesses non désirées, et je me sens cruellement impuissant.
Un autre Rindo verra le jour. D'autres bordels existent, partout. La misère humaine va avec la prostitution. La manière la plus honteuse d'humilier un être est de le briser sous soi. La violence la plus immonde est celle-là.
Voilà pourquoi c'est un domaine dans lequel je ne glisse pas un orteil. Je ne serais jamais un connard de violeur : je ne serais jamais un mec qui abuse de sa position, de son fric ou de sa gueule.
Je ne ferais souffrir personne. Et le pacte conclu avec ce démon a fini de m'en dissuader.
Je ne mérite l'attention de personne, aujourd'hui. Et sûrement pas d'elle.
Ici, elles sont dans une relative sécurité, et elles rapportent de l'argent à leur famille. Si le bordel fermait, elles seraient à la rue, et elles continueraient dans des conditions pires encore. Ça me détruit profondément la gueule de l'accepter et de continuer à jouer le bon samaritain en distribuant des piles de cachetons.
« ...Nous avons de quoi manger, nous loger, nous soigner grâce à Madame Bacri. Nous avons un salaire, de quoi aider nos familles. Nous sommes solidaires... ça pourrait être pire. »
J'entends les paroles de Tess au travers d'un brouillard de haine. Si Sylas s'est perdu dans son traumatisme personnel, ses réminiscences ont permis à mon enfer personnel de surgir. La pulsation se réveille dans mon orbite droite, que j'écrase de ma paume en grognant.
Je m'aperçois que je n'ai pas lâché Sylas, et je retire doucement ma main de son épaule. Respirer lentement. Célébrer la vie devant toi. Elles rient, en cet instant.
Je croise le regard de Myrrhe, indéfinissable. Cette fille est un mystère.
En quelques pas, elle s'approche de Sylas et il ne la dépasse que d'une demi-tête. Fière, elle s'adresse à lui le menton levé, poings aux hanches.
« Vous êtes qui, vous ? Un ponte de Liberty ? Y'a quelque chose que vous puissiez faire contre cette situation pourrie ? Parce que c'est quand même bien ironique qu'on reçoive de l'aide de bénévoles parfois plus pauvres que nous encore, ou de l'économie souterraine d'on sait pas où du Nomade, mais des autorités, que dalle. »
Tess écarquille ses grands yeux noirs, et je dois avoir à peu près la même gueule. Outch. Ça pique.
Hiraeth râle en #ff9900
Epigraphe
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- Pouvoirs:
- Agilité & Précision P2, Vue Augmentée P2, Pétrification, Invisibilité, Nyctalopie
Citoyen du monde
Sylas
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Les réponses tombèrent dans un sentiment de malaise généralisé. La moitié des personnes ici n'était pas dupe, l'autre moitié se gardait de s'aventurer sur un terrain dangereux et sensible. Si Lorien avait été là, il aurait déploré que son représentant se fût refermé de la sorte. C'était cette facette encore mystérieuse que personne n'avait pu dévoiler complètement, celle qui suggérait un vécu difficile et passé sous silence. Mais une fois Tess arrivée au bout de ses explications -logiques, profondément pragmatiques, et reflet d'une triste réalité-, une autre des jeunes femmes s'avança pour entrer dans la danse. Hargneuse, presque provocatrice, elle se campa sur ses jambes comme si toutes celles du bordel se tenaient derrière elle à la haranguer.
L'ange la laissa parler sans réagir, puis la dévisagea longuement en silence, comme pour jauger de sa ténacité. Pauvre enfant. Il devait avoir quelque chose comme 300 fois son âge, et sa réplique acerbe ne lui fit pas plus d'effet qu'une caresse. Néanmoins, puisqu'elle prenait le temps et la peine de poser la question, il estima qu'elle méritait une réponse argumentée et solide.
"Je suis un anonyme, un oublié comme vous, à qui une belle âme a un jour tendu la main. Elle m'a permis non seulement de me relever, mais aussi de regarder plus loin. J'ai travaillé jour après jour pour me sortir de l'abîme. Aujourd'hui je suis Sylas, ambassadeur de Melorn, la Cité-État elfique du grand Nord. Je n'ai certes aucun pouvoir ici, et ne prétends pas pouvoir accomplir de miracles. Je suis là pour marcher moi-même dans la boue, pour entendre vos histoires et partager vos souffrances. J'ai des idées à apporter. Et pourtant, je ne peux m'empêcher de vous poser cette question : que faites-vous de cette aide précieuse que l'on vous accorde ? A quoi mènent vos plaintes ?"
Il détourna un instant le regard vers Hiraeth, une autre bonne âme à n'en pas douter. Lui peut-être saurait où trouver ce qui leur manquait, lui dont les ressources semblaient dépasser quelque peu de son honnête façade de caravanier.
"Ce qu'il vous faut, c'est un professeur. Quelqu'un pour ouvrir votre esprit plutôt que vos cuisses. Quelqu'un pour nourrir votre connaissance en lieu et place de vos peurs. Savez-vous au moins lire et écrire ? Que ferez-vous quand votre beauté fanera sous le poids du temps ? Pensez-vous que le monde s'arrêtera pour vous aider ? Vous aboyez à tort sur quelqu'un disposé à vous écouter sincèrement. Je vous suggère de réfléchir un peu par vous-même et vous serez alors en mesure de répondre vous-même à votre question."
Si les mots pouvaient paraître durs, Sylas les avait prononcés avec calme, sans hausser la voix. Donner de l'argent pour qu'elles puissent vivre était un synonyme de générosité, mais pour vraiment leur éviter les pires ennuis tout en les extrayant de cet univers des bas-fonds, il fallait qu'elles envisagent de changer. D'apprendre et de travailler réellement, sans attendre qu'on vienne leur glisser un billet en échange de leur corps ou de leurs principes. De changer de vie, peut-être d'endroit, de mœurs, et si elles réussissaient, d'emmener leurs familles avec elles. Lui ne pouvait rien de plus qu'ouvrir une porte, comme avec le groupe un peu plus tôt. Il aurait pu lui proposer de grimper dans le charriot pour Melorn, mais la décision était porteuse de bien trop de conséquences pour être amenée si légèrement, au détour d'une simple conversation.
"Je suis ici car je n'ai pas l'intention de détourner le regard. Cependant, je ne puis rien faire seul. Il faut que soyez les premières artisanes de votre libération."
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