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    Takhys Suladran
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  • Lun 27 Mai - 14:23

    Takhys ne sursauta même pas quand la porte s'ouvrit, après qu'un coup eut été martelé dessus, comme pour annoncer une nouvelle venue. L'officier Dosian venait d'arriver, dans une parfaite synchronisation... juste après la soi-disant nécessité d'être deux pour procéder à une fouille au corps. Preuve plus qu'évidente pour la Sirène qu'il avait tout écouté le petit malin. Et son comparse qui ne voulait sans doute pas se retrouver tout seul avec la tavernière. Ou parce qu'ils se plaisaient à participer à deux quand la proie qu'ils pensaient tenir sous leurs autorités s'avérait facile ? De toute façon, elle n'était pas une de ces jeunes terrestres qui jouent les belles et qui frémissent quand les choses devenaient plus sérieuses. Elle se retint de rire avec sa légèreté habituelle quand des menottes furent déposées sur le comptoir.

    "Il ne faudra pas les oublier, officier."Dit-elle avec une pointe de malice dans sa voix cristalline.

    Elle se laissa manipuler, si c'était bien le terme à adjoindre à leurs prétendues recherches. Elle s'amusait, laissant à peine apparaître cela sur son visage souriant. Bien qu'elle eût un ou deux mouvements, elle était telle une murène faussement endormie, qui se laissait faire aux gestes de l'officier Bremer. Oh, elle veillait à avoir une ou deux réactions qu'une humaine aurait face à une proximité aussi forte avec un bel homme. Par contre, elle ne retint pas un élégant rire quant aux choses dangereuses qu'on pouvait trouver dans certains endroits insolites.

    "De vos dires, vous êtes des hommes de grandes expériences. Vous paraissez si modestes à dissimuler cette forte expertise qui en ferait rougir plus... d'une... Je peux m'estimer chanceuse alors. Si j'étais une redoutable criminelle, je pense que je commencerai à trembler de peur quand à mon proche avenir derrière les barreaux. "

    À la palpation exploratrice, elle ne frémissait même pas. Ce qui réagissait était juste le plaisir qui réchauffait son sang à travers ses veines, au pouls accéléré par la simple promiscuité de Gunnar, et du regard avide et affamé qu'elle lisait chez Pancrace. La tentation de pousser un peu plus loin le jeu lançait un appel très tentant. Tout venait à point qui savait attendre. Elle s'amusait trop pour tout gâcher. Ces humains... ils étaient si faciles à mener là où il le fallait, quand eux-mêmes ne se refusent pas une délicieuse créature à dévorer, plus encore quand elle se prête à leurs "devoirs"Le jeu monta d'un cran, quand l'officier Bremer passa du fessier aux formes et à la fermeté parfaites, à l'intérieur galbé de cuisses, non sans un passage sur leur extérieur. Mais ce n'était pas l'objectif de l'investigation. Le beau moustachu remontait lentement, mais habilement, vers les sommets des jambes, dans les ombres des plis et replis de sa longue jupe.

    "Je doute posséder des cuissardes doublées pour y cacher des surins"dit-elle d'une voix légère, presque un doux murmure.

    Il était habile, le bougre. Elle se retint de se mordiller la lèvre.

    "Vous avez un don, très cher… "

    Il poussait l'exploration toujours plus proche de l'entrée interdite, que seule Takhys pouvait permettre l'accès pour qu'il vienne en découvrir les profondeurs. Elle attendit qu'il arrive à l'ultime frontière, profitant de ces caresses qui lui donnaient de si bons frissons ; le bout de ses doigts était... Ce n'était guère évident à décrire. Elle ne trouvait même pas de mots pour expliquer cette intensité qui allait croissante. Elle avait l'impression de bouillir. Elle retint un gémissement. Il y avait...ca chatouillait ? Non, autre chose. Il pourra se vanter d'être le premier humain à éveiller si soudainement son appétit. Si elle n'était pas bloquée contre le comptoir, elle lui aurait dévoré les lèvres.

    D'un coup, elle serra d'un coup les cuisses. L'officier aura sa main un peu coincée, sans souffrance. Il pourra là aussi sentir qu'il y avait du muscle sous la peau fine, là où on trouvait d'ordinaire un peu de gras et une peau plus molle. Là, tout n'était que fermeté attrayante, qui appelait encore à l'explorer. Takhys tourna sa tête comme elle pouvait pour adresser un regard plus que langoureux.

    "Doucement officier, il ne faudrait pas déraper... "

    Elle ne put s'empêcher d'avoir une voix plus séduisante encore. Elle se retenait d'user de son Chant ; ce serait un poil dangereux.

    "Avant de partir en quête de mes chaudes abysses, ne serait-il pas judicieux de ne point vous exposez visuellement ? "

    Elle pointa sa tête vers quelques fenêtres.

    "Je m'en voudrais qu'on prenne mal votre travail... Ma salle d'eau est plus discrète. Après une telle intensité de travail, il faut vous ménager, vous prélasser...et partager certaines saveurs délassantes..."





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    Pancrace Dosian
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  • Sam 22 Juin - 9:40

    Ma crainte principale, à ce stade, c’est de finir relégué à un rôle convenu et limité de spectateur tout du long. J’ai pas d’appétence particulière pour ça, j’ai pas de mal à lever la bête, et tant qu’à faire, quand elle est réveillée, faut la faire sortir. Alors, si en plus je mater mon meilleur pote tringler une jeune femme épanouie et accorte, autant dire que j’préfère rentrer chez moi. J’dirai que j’ai un rhume ou la migraine, bref, c’est pas Gunnar qui me fera chier. Il me couvrirait, plutôt, probablement. Le plus raisonnable serait encore de le laisser faire son affaire et que j’aille faire notre boulot à tous les deux. Comme ça, il m’en devrait une belle, du genre que je saurais lui rappeler au moment opportun.

    Mais, déjà, il pleut toujours comme vache qui pisse, ce qui me gonfle passablement : on voulait pas patrouiller sous la pluie, et j’ai même la flemme de faire les cinq mètres qui me séparent de la boutique suivante. C’est un coup à finir tremper jusqu’à la raie des fesses, putain, alors qu’ici il fait chaud, au sens littéral en tout cas, et qu’on a à boire et à manger, toujours au sens littéral d’ailleurs.

    Et puis, merde, j’ai beau avoir fait sept ans d’études, j’suis un homme d’action, pas passif ou spectateur, même si l’observation fait partie des bases des compétences de l’officier républicain -’’Observer pour mieux comprendre, déduire, elucider’’, module de première année-, donc quand Takhys propose de nous relocaliser dans un endroit moins ouvert aux quatre vents, du genre avec pas des fenêtres partout par lesquelles des gens pourraient nous mater, j’peux pas dire que j’sois contre.

    C’est le moment où j’serais parti si l’invitation avait pas été accompagnée d’un regard du genre qui met des fourmis dans les jambes et le feu dans le ventre et le bas-ventre.

    En l’état, j’suis manifestement concerné pour ce qui s’agit de continuer la fouille au corps de façon plus approfondie, et la salle d’eau a beau être spacieuse, avec ses vasques et ses toilettes sèches, reste qu’on est trois dedans, et que ça commence à mettre les mains un peu partout. Au hasard d’un vêtement qui tombe, d’un changement de position pour se mettre plus à l’aise, mes yeux croisent ceux de Gunnar.

    « Hors de question que ça se touche, hé ? »

    Il est d’accord, faut pas déconner. J’me demande jusqu’où on peut pousser le vice : est-ce que lui proposer de devenir invisible, ça serait abusif ? Est-ce que me métamorphoser en lui pour qu’il ait l’impression d’être seul ou avec un clone, ça se fait ? Genre moi en lui et lui en invisible ? Ca rendrait le tout moins bizarre, puis la vocation de la magie, c’est quand même d’être utile. Tant de questions, si peu de réponses, puis mon esprit est occupé ailleurs actuellement.

    ****

    J’suis essoufflé.

    Evidemment, faut pas faire mauvaise figure devant un collègue, mais c’est pas que ça. P’tet que le chasseur n’était pas çui qui croyait, et que les rôles se sont inversés à un moment, comme en témoigne la trace de morsure que j’ai sur l’épaule. P’tet aussi que c’était quand même sympa, et qu’on n’est pas les plus voraces du lot, à voir la tavernière qui ramasse ses vêtements, en vrac au hasard de la salle. J’attrape ma chemise, non, trop grande, c’est celle de Gunnar, donc j’la jette dans sa direction pour trouver la mienne.

    Puis y’a un bruit de porte, qui semble venir de l’arrière, et une voix qui sifflotte tranquillement.

    « ... Takhys ? »

    Est-ce qu’on va avoir le droit au retour du mari jaloux ? D’habitude, par politesse, j’m’esquive pour pas créer de conflit ouvert : le gars se fait cocufier, je vais pas en plus lui casser la gueule et le foutre dans une geôle. Il passe déjà une journée de merde, après tout. Enfin, parfois, il le cherche bien, et si c’est mérité, c’est pas volé. Mais j’évite, et pas que pasque j’aime pas regarder par-dessus mon épaule quand je me promène en ville. Je hausse un sourcil en direction de la tavernière, mais elle se contente d’un mouvement neutre des épaules.

    L’inconnu est dans la cuisine, maintenant, et j’me dis que si c’est un voleur, c’est vraiment pas de bol pour lui.

    Et y’a une autre porte qui s’ouvre, cette fois sur un concert de bruits, de jurons, et de grognements. On entend qu’un mot sur deux, des timbres, mais cette fois, c’est Gunnar et moi qui tournons la tête avec l’air surpris.

    « C’est moi ou... ? Que j’demande en chuchotant.
    - Je crois bien, qu’il répond. »

    C’est que, à n’en point douter, ceux qui viennent de rentrer dans la salle commune du bar, c’est nos hommes. Pas l’effectif complet a priori, vu que le boucan est encore modéré, mais j’me souviens distinctement qu’on leur avait ordonné d’aller patrouiller pendant qu’on visitait les commerçants. Alors, certes, on en a pas visité beaucoup. Mais, pour bien connaître les itinéraires des rondes, y’en a aucune qui passe par l’intérieur du Marsouin.

    J’me prépare déjà à les engueuler comme du poisson pourri, puis j’me rappelle que mes chausses sont au niveau de mes chevilles, ma ceinture par terre, et que j’ai ma chemise à la main. Ahem. On va d’abord remettre un peu d’ordre républicain par ici.

    Puis on s’occupera de l’inconnu, aussi.
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  • Mar 16 Juil - 19:02
    Je regarde mon futal en jetant un sale regard sur la tâche qui forme un gros cercle dégueulasse au niveau de la cuisse gauche. Je sens une fois, mais j’arrive pas à en distinguer l’origine. ça peut être tout et n’importe quoi, surtout après ce qu’il s’est passé. Pourquoi je m’en soucie alors qu’il y a la drache dehors et que ça pourrait être de la pluie ? C’est quand on sait se protéger. Le truc qu’on a le moins envie de subir, c’est l’humidité dans le fute et dans les chausses. Si nos capes sont élimées, elles sont toujours fonctionnelles. On faisait de belles choses à l’époque pour l’Office Républicain. Aujourd’hui, on nous a un peu oublié.

    Aujourd’hui, on s’est un peu personnellement oublié. Je récupère la chemise que m’envoie Pancrace, observant un instant son torse viril avant de regarder le mien, m’assurant pour la centième fois que je ne fais pas pâle figure à côté. Sur beaucoup d’aspects, je me suis un peu comparé, mais en même temps, dans ce genre de circonstance, on est généralement seul avec la belle. On a pas trop l’occasion de se comparer aux autres. Heureusement, dans l’affaire, on était peut-être pas assez de deux pour satisfaire la bête. Mon regard glisse sur elle, encore partiellement dénudée, détaillant une dernière fois ce qui a été minutieusement manipulé par la crème de la crème de l’Office Républicain. Je m’en pourlèche les babines un instant alors que j’ai techniquement plus de jus. Je suis lessivé. Je me concentre sur ma chemise à bien la boutonner, dissimulant plusieurs marques. J’ai reçu plus de blessures que lors de Kaizoku, c’est dire.

    C’est ce genre de rencontres qui vous fait porter un autre regard sur les gens. Et autant dire que j’aimais pas trop les non humains, en rapport aux faits qu’ils sont foncièrement terrifiants car dotés généralement de capacités magiques effroyables, mais les Sirènes, c’est plutôt très agréable. Je serais probablement plus enclin à accepter les sirènes dans notre belle République. Les tritons, un peu moins, j’y vois plus d'inconvénient et puis, on est déjà assez fort sur la mer. Cette découverte de queue de sirène, ça nous a tous surpris. Puis, on a montré nos petits talents à chacun et finalement, les petites choses de la vie sont des friandises croustillantes quand on sait les utiliser au bon moment avec les bonnes personnes.

    On est un peu moins ouvert aux collègues qui viennent au mauvais endroit et surtout au mauvais moment. On échange un autre regard avec l’ami Pancrace pour savoir quoi faire. La propriétaire n’est clairement pas en tenue pour accueillir les nouveaux clients avant qu’ils ne s’en inquiètent et si elle sort comme ça, je m’inquiète pour notre troupe : ils n’ont aucune chance, surtout Fifi, le nouveau, dont la franche camaraderie de l’Office Républicain lui a peut-être déclencher ces premiers émois. Pancrace n’est pas non plus en état. Je vais me dévouer.

    -Je m’occupe de nos gars.

    Je me dirige vers la porte d’un bon pas. Je sens que Pancrace veut me dire quelque chose, mais il est trop tard, ça s’agite un peu trop. Tarot gueule un “Y’a un problème ?” et si oui, il y’en a un, je ne voudrais pas qu’ils le découvrent. J’ouvre la porte et je referme aussitôt derrière moi pour pas qu’ils puissent jeter un regard derrière moi. Ils me regardent l’air particulièrement surpris.

    -Capitaine ? Qu’est ce que vous faites ?
    -Moins fort !

    Je leur intime de baisser d’un ton. Ils s’approchent, me détaillant des pieds à la tête.

    -Qu’est ce que vous faites, Capitaine ? Et où est le Capitaine Dosian ?
    -On est tombé sur quelque chose de gros. Quelque chose de sérieux. Vous tombez à pic. J’ai besoin que vous vous mettiez en planque autour de cette taverne. Identifier les menaces et surveiller les entrants et sortants.
    -Mais pourquoi ?
    -Je peux pas vous dire pour l’instant, faut le faire tout de suite.
    -Nan mais pourquoi vous êtes cul nu ?

    Je baisse les yeux. En effet, à force de regarder mon futal, j’ai oublié de le mettre. Je leur lance un regard courroucé.

    -Je ne suis pas cul nu, Toubib, j’ai ma culotte républicaine.
    -C’est un peu tout comme, mon Capitaine. C’est juste un peu surprenant de vous voir sortir de la salle d’eau à moitié en uniforme. Ça ne fait pas très sérieux.
    -Il y a un truc dégueulasse qui a tâché mon falzar. J’essayais de le nettoyer.
    -Si vous êtes sur un truc important, pourquoi est-ce important de le nettoyer ?
    -Parce que si vous, vous posez des questions, qu’est ce que diront les civils ?
    -Pas faux. Faut se mettre en position les gars.

    Grognement dans les rangs. Personne n'a envie de retourner sous la pluie. Fifi éternue. Il a pris un coup de froid. Magnanime, je lui fais signe.

    -Reste à l’intérieur, Fifi.
    -Je peux aussi ?
    -Non Tarot. Je compte sur toi pour positionner les gars dehors.
    -Fais chier.

    La troupe sort de mauvaise grâce pour se placer autour de la taverne et dans les rues adjacentes. Je vérifie que les têtes passent pas devant les fenêtres et j’attends un instant avant de me retourner vers Fifi.

    -Mon gars. J’espère que tu sais tenir un secret.
    -Boui Capitaine.
    -Viens ici, tu vas comprendre et ça va te réchauffer.
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    Takhys Suladran
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  • Sam 3 Aoû - 17:19
    Les lèvres de la Sirène marquaient un très grand sourire. Il n'avait qu'un sens précis : celui d'une femme comblée. Son cœur tambourinait encore de cette intense et sulfureuse passion qui avait plus que dépassé ses attentes affamées. Les deux officiers républicains avaient eu un tel niveau que cela était presque... du professionnalisme, un don même. Elle s'en mordit le bout de ses lèvres mêmes, frissonnant non sans un certain plaisir à l'air frais qui arrivait à passer et qui effleurait sa peau en sueur. À croire que le côté aérien du hasard voulait rallumer la flamme de la gourmandise de la sirène, en laissant cette minuscule bise chercher à imiter le chaud baiser des deux humains.

    Pour éviter de se laisser emporter dans un nouvel élan de désir profond et ardent, elle attrapa le haut de sa tunique de robe, tout en portant un langoureux regard contemplatif et guère rassasié sur chaque torse des deux hommes. Chaque ligne de leurs membres, de leurs muscles qui roulaient sous la peau. Elle se pinça les lèvres pour ne pas rire en remarquant les traces de morsures sur la peau. Hum, elle s'était un peu trop lâchée, on dirait. Mais il n'y avait pas eu trop de plaintes à ce sujet-là. Leurs talents avaient été au-dessus de cela. En se remémorant les actes de chacun, elle passa de Pancrace à Gunnar, passant la pointe de sa langue au commissure droit de ses lèvres. Si jamais il venait à chercher un emploi à la hauteur de ses capacités naturelles, elle l'embaucherait de suite. Il avait des doigts d'or... d'une rare agilité qui avait su atteindre les points les plus sensibles de son être. Et cette exploration intérieure... Elle calma vite l'incendie qui renaissait de ses braises chaleureuses, profitant du court vol d'une chemise passant de main en main pour rire de ce genre brisant une montée d'appétit vorace.

    À l'instant où elle voulut gratifier les deux hommes de leurs secrètes compétences, la porte de l'arrière de la taverne s'ouvrit. Un nom parvint à toutes les oreilles présentes dans la salle d'eau : celui de Takhys, prononcé par une petite voix masculine. Hum... elle avait complètement oublié la livraison de ce soir. Et... La porte principale émit son grincement d'ouverture, à son tour. Il y eut plus de voix. Pancrace et Gunnar se lancèrent un regard muet, pendant que la Sirène les observait, avant de passer la tête dans sa tunique.

    Leurs hommes, hein... les choses se compliquaient un peu d'un coup. Et pourtant, elle gardait toujours le sourire. Ce fut Gunnar qui se proposa d'aller régler le début des ennuis avec leurs subalternes, laissant son compère de patrouille avec elle. Elle lui lança une petite oeillade des plus significatives. Il serait amusant de relancer les hostilités presque... volcaniques. Le malheureux pourrait se récolter une autre morsure en souvenir. Mais il y avait son autre "client". Pour l'instant, elle ne savait pas s'il avait pris le temps de partir ou de se cacher dans la réserve. De ce qu'elle arrivait à entendre, les hommes de la petite patrouille s'en retournaient dehors pour se placer autour de l'établissement. Une charmante et délicate attention de leur part, vraiment.

    "Il semblerait qu'un de mes commis de cuisine veuille faire du zèle ce soir. Je risque de le trouver évanoui par tant de présence soldatesque dans les parages."

    Elle s'était un peu rapprochée de Pancrace, en minaudant juste un peu, laissant volontairement le haut de sa tunique ouverte, pour offrir une magnifique vue sur sa poitrine généreuse et ferme.

    "Avez-vous retrouvé votre souffle, Capitaine ?"

    Elle adorait tellement jouer de la sorte. Ou alors était-ce pour détourner l'attention de l'autre bonhomme qui avait peut-être son sort scellé avec la patrouille ? Bah, c'étaient les risques du métier. Après, s'il venait à tout déballer, là elle aviserait. Après tout, Gunnar et Pancrace étaient des auxiliaires de la République, exerçant une dure profession qui méritait bien quelques petits à-côtés. Maintenant, si l'autre venu était venu sans le coffret, ce serait plus facile. À chaque problème sa solution, après tout.

    La porte de la salle s'ouvrit à nouveau et elle ne put s'empêcher de glousser sur un beau timbre cristallin.

    "Apportez-vous le dessert, Capitaine ?"
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  • Lun 12 Aoû - 21:21

    Difficile de pas loucher quand le décolleté arrive sous mes yeux, et j’me demande si Gunnar m’en voulait si on s’octroyait un second round, vite fait, dans le feutré. Mais la première manche était déjà rapide, et le travail a l’air de nous avoir rattrapés. C’est aussi ça, officier républicain : toujours prêt à agir pour le bien commun de la nation, même à nos dépens ou quand on aurait clairement... mieux... à... foutre. Dans tous les sens du terme, et avec mes compliments à la dame, bien entendu.

    En tout cas, mon collègue est sorti le premier, à moitié vêtu, et j’l’entends distribuer des ordres à droite à gauche. Faut dire que leur mission, c’était de patrouiller à l’extérieur, pas de venir se réchauffer dans les débits de boisson de la zone du port. Non, ça, c’était ce qu’on s’est gardé pour nous au terme d’un épique duel de pile ou face, avant que la solidarité de la hiérarchie ne prenne le pas sur toute idée de justice et d’équité. Dans l’arrière-salle, le gus hésite toujours, fait un pas en direction de la porte, puis vers la salle commune, reste immobile à tendre l’oreille, probablement.

    Et les autres ressortent en bougonnant profiter de l’air frais du dehors pendant que j’reboutonne rapidement mes effets personnels.

    « J’ai retrouvé mon premier souffle, et le second est pas loin, mais y’a quelques trucs qui nécessitent malheureusement notre attention, hé ? Enfin, on va essayer de s’y consacrer rapidement et proprement, en tout cas. »

    Le fil de pensées un peu trop joyeuses est interrompu par quelqu’un qui toque à la porte avant que la tignasse rousse de Fifi ne passe par l’ouverture, alors que j’ai les mains sur ma ceinture et que Takhys le regarde bien de face. Il devient presqu’aussi rouge que sa chevelure, avant de refermer brusquement derrière lui. Fifi, c’est un de nos meilleurs éléments, mais par certains aspects, il n’a pas bien compris que l’arsenal complet des officiers républicains pouvait avoir lieu hors des lettres soigneusement manuscrites sur les petits papiers légaux du pays.

    Bref, il est un poil trop honnête.

    « Le dessert ? Je... Non... Et je ne suis pas capi... »

    Je repousse sèchement la porte.

    Heureusement, grâce à l’influence positive et bienveillante de ses collègues et ses supérieurs, à savoir nous, il se détend petit à petit, et d’ici quelques années, j’doute pas qu’il deviendra un excellent officier. J’adresse un signe de tête à Takhys avant de sortir pour le rejoindre alors qu’il observe d’un air intense les verres qui restent sur le comptoir avec la planche vide. Une noisette tombée du saucisson le guette, alors j’l’attrape et je la gobe avant qu’il tombe dans l’embuscade. J’voudrais pas le perturber davantage.

    Plus loin dans la pièce, Gunnar m’adresse un regard plein d’innocence qui tromperait même pas sa très chère mère. J’aurais dû me douter que c’était pas venu tout seul, et à le voir finir de se rhabiller, il a dû se dire que y’avait pas de raison qu’il soit le seul à avoir l’air débraillé. Franchement, ça serait un peu mesquin, comme vengeance, si ça n’avait pas été Fifi. J’me racle la gorge.

    « Fifi, certaines informations découvertes dans le cadre d’enquêtes doivent rester confidentielles en raison de leur importance pour l’office, tu comprends ?
    - Bien sûr, Capitaine, je ne soufflerai mot à personne de... de...
    - Ah. Ah. Hm. »

    On échange un regard avec Gunnar, et j’passe mon bras autour des épaules de Fifi.

    « Non, je parlais pas de ça, on s’en fout, ça n’a pas d’importance. »

    Toujours faire croire que la vraie cible n’est pas celle qu’on croit. Principe de base pour éviter les rumeurs et les emmerdes.

    « Non, reprend Gunnar. Par contre, ce saucisson aux noisettes ? Est-ce que tu crois qu’il est réellement réglementaire ? Qu’on peut le tracer jusqu’au producteur ? Et la bière, à ton avis, elle a été brassée où ? Quelle est l’origine du bois des tonneaux ?
    - Je... sans doute ? Demande-t-il, destabilisé par le brusque tour des questions.
    - Voilà les questions qu’un véritable officier républicain doit se poser, savoir poser, et pour lesquelles il doit obtenir des réponses. Tu comprends ça, Fifi ? Tu le comprends ?! »

    Il titube sous le poids des questions et des réponses, puis ses yeux prennent un air décidé et combatif. Il se redresse de toute sa hauteur, et se met au garde-à-vous. J’ai toujours dit que Fifi avait du potentiel. Déjà, on est sûr qu’il va pas saloper le boulot, c’est une qualité considérable. D’aucuns diraient que la marche est basse, et je leur rétorquerais qu’ils devraient faire un tour chez la GAR avant de la ramener. C’est ce qui nous sépare du troufion moyen : le goût du travail bien fait.

    Enfin bon, on fait de la pédagogie, on forme l’élite de demain... ou après-demain, plutôt, mais il reste toujours l’autre pitre dans la cuisine. Et ça, faut s’en occuper, quand même, à un moment. Bon, bien sûr, c’est pas un voleur ou un assassin : quelqu’un de coupable serait parti depuis bien longtemps en entendant une telle présence dans la salle principale, après tout. Sans faire de chichis, donc, j’pousse la porte et j’vois un gars malingre avec un chapeau et le col de sa cape de pluie remonté, ce qui fait qu’on distingue à peine le bout de son nez.

    Il sursaute en me voyant entrer brusquement, fait un pas de recul en direction de la sortie.

    « Ne vous inquiétez pas, mon brave, je suis de l’office républicain, vous n’avez rien à craindre.
    - Ah, euh... Oui...
    - La propriétaire nous a informés qu’un des commis risquait de venir, donc ne vous en faites pas pour nous. C’est une simple inspection de routine.
    - Oh, oui, pas de problème, c’est tout naturel... »

    Il a l’air un peu stressé, mais j’peux le comprendre : on a souvent cet effet intimidant sur les gens. J’m’avance avec bonhommie jusqu’à lui, et je lui enlève son chapeau avant qu’il puisse réagir. Il essaie de l’attraper, mais j’le jette à travers la pièce sur la patère à laquelle les tabliers de cuistots sont suspendus. Puis je pose la main sur son épaule, et je commence à lui enlever sa cape.

    « Non mais c’est pas la peine de...
    - Allons, allons, tout va bien, je vous aide à vous débarrasser pour que vous poussiez travailler. Takhys nous a dit que vous veniez parfois cuisiner en extra. »

    Evidemment, je suis rarement aussi sympa sans la moindre raison.

    « Et, justement, moi et mes hommes, on a un petit creux. On se disait que vous pourriez peut-être nous préparer un petit quelque chose, pas un truc extraordinaire, hein, juste de quoi se caler l’estomac ? »

    C’est qu’ils ont patrouillé sous la pluie, et nous, on a fait de l’exercice, donc on commence à avoir la dalle, malgré l’apéro.

    « Allez, tenez, et je vous laisse choisir. Par contre, j’aime pas trop les carottes, d’accord ? La spécialité du chef, ce sera. On est une petite quinzaine. »

    On paiera, bien entendu, on n’est pas des monstres. Enfin, sauf si c’est offert, un cadeau, ça se refuse pas.

    Petit à petit, le gus s’est décomposé, et il oscille maintenant entre un blanc pâlot et un vert dégueulis. Mais il attrape le tablier que je lui tends, et ouvre deux tiroirs pour en sortir des couteaux et des casseroles. Bon bah s’il est lancé, je vais pas le déranger outre-mesure, hein ?

    « Si vous avez besoin d’aide, hésitez pas, on vous enverra quelqu’un. »
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  • Ven 16 Aoû - 23:39
    Après nos explications plutôt claires, Fifi tente de les mettre en pratique. Pour connaître l’approvisionnement des produits, il n’y a pas une infinité de solutions, il faut demander. Ainsi, Fifi fait face à la plantureuse Takhys dont le regard en dit long sur son envie de manger tout cru l’innocent Officier Républicain qui a bien du mal à ne pas détourner son regard.

    -Et sinon, pour assaisonner vos viandes, vous prenez ?
    -Le meilleur. Le genre qui dégage une odeur de musc… puissante… qui anime toute la bestialité en vous.
    -Ah d’accord.

    C’est tout de même impressionnant. D’expériences, j’aurais dit que nous autres, les hommes, on est tout de même les créatures les plus queutards que la création est permise dans tous l’univers, mais j’ai l’impression que toute notre suprématie n’est rien comparée à la fournaise primale de Takhys. Deux officiers Républicains ne suffisent donc pas. faut-il que toute la garnison y passe pour calmer ces ardeurs ? Pour le salut de Fifi, il évitera de goûter au fruit défendu et d’un échange de regard, j’ai été très clair avec la tavernière. On peut chauffer, mais on n'allume pas l’avenir de l’Office comme ça. J’ai jeté des regards fréquents dans la grande salle alors que je suis allé me chercher mon futal, toussotant avec insistance quand Takhys tentait de mettre son opulente poitrine sous le nez de Fifi comme si elle cherchait à lui faire demander leur provenance.

    Mais il n’a pas cédé. Il ira vraiment loin.

    De nouveau sapé et presque pas débraillé, je passe à côté du duo insolite pour nous servir deux grandes bières. La patronne laisse faire avec un sourire dans un vain espoir, que ça nous requinque pour le dessert. Je lui fais un clin d'œil salace en remplissant les verres, les doigts tapotant innocemment sur le comptoir pour réveiller un souvenir récent. Une taquinerie que je regrette presque instantanément. C’est amusant de voir la fournaise sur le point d’exploser et de la titiller sur ce point, mais ça serait difficile à expliquer à Pancrace si elle projette Fifi sur le comptoir pour une saillie. Je pars rejoindre Pancrace dans la cuisine qui ne réapparaît pas, découvrant le commis aux cuisines et mon collègue posé contre un mur, le regard un peu suspicieux. Je m’approche, lui tendant son verre.

    -Ah, c’est pas de refus ça.
    -Il se passe quoi ?
    -Il fait à bouffer pour toute la troupe. C’est que j’ai faim.
    -Moi aussi, mais le dit pas trop fort, faudrait pas qu’elle comprenne de travers.
    -Va peut-être falloir la laisser avec les hommes, j’ai pas l’impression qu’on va avoir notre bouffe tout de suite. Un problème mon gars ?

    Je perçois le problème. Le commis n’a pas l’air très à son aise, tournant entre les différents postes sans savoir quoi faire. Il bredouille.

    -C’est que… Faut que… Madame Suladran n’est pas là ?

    Peut-être bien que notre gars ne sait pas faire sans demander la permission. C’est vrai quoi. Il pourrait croire qu'elle n'est pas là et qu’on s’accapare les provisions comme des malandrins. On aurait dit alors “réquisitionner”, mais à cette heure de la soirée où tout est calme, difficile de le justifier. Je m’en vais l’appeler en direct, passant la tête dans la salle principale, découvrant un Fifi n’ayant plus aucune marge de manœuvre pour échapper à la proximité imposante de la patronne. Je les siffle comme si on sifflerait une donzelle.

    -On a besoin de vous à l’arrière pour… faire à manger.

    Mimant le geste de croquer quelque chose à pleine dent. Je suis décidément irrécupérable. Fifi se dégage et me rejoint, forçant Takhys à nous suivre à son tour. D’un œil, elle capte l’ensemble du problème.

    -Peut-être que nos chers Officiers Républicains veulent déguster une spécialité de la maison ? Je prépare à la perfection les rognons de coq, sauce au vin…
    -Juste un jambon purée, ça ira très bien, hein…

    Mais difficile de faire entendre la patronne qui veut sans doute nous impressionner. Elle prend d’une main experte son commis sous sa direction, mettant en branle son empire qui est la cuisine. Avec Pancrace, on boit, surveillant Fifi qui tente de poursuivre ces investigations sur la traçabilité des approvisionnements. Je finis par me rappeler qu’on a des gars à l’extérieur qui poirote alors qu’ils seront attendus à la table. si je les fais attendre pour rien pendant que ça chauffe, ils vont être chafouins. Alors, je finis par ouvrir une fenêtre pour les appeler, gueulant dans la nuit. Bientôt, la quinzaine de couverts entre dans l’établissement, bien évidemment trempée.

    -Dégueulassez pas tout !
    -Sinon, nettoyez derrière vous. On vous fait à manger, ça serait tout de même poli de laisser l’endroit comme vous l’avez laissé.
    -Et sinon, Capitaine ? Le truc de gros ?
    -Ah, ça ? Je pense qu’il nous a filé entre les doigts. Vous êtes arrivées trop tard, mais ce n’est pas votre faute, hein, c’est juste pas de chance. Profitez-en pour mettre la table.

    Si Tarot et Surin s'éclipsent rapidement dans la salle principale autant pour chercher des verres que pour en vider leur contenu habituel, Krueger observe la cuisinière d’un œil avide comme d’autres, mais pour une autre raison. C’est généralement lui qui fait la bouffe quand on est en mission et on ne lui en voudra pas d’égayer davantage nos repas par quelques secrets de cuisine récupérés dans les meilleurs pots.

    Déjà, la joyeuse bande commence à faire entendre de la voix, frappant en chœur sur la table.

    -On a faim ! On a faim !
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  • Dim 8 Sep - 17:48
    Et quel dessert ! Le jeune rouquin était vite devenu rougeaud en pensant à ce qui s'était tramé là-dedans. Voilà un jeune humain qui n'avait pas encore connu la chaleur d'une femme à ses côtés, et voir... plus et affinités. Peut-être qu'elle pourrait arranger cela. Elle retint à peine son rire cristallin face à ses balbutiements, avant que la porte se referme, tout en le contraignant à se retirer, mû par la main déterminée de son supérieur. Puis, Pancrace lui fit un signe de la tête avant de sortir.

    La Sirène affichait un grand sourire, malgré la petite pression que lui imposait indirectement la présence des officiers républicains. Si l'autre bougre ne tenait pas son rôle de "commis", cela risquerait de chauffer pour lui. Et elle aussi serait prise dans le flot de la complicité. Elle n'en frémissait pas de peur pour autant. La vie quotidienne était faite de risques. D'ailleurs, elle n'oubliait toujours pas la petite cassette qu'elle avait laissée sur le comptoir. Il était encore surprenant qu'elle soit toujours là, sous leur nez, pouvant être ouverte à tout moment. Il faut dire que sur un comptoir, une petite boîte en bois paraissait si innocente. Bah, comme à son habitude, elle avisera. Elle verrait comment rebondir si les choses venaient à faire pencher la balance du mauvais côté.

    Après avoir arrangé un peu sa tenue et ses cheveux dorés, elle sortit, avec un magnifique sourire, empreint d'une petite malice. Et forcément, le pauvre jeune rouquin ne put échapper à son regard avide. Goûter à la jeunesse innocente avait son charme et ses petits plaisirs, après tout. Mais si elle se mettait au défi de lui mettre le grappin dessus, juste pour s'amuser à ses dépens, elle devrait composer avec ses deux comparses. Gunnar et Pancrace l'encadraient comme s'il était une marchandise précieuse, à éloigner de sa voracité ardente. Alors, pour le détourner de sa venue plantureuse, les deux hommes l'assaillaient de questions. En même temps, il était jeune, inexpérimenté. Il devait savoir faire son boulot.

    À force d'être secoué, le dénommé Ifi reprenait du poil de la bête. Voilà qui n'était pas sans animer un peu plus l'intérêt de l'Aquarienne. Puis, quand Pancrace se dirigea vers la cuisine, elle le suivit à peine du regard. Cela aurait aiguisé les soupçons. Après tout, l'autre venu devait savoir dans quoi il avait mis les pieds. S'il était arrivé plus tôt, il ne serait pas dans la merde, avec toute une patrouille autour de lui, dehors comme dedans. Vaguement, elle entendait la voix du capitaine lui demander de faire à manger. Elle se retint de rire. C'était cocasse quand même. S'il réchappait à tout ce bordel, il en aurait une bonne à raconter plus tard.

    Bon ! Et si elle asticotait le jeunot roux ? Elle le fixa de ses deux beaux yeux bruns pailletés d'ambre. La timidité rougissait encore ses joues, à ce qu'elle crut voir. Et à sa petite question de "contrôle", elle ne put s'empêcher de faire un magnifique sous-entendu. De quoi l'ébranler peut-être ? Elle avait même pris une posture légèrement aguichante, pour le provoquer un peu, avant de croiser le regard de Gunnar. Elle eut envie de rire en voyant le sérieux qui luisait dans ses yeux. Elle lui adressa un petit rictus de défi. Braver l'interdit pouvait être si stimulant ! D'ailleurs, elle se pencha juste un peu plus en avant. Le raclement de gorge fut un rappel à l'ordre. Le rouquin parut réussir à ne pas rougir plus. Peut-être qu'en insistant d'une autre façon, il pourrait céder. Elle était très patiente.

    Sans mot dire, elle regarda Gunnar agir allègrement, comme s'il était lui-même tavernier. Tout sourire, elle le laissait faire. Après tout, se montrer coopérative était le mieux à faire, non ? Elle eut un petit rictus au coin de la lèvre quand il lui fit un léger clin d'œil aguicheur. À son petit jeu de doigt, elle lui rendit son clin d'œil, et surtout, elle darda la pointe de sa langue sur le dessus de ses lèvres. Il était clair qu'elle n'était pas encore rassasiée. Elle lorgna le malheureux Fifi, avant de voir l'officier rejoindre son collègue. Les choses pourraient se corser. Elle resta sur le qui-vive de ce fait. C'était l'occasion d'essayer de hameçonner le petit rouquin. Et forcément, c'est toujours aux prémices de l'offensive que tout se coupe.

    Gunnar avait bien veillé à ne pas trop s'éloigner, appelant déjà la belle tavernière à rejoindre son commis, qui avait clairement besoin d'aide. Elle ne manqua pas de rire devant la petite mimique du moustachu. Le rouquin alla se réfugier vers lui, tandis qu'elle suivait son sillage. Après un petit échange verbal, elle sut ce qu'elle ferait à manger. Avec agilité, elle passa le bout de ses doigts sur le haut des fesses fermes de l'humain à moustache, juste pour le taquiner, avant de se mettre à son tour au fourneau. Le regard qu'elle jeta à son contact fut clair : qu'il continue à jouer son petit rôle. L'humain manqua de paniquer quand il entendit le reste de la bande soldatesque se pointer dans la taverne. Les finauds... La coopération se résumait maintenant à manger gratos. Elle se retint de rire. Avec de la chance, si tout se passait bien, cela apporterait quelques nouveaux clients "réguliers".

    Elle s'activa promptement pour préparer un plat simple, mais qui avait le mérite d'être bon. L'officier avait parlé de jambon et de purée ? Alors soit ! Elle ordonna à son "cuistot" du moment de lui sortir des contenants remplis qu'elle gardait pour faire des potages ou des bouillons de légumes. Des pommes de terre cuites de la veille, qui étaient dans un fond de bouillon de légumes ? Cela devint une sorte de purée de légumes, qu'elle mit à réchauffer. Un peu de lait crémeux pour donner une texture plus soyeuse, quelques épices, un poil de sel. Une bonne base. Elle lorgna un peu ce qu'elle avait encore sous la main. Tiens, un reste de pignons de pin. Très bien. Mais il manquait un petit plus. Elle sourit en voyant son jambon fumé.

    Elle ordonna à l'autre gugusse de préparer des bols, et de se tenir correctement en allant les mettre devant chaque membre de la patrouille, sans oublier la cuillère. Après quoi, il coupera de belles tranches de pain. Elle arrivera avec sa marmite fumante, pour remplir chaque récipient creux d'une bonne louche de soupe odorante.

    "Patientez juste un peu, messieurs. Vous allez apprécier ce que je vais rajouter."

    Le commis, un peu pâlot – ce qui devenait un peu problématique à ses yeux – apporta une belle planche de bois, avec une bonne vingtaine de tranches de jambon fumé, qui sentait bon. Très bon. Elle posa la planche en bord de table, pour que les hommes se servent chacun leur tour. Et, dans un élégant et rapide passage, elle offrit une petite poignée de pignons de pin dans chaque bol.

    "Bon appétit !"

    D'un mouvement de tête, elle fit comprendre à l'autre tremblant de retourner en cuisine. Elle jeta rapidement un coup d'œil à la petite cassette, toujours posée sur le comptoir, qui attendait de partir dans les mains du messager, livide face à la présence des officiers républicains.
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  • Mar 24 Sep - 19:32

    Le sourire des troupes fait chaud au coeur, quand ils reçoivent leur bol avec du jambon cuit, de la purée faite sur le pouce, et qu’on leur ouvre un nouveau tonnelet de bière. Evidemment, y’en aura pas assez pour la soirée, mais faut pas oublier qu’on est là pour le travail, même si on a tendance à être un peu distrait actuellement. C’est qu’entre la nécessité de surveiller que Fifi fasse pas de bêtise et que les officiers débordent pas n’importe comment, on est quasiment devenu professeurs des écoles plutôt que capitaines de l’office républicain.

    Certains diraient que y’a aucune différence.

    Mais autant c’est vrai pour la GAR, autant, nous, on surveille clairement des adolescents turbulents, grâce à leurs sept ans d’études.

    « Alors, que j’demande à Gunnar, tu penses quoi de Fifi ?
    - Il résiste bien à la pression, c’est super.
    - Pour l’instant. M’est avis qu’il tiendrait pas le long terme.
    - C’est pour ça qu’on doit continuer à le surveiller.
    - Il mérite pas encore tous les avantages qui vont avec les lourdes responsabilités de capitaine.
    - Voilà. »

    On hoche la tête d’un air satisfait, pasqu’on est d’accord, et pasque la bouffe est bonne. Le commis, qui avait l’air carrément nerveux au tout début, est maintenant bien plus à l’aise et échange même des sourires avec les hommes et les femmes attablés, tout en faisant le service. J’me tourne vers Surin et Tarot et Fifi, qui mangent avec appétit. Leurs capes de pluie sont empilées sur une table plus loin et gouttent au sol avec un ploc-ploc régulier. Ça facilitera le ménage, va.

    « Alors, les gars, c’était comment, la patrouille ? »

    Mauvais choix de mots, ils prennent l’air mauvais.

    « Mouillé.
    - C’était pas la question. J’ai remarqué qu’il flotte dehors, que j’grince. »

    C’est qu’on a pris l’eau aussi pour venir, hein, c’était pas grand soleil non plus, faut pas déconner.

    « On patrouillait tranquillement du côté des quais, quand un indic’ s’est pointé pour parler à Tarot, dit Fifi.
    - Ouais ? C’était qui ?
    - Un nouveau, je sais pas trop à quel point on peut y faire confiance.
    - D’acc’. Et ?
    - Soi-disant que y’avait un contrebandier qui se radinait avec une grosse cargaison de pièces, et qu’il allait convertir tout ça en perlouze et en caillasses. Après, pour l’origine des pierres, il a pas su cracher le morceau, mais il avait le regard mauvais du gars qui veut régler ses comptes, tu vois ?
    - Et on le connaissait pas.
    - Voilà. Donc il en voulait probablement à quelqu’un d’autre que l’office. Bref, on s’est dit que ça coûtait rien de vérifier, donc on est allé voir sur le quai. Là, y’a un inconnu, pareil, cape de pluie, houppelande, écharpe qui couvre la moitié du visage, qui s’est mis à courir en nous voyant.
    - On fait difficilement plus suspect, ouais. »

    Le commis fait tomber un bol qu’il débarrassait, sursaute, et j’échappe de peu à une tache sur mon uniforme. Enfin, une nouvelle tache de plus, plutôt.

    « Pardon, pardon, j’ai glissé, ca... capitaine...
    - Y’a pas de mal, mon brave. »

    J’me baisse pour ramasser le matos et les couverts pour les lui tendre, et il est tout rouge et tout gêné.

    « Bon, le suspect, alors ? Reprend Gunnar.
    - Ben il s’est enfui... fait Surin piteusement. »

    On le regarde d’un air interloqué.

    « Comment ça, il s’est enfui ?
    - C’est pas clair, ajoute Gunnar.
    - Il a couru...
    - Très vite, précise Madame qui écoutait la conversation.
    - Plus vite que Fifi ? »

    Je sais pas si Fifi utilise son CPF, mais en tout cas, il a toujours été athlétique et a jamais séché l’entraînement. C’est pour ça qu’il est efficace, aussi : jamais ça nous viendrait à l’esprit de faire courir Gégé, par exemple. On risquerait de perdre un des atouts maîtres de l’office contre une banale attaque cardiaque. Il est bien plus utile comme distilleur privé, puis ça donne l’impression aux troupes d’appartenir à quelque chose de spécial et d’un peu secret, de se faire servir de la réserve personnelle de Gégé.

    Gérer les officiers, c’est beaucoup de boulot, et tous les moyens sont bons.

    « Même Fifi l’a pas rattrapé, confirme Surin.
    - Il ressemblait à quoi, alors ?
    - Dur à dire. Avec toutes les couches de vêtements et la mauvaise visibilité...
    - Roh, les gars, quand même, que j’lâche.
    - Oui ben si on avait eu un capitaine avec nous, peut-être que... marmonne un gus plus loin. »

    Mais si j’entends les mots, j’reconnais pas la voix, au milieu du brouhaha. J’me racle la gorge. Ils ont pas tout à fait tort. Puis on s’en fout d’un contrebandier parmi tous les autres, même si cette hsitoire de cargaison de perles et de pierres précieuses attire forcément notre attention : si c’est vraiment un pactole aussi gros qu’annoncé, il est de notre devoir d’empêcher, euh, qu’il serve à des fins néfastes. Vaut mieux que ce soit sous le contrôle de l’office, contrôle impartial et pleins de qualités comme, par exemple, celle de savoir compter avec précision pour voir si y’a vraiment besoin de tout verser aux minutes du procès-verbal.

    Le commis repasse, dirigé de loin par Takhys, et il est à nouveau tout blanc.

    « Hé, ça va, mon vieux ?
    - Euh, oui, oui...
    - Pas un problème de santé ? Ca doit pas être naturel, de devenir pâlot comme ça tout le temps.
    - Non, non, je vais bien...
    - Pas une gastro, hein ? Pasque t’as foutu tes mains pleines de doigts dans toutes les assiettes, si on se tape tous une chiasse cosmique derrière...
    - Non, capitaine, je vous assure, tout va bien, qu’il dit avec un peu plus de force.
    - Bon, bon, si tu l’dis... »

    J’suis quand même pas convaincu. Si dans deux jours, on est tous plié en deux sur notre pot de chambre, j’en connais qui vont se retaper un contrôle, et moins magnanime que le premier.
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  • Hier à 11:50
    Le repas enfilé, les braves officiers républicains peuvent exprimer leur contentement. Un repas simple après avoir subi une bonne drache dans les rues de la ville, ça vous redonne pas mal de baume au corps et les esprits se détendent. C’est simple, on a plus l’impression d’être une double escouade d’officiers républicains en patrouille, mais d’être en pleine activité de construction d’équipes à resserrer les liens bien loin des affres du travail. Tarot sort son traditionnel jeu de cartes et la bonne humeur générale efface les habituelles suspicions des collègues envers le jeu bien évidemment truqué de l’Officier. Les cartons volent d’un joueur à l’autre et ça se permet même de mettre quelques pièces sur la table pour donner un peu d’intérêt à la partie. Avec Pancrace, on jette un regard paternaliste à l’assemblée. Les moments de petits plaisirs sont rares et il faut bien fermer les yeux de temps en temps pour l’esprit de groupe. Et puis, la proprio nous laisse faire même avec le sourire. Alors, pourquoi s’emmerder ?

    C’est quand même bizarre quand on y repense.

    C’est qu’on est nombreux et que Surin commence déjà à ouvrir un autre tonneau de bière. La dépense va chiffrer et le tout gratuitement, ça fait quand même beaucoup. Alors certes, avoir une escouade d’officiers républicains dans son établissement, c’est plutôt bon pour les affaires au point qu’on peut leur accorder quelques extras gratuitement. Ca rassure le client honnête et puis ça met l’ambiance. Le criminel notoire évite l’établissement, mais ce sont généralement de mauvais payeurs doublé d’être de piètre consommateur parce qu’ils sont sans cesse en affaire et qu’il faut avoir les bons réflexes à chaque instant, comme lors d’une descente de l’Office, par exemple. C'est pour ça que je fais un piètre truand à mes heures perdues. Je suis beaucoup trop officiers républicains dans le sang.

    Mais là, c’est fermé. Pour le nettoyage qu’elle a dit et je peux vous dire qu’on est en train de bien dégueulasser l’endroit. C’est un peu l’inverse de ce qui était prévu. Alors, bien sûr, il est toujours difficile de dire non à une bande d’officiers républicains dont la joie du moment pourrait se transformer intégralement en ressentiment si on vient les emmerder, mais Takhys nous a prouvé tout récemment qu’elle n’avait pas froid aux yeux pour nous rentrer dedans. Puis, il y a le commis. Lui, il est pas net. Maintenant que les gamelles sont vides et que le monde se désintéresse de lui, il semble perdu, jetant des œillades fréquentes à la tavernière comme s’il cherchait à faire passer un message secret. Si c’est le nettoyage saisonnier, pourquoi ne nettoie pas ? La soirée s’avance et il va finir le lendemain s’il ne s’y met pas. Généralement, on cherche à optimiser son temps pour ne pas finir à l’heure ou les bars ferment pour naviguer entre les vomis des épaves de la nuit.

    -Faut te couvrir si t’es pas bien. Ou t’as mis tes frusques ?
    -Euh… là…
    -Ramène les moi Krueger.
    -V’là chef.
    -C’est du bon tissu. Un peu mouillé, mais une fois recouvert, ça doit tenir chaud.
    -C’est sûr, monsieur…
    -Capitaine.
    -Oui, capitaine…
    -Met ta cape. Ce truc là. Et puis l’écharpe. On ressert bien pour que tout soit couvert et puis voilà. Il n'y a pas de honte à se couvrir à l’intérieur si ça va pas bien.
    -Vous avez raison, capitaine…
    -Et bien, t’as de la couche de vêtement avec tout ça. On te croiserait dans une ruelle sombre, on te trouverait immédiatement suspect. Pas vrai les gars ?
    -Si ! Ahahah !
    -Ahahah !
    -Ahah…
    -Ahahah.
    -Ahah… Ahum…

    On est plusieurs à commencer à le dévisager. Quelqu’un frappe à la porte. Dans une hésitation, Takhys finit par y aller tandis que les officiers républicains les plus proches du commis commencent à s’approcher, suspicieux, posant des mains rudes sur des matraques usés. Le commis tremble plus que de raison. La porte s’ouvre. Je me lève à mon tour, commençant à conceptualiser une question dans mon esprit aux lourdes répercussions pour l’individu. Puis une voix mielleuse se fait entendre dans mon dos.

    -Ah. Vous voilà. J’espérais ne pas vous rencontrer ici, mais la vie est parfois faites de déception.

    On se retourne comme un seul homme, avisant le bienheureux Commissaire Patoche dans l’encadrure de la porte. L’ambiance est annihilée dans la seconde. Pancrace est le plus rapide.

    -GAAAAAAAARDE A VOUS !

    Les quelques secondes qui suivent sont un chaos sans nom. Les pieds retournent dans les bottes autant qu’ils reviennent au sol. Les chaises sont renversées et les coudes sont donnés pour se faire une place au dernier rang pour échapper à la vision du commissaire. Je viens me placer à côté de Pancrace. Le commis en profite pour s'éclipser.

    -Co… Commissaire ? Vous ici ?
    -Fine observation, Capitaine Bremer. Vous vous demandez sans doute pourquoi je suis ici ?
    -Euh… oui… un peu.
    -Voyez vous, Capitaine, je vous connais bien.
    -Moi ?
    -Vous tous. Vous avez vos habitudes, je le sais bien. Je ne reproche pas votre efficacité, notez le. Par contre, je sais bien que vous ne faites pas preuve d’un excès de zèle quand les conditions météorologiques ne sont pas très engageantes.
    -Ah, ça, Commissaire…
    -Le fait de ne pas vous voir rentrer à l’heure de l’inspection malgré le temps m’a intrigué. et pour une fois, je me suis dit qu’il serait bon de voir la raison de votre… égarement.

    Il balaie du regard la scène. Les reliquats de repas, les cartes, le bordel ambiant, les tâches sur les uniformes.

    -Je dois dire que je ne m’attendais pas à ça.

    Il s’approche de moi et me regarde dans les yeux.

    -Je suis déçu.

    Je sens Pancrace se réjouir intérieurement. Je crois avoir perdu mon statut de “Fils”. S’il n’est pas non plus tout blanc dans l’opération, ce n’est pas lui qui reçoit toute l’opprobre de la situation dans la figure. Il s’approche alors de Takhys avec toute l’humilité dont il sait faire preuve en présence des civils et des gens puissants qu’il côtoie à longueur de journée.

    -J’espère que mes hommes ne vous ont pas trop importuner. Je veillerais à ce que chaque dommage soit remboursé et je veillerais personnellement à ce que la sanction soit à la hauteur du préjudice moral.

    Soudainement, notre carrière ne tient qu’à la volonté de la tavernière.
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