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Citoyen du monde
Rêve

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Une patte griffue aux serres anormalement acérées vint se poser délicatement sur l'épaule de Pancrace. Les ailes de Cauchemar, comme d'énormes boucliers de plumes, se réorientaient parfois et privaient ainsi les nouveaux arrivants de la vue du militaire républicain. La créature onirique peinait à garder en vue chacun des intervenants et sa tête énorme pivotait nerveusement, tâchant de balayer la zone d'un regard inquisiteur en cherchant à déceler un potentiel agresseur tapi dans les ombres. N'ayant aucune confiance dans les propos de ces rêveurs hostiles, la bête restait sur ses gardes malgré l'apaisement apparent de son camarade. Loin de se montrer docile, la chimère esquissa même un léger mouvement de recul lorsque le perturbateur masqué jeta la bourse garnie à Pancrace qui la saisit habilement au vol.
"Votre enquête s'est donc conclue sur vos suppositions initiales. Vous avez attrapé le bon malfrat, malheureusement il n'est plus en état de plaider coupable mais c'est pas comme si on avait besoin de son accord pour le coller au trou. Inutile d'aller plus loin, vous avez fermé le dossier pour reprendre vos petites vies. Vous avez mieux à faire, de toute façon. Ca vous convient, comme version des faits ?"
"Qu'en est-il d'Hortensia ?"
Les voix grinçantes de la créature aux mille visages avaient vaguement surpris l'étranger mais, après un bref silence embarrassé, ce dernier reprit sa contenance et parvint à répondre avec ce même petit ton déplaisant qu'il avait employé lors de sa conversation avec l'officier. Les doigts joints, il semblait tout faire pour ne pas laisser transparaître une quelconque crainte à l'égard du monstrueux volatile mais Rêve voyait bien au delà de ce que lui disaient ses yeux. Dans ses propos venimeux, la bête ne percevait qu'une peur maladroitement camouflée.
"La fille de joie ? Son sort t'inquiète ? Je pensais pas qu'une vilaine bestiole comme toi ferait dans le sentimental. T'en fais pas, mon gentil hibou, on a aucunement besoin d'aller poignarder ta traînée. Elle est pas vraiment en état de raconter quoi que ce soit et même quand elle le sera; y'aura pas grand-monde pour croire à ses histoires."
Les yeux d'encre de la créature ne traduisaient aucune émotion lisible. Luisants dans l'obscurité, ils paraissaient si perçants que l'on les aurait crus capables de lire dans l'âme de ceux qu'ils observaient. Immobile, la chouette monstrueuse se contentait de dévisager sans mot dire l'étranger sans pour autant croire un traître mot de son discours parsemé de provocations malvenues. Un roucoulement surnaturel s'échappa de sa gorge et il accorda un coup d'œil en biais à Pancrace. Ils échangèrent un vague regard entendu, Rêve n'ayant nullement l'intention de revenir sur sa parole en faisant preuve d'une violence inconsidérée.
"Si vous mentez..."
"...tu nous traqueras et tu nous feras connaître un sort pire que la mort. J'ai bien compris l'idée, te fatigue pas. D'une, t'en as pas les moyens et de deux, t'as aucune raison de t'en faire. On s'en balance, de ta copine. Cette histoire est derrière nous, pas vrai ?"
Il désigna de son index la bourse que soupesait machinalement Pancrace, comme pour rappeler que le premier pas venait d'eux et qu'il serait bien peu civil de revenir sur cette offre. Indifférent à la nouvelle vague d'irrespect qu'il essuyait sans sourciller, Rêve avait déjà détourné son attention de son interlocuteur et avait retourné sa tête dans un angle impossible pour jeter un coup d'œil aux antagonistes qui se trouvaient derrière lui. Les inconnus ne s'étaient pas approchés, désireux sans doute d'éviter toute proximité avec la créature que leur chef s'évertuait à dénigrer sans connaître un franc succès. Leur destin les punirait pour leur arrogance mal placée, tôt ou tard. Un voile de noirceur magique engloba la silhouette de Rêve et en une fraction de seconde, il vint revêtir à nouveau son déguisement canin, se postant fièrement aux côtés de Pancrace.
"Officier, un plaisir de traiter avec vous. Ca fait drôlement chaud au coeur de savoir que les rênes de la justice sont tenues par des types intègres. On va pas vous déranger plus longtemps hein, vous avez un clébard à aller dresser."
Le voyou s'autorisa un furtif éclat de rire puis il tourna théâtralement les talons et ses compagnons firent de même, disparaissant à chaque extrémité de la ruelle sans laisser de trace. Le duo atypique laissa le silence retomber puis, après un moment de tranquillité, Rêve releva la tête et transmit télépathiquement une question à son camarade :
"Vas-tu réellement mettre un terme à ta quête ou est-ce là un stratagème de ta part, cher rêveur ?"
"Votre enquête s'est donc conclue sur vos suppositions initiales. Vous avez attrapé le bon malfrat, malheureusement il n'est plus en état de plaider coupable mais c'est pas comme si on avait besoin de son accord pour le coller au trou. Inutile d'aller plus loin, vous avez fermé le dossier pour reprendre vos petites vies. Vous avez mieux à faire, de toute façon. Ca vous convient, comme version des faits ?"
"Qu'en est-il d'Hortensia ?"
Les voix grinçantes de la créature aux mille visages avaient vaguement surpris l'étranger mais, après un bref silence embarrassé, ce dernier reprit sa contenance et parvint à répondre avec ce même petit ton déplaisant qu'il avait employé lors de sa conversation avec l'officier. Les doigts joints, il semblait tout faire pour ne pas laisser transparaître une quelconque crainte à l'égard du monstrueux volatile mais Rêve voyait bien au delà de ce que lui disaient ses yeux. Dans ses propos venimeux, la bête ne percevait qu'une peur maladroitement camouflée.
"La fille de joie ? Son sort t'inquiète ? Je pensais pas qu'une vilaine bestiole comme toi ferait dans le sentimental. T'en fais pas, mon gentil hibou, on a aucunement besoin d'aller poignarder ta traînée. Elle est pas vraiment en état de raconter quoi que ce soit et même quand elle le sera; y'aura pas grand-monde pour croire à ses histoires."
Les yeux d'encre de la créature ne traduisaient aucune émotion lisible. Luisants dans l'obscurité, ils paraissaient si perçants que l'on les aurait crus capables de lire dans l'âme de ceux qu'ils observaient. Immobile, la chouette monstrueuse se contentait de dévisager sans mot dire l'étranger sans pour autant croire un traître mot de son discours parsemé de provocations malvenues. Un roucoulement surnaturel s'échappa de sa gorge et il accorda un coup d'œil en biais à Pancrace. Ils échangèrent un vague regard entendu, Rêve n'ayant nullement l'intention de revenir sur sa parole en faisant preuve d'une violence inconsidérée.
"Si vous mentez..."
"...tu nous traqueras et tu nous feras connaître un sort pire que la mort. J'ai bien compris l'idée, te fatigue pas. D'une, t'en as pas les moyens et de deux, t'as aucune raison de t'en faire. On s'en balance, de ta copine. Cette histoire est derrière nous, pas vrai ?"
Il désigna de son index la bourse que soupesait machinalement Pancrace, comme pour rappeler que le premier pas venait d'eux et qu'il serait bien peu civil de revenir sur cette offre. Indifférent à la nouvelle vague d'irrespect qu'il essuyait sans sourciller, Rêve avait déjà détourné son attention de son interlocuteur et avait retourné sa tête dans un angle impossible pour jeter un coup d'œil aux antagonistes qui se trouvaient derrière lui. Les inconnus ne s'étaient pas approchés, désireux sans doute d'éviter toute proximité avec la créature que leur chef s'évertuait à dénigrer sans connaître un franc succès. Leur destin les punirait pour leur arrogance mal placée, tôt ou tard. Un voile de noirceur magique engloba la silhouette de Rêve et en une fraction de seconde, il vint revêtir à nouveau son déguisement canin, se postant fièrement aux côtés de Pancrace.
"Officier, un plaisir de traiter avec vous. Ca fait drôlement chaud au coeur de savoir que les rênes de la justice sont tenues par des types intègres. On va pas vous déranger plus longtemps hein, vous avez un clébard à aller dresser."
Le voyou s'autorisa un furtif éclat de rire puis il tourna théâtralement les talons et ses compagnons firent de même, disparaissant à chaque extrémité de la ruelle sans laisser de trace. Le duo atypique laissa le silence retomber puis, après un moment de tranquillité, Rêve releva la tête et transmit télépathiquement une question à son camarade :
"Vas-tu réellement mettre un terme à ta quête ou est-ce là un stratagème de ta part, cher rêveur ?"

Citoyen de La République
Pancrace Dosian

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J'laisse échapper un soupir de soulagement quand les trois s'en vont. Je crois que j'aurais même accepté gratuitement, vu la situation : en terrain hostile, pris en embuscade, sans possibilité de me téléporter ailleurs ou de m'échapper, autant dire que j'ai déjà un pied dans la tombe. Mais bon, sans un pot-de-vin, personne y aurait cru, surtout pas eux, et c'était bien ça, le plus important. Ils devaient avoir la sensation de dépenser quelque chose pour gagner, quand on n'avait pas du tout les mêmes enjeux.
J'peux pas m'empêcher de regarder avec satisfaction ce que j'viens d'empocher, n'empêche. A deux doigts de tenir ma part du marché, même.
Puis le démon qui me hante se rappelle à moi d'une phrase télépathique bien envoyée, et j'me rappelle des gars réduits à l'état de légumes qu'on a laissé dans notre sillage, et de son obsession pour Hortensia et châtier les coupables. Les motivations personnelles, ça fait jamais bon ménage avec une enquête menée en bonne et due forme, mais est-ce que j'ai vraiment envie de me laisser virer comme ça de mon affaire, surtout après quelques mots hautains, méprisants et condescendants d'un sale type ?
Pas que j'aie un ego surdimensionné, mais y'a des limites.
« Allons-y, que j'grogne. »
Le duo est apparu puis a disparu d'un coup, ça veut pas dire qu'ils sont pas toujours dans le coin, même si mon senseur magique détecte rien. C'est pas gage de qualité, après tout. Il est tard, toujours, et j'me demande s'il faut laisser reposer quelques jours histoire que l'embrouille se tasse. Mais dans ce laps de temps, j'aurai p'tet pas le temps d'y revenir. C'est que les chefs s'arangent pour qu'on s'ennuie pas trop, forcément.
C'est le souci des objectifs de rentabilité, des chiffres et de la bureaucratie, y'aura toujours quelqu'un pour mettre des valeurs et des croix dans des cases, et on s'retrouve à courir à droite à gauche sans arriver nulle part. Par contre, c'est le moment d'avoir les méninges qui tournent à fond, alors à mesure qu'on enfile les rues, j'réfléchis.
Puis j'rentre dans une taverne quelconque, d'assez bon aloi au vu de la façade extérieure, et j'me dirige vers la tenancière, avec son tablier blanc et sa bonne bouille graisseuse.
« Une chambre pour la nuit, une bouteille de rouge, deux verres du calme, c'possible ?
- Vous attendez de la visite ?
- Pas sûr, encore.
- Et le chien ?
- L'est bien élevé, il sera propre.
- On prend pas les tapineuses.
- Pas de soucis, ça serait plus facile s'il suffisait de raquer... »
Elle marmonne dans sa barbe avant de m'annoncer le tarif, que j'paye sereinement avec la bourse que j'viens de recevoir. On monte, avec Rêve, et on s'pose dans la piaule qui nous a été assignée : un lit deux places qui semble pas contenir de morpions ou de puces, après une vérification sommaire, une table qui peut servir de bureau, deux chaises un peu bancales, et un coin avec un broc d'eau, un âtre pas très approvisionné et un placard pour ranger du bouzin.
Après avoir débouchonné la bouteille, j'remplis les deux verres, davantage des godets d'ailleurs, et j'en prends un avant de m'affaler sur le plumard.
« Sers-toi, Rêve, s'tu veux. S'tu peux. S'tu bois. »
Hm, ouais, ça fait un sacré paquet de conditions préliminaires.
« J'ai pas trop voulu répondre avant, j'pense toujours qu'on peut être suivi. Pas moyen de détecter le duo à distance, alors pour peu que y'en ait un qui nous colle aux basques, ça risquerait de salement nous foutre dans la panade. Pour ça aussi qu'on est à l'hôtel et pas chez moi. Dans l'absolu... On a sauvé Hortensia, alors moi, le châtiment des coupables, hein... »
J'fais tourner mon picrate avant de le goûter : bien tanique, bien pas cher. J'aurais mauvaise grâce de m'en plaindre, mais un homme peut rêver.
« Le truc, c'est que c'est trop louche, d'avoir voulu changer la version d'Hortensia, vu que c'est plus ou moins l'impression qu'on a, pour qu'elle accuse quelqu'un d'autre. D'un point de vue strictement professionnel, y'a p'tet quelque chose là-dessous qu'il faudrait percer à jour, tu vois ? »
J'me vide le premier verre, et j'pose le contenant par terre le temps que la morsure relative de l'alcool m'aide à réfléchir.
« D'un autre côté, d'un point de vue plus personnel, faut bien admettre qu'il nous a mal parlé, et ça... Ca, ça vaut bien qu'on se démène un peu. »
Des vraies teignes, les officiers républicains, tout le monde le dit. Ben l'est p'tet temps de le montrer à nouveau.
« Donc ouais, je saurais reconnaître les trois, si on se trouve à proximité, mais pour les retrouver directement... Peut-être qu'avec une métamorphose, on pourrait retourner vers leur QG, je sais pas trop... »
Mais quand même, y'a un truc qui me chiffonne.
« Cela dit, Rêve, maintenant qu'Hortensia est sauvée, il te reste quoi, à voir, toi ? J'pensais pas que les démons s'attachaient à... hm... »
Mes mains aggrippent l'air à la recherche des mots qui s'y trouvent, jusqu'à enfin trouver celui que j'cherche.
« ... à l'esprit des lois. »

Citoyen du monde
Rêve

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Lorsque le duo invraisemblable pénétra dans la chambre que Pancrace leur avait déniché, Rêve quitta son enveloppe canine dans un tourbillon de plumes noires et se mit à explorer son nouvel environnement en flottant silencieusement dans cet espace un peu trop petit pour accueillir son corps immense. Il semblait plus léger qu'une feuille, malgré sa taille, et ce fut donc d'une simple poussée contre le sol qu'il bondit jusqu'à la fenêtre comme si la gravité n'avait pas d'emprise sur lui. Une fois arrivé, il jeta un bref instant un regard à l'extérieur puis il vint doucement refermer les rideaux pour éviter d'attirer l'attention de mortels trop curieux.
Pancrace lui indiqua qu'il pouvait partager avec lui l'étrange mixture alcoolisée qu'il avait commandé et la chouette fantasmagorique prit appui sur le mur afin de se projeter lentement en arrière, se stoppant dans sa course juste au dessus du breuvage si gentiment proposé. Ses yeux se posèrent sur le liquide trouble mais ce bref gain d'intérêt fut rapidement balayé par d'autres questions plus pressantes. A l'envers, la bête gigantesque se figea dans le vide tout en observant son compagnon qui malmenait ses méninges en quête de réponses. D'une impulsion magique, Rêve se projeta jusqu'au plafond et serpenta à sa surface pour s'approcher de Pancrace qui, pensivement, ressassait les évènements passés.
"Les machinations de ces rêveurs me fascinent. J'aimerais pouvoir explorer leurs esprits afin d'en découvrir les rouages."
A la lueur fébrile des quelques bougies qui illuminaient la pièce, Rêve apparaissait encore et toujours comme ce qu'il était réellement : un mirage, une illusion fiévreuse projetée par l'esprit de ceux qui l'avaient ainsi imaginé. Pancrace lui demanda très justement pour quelle raison il n'avait pas encore abandonné l'épopée, puisque sa douce protégée avait déjà été tirée des griffes de ses ravisseurs et Rêve, sans la moindre once d'hésitation, jeta un regard insistant à son interlocuteur et lui rétorqua :
"La loi n'est pas une maitresse que je sers. Ce n'est pas à elle que je m'attache, mais à toi."
Esclave de ses lubies et des fantasmes sur lesquels il voguait, le Voyageur n'était au final qu'un papillon porté d'une lumière à une autre. Hortensia n'avait pas tout à fait quitté son esprit, car chaque rêveur qu'il avait côtoyé devenait éternellement une étoile dans l'immense constellation représentant son existence, cependant les aspirations de Pancrace l'avaient envoutées et étaient devenues, bien plus vite qu'il ne l'aurait cru, sa seule et unique obsession du moment. L'attention de la bête onirique fut détournée lorsqu'une présence inconnue vint toquer à la porte de la chambre. Derrière le bois, une voix étouffée se fit entendre :
"Tout va bien m'sieur ? Besoin d'autre chose ?"
Ne laissant pas à Pancrace l'occasion de répondre par lui-même, Rêve usa de magie et le masque de chouette qui ornait son faciès se scinda alors puis vint éclore comme une fleur, dévoilant derrière le visage répliqué à la perfection de l'officier républicain. Lorsque la créature partiellement métamorphosée ouvrit la bouche, ce fut avec la voix imitée de Pancrace qu'elle répondit à la perturbatrice :
"Tout baigne. Merci."
Sans un mot, la tenancière s'éloigna et Rêve, aussitôt, laissa son visage redevenir rapidement celui d'un volatile. Il secoua la tête et ses plumes luisantes frémirent tandis qu'une fine poudre illusoire retombait de son enveloppe, s'éteignant dans un infime crépitement magique juste au dessus du visage de l'homme de loi. Faisant suite à cette performation plutôt saisissante en matière de comédie, il expliqua à son vis-à-vis les quelques états d'âme qu'il avait en tête.
"Je me moque bien de la cruauté apparente du rêveur masqué que nous avons rencontré. J'ai senti la peur en lui. C'est parce qu'il nous craint qu'il ne nous a pas attaqué de front. Toi et moi, nous savons transformer la réalité à notre guise. Ils préfèrent nous savoir loin d'eux, puisqu'ils sont coupables, c'est indéniable..."
Il passa son bec dans les plumes à la racine de son cou, les ajustant méthodiquement tandis qu'il réfléchissait pour exprimer son point de vue sur ces choses qu'il comprenait à peine. Reportant enfin son attention sur l'officier, il conclut :
"Mais comment obtenir des preuves irréfutables de leur culpabilité ? De simples aveux ne semblent pas suffire à tes pairs, dans ce jeu curieux qu'est celui de ta civilisation. Un écrit situé dans l'antre de nos ennemis pourrait-il trahir leur implication ?"
Ces concepts étaient difficiles à assimiler pour lui mais Rêve tentait au mieux d'assister son collaborateur, ce malgré ses lacunes et son immaturité évidentes.
Pancrace lui indiqua qu'il pouvait partager avec lui l'étrange mixture alcoolisée qu'il avait commandé et la chouette fantasmagorique prit appui sur le mur afin de se projeter lentement en arrière, se stoppant dans sa course juste au dessus du breuvage si gentiment proposé. Ses yeux se posèrent sur le liquide trouble mais ce bref gain d'intérêt fut rapidement balayé par d'autres questions plus pressantes. A l'envers, la bête gigantesque se figea dans le vide tout en observant son compagnon qui malmenait ses méninges en quête de réponses. D'une impulsion magique, Rêve se projeta jusqu'au plafond et serpenta à sa surface pour s'approcher de Pancrace qui, pensivement, ressassait les évènements passés.
"Les machinations de ces rêveurs me fascinent. J'aimerais pouvoir explorer leurs esprits afin d'en découvrir les rouages."
A la lueur fébrile des quelques bougies qui illuminaient la pièce, Rêve apparaissait encore et toujours comme ce qu'il était réellement : un mirage, une illusion fiévreuse projetée par l'esprit de ceux qui l'avaient ainsi imaginé. Pancrace lui demanda très justement pour quelle raison il n'avait pas encore abandonné l'épopée, puisque sa douce protégée avait déjà été tirée des griffes de ses ravisseurs et Rêve, sans la moindre once d'hésitation, jeta un regard insistant à son interlocuteur et lui rétorqua :
"La loi n'est pas une maitresse que je sers. Ce n'est pas à elle que je m'attache, mais à toi."
Esclave de ses lubies et des fantasmes sur lesquels il voguait, le Voyageur n'était au final qu'un papillon porté d'une lumière à une autre. Hortensia n'avait pas tout à fait quitté son esprit, car chaque rêveur qu'il avait côtoyé devenait éternellement une étoile dans l'immense constellation représentant son existence, cependant les aspirations de Pancrace l'avaient envoutées et étaient devenues, bien plus vite qu'il ne l'aurait cru, sa seule et unique obsession du moment. L'attention de la bête onirique fut détournée lorsqu'une présence inconnue vint toquer à la porte de la chambre. Derrière le bois, une voix étouffée se fit entendre :
"Tout va bien m'sieur ? Besoin d'autre chose ?"
Ne laissant pas à Pancrace l'occasion de répondre par lui-même, Rêve usa de magie et le masque de chouette qui ornait son faciès se scinda alors puis vint éclore comme une fleur, dévoilant derrière le visage répliqué à la perfection de l'officier républicain. Lorsque la créature partiellement métamorphosée ouvrit la bouche, ce fut avec la voix imitée de Pancrace qu'elle répondit à la perturbatrice :
"Tout baigne. Merci."
Sans un mot, la tenancière s'éloigna et Rêve, aussitôt, laissa son visage redevenir rapidement celui d'un volatile. Il secoua la tête et ses plumes luisantes frémirent tandis qu'une fine poudre illusoire retombait de son enveloppe, s'éteignant dans un infime crépitement magique juste au dessus du visage de l'homme de loi. Faisant suite à cette performation plutôt saisissante en matière de comédie, il expliqua à son vis-à-vis les quelques états d'âme qu'il avait en tête.
"Je me moque bien de la cruauté apparente du rêveur masqué que nous avons rencontré. J'ai senti la peur en lui. C'est parce qu'il nous craint qu'il ne nous a pas attaqué de front. Toi et moi, nous savons transformer la réalité à notre guise. Ils préfèrent nous savoir loin d'eux, puisqu'ils sont coupables, c'est indéniable..."
Il passa son bec dans les plumes à la racine de son cou, les ajustant méthodiquement tandis qu'il réfléchissait pour exprimer son point de vue sur ces choses qu'il comprenait à peine. Reportant enfin son attention sur l'officier, il conclut :
"Mais comment obtenir des preuves irréfutables de leur culpabilité ? De simples aveux ne semblent pas suffire à tes pairs, dans ce jeu curieux qu'est celui de ta civilisation. Un écrit situé dans l'antre de nos ennemis pourrait-il trahir leur implication ?"
Ces concepts étaient difficiles à assimiler pour lui mais Rêve tentait au mieux d'assister son collaborateur, ce malgré ses lacunes et son immaturité évidentes.

Citoyen de La République
Pancrace Dosian

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Visiblement, ça picole pas, chez les démons. Ou chez les chouettes. J'pense que je manque un peu de données pour établir un avis définitif. Est-ce qu'il faudrait faire des expériences sur les démons, leur faire manger des trucs pour voir si ça les tue ou pas ? Si tant est qu'ils puissent mourir s'ils sont pas réellement vivants, mais j'ai pas encore eu le temps de potasser tous les bouquins que j'ai pu récupérer de Klarion. Et, surtout, ça s'éloigne vachement du sujet actuel.
« Hm, je vois, on doit réfléchir vachement différemment, même par rapport à quand on est dans le monde des rêves, j'suppose. En tout cas, les règles sont plus du tout les mêmes, si j'en crois mon humble expérience, et ça ouvre la voie à des émotions ou des pulsions qui sont totalement absentes ensuite dans le... réel. »
J'm'attarde pas sur ce qu'il serait prêt à faire pour avoir ces informations, mais difficile de pas se rappeler le sort pas très enviable que les autres mafieux ont connu, entre ceux qui sont morts et ceux qui sont devenus des légumes. Ouais, nan, rester méfiant pour pas se retrouver dans cette situation, et pas oublier à quel point mon compagnon de fortune est alien.
Puis comme il le dit si bien, si c'est à moi qu'il est rattaché, il voudra p'tet pas me gober le cervelet et l'âme... si ? J'essaie de masquer mon inconfort en reprenant une liche de vin, puis j'laisse tomber le verre pour attraper la bouteille directement. De toute façon, il a pas l'air chaud, alors autant que je me fasse plaisir sans m'emmerder.
J'manque d'avaler de travers quand il m'imite, même si j'ai pas l'impression d'entendre ma voix. Mais ça marche pour la patronne, et j'sais qu'on s'entend jamais comme les autres nous écoutent, alors c'est p'tet ça... Bah, au stade où j'en suis, faut pas se focaliser là-dessus, y'a bien pire et plus pressant.
« Oh, c'est sûr qu'ils sont coupables, sinon ils auraient pas payé : le dérangement potentiel valait pas autant, c'est certain. Et la peur... J'pense honnêtement qu'elle vient de toi. Moi, au mieux, j'suis qu'un brave gars comme on en perd tant. Certes, j'suis remonté jusqu'à eux, mais ça fait pas de moi un danger pour les mercenaires des Cloches d'Argent. »
J'l'observe faire sa toilette, et j'me demande si le mieux serait quand même pas d'oublier cette histoire et disparaître avec la belle bourse en poche. Mais l'autre démon, là, il serait foutu de me retrouver au moment où je m'y attends le moins et bouffer mon âme. J'ai pas envie de passer le reste de ma vie à regarder par-dessus mon épaule.
Alors que si on s'occupe des mercenaires, ça sera jamais que des gens qui voudront ma peau, et ça, j'ai davantage l'habitude.
Puis, merde, ils m'ont mal parlé.
« Ouais, un écrit, ou un témoignage. L'écrit, j'y crois pas trop, surtout pour un contrat un peu limite du point de vue de la loi comme on est actuellement. Nan, le plus simple, ça serait juste de trouver le gus, de lui casser la gueule... gentiment, hein ? On bouffe pas son âme et on le transforme pas en chou kale ? Bref, le retrouver et l'amener au poste. Là, ses potes pourront bien faire les malins, ça leur coûtera autrement plus cher de mettre un terme à tout ça. »
Le plus probable, de toute façon, c'est qu'ils se désolidariseraient de toutes ses actions, et p'tet qu'ils chercheraient vachement à me crever, mais encore faudrait-il qu'ils me trouvent. Et en parlant de trouver...
« T'as pas un moyen de retrouver notre loustic, d'ailleurs ? En passant par les rêves ou quelque chose comme ça... Pasque moi, j'me vois pas retourner rôder vers chez eux tout de suite... Encore qu'avec une métamorphose, y'a le risque du senseur magique, c'est surtout ça qui m'inquiète pour être tout à fait honnête. »
Mais au pire, on utilisera ça, et on se fera discret, genre en passant par les toits ou quoi. Les moyens sont pas forcément ce qui manque, mais si y'en avait un simple et qui marchait bien, ça serait rudement mieux.
Putain, mais dans quoi j'm'embarque, n'empêche...

Citoyen du monde
Rêve

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A chaque évocation de la perte de ses capacités, le prince des songes semblait pour le moins irrité, pour ne pas dire profondément attristé. Ecartant son regard de Pancrace, Rêve profita de son état d'apesanteur et donna une légère impulsion à son corps pour flotter doucement jusqu'à la fenêtre que masquait le rideau. De ses griffes, il écarta légèrement le tissu afin de pouvoir jeter un œil à la beauté de cette cité maintenue en éveil malgré la noirceur de la nuit puis il reprit la parole d'un ton véritablement las, à deux doigts qu'il était de laisser échapper un mélancolique soupir :
"Non, j'ai peur d'avoir perdu ce pouvoir. J'ai aujourd'hui bien plus d'emprise sur le réel que sur mon propre domaine, Pancrace... Du plan onirique, je n'ai conservé qu'une infime partie de mes aptitudes."
Sa tête pivota à nouveau sur le côté et ses yeux scrutèrent un instant le rêveur auquel il s'était allié. Malgré la tristesse de sa nouvelle condition, il y avait du bon à pouvoir ainsi partager la quête d'un mortel au delà du voile du Songe. Rêve avait encore bien du mal à définir si son ascension dans le monde matériel était un fléau ou plutôt une bénédiction déguisée car il entretenait encore à ce sujet des sentiments très partagés. Plutôt que de sombrer dans une énumération des choses qu'il était désormais incapable d'accomplir, le Démon préféra s'illustrer par ses talents indiscutables. Les ailes de la créature effectuèrent un grand mouvement et son corps énorme se tourna sur lui-même. Ce faisant, il devint invisible et reprit la parole une fois au centre de la pièce :
"Ne te dénigre pas, cher rêveur. Tu es toi-même un illusionniste hors-pair ainsi qu'un mage remarquable et tes facultés d'analyse nous ont déjà mené bien loin dans la recherche de la vérité."
Ce ne fut qu'après avoir offert ces compliments que Rêve se remanifesta dans les airs, la tête en bas cette fois-ci. Le prince n'avait pas pour habitude de se creuser la tête de la sorte mais la situation impliquait pour lui de se prêter à un exercice extraordinaire car il devait tenter de comprendre les rouages d'une loi qu'il découvrait tout juste afin de mener à bien cet objectif qu'il aurait traité bien différemment, s'il se l'était imposé de lui-même. Afin de satisfaire les besoins de Pancrace, il était pourtant nécessaire de se plier aux obligations curieuses et furieusement contradictoires que dictaient sa profession.
Pancrace avait d'ailleurs rappelé une fois encore que briser l'esprit de leurs cibles était maintenant hors de question. Rêve ne se formalisait pas, sachant à quel point son jugement s'était avéré pauvre lors de ces situations, mais cette nouvelle condition complexifiait grandement l'approche des nouvelles altercations. Il y en aurait, à n'en pas douter, car aucun membre du duo atypique n'avait su trouver une méthode pour se simplifier la tâche. Ce fut donc en dépit d'alternative que Rêve conclut en adoptant un ton dans lequel se lisait une vague déception :
"Faisons donc appel à nos capacités en matière de métamorphose, dans ce cas. C'est bien là notre seule carte fiable. Pour l'heure, je veillerai sur ton sommeil."
Il y avait sans doute chez Pancrace une certaine angoisse à l'idée de s'exposer ainsi à la bête démoniaque dans une telle position de faiblesse. Sans compter bien sûr qu'elle avait évoqué, à de très nombreuses reprises, son affinité toute particulière avec le domaine des songes. Rêve était-il capable, au contraire de ses propres dires, de s'immiscer dans le crâne de ceux qui se laissaient aller face à la fatigue ? N'évoquant pas les potentielles inquiétudes de son compagnon, Rêve se contenta de se fondre dans l'obscurité de la pièce et posa ses yeux sur le mince interstice par lequel il pouvait observer l'extérieur derrière le rideau et s'imposa alors en imperturbable sentinelle, garantissant la sécurité de son collaborateur du jour en véritable sentinelle nocturne.
La bête ne sut pas réellement si Pancrace s'était totalement endormi, durant cette courte nuitée et, de toute manière, ils n'en firent nullement état lorsque vint l'heure de quitter le confort de la petite chambre au profit d'un projet bien plus endiablé. Alors même que se profilaient les premiers rayons d'un timide soleil, l'homme au service de la loi se redressa et se contenta de rassembler ses affaires tandis que son compagnon curieux, quant à lui, usait à nouveau de sa magie afin de reprendre son déguisement de chien, qui semblait être devenu pour lui une seconde peau, tant il l'avait porté depuis sa rencontre avec son camarade d'enquête.
Sans plus de cérémonie, Rêve descendit quatre à quatre les marches de l'escalier, gratifia la tenancière d'une salutation muette, puis il s'éclipsa en repoussant la porte d'entrée à l'aide de son museau. Assis sur le sol frais, il patienta un moment en inspectant les environs et fut bien vite rejoint par Pancrace, qui avait probablement pris un peu de temps supplémentaire afin de régler quelques détails mineurs que le Voyageur ne prenait pas réellement la peine de comprendre. Lorsqu'ils furent réunis, la créature fit passer à l'officier un message par télépathie :
"Sommes-nous prêts, Pancrace ?"
Après la confirmation de l'intéressé, ils se mirent en route et si la situation semblait se prêter à un certain gain de nervosité, Rêve paraissait quant à lui parfaitement tranquille, voir même relativement enjoué à l'idée de se livrer à une nouvelle aventure en compagnie du militaire. Une fois rapproché de leur objectif, l'intéressé fit d'ailleurs signe à Rêve qu'il était temps de revêtir une nouvelle enveloppe, son apparence de canidé étant déjà connu de leurs potentiels adversaires. Ni une ni deux, la chimère obtempéra en profitant de l'ombre d'une ruelle étroite afin de passer d'un camouflage à l'autre, se transformant cette fois-ci en gros chat noir aux yeux orangés. Rêve tourna la tête et découvrit, non sans stupeur, qu'il avait été imité dans cette manœuvre par son allié. De sa gueule entrouverte, il prononça quelques mots avec amusement :
"Je n'aurais pas cru que tu saurais t'adapter à une telle enveloppe. Certains rêveurs sont véritablement impressionnants."
Suite à quoi, les deux félins entreprirent d'escalader l'un des bâtiments les plus proches. Rêve étant particulièrement habitué à l'exercice, il n'eut aucun mal à atteindre la toiture et s'offrit ainsi le luxe d'une vue d'ensemble sur le quartier général de leurs ennemis qui, étonnamment, n'avait rien de la bicoque mal famée que s'imaginait Rêve. Décoré avec noblesse et bon goût, l'établissement avait tout du siège d'une guilde honnête et particulièrement riche. Evidemment, le regard perçant de la chimère ne parvint pas à identifier de suite les cibles d'intérêt, aussi il s'en remit à l'esprit d'enquêteur de son compère :
"Vois-tu quelque chose d'intéressant, mon ami ? Je ne sais pas quoi chercher..."
"Non, j'ai peur d'avoir perdu ce pouvoir. J'ai aujourd'hui bien plus d'emprise sur le réel que sur mon propre domaine, Pancrace... Du plan onirique, je n'ai conservé qu'une infime partie de mes aptitudes."
Sa tête pivota à nouveau sur le côté et ses yeux scrutèrent un instant le rêveur auquel il s'était allié. Malgré la tristesse de sa nouvelle condition, il y avait du bon à pouvoir ainsi partager la quête d'un mortel au delà du voile du Songe. Rêve avait encore bien du mal à définir si son ascension dans le monde matériel était un fléau ou plutôt une bénédiction déguisée car il entretenait encore à ce sujet des sentiments très partagés. Plutôt que de sombrer dans une énumération des choses qu'il était désormais incapable d'accomplir, le Démon préféra s'illustrer par ses talents indiscutables. Les ailes de la créature effectuèrent un grand mouvement et son corps énorme se tourna sur lui-même. Ce faisant, il devint invisible et reprit la parole une fois au centre de la pièce :
"Ne te dénigre pas, cher rêveur. Tu es toi-même un illusionniste hors-pair ainsi qu'un mage remarquable et tes facultés d'analyse nous ont déjà mené bien loin dans la recherche de la vérité."
Ce ne fut qu'après avoir offert ces compliments que Rêve se remanifesta dans les airs, la tête en bas cette fois-ci. Le prince n'avait pas pour habitude de se creuser la tête de la sorte mais la situation impliquait pour lui de se prêter à un exercice extraordinaire car il devait tenter de comprendre les rouages d'une loi qu'il découvrait tout juste afin de mener à bien cet objectif qu'il aurait traité bien différemment, s'il se l'était imposé de lui-même. Afin de satisfaire les besoins de Pancrace, il était pourtant nécessaire de se plier aux obligations curieuses et furieusement contradictoires que dictaient sa profession.
Pancrace avait d'ailleurs rappelé une fois encore que briser l'esprit de leurs cibles était maintenant hors de question. Rêve ne se formalisait pas, sachant à quel point son jugement s'était avéré pauvre lors de ces situations, mais cette nouvelle condition complexifiait grandement l'approche des nouvelles altercations. Il y en aurait, à n'en pas douter, car aucun membre du duo atypique n'avait su trouver une méthode pour se simplifier la tâche. Ce fut donc en dépit d'alternative que Rêve conclut en adoptant un ton dans lequel se lisait une vague déception :
"Faisons donc appel à nos capacités en matière de métamorphose, dans ce cas. C'est bien là notre seule carte fiable. Pour l'heure, je veillerai sur ton sommeil."
Il y avait sans doute chez Pancrace une certaine angoisse à l'idée de s'exposer ainsi à la bête démoniaque dans une telle position de faiblesse. Sans compter bien sûr qu'elle avait évoqué, à de très nombreuses reprises, son affinité toute particulière avec le domaine des songes. Rêve était-il capable, au contraire de ses propres dires, de s'immiscer dans le crâne de ceux qui se laissaient aller face à la fatigue ? N'évoquant pas les potentielles inquiétudes de son compagnon, Rêve se contenta de se fondre dans l'obscurité de la pièce et posa ses yeux sur le mince interstice par lequel il pouvait observer l'extérieur derrière le rideau et s'imposa alors en imperturbable sentinelle, garantissant la sécurité de son collaborateur du jour en véritable sentinelle nocturne.
La bête ne sut pas réellement si Pancrace s'était totalement endormi, durant cette courte nuitée et, de toute manière, ils n'en firent nullement état lorsque vint l'heure de quitter le confort de la petite chambre au profit d'un projet bien plus endiablé. Alors même que se profilaient les premiers rayons d'un timide soleil, l'homme au service de la loi se redressa et se contenta de rassembler ses affaires tandis que son compagnon curieux, quant à lui, usait à nouveau de sa magie afin de reprendre son déguisement de chien, qui semblait être devenu pour lui une seconde peau, tant il l'avait porté depuis sa rencontre avec son camarade d'enquête.
Sans plus de cérémonie, Rêve descendit quatre à quatre les marches de l'escalier, gratifia la tenancière d'une salutation muette, puis il s'éclipsa en repoussant la porte d'entrée à l'aide de son museau. Assis sur le sol frais, il patienta un moment en inspectant les environs et fut bien vite rejoint par Pancrace, qui avait probablement pris un peu de temps supplémentaire afin de régler quelques détails mineurs que le Voyageur ne prenait pas réellement la peine de comprendre. Lorsqu'ils furent réunis, la créature fit passer à l'officier un message par télépathie :
"Sommes-nous prêts, Pancrace ?"
Après la confirmation de l'intéressé, ils se mirent en route et si la situation semblait se prêter à un certain gain de nervosité, Rêve paraissait quant à lui parfaitement tranquille, voir même relativement enjoué à l'idée de se livrer à une nouvelle aventure en compagnie du militaire. Une fois rapproché de leur objectif, l'intéressé fit d'ailleurs signe à Rêve qu'il était temps de revêtir une nouvelle enveloppe, son apparence de canidé étant déjà connu de leurs potentiels adversaires. Ni une ni deux, la chimère obtempéra en profitant de l'ombre d'une ruelle étroite afin de passer d'un camouflage à l'autre, se transformant cette fois-ci en gros chat noir aux yeux orangés. Rêve tourna la tête et découvrit, non sans stupeur, qu'il avait été imité dans cette manœuvre par son allié. De sa gueule entrouverte, il prononça quelques mots avec amusement :
"Je n'aurais pas cru que tu saurais t'adapter à une telle enveloppe. Certains rêveurs sont véritablement impressionnants."
Suite à quoi, les deux félins entreprirent d'escalader l'un des bâtiments les plus proches. Rêve étant particulièrement habitué à l'exercice, il n'eut aucun mal à atteindre la toiture et s'offrit ainsi le luxe d'une vue d'ensemble sur le quartier général de leurs ennemis qui, étonnamment, n'avait rien de la bicoque mal famée que s'imaginait Rêve. Décoré avec noblesse et bon goût, l'établissement avait tout du siège d'une guilde honnête et particulièrement riche. Evidemment, le regard perçant de la chimère ne parvint pas à identifier de suite les cibles d'intérêt, aussi il s'en remit à l'esprit d'enquêteur de son compère :
"Vois-tu quelque chose d'intéressant, mon ami ? Je ne sais pas quoi chercher..."

Citoyen de La République
Pancrace Dosian

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Sale nuit. P'tet que se réveiller toutes les dix minutes la peur au ventre de trouver un piaf géant en train de boire mon âme constitue pas une situation préalable à un sommeil sain et réparateur. Mais il s'est passé queutchi, et il est resté immobile à fixer l'extérieur, aux aguets, ce qui me fait juste me sentir bien con. Et fatigué. Surtout fatigué.
On s'pointe à proximité des lieux qui nous intéressent, et la transformation en chat prend pas bien longtemps. On savait qu'il avait une enveloppe charnelle un peu souple, mais j'avais pas encore fait étalage de mes capacités de métamorphoses, qui me sont fréquemment utiles pour entrer là où j'devrais pas, que ce soit pour des infiltrations ou des soirées privées auxquelles j'suis pas invité.
Hé, on s'amuse comme on peut, et les p'tits fours sont bien meilleurs.
Enfin, le chat, j'le fais pas tous les jours, donc j'suis un chemin un brin différent de celui de Rêve. Plus sûr et plus simple, globalement, j'évite les sauts trop tendus entre les façades des bâtiments, me fiant davantage à l'instinct de ma nouvelle forme pour grimper jusqu'à le rejoindre sur un toit surplombant une cour intérieure entretenue avec goût et pognon. Le p'tit jardin avec ses bancs et sa véranda doit servir de lieu de détente central, et les chemins latéraux sont protégés des intempéries par un plafond qui nous empêche de voir dessous.
« Rien de particulier, mais on doit pouvoir se balader. On va plutôt essayer de trouver notre mercenaire-sorcier, et on avisera à partir de là ? »
De toute façon, on trouvera pas un joli papier encadré avec écrit "On va bien niquer le bulbe rachidien du seul témoin pour la faire accuser à tort la mauvaise personne" alors faut bien qu'on trouve un autre moyen. En plus, au-delà dee l'outil qu'a été utilisé, j'suis quand même curieux du commanditaire. C'est pas un mercenaire qui s'est levé un beau matin en se disant qu'il allait foutre le boxon, et j'suis sûr que mes chefs seraient pas désintéressés d'en savoir un peu plus sur le double-fond de l'affaire.
On descend tranquillement le long de la paroi, en prenant appui sur le rebord des fenêtres, puis les branches du chêne qui trône fièrement au milieu de la cour. On nous adresse pas plus d'un regard, si ce n'est une femme d'âge mûr qui s'arrête pour me caresser. J'pousse un ronronnement et j'donne un coup de tête avant de filer plus loin. Elle est contente, je suis content, tout le monde il est content.
P'tet que j'gagnerais à me transformer plus souvent en chat.
Ahem.
On trouve un couloir, mais les portes intéressantes sont toutes fermées, et on peut pas vraiment sauter sur les poignées pour les ouvrir, ou attendre à côté que quelqu'un ouvre. Et, surtout, j'ai pleinement conscience que si quelqu'un d'utiliser une magie de sensibilité pour s'assurer qu'on est bien des chats, le déguisement tiendra pas une seconde. A partir de là, vaut mieux rester en mouvement pour avoir l'air discret.
J'pousse un miaulement en voyant une fenêtre ouverte à l'étage, et voilà qu'on grimpe à nouveau dans l'arbre, à la force de nos griffes et nos patounes. Le saut est un peu difficile mais le corps suffisamment athlétique et bien calibré pour pas poser problème, et on se retrouve dans ce qui est manifestement une salle de pause, avec une série de chaises posées autour d'une table, avec des fruits et du pain à disposition. Un genre de réchaud dans le coin s'assure que la température baisse pas trop et qu'on puisse utiliser la bouilloire au besoin.
Finalement, c'est là qu'on trouve notre homme, avec une collègue à lui, en train de prendre son café du matin. Vrai que j'ferais bien pareil, ça me ferait du bien. On va renifler les pommes avant de s'en détourner, et elle nous pousse de la table, mais on continue de tourner autour des chaises et à se frotter contre leurs jambes. A la réflexion, j'me sens un peu sale, mais c'est pour la couverture.
A noter que leur conversation n'a strictement aucun intérêt, donc on est soulagé quand elle s'arrête enfin, et que notre cible repart dans les couloirs, nous laissant seuls dans la pièce, allongés dans un coin sur un rayon de soleil. On échange un regard, avec Rêve, et j'me remets en forme humaine, serait-ce que pour pouvoir ouvrir les portes.
Quand on entre derrière notre gus dans une pièce qu'est manifestement sa piaule, il lève les yeux d'un air surpris avec un commentaire acerbe dans le rictus de sa bouche, mais il est interrompu par mon panard dans sa gueule. Rêve est redevenu son lui habituel, il nous faut pas longtemps pour le saucissonner sur son lit et le menacer d'un couteau pour lui faire comprendre qu'on est pas là pour jouer de l'ophicléide.
« Coucou, c'est toujours nous, que j'chuchotte. On va jouer à un jeu. Je pose une question, tu réponds, et mon démon te bouffe pas l'âme par petits morceaux. D'accord ? »
Il hoche pas la tête, et j'sens sa magie prendre forme. Le doigt que j'lui colle dans l'oeil fait vaciller sa concentration.
« Je saurai si t'incantes quoi que ce soit. Tu veux vivre sans quelle partie du corps ? Les mirettes ? Les genoux ? Les doigts ? Les... couilles ? »
Franchement, c'est la menace qui marche le mieux en général, et à voir son air d'assentiment, j'me dis que j'ai tapé juste.
« Nickel. On veut juste le client qui a demandé de manipuler le cerveau d'Hortensia. »
Il fait la grimace.
Moi aussi.

Citoyen du monde
Rêve

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D'une inoffensive paire de chats un peu trop curieux, le duo aux rouages désormais bien huilés était instantanément redevenu cette équipe ravageuse qui avait semé un innommable chaos dans les affaires du malfrat interpelé précédemment. Lorsqu'ils firent face à l'homme qu'ils cherchaient, ce fut la botte de Pancrace que rencontra le brigand et Rêve vint fondre sur lui dans un ouragan de plumes et de serres pour l'empêcher de riposter d'une manière ou d'une autre. Une fois leur proie ligotée, les deux infiltrés se lancèrent dans leur interrogatoire. L'entité démoniaque laissa faire l'homme de loi et même si elle se garda bien d'effectuer tout commentaire, elle fut pour le moins troublée par la méthode relativement barbare qu'employait Pancrace lorsqu'il posait ses questions. Le Gardien des Songes ne s'était définitivement pas lié à un enfant de chœur mais savait reconnaître à cette brutalité de nombreux avantages. Affichant un air faussement résolu, l'individu ligoté rétorqua après un moment d'hésitation :
"C'est bon, c'est bon. Vous m'avez eu, je vais tout vous dire. M'enfin très franchement, c'est pas dans votre intérêt. Même avec mes révélations, vous ne pourrez rien prouver. Ca vous mène pas loin de m'agresser ainsi, j'irai même jusqu'à dire que c'est vous que ça fout dans la mouise, officier."
Les deux assaillants ne répondirent pas et le cou du volatile géant qui s'était posté derrière le militaire vint légèrement s'étendre, ce afin d'obtenir un meilleur angle de vue sur le visage de leur vis-à-vis. La crapule accorda un regard en biais à cette bête mythique et se dit alors qu'il était infiniment étrange de voir une telle créature de fantaisie se tenir au dessus de lui dans cette chambre tout à fait réelle. Il était encore loin de se douter cependant à quel point cette chouette colossale pouvait le surprendre. Tâchant d'ignorer du mieux qu'il pouvait les yeux hypnotiques de la fameuse chimère, il oublia momentanément la menace très directe qui planait sur ses parties intimes et tâcha par habitude de reprendre le contrôle de la situation, malgré sa position pour le moins désavantageuse :
"Ecoutez... j'ai bien compris à quel point vous vouliez aller au bout de l'affaire, même si j'ignore pourquoi. Je vous le répète, l'histoire vous dépasse et..."
Un vrombissement abject s'insinua brusquement dans l'esprit du voyou et un souffle glacial vint frapper l'arrière du crâne de Pancrace, interrompant le discours du voyou et contraignant son faciès à une expression de profonde terreur. Alors que des larmes se formaient au coin des yeux du captif et que sa mâchoire se serrait brutalement sous le coup de la douleur, des voix obscures émanèrent de la créature démoniaque et un ordre formulé sèchement résonna subitement dans la pièce :
"Le nom."
"Vellelf Linemas."
Une seconde plus tard, le bourdonnement cessa et le démon retrouva son masque de volatile. Attentif aux directives de son camarade, Rêve avait pris soin de ne maintenir son attaque mentale que pour endolorir et terroriser sa proie sans causer de dégât irréversible sur sa psyché. Haletant et à deux doigts de sangloter, l'homme qui avait eu l'audace de les menacer un jour plus tôt avait désormais tout l'air d'un enfant effrayé et évitait tant bien que mal le regard pénétrant du cauchemar ambulant qui venait de le forcer à avouer l'identité du commanditaire. Lorsque les griffes de l'entité s'approchèrent de la tête du malheureux, ce dernier tenta d'esquisser un mouvement de recul mais ses liens l'en empêchèrent. Les serres se refermèrent malgré tout sur son front et la main du monstre le repoussa, le plaquant ainsi contre son lit pour le forcer à se tenir tranquille. Tout en le maintenant en place, Rêve s'adressa finalement à Pancrace :
"Cela t'évoque quelque chose ?"
Avant qu'une réponse ne puisse venir, on toqua à la porte et Rêve prit à la hâte une décision pour s'éviter un nouveau conflit. N'accordant qu'un bref regard à Pancrace pour se faire comprendre, il agrippa son camarade entre ses griffes et donna à la fenêtre un puissant coup de queue. Le verre explosa aussitôt dans un fracas brutal et l'oiseau immense déploya ses ailes avant de bondir à travers l'ouverture sans prendre le temps de demander l'avis de son collaborateur. Rêve effectua une vrille aérienne et à l'issue de celle-ci, son compagnon et lui-même disparurent dans les airs tandis qu'accouraient des secours dans la pièce où se trouvait le mercenaire ligoté.
Invisible à l'œil nu, les deux enquêteurs atypiques disparurent par la voie des cieux et après quelques minutes à s'éloigner du point dangereux, Rêve réapparut dans un léger crépitement magique tout en atterrissant doucement sur une toiture plate de l'une des vertigineuses bâtisses de la cité. Désormais en sécurité, il laissa Pancrace quitter ses bras et réalisa seulement qu'une telle aventure risquait de l'avoir secoué. Tout en cherchant à décrypter le ressenti de l'officier en tentant d'accrocher son regard, il lui glissa d'un air passablement inquiet :
"Tout va bien ?"
"C'est bon, c'est bon. Vous m'avez eu, je vais tout vous dire. M'enfin très franchement, c'est pas dans votre intérêt. Même avec mes révélations, vous ne pourrez rien prouver. Ca vous mène pas loin de m'agresser ainsi, j'irai même jusqu'à dire que c'est vous que ça fout dans la mouise, officier."
Les deux assaillants ne répondirent pas et le cou du volatile géant qui s'était posté derrière le militaire vint légèrement s'étendre, ce afin d'obtenir un meilleur angle de vue sur le visage de leur vis-à-vis. La crapule accorda un regard en biais à cette bête mythique et se dit alors qu'il était infiniment étrange de voir une telle créature de fantaisie se tenir au dessus de lui dans cette chambre tout à fait réelle. Il était encore loin de se douter cependant à quel point cette chouette colossale pouvait le surprendre. Tâchant d'ignorer du mieux qu'il pouvait les yeux hypnotiques de la fameuse chimère, il oublia momentanément la menace très directe qui planait sur ses parties intimes et tâcha par habitude de reprendre le contrôle de la situation, malgré sa position pour le moins désavantageuse :
"Ecoutez... j'ai bien compris à quel point vous vouliez aller au bout de l'affaire, même si j'ignore pourquoi. Je vous le répète, l'histoire vous dépasse et..."
Un vrombissement abject s'insinua brusquement dans l'esprit du voyou et un souffle glacial vint frapper l'arrière du crâne de Pancrace, interrompant le discours du voyou et contraignant son faciès à une expression de profonde terreur. Alors que des larmes se formaient au coin des yeux du captif et que sa mâchoire se serrait brutalement sous le coup de la douleur, des voix obscures émanèrent de la créature démoniaque et un ordre formulé sèchement résonna subitement dans la pièce :
"Le nom."
"Vellelf Linemas."
Une seconde plus tard, le bourdonnement cessa et le démon retrouva son masque de volatile. Attentif aux directives de son camarade, Rêve avait pris soin de ne maintenir son attaque mentale que pour endolorir et terroriser sa proie sans causer de dégât irréversible sur sa psyché. Haletant et à deux doigts de sangloter, l'homme qui avait eu l'audace de les menacer un jour plus tôt avait désormais tout l'air d'un enfant effrayé et évitait tant bien que mal le regard pénétrant du cauchemar ambulant qui venait de le forcer à avouer l'identité du commanditaire. Lorsque les griffes de l'entité s'approchèrent de la tête du malheureux, ce dernier tenta d'esquisser un mouvement de recul mais ses liens l'en empêchèrent. Les serres se refermèrent malgré tout sur son front et la main du monstre le repoussa, le plaquant ainsi contre son lit pour le forcer à se tenir tranquille. Tout en le maintenant en place, Rêve s'adressa finalement à Pancrace :
"Cela t'évoque quelque chose ?"
Avant qu'une réponse ne puisse venir, on toqua à la porte et Rêve prit à la hâte une décision pour s'éviter un nouveau conflit. N'accordant qu'un bref regard à Pancrace pour se faire comprendre, il agrippa son camarade entre ses griffes et donna à la fenêtre un puissant coup de queue. Le verre explosa aussitôt dans un fracas brutal et l'oiseau immense déploya ses ailes avant de bondir à travers l'ouverture sans prendre le temps de demander l'avis de son collaborateur. Rêve effectua une vrille aérienne et à l'issue de celle-ci, son compagnon et lui-même disparurent dans les airs tandis qu'accouraient des secours dans la pièce où se trouvait le mercenaire ligoté.
Invisible à l'œil nu, les deux enquêteurs atypiques disparurent par la voie des cieux et après quelques minutes à s'éloigner du point dangereux, Rêve réapparut dans un léger crépitement magique tout en atterrissant doucement sur une toiture plate de l'une des vertigineuses bâtisses de la cité. Désormais en sécurité, il laissa Pancrace quitter ses bras et réalisa seulement qu'une telle aventure risquait de l'avoir secoué. Tout en cherchant à décrypter le ressenti de l'officier en tentant d'accrocher son regard, il lui glissa d'un air passablement inquiet :
"Tout va bien ?"

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Pancrace Dosian

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Même pas le temps de digérer le nom du commanditaire que j'me retrouve à travers la fenêtre, à chuter pendant une seconde qui semble en durer vingt, puis à me sentir bringuebaler dans les airs. Même si Rêve me tient, j'me cramponne de mon côté à ses serres, des fois que ses doigts de pieds se sentent un peu plus faibles ou aient une crampe. Un piaf, ça a des griffes solides, mais j'suis pas du genre à prendre des risques, hein ?
Posés sur le toit, sans plus de protection magique, hors de vue et de portée de nos éventuels poursuivants, j'reprends mon souffle et mes esprits, j'étire mes doigts un peu gourds et j'jette un coup d'oeil en bas, et c'est bien loin. Y'a une trappe sur le toit, de toute façon, ou alors je ferai une téléportation directement en bas, peu importe. En tout cas, j'ai pas prévu de m'envoler à nouveau avec Rêve, même s'il s'agirait que de planer jusqu'en bas.
« Ca va, ça va, j'ai juste été surpris mais... bien joué, de nous avoir sorti de là aussi vite. Pas l'habitude de voler, faut dire. »
Puis j'repense au nom que notre mercenaire a lâché avant qu'on s'échappe. Me faut un moment pour que ça revienne, pasque j'cherchais d'abord dans les mauvais tiroirs de mes souvenirs : ceux qui contiennent tout ce que le pays fait de mafieux, chefs de gangs, et autres criminels un peu en vue. Comme j'trouve rien, j'élargis un peu, et ça me revient.
« Vellelf Linemas, c'est un sénateur démocrate. Il a quelques affaires au cul, rien de particulier pour un élu de la République, cela dit. Par contre, ça pose des gros soucis pour la suite des événements, d'une certaine façon. »
J'ai comme l'impression que Rêve va pas bien comprendre en quoi ça pose un énorme problème, que d'avoir un des gars les plus puissants du pays qu'était à l'origine de cette affaire d'arnaque multiple. Et qui est, d'une certaine façon, un de mes employeurs. Alors après, on peut mégoter que je suis au service du peuple, machin tout ça, mais s'il me prend en grippe, il lui faudra pas plus de quelques mots pour que les emmerdes commencent, genre mise à pied, renvoi, ou pire. Et c'est pas mes huiles à moi qui vont me défendre, j'me leurre pas trop là-dessus.
« C'est quelqu'un de très puissant, comme le père de la fille qu'est morte et dont Hortensia était la seule témoin. Si c'est lui qu'a demandé au mercenaire de changer les souvenirs d'Hortensia, c'est qu'il est probablement mêlé, de près ou de loin, à l'homicide. Ou alors c'est du simple opportunisme pour effacer un gang, mais il aurait pas besoin de ça, je pense, sauf si ça peut affaiblir des soutiens cachés d'un rival, mais... »
J'lutte en pleine hésitation, on atteint un peu des sphères qui me dépassent, pour être tout à fait honnête, et j'sais pas trop par quel bout prendre la suite de cette affaire. J'pousse un long soupir.
« Pour pas mentir, je sais pas trop si je veux continuer à creuser. Autant, un gang un peu miteux, un mercenaire sorcier d'une bande un peu mineure, ça restait gérable, autant un sénateur, j'ai peur de pas parvenir, d'une part, à avancer tout court, et d'autre part, à y survivre. Y'a trop de prises pour qu'il se débarrasse de moi, trop de pouvoir de nuisance. J'fais pas le poids, quoi. »
Le constat pourrait sonner amer ou déçu chez quelqu'un d'autre, il est juste froidement analytique chez moi. On vit pas dans le même monde, et y'a pas de honte à l'accepter et l'assumer. Tout comme le boucher va pas devenir maire de Liberty, l'officier républicain tout seul, même accompagné d'un démon onirique, va pas faire tomber un ponte de la République.
« A ce stade, le mieux qu'on puisse faire, c'est laisser tomber, quoique... »
Une idée me vient soudain. Certes, on fait pas le poids, mais on a toutes les raisons du monde de contacter justement quelqu'un qui le fait, et qui serait p'tet même en mesure de couvrir nos arrières, tant que ça déborde pas trop. J'fais les cent pas sur les tuiles glissantes du toit en claquant des doigts à mesure que les éléments s'emboîte.
« On doit pouvoir refiler l'info au père de la morte, ça lui fera sûrement plaisir, et si on la joue fine, il nous sacrifiera p'tet pas salement... »
Y'aura p'tet même une récompense à la clé, et je suis pas du genre à cracher dans la soupe.
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