Sylvain Blaese est un homme qui a vécu longtemps. Le poids des âges a marqué ses traits. Des rides parcourent son visage dur et sa pilosité s’est illuminé en même temps qu’il a perdu ses cheveux. Il cache son absence de chevelure par une calotte grise. Néanmoins une barbe compense cette perte, il la taille grossièrement ce qui lui donne un air légèrement négligé. Il est un curieux mélange entre quelqu’un de charismatique et de quelconque. Ses yeux marron se sont enfoncés dans son crâne et ont perdu de leur éclat. Mais comme une chouette ils continuent de fixer avec attention ce qui se passe autour de lui.
Toujours enveloppé dans une bure qui semble grise ou du moins qui a perdu sa couleur d'origine depuis longtemps. Sylvain cache son corps tremblant, mais toujours fonctionnel pour quelqu’un de son âge. La vie à parcourir les champs de bataille lui ayant forgé un corps musclé dans sa jeunesse. Il n’en possède maintenant que les reliquats. Sa démarche est légèrement voûtée. Mais il sait encore comment courir lorsqu’il en a besoin. Et peut faire preuve d’un peu de force si nécessaire.

Il a le caractère d'un homme bourru et en acier trempé. Il était le plus souvent à l’écart de la société. Médecin et chirurgien de guerre il a plus connu les tentes boueuses de campagne que les villes de pierre. Le vieillard marmonne toujours des choses dans sa barbe et envoie paître n’importe qui peu importe son rang lorsqu’il rumine ses pensées. Curieusement, il est sage et choisis toujours ses mots avant de parler. Certain pourrait lui affubler le surnom de sournois ou de perfide. Mais c’est uniquement, par ce que Sylvain est un être franc qui n’hésite pas à parler et à dire à haute voix ce que tout le monde pense tout bas. Il méprise les castes et les hiérarchies de pouvoir. Il effectue sans jamais rechigner les besognes de son métier les plus lourdes de conséquences qu'elles soient psychiques ou physiques pour ses patients. Cela lui permet de sauver des vies même si ce qu'il fait n'est pas toujours saisi correctement.

Il voudrait continuer à arpenter les chemins de la guerre mais il était plus sage pour lui de rentrer à l'académie et de compiler son savoir tout en continuant d'en engranger. C'est un érudit discret, mais prompt à dispenser ce qu'il a appris durant sa vie. Les horreurs de la guerre auraient développé des talents magiques chez lui pour apaiser ou comprendre ses patients. Il méprise malgré cela la magie et ses pratiquants ainsi que toute forme de religion. Nulle ne connait ses véritables motivations depuis son retour à l'académie et même lui semble l'ignorer tellement il passe son temps à maugréer.

Une nouvelle charrette de blessé venait d’arriver, sous la pluie battante une silhouette émergea de la tente devant laquelle l’attelage c’était stoppé. Un éclat de lumière vient perturber un instant la grisaille de cette matinée. La silhouette avait rallumé une pipe et se penchait sur le contenue de la charrette. Criant un instant en direction de la tente celle-ci s’ouvrit de nouveau. D’autre personne en jaillir et prirent le contenu du chariot. Des corps, certain s’agitèrent mollement, d’autre pas du tout.
4 personnes étaient encore allongé, dans le chariot, mais la silhouette secoua la tête en prenant une bouffée de tabac. Le cocher compris et reparti pour une autre destination plus loin dans le camp le tout sans se presser. La ligne de front était un véritable carnage et une flèche perdue n’était pas chose rare.

À peine Sylvain avait rabattu la toile de la tente que les premiers cris commencèrent. Une blessure propre ça n’existait pas ou c’était rare et la magie n’arrangeait pas les choses, les amputations étaient le moyen le plus simple de garder quelqu’un en vie et de l’envoyer de nouveau se prendre une hache dans la figure en criant des cris de guerre sûrement très inspirés. La pile de ce qui devait être à un moment des membres humains était autant de complication ou de gangrène évitée. Le médecin repassa une nouvelle fois devant le mage médecin qui était depuis bien longtemps à court de magie, le visage blême, il lui servit le même regard dédaigneux qu’a l’aller.

— Si vous pouvez plus servir, cassez-vous de cette tente sinon tenez au moins les blessés trop agité ou faite des bandages. Mais restez pas planté là comme un couillon.

Retroussant ensuite ses manches le vieil homme commença ce pourquoi il était debout depuis des heures. Sauver la vie de malheureux en les triturant avec ses instruments. La journée ne faisait que commencer.

Une énième bataille de finie, Sylvain ne savait même pas qui c’était battus contre qui. Il fumait doucement sa pipe au milieu de la tente des blessés qui était d’un calme mortuaire. Seuls des gémissements venaient perturber le silence. Ayant vaguement dissipé la terreur de la mort des plus enclins à survivre, d’une vague mentale, il se leva. Il n’aimait pas avoir recours à la magie, mais il fallait avouer que des fois cela avait du bon. Sauf quand une boule de feu vient vous fusionner votre cuirasse au corps et qu’il faut vous écorcher vif pour vous en sortir. La magie était le moyen d’expression le plus pervers que l’humanité avait trouvé. Même un mage compétent dans les sortilèges de soins pouvait avoir du mal à soigner quelqu’un avec ce genre de cas. Ses jambes le faisaient atrocement souffrir. Qu’il était loin le temps où il accompagnait lui même le cocher sur les lignes de front. Marche ou crève se dit il vielle carcasse pour se motiver à aller à sa tente sans faire une pause en chemin.

Enfin il arriva et s’écroula dans son fauteuil, l'ancêtre se massa doucement les jambes. Scrutant ensuite le raie de lumière à travers l’ouverture de la tente il ne se souvenait même plus de quand il avait dormi pour la dernière fois. Cette campagne serait sa dernière. Il allait devoir retourner à l’académie. Finir ses vieux jours, cette idée le fit ricaner. Il avait passé sa vie à faire des gestes obscènes face a la mort en lui arrachant de ses griffes les âmes des guerriers qui lui était destinée. Il murmura doucement.

— Il faudra attendre encore un moment ma vieille amie.

Se redressant ensuite il raviva le feu de sa pipe et alluma une bougie, enfin il se mit à la rédaction d’une lettre. Il annonçait la fin de sa carrière sur le terrain et son retour à l’académie. Du moins si aucun événement majeur ne survenait. L’idée de pouvoir disséquer des cadavres devant une salle de potentiel futur médecin se servant de leurs dix doigts et non pas de magie n’était peut être pas si désagréable songea-t-il. Peut-être même qu’on lui foutra la paix ?

Qui sait ce qu’il l’attendait.

Université de Drakstrang