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  • Lun 1 Jan - 20:31
    Vizalys humait l’air, humide et terreux, s’appuyant contre un pin afin de garder bien en vue la direction de la bicoque de la guenaude. Ses chiens commençaient à montrer des signes de fatigue, mêlée à une impatience. Ils n’étaient pas habitués à si peu d’action, et se tortillaient d’ennui.
    Les éclaireurs qui ouvraient la marche n’étaient toujours pas revenus, et bien que le mage était un optimiste par nature, surtout quand cela avantageait il se doutait que quelque chose se tramait autour de ce cimetière maudit. Il sentait l’atmosphère s’alourdir de plus en plus, à chaque pas qui les rapprochait de sa promise. Vlasov se tenait en face de lui, accroupi, tenant fermement l’un des chien, le plus retord. Les muscles de sa nuque étaient tendus, et il émanait de lui une énergie meurtrière palpable. Pour les autres, ils avaient perdu de leur superbe, tant et si bien que Vizalys se demandait comment il avait pu les garder auprès de lui aussi longtemps. Ma foi, les hommes, c’est comme les outils, on peut les affûter ou les réparer, mais si il faut jeter, on jette. On en trouvera toujours ailleurs.
    Fronçant les sourcils, il plissa les yeux et se rapprocha de son subalterne. Au moment où il arrivait à sa hauteur, une sorte de bruit sourd, un brouhaha indescriptible commençait à s’élever, et semblait augmenter et se rapprocher d’eux. C'étaient des oiseaux. Affolés, ils s'égosillaient, allant de branche en branche, battant furieusement des ailes.
    L’homme au tricorne reprit une inspiration, et une odeur particulière vint s'immiscer dans ses narines.

    - Tu sens ça ? Dit-il en observant les piafs, qui s’agitaient de plus en plus.
    - Ouais. Ca pue. Littéralement. Ca vient de là où est ta petite copine. Répondit Vlasov concentré sur les silhouettes des conifères, épaisses et sombres. Il y avait du mouvement.
    Vizalys, d’apparence calme, s’accroupit lentement et posa une main gantée contre le sol mouillé. Il aperçut, non loin de quelques roches, une armée de cloportes qui grouillaient, et pareillement que la volaille, se carapataient d’une manière peu naturelle. Certains d’entre eux semblaient se recroqueviller sur eux même et se tordre en spasmes peu ragoûtants. Le mage n’eut pas le loisir de les étudier plus longtemps, sentant sous sa paume des pulsations rythmées et conséquentes, se rapprochant dangereusement de leur position.
    - La terre gronde.
    Ils étaient trop éloignés pour pouvoir ne serait-ce qu’apercevoir la maison de la malade, cela ne voulait pas dire cependant qu’ils étaient à l'abri de la chose qui avait massacré Smothler et Rich.
    Sans une parole, comme un seul homme, les deux collègues commencèrent à évoluer vers la gauche, plus rapidement. Laissant ainsi le reste de leurs comparses en arrière.
    Une flopée d'oiseaux les survolèrent dans des coassements effrayés, et des bruits sourds se firent entendre tout près de là où stationnait le reste des bandits. Un des criminel poussa un cri étouffé : c’était un oiseau, en état de putréfaction avancée, qui s’était écrasé sur la tête du pauvre homme. Il fut suivi par d’autres volatiles tout aussi mal en point, venant s’échouer tous les cinq mètres, le reste des oiseaux essayant de fuir, en piaillant, la menace invisible qui s’emparait du bois. Ne voyant plus leurs deux supérieurs, les chiens ayant été lâchés et ne donnant plus de signe de vie, les bandits se regardèrent mutuellement. Ils étaient visiblement alarmés, certains sortirent une arme, d’autres commencèrent à reculer doucement. Entre la peur de cette menace inconnue et la peur que leur suscitait leur chef, le groupe avait du mal à se positionner pour prendre une décision.
    La terre se mit à tressaillir sous leurs pieds, et ils se mirent à courir, dans toutes les directions, si n’était toujours plus loin de cette maudite baraque.
    Alors qu’ils pensaient pouvoir s’en sortir, un cerf surgit par dessus un arbre abattu, La tête à moitié pourrie, ravagée par la gangrène, la chair boursouflée se détachant en filaments visqueux de son crâne, un oeil pendant au bout d’un nerf optique nécrosé, la mâchoire de l’animal grignoté par un mal noir et spongieux. La panique gagnant les criminels, certains prirent leurs jambes à leur cou à cette vision d’horreur, d’autres plus téméraires, pensaient pouvoir faire face à ce monstre surgit du ventre des bois. Malheureusement, le cerf n’en avait après aucun de ses guignols en braies souillées, après avoir donné des coups de tête dans des cibles imaginaires, en bramant comme un beau diable. Après une pénible lutte contre le mal qui le rongeait, le cervidé s’effondra sur l’un des bandits qui essayaient de tuer l’animal. A présent coincé sous cet animal imposant, le visage et les mains du bonhomme furent rapidement souillés par ces lésions mortifères, arrachant des hurlements d'effroi à l’infortuné.
    D’autres hurlements s’élevèrent, car même en ayant fui le monstre à bois, les brigands furent infectés de cette nécrose effroyable, aussi rapide que mortelle.
    Une cacophonie de cris d’animaux et d’hommes mêlés aux clameurs de la forêt résonnait sinistrement au sein de ces bois désormais viciés.

    Vlasov et Vizalys avaient réagi avec instinct. Et heureusement, cela les avait certainement sauver leur cul. Vlasov observait son patron évoluer rapidement dans la forêt. Ils n’étaient plus très loin du cimetière et avaient repéré un mur de pierre qui semblait facilement franchissable.
    Il les avait laissés crever comme on laisse un bestiau à l’abattoir. Le guerrier serrait fortement la fusée de son sabre, s’estimant heureux de ne pas avoir été jeté comme une merde lui aussi. De ce qu’il pouvait entendre d’ici, il était bien content d’avoir taillé la route.
    Ils arrivèrent enfin en lisière de forêt, et se faufilèrent entre les diverses buissons et ronces qui rendaient difficiles l’accès au mur du jardin des allongés. Le mage escalada sans mal, s'aidant du lierre qui s’était incrusté dans la pierre. Vlasov eut plus de difficultés, plus lourd, mais ne voulant absolument pas rencontrer le même destin que ceux qui étaient restés en arrière, il s’extirpa de l’autre côté de la cloison, pour retomber tout près de son supérieur.
    Vizalys lui s’engouffra dans un mausolée à la porte enfoncée, rongée par le temps.
    Enfin dans un semblant de sécurité, il souffla un bon coup et constata avec satisfaction que son bras droit avait survécu. Il ôta son couvre-chef, et plaqua ses cheveux en arrière d'un geste brusque. Il aurait pu s’arrêter là, et se dire que peut-être cela n’en valait pas la peine, comme certains de ses hommes s’étaient risqué à lui.
    Mais les yeux du mage luisaient à présent d’une lueur malsaine, oscillant entre colère et obsession. L’objet de son désir maladif  n'était plus très loin.


    ***


    Karsa avait traversé ces dernières décennies sans vraiment avoir côtoyé d’autre personne. Non pas qu’elle n’en avait pas envie, mais elle errait en ces terres depuis assez longtemps pour se lasser rapidement des paysages, des caractères et des rencontres qu’elle avait pu faire.  Non pas qu’elle était l’être le plus fascinant de ce bas monde, au contraire, cependant la lassitude venait forcément se frayer une place bien ancrée dans les êtres qui vivaient plus longtemps que d’autres. Toujours en quête de renouveau, de nouvelles sensations. Il fut un temps où la faiseuse était bien plus fougueuse et aventureuse, seulement les rouages du temps faisaient leur œuvre, et l’attitude de l’ombra s’en était accommodée.
    Il semblait cependant, que ces derniers mois, le destin avait décidé que la créature devait sortir de sa dormance nonchalante, en lui montrant une nouvelle voie, un nouveau rêve. Une plume noire vint à l’esprit de Karsa, qu’elle embrassa dans une pensée reconnaissante, et se reconcentra sur son hôte. Elle n’était pas l’être le plus expert en relations sociales, pourtant, même elle pouvait deviner que le regard de la jeune femme, qui se voulait discret, l’admirait en cachette. Une admiration partagée, et Karsa avait voulu peut être lui plaire, sans grandes manœuvres.
    Elle ne se serait jamais imaginé que Maria, avec ses joues rougies par la timidité et les mains tremblantes d’incertitude, aurait été celle à encourager un quelconque rapprochement.

    La sensation de sa main contre sa joue la ramenait à un plan d’existence jusque lors en hibernation chez l’ombra, qui s’éveilla doucement à ce contact. Elle posa alors une main ruisselante sur celle de la fossoyeuse, inclinant la tête pour appuyer ce contact. Elle leva les yeux vers ceux couleur nuage de sa partenaire, et se pencha en avant. Quand ses lèvres rencontrèrent celles de Maria, un sentiment étrange, alliant fièvre et plénitude, vint animer le cœur de la faiseuse.
    Citoyen de La République
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    Maria Moonshire
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  • Mar 27 Fév - 11:22

    Amusée, la spectre observait la maladie se répandre dans la forêt. Toutes les cibles de son sombre pouvoir voyaient à présent leur corps se nécroser rapidement, pourrir, alors même qu'ils n'étaient pas encore trépassés. Une vision d'horreur qui s'imposait aussi bien aux animaux qu'aux malheureux membres de la bande de Vyzalis. Si ce dernier et son compère laissèrent leurs semblables à un sort funeste, la protectrice de Maria prit un malin plaisir à remarquer chaque corps qui s'effondrait. A les observer, silencieusement, tandis que des pustules abjectes venaient apparaître sur leur derme avant d'éclater dans un bruit humide pour propager un peu plus le mal de sa propre magie. Sur son visage éthérée, un large sourire était venu déformer les traits similaires à ceux de la jeune fossoyeuse tandis qu'elle repartait alors en direction de la demeure de cette dernière. Le gros des forces "intruses" avait été éliminé. Pour les survivants potentiels, elle pourrait peut-être... Silencieusement, la revenante remarqua les deux "chefs" de cette bande de malfrats qui venaient de pénétrer dans le cimetière. Et l'amusement de la spectre se mua alors en une profonde inquiétude à l'égard de celle avec qui elle partageait sa destinée.

    *
    *  *


    Le front posé contre celui de la faiseuse, Maria éprouvait un sentiment nouveau. Si elle tentait de faire fi de la chaleur qui courait dans sa poitrine et sur ses joues, la préparatrice mortuaire restait là à simplement profiter du moment. Elle ne savait pas trop pourquoi elle avait prit l'initiative ainsi. Ni pourquoi sa vis à vis avait accepté ses avances. Mais... Elle en était heureuse. Peut-être même qu'elle l'était pour la première fois de sa triste vie. Et pourtant... Pourtant elle ne pouvait se défaire de ce désagréable instinct qui lui hurlait d'éloigner l'ombra de sa vie. De la repousser. Pour son propre bien. Maria était une source de problèmes. A part les morts, tout finissait par se briser autour d'elle. Des biens physiques ou des personnes. Combien de suicides avait-elle pu voir dans son adolescence? Combien d'âmes s'étaient retrouvées mises en terre par ses propres mains faméliques? Maria était liée à la mort elle même et elle ne voulait pas que Karsa soit affectée par sa propre malchance. Mais elle ne pouvait se défaire de ce qu'elle ressentait là. De ce baiser. De cette plénitude. Rouvrant doucement les yeux, la fossoyeuse plongea son regard gris dans le vairon du regard de l'ombra et un nouveau sourire glissa sur ses lèvres fines. Caressant encore un peu la peau de la blessée, Maria sentit de nouveau cette chaleur se manifester en elle. Rapprochant de nouveau son visage, elle s'apprêtait à sceller un nouveau baiser lorsque toute la chaleur disparut de la pièce. Lorsque la froid caractéristique de sa protectrice se répandait autour d'elle.

    * Les bourreaux de ta belle sont là, ma chère enfant. *

    Un long frisson glissa sur l'échine de la fossoyeuse tandis qu'elle se reculait soudainement de l'ombra. Sur ses yeux, une profonde inquiétude put se lire tandis qu'elle commençait à chercher ses mots. L'angoisse commençait à étreindre son cœur et elle ne sut pas tout de suite comment réagir et parler. Elle voulait informer Karsa de ce qu'il se passait. Elle voulait l'avertir. Lui demander de rester loin. Elle voulait la protéger. Elle. Elle qui était pourtant bonne à rien. Ses yeux s'emplirent quelques instants d'une buée étrange tandis qu'elle cherchait ses mots. Et, dans un soupir tremblotant, elle prit finalement la parole, tirant sur la main de sa partenaire.

    - Ils sont là, ceux qui te cherchent.

    Elle n'attendit aucune réponse, entraînant Karsa dans sa chambre tout en ignorant les gouttelettes qui continuaient de perler ici et là. Ouvrant une armoire dans une précipitation marquée, la thanatopractrice sortit une robe de dentelle de qualité modeste qu'elle jeta sur son lit. Plus qu'autre chose, elle refusait que les ordures qui cherchaient à s'en prendre à l'ombra ne la trouve dans sa robe naturelle.

    - Mets ça puis rejoint moi en bas. Je... Nous... Allons les arrêter.

    Une étrange lueur brillait dans les yeux de la jeune femme maudite. De la peur, naturellement, se lisait sur tout son visage. Elle ne souhaitait la mort de personne. Elle allait chercher, une nouvelle fois, à raisonner les êtres qui venaient violer le cimetière de leurs sombres intentions. Mais... Elle refusait de perdre Karsa. De la voir mourir sous ses yeux.

    * Prête moi ta force. Je t'en supplie. *

    Sentant alors la main froide et éthérée de la spectre qui la protégeait depuis tant d'années, Maria lâcha un long soupir tandis qu'elle descendait les marches de sa propre demeure. Cette sensation de givre marquant sa peau de porcelaine. Cette impression de mort l'entourant... C'était étrangement rassurant.

    * Bien sûr mon enfant. Je n'accepterai qu'aucun mal ne te soit fait. *

    Bien sûr, la spectre se gardait bien d'évoquer le sort de l'ombra qui accompagnait l'enfant aux cheveux blancs. D'ailleurs, elle hésitait même à volontairement provoquer la fin de la faiseuse par pur sadisme. Par plaisir de voir Maria de nouveau s'écrouler en apercevant une personne qu'elle aimait mourir devant elle. Une boucle sordide qu'elle alimenterait de nouveau tout en savourant toutes les émotions négatives qui se dégageraient de la fossoyeuse. Mais... Elle se retiendrait. Pour cette fois. L'ombra redonnait un sursaut de vie à l'enfant qu'elle protégeait et même si elle se nourrissait de son malheur, la spectre était également consciente que, sans l'enfant maudite, elle risquait bien d'errer de nouveau sans but. Alors, elle laisserait simplement les choses se faire concernant Karsa. Elle? Elle protègerait comme elle l'avait toujours fait Maria. Et elle se montrerait sans pitié.

    Arrivant devant la porte, la concernée ouvrit cette dernière d'un geste vif, apercevant rapidement les deux intrus qui s'approchaient. Dans un soupir long, la fossoyeuse s'avança doucement, les bras le long du corps et le regard aussi mélancolique que déterminé.

    - N-N'approchez pas plus!

    La voix cristalline résonna quelques temps dans l'air. Un suspend, dans la nuit froide de ce cimetière particulièrement avide en âmes. Fixant son regard sur les deux hommes, la jeune femme toussota doucement avant de reprendre, un léger filet de sang glissant sur sa main.

    - Trop de vies se sont déjà arrêtées à cause de votre folie. N'approchez pas plus de ma demeure. Elle releva la tête, fixant les deux malfrats. Ce jardin, cette maison, et tout ce qui se trouve ici sont sous ma protection. Les morts ne vous ont-ils rien appris? Partez. Vous ne trouverez rien d'autre qu'une fin horrible si vous faites un pas de plus.

    Elle les fixa un peu plus intensément, tandis que l'air s'emplissait d'une aura particulièrement glaciale. La spectre était là, à les observer, et elle jubilait silencieusement. Ces hommes étaient pourris jusqu'à la racine, et la revenante savait que jamais ils ne partiraient. Alors, bientôt, elle pourrait récolter de nouvelles âmes, et assister à la mise en terre de ces corps froids.

    - Partez. Ou mourrez.

    Des mots étrangement violents, dans la bouche d'une petite personne aussi innocente.
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  • Hier à 17:00
    L’ombra avait compris. Une fois que leurs lèvres s’étaient éloignées, qu’elle avait croisé ses yeux, emplis de peur et d’espoir, Karsa avait compris. Elles ne pourraient jamais être ensemble. Aucun lendemain, aucun plus tard, aucun avenir n’était envisageable. La femme brune résista d’abord, lorsque la jeune thanatopractrice voulu s’extraire de ses bras. Elle fixa l’endroit de la pièce où le froid était le plus agressif, d’un œil meurtrier, la pupille en mydriase.
    Puis elle la laissa s'en aller, doucement, laissant glisser ses doigts maintenant presque secs, contre le coton mouillé de la chemise de Maria.
    Elle ressentit d’abord une sorte de tristesse, indéfinissable, s’emparer d’elle. Puis cette tristesse se mua en résolution, et vint se mélanger violemment à une colère noire. Une colère incontrôlable, froide et brute. La créature des ombres se releva, à l’invitation de sa dulcinée. Qu’elles ne soient pas destinées à évoluer ensemble était une chose, cependant Karsa était entraînée par un instinct de possession, et à ses yeux, la condamnée était à présent sienne. Elle le regarda partir à la rencontre de ces gêneurs, venus une nouvelle fois les déranger. Elle parcourut la pièce d’un regard froid, l’esprit vide. Puis son regard se posa sur la tenue sortie à son égard, faite de dentelles et de rubans. Les broderies étaient fines, et le tissu encore en très bon état. Karsa laissa échapper un petit rire. Elle n’allait certainement pas mettre ça. Elle posa une main pâle sur la partie haute de la robe, Elle effleura le corsage, descendant jusqu’à la jupe. Puis, serrant le poing, se retourna d’un mouvement brusque  vers l’armoire. Hors de question d’abîmer une si jolie toilette.

    Sans aucune pensée pour sa partenaire qui devait à présent faire face à ses agresseurs, la créature fouillait les affaires de la malade, par des gestes mécaniques et presque rageurs. Elle tapa le pied contre une boîte, qui fit un bruit qui attira l’attention de la faiseuse. Elle baissa la tête, et aperçut une sorte de boîte en velour noir. Elle s’accroupit et, sans aucune cérémonie, l’ouvrit. A la vision de ce qu’elle y trouva, elle se mit à sourire.

    ***

    - C’est pas toi qu’on veut la souffrante, alors sois une fleur et casse toi.

    Vlasov s’était avancé, ni de trop loin ni de trop près, d’où se trouvait la fossoyeuse. Il fit miroiter la lame de son sabre, et analysait le moindre des mouvements de la brindille qui essayait de leur tenir tête. Comment une petite nana aussi frêle avait pu dézingué la moitié de leur groupe, ça c’était un mystère pour lui. Cependant, il ne ferait pas l’erreur de ses camarades, et ne sous estimait en rien la donzelle. A l'affût du moindre mouvement suspect de sa part, il l’acheverait soit d’une flèche empoisonnée en pleine tête ou la ferait voler en lui tranchant le cou.

    - Il me semble, chère demoiselle, que vous avez quelque chose qui m’appartient. Retentit une voix d’outre-tombe. Vizalys était là, adossé contre une ruine de mausolée, nonchalant.

    Voyant la mine résolue de son interlocutrice, il poussa un petit soupir, et sortit une petite boîte en argent, qu’il fit tourner dans sa main. Après quelques tours et un silence insolent, il l’ouvrit d’un coup sec et étala une sorte de pâte noire violacée sur son doigt, qu’il porta à sa bouche. Il mâchonna quelques secondes, et prit une grande inspiration. Ses yeux luisaient d’une nuance malsaine.

    - Savez-vous au moins qui vous abritez ? Excusez moi eheh, je ne devrais pas être si vague avec mes mots. Avez-vous connaissance de quel spécimen vous cachez chez vous ?

    Quelques bruits de masticage, le vent qui se levait, le ciel qui se voilait. Le mage se redressa et commença à s’avancer vers Maria, une aura écrasante et menaçante émanant de lui.

    - Vous savez ce que je déteste le plus en ce bas monde ?

    Un craquement.

    - Ce sont les personnes qui n’en font qu’à leur tête, sans réfléchir. Ca, ça me bute.

    Plusieurs craquements, le sol se mit à gronder.

    - La deuxième chose, c’est les cimetières. Rien contre votre profession hein, mais clairement, je hais ces endroit à la con où on fait genre les êtres qui se retrouve à pourrir sous terre ont un jour compté dans la vie de quelqu’un.

    Une craquelure vint fissurer la terre juste aux pieds de Maria.

    - Et la dernière chose. Vizalys était maintenant tout près. La dernière chose borde, c’est qu’on me vole ce qui est à moi. Et crois-moi ma caille, je suis plutôt remonté contre toi. Alors tu vas être bien-

    Une détonation se fit entendre, résonnant jusqu’à la lisière des bois sombres entourant le cimetière et ses environs. Tout se passa très vite, aussi la jeune thanatopractrice ne vit pas ou peu de choses. Elle sentit seulement une main familière se poser sur son épaule.

    - Le mot "spécimen" n'est décidément pas très poli, Mage.  Claqua la voix de Karsa, glaciale.

    Le mage et son acolyte avaient été repoussés de plusieurs mètres. Plusieurs pics de glaces enfoncés dans la terre dure, s’étaient dressés entre les jeunes femmes et leurs assaillants.
    La femme brune passa devant Maria, sans un regard. Pourtant, leur connexion était toujours là, tacite et terriblement dense.

    Le mage de terre se redressa fièrement, époussetant le manteau qui avait été déchiré par l’attaque surprise de Karsa. Un sourire démoniaque vint étirer les lèvres de l’homme, qui ne pris même pas la peine de vérifier si son subordonné était indemne. Vlasov avait encaissé au mieux, seulement, son bras avait été transperçé par un des projectiles tranchants de la femme masquée. Il grogna et retira sauvagement le pic qui déchirait sa chair et se fit un garrot. Malgré cela, le bandit avait toujours sa rage de guerrier, et ne semblait pas vouloir se débiner.

    Vizalys se mit à rire et ouvrit ses bras, dans un vacarme insensé. Des roches vinrent pourfendre les stalagmites givrées, crissant sous la pression de son pouvoir.

    - Ombra ! Viens donc me voir !

    Karsa, sa nature révélée, se tourna vers sa promise. Attendant un signe, un ordre, humant l’air à la recherche de cette nuée glacée qui entourait la jeune condamnée. Elle attendait.
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