A Dreadful Night.
(Enfance)
Vesimyr Dyr Erlamshir et Myra Erlamshir, fiers citoyens de Reike, vivant sous le règne du roi Reih et la reine Aaliya Draknys. C'est au palais que les deux amants se sont aperçus pour la fois alors que Vesimyr occupait un poste de garde royal et que Myra servait sa majesté. Ainsi, quelques années plus tard, la venue d'un enfant était imminente. Le soleil était déjà tombé à l'horizon alors qu'un homme approchait les portes du palais en courant, un message important à transmettre. L'homme à bout de souffle supplia les gardes d'avertir Vesimyr que son épouse était déjà en travaux.

L'elfe était bien connu de ses confrères et la missive se rendit rapidement. Fou de joie, Vesimyr quitta son poste de garde, sous permission de son capitaine, se rendant directement à son domicile. Quelle ne fut pas sa surprise de constater plusieurs voisins et passants rassemblés devant la maison à son arrivée. Se frayant un chemin parmi eux, les gens se retournèrent sur son passage en murmurant dans l'oreille de l'un et de l'autre, jusqu'à tomber nez à nez avec l'un de ses chers amis.

«Je suis navré ... Vesimyr ...»

Sont les seules paroles que l'elfe pu distinguer au milieu du rassemblement autour de lui. Poussant la foule de curieux sur la voie, il entra dans son logement et ne put que constater le pire. L'enfant était bel et bien née et en bonne santé, mais son épouse n'avait pas survécu au dur labeur.

C'est ainsi que Vesimyr se retrouva seul avec Nikaerth, n'ayant que d'autre choix que d'engager une domestique afin de prendre soin de l'enfant. Au fond de lui, Vesimyr essaya comme il le pouvait d'aimer le poupon, mais il le rendait responsable de la mort de sa bien-aimée. Un seul regard et des souvenirs douloureux venait le hanter jusque dans les recoins de la nuit. Le pauvre elfe était inconsolable et se referma vis-à-vis de son nouveau-né.

Nikaerth grandit dans l'absence de son père, alors que celui-ci passait le plus clair de son temps au palais à exécuter ses devoirs et même davantage afin d'éviter le petit. Le garçon tentait par tous les moyens de captiver son attention ou même un seul regard, mais sans succès. L'enfant n'avait jamais appris ce qui était arrivé à sa mère et n'osait jamais demander de peur de mettre Vesimyr en colère. Grandissant seul avec sa nourrice, le bambin n'était pas porté à jouer avec les autres petits et préférait la solitude se sentant rejeté par le seul homme qui n'aurait pas dû.

À l'âge de douze ans, il avait finalement atteint l'âge de commencer son entraînement militaire. Enfin quelque chose qui intéressait le jeune homme, mais surtout il était convaincu que cela rendrait son père fier de lui. Nikaerth voulait être le plus fort, le meilleur et de ne laisser aucun choix à son paternel que de réaliser l'importance de son fils une bonne fois pour toute. Seulement le garçon n'était jamais assez bien, assez fort, pour mériter la reconnaissance qu'il cherchait désespérément. L'indignation grandit peu à peu dans le cœur du petit et conclut qu'il ne devrait plus rien espérer de son géniteur.

Daddy Issue.
Soixante-trois ans (Adolescent)
Les années d'entraînement furent difficiles et douloureuses, des années à se rouler dans la boue et à saigner des mains afin de s'endurcir, mais le jeune elfe en redemandait encore et encore. C'était sa façon de canaliser la rage qui l'habitait. Maintenant devenu soldat, Nikaerth n'avait jamais été aussi seul. D'autant plus que le jeune homme avait développé un tempérament colérique le rendant impopulaire auprès de ses confrères et certaines bagarres entre eux. Ne voyant que son parent qu'en de rares occasions, il préférait rester dans les baraques que de retourner dans cette maison qu'il haïssait désormais et où il se faisait toujours considéré comme un enfant.

C'est d'ailleurs cette attitude et cet isolement qui le fit connaître auprès de l'un de ses officiers. Ayant aperçu le jeune elfe séparer du reste du groupe et ne voulant pas être inclus, l'officier se retrouva compatissant avec lui. Sans doute l'homme reconnaissait son propre parcours lors de sa jeunesse. Malgré les crises de colère et son humeur massacrante, l'adolescent n'en était pas moins un vaillant soldat et il s'était déjà démarqué à plusieurs reprises devant ses supérieurs. Voyant le potentiel du jeune homme, il le recueillit sous son aile. Ce ne fut pas un parcours des plus facile puisque l'elfe se montrait beaucoup plus têtu à accepter de l'aide qu'il avait escompté. Lui rappelant constamment qu'un homme seul ne pouvait acquérir la victoire et qu'il avait besoin de ses confrères que ça lui plaise ou non. Lentement, mais sûrement, l'officier gagna la confiance de Nikaerth et celui-ci se laissa guider vers une alternative beaucoup plus profitable pour lui.

Bien que les techniques enseignées par l'officier fonctionnaient, le jeune homme avait du mal à se faire des amis et surtout, à les préserver. Il comprenait l'importance de garder ses frères d'armes à portée de main, mais devoir être plaisant avec eux n'était en rien un comportement naturel pour lui. Tout ce qu'il désirait était de devenir officier afin d'avoir une plus grosse paye et surtout faire de l'ombre à son imbécile de père. La haine et la vengeance semblaient être les seuls éléments qui résonnaient avec lui.

«Fais semblant !! Je me moque que ce soit faux. Cette attitude ne va te mener nulle part, mon garçon.»

Forcément, l'officier avait raison, même si l'elfe ne l'aurait jamais avoué de vive voix. Avec les ennemis qu'il s'était fait, l'elfe avait plus de chance à se faire laisser pour mort par ses frères d'armes que de pouvoir compter sur eux lors d'une bataille. Cette situation devrait changer, d'autant plus que l'adolescent ne pourrait jamais aspirer à un meilleur poste avec ce genre de dynamique qui l'entourait. Nikaerth avait compris ce principe et il comptait désormais avoir ce qu'il méritait par tous les moyens nécessaires. Le comportement du jeune homme changeait progressivement devant les yeux des autres soldats, fier de son pupille, l'officier ne se doutait pas de la défectuosité de l'individu qu'il était en train de créer.

When the moon comes down
Deux cent-trente-cinq ans. (Adulte)
Nikaerth était bien allongé sur son lit de fortune lorsqu'il entendit des cris à l'extérieur du campement. Se levant précipitamment et enfilant rapidement son armure Luteni, il traversa la foule afin de voir de quoi il en retournait. Les nouvelles étant que le clan Ryssen s'était emparé de la ville de Kyouji quelques nuits auparavant. Deux ans de siège interminable pour finalement se faire conquérir lors d'une seule nuit, quel désastre, mais surtout qu'est-ce qui avait bien pu mal tourner pour qu'aucun des régiments dans les environs n'ait été avisés du changement de situation?

«Les seigneurs de Kyouji ! Ont-ils survécu à l'attaque ?!»

«Non Khashis , la famille a été assassinée.»

L'officier se contenta de regarder la scène en silence, réfléchissant déjà à la meilleure marche à suivre dans de telles circonstances. Bien entendu, la décision ne lui revenait pas, mais il craignait que le capitaine fasse preuve de mauvais jugements ayant des liens familiaux avec quelques foutus nobles de la ville. Comme escompté, les ordres étaient de démonter le camp sur-le-champ et d'attendre la suite. Bien que son rang d'officier ne lui permettait pas de se sauver de ce travail peu glorieux, il suit plutôt le Khashis jusque dans la tente qui lui avait été attitrée. Le capitaine se prépara au débat qu'il devrait avoir avec l'elfe, sachant pertinemment qu'il ne devrait pas le laisser lui faire de l'ombre de la sorte. Au fil du temps, Khashis Ibrahim s'était retrouvé particulièrement attaché à Nikaerth. Bien entendu, le vieil homme n'avait jamais vraiment eu vent de son passé tumultueux et ses frères d'armes étaient, pour la plupart, décédés de vieillesse depuis des années. Évidemment, Nikaerth n'avait jamais abordé le sujet avec lui et il était heureux que très peu de témoins vivaient toujours.

«Parle ...»

«Ça ne les ramènera pas. Déplacer une garnison complète pour une cité vaincue ne changera rien. Nous devrions tous se rendre à Ikusa et protéger notre capitale, courir derrière des fantômes ne serait qu'une perte de temps.»

Nikaerth tentait d'être le plus calme possible sachant pertinemment le sujet fragile dans lequel il mettait les pieds. Il quitta la tente sans attendre aucune réponse de la part du capitaine. C'était peine perdu et le laisser réfléchir seul était la façon qui avait toujours bien fonctionné avec lui.

En route vers les terres de Kyouji, Nikaerth bouillait de rage intérieurement. Ibrahim avait bien évité le regard du lieutenant lors de l'annonce du nouvel ordre. Manifestement, ils se rendraient tous à Kyouji dans le but de reprendre la ville dans la mesure du possible. La troupe était loin d'être suffisante et l'elfe savait pertinemment qu'il se dirigeait uniquement vers le suicide. Rien d'étonnant que la guerre se faisait de plus en plus difficile avec des dirigeants prenant ce genre de résolution, d'autant plus qu'ils n'étaient pas postés dans le rayon le plus rapproché de la ville. Le chemin serait long et ardu. Pourtant, la garnison ne se rendit jamais à son port, avant même d'arriver à la vue de la ville, une missive sur la tomber d'Ikusa arrivait entre les mains d'Ibrahim.

Le chaos, voilà ce qui en découla, tout espoir de repousser les rivales, décimé. Le roi Reith et la reine Aaliya exécutés et le chef Tensai sur le trône de Reike. Selon les rumeurs, le prince Vaenys avait offert la main de la jeune princesse contre sa vie et il avait fui la capitale. En une semaine tout au plus, la lignée de sang pure Vosdraak allait bientôt être anéanti, les trois villes principales de Reike étaient tombés aux mains de l'ennemi et le seul homme possédant une autorité nécessaire afin de rassembler une armée suffisamment importante pour revenir à la charge s'était échappé comme un lâche en laissant son peuple et la princesse Ayshara à la merci du clan Ryssen. Nombreux soldats avaient entendu les rumeurs sur le prince et ses activités illégales, n'aurait-il pas pu mieux défendre la ville? Ou n'était-ce cela que rumeurs infondées après tout?

Les seuls choix s'offrant maintenant au reste de l'armée était de fuir le Reike en tant que déserteur ou de se prosterner et jurer allégeance au nouveau souverain.

The Black Sheep
De retour à Ikusa, Nikaerth passait la porte sous les regards des Ryssens et le spectacle affreux des têtes des Draknys sur les piques. Vue comme un traître dans son propre royaume, l'elfe du se faire à l'idée que ce serait pas chose facile de cohabiter avec l'ennemi. Il avait envie de tous les tuer un-à-un que par vengeance, mais cela ne mènerait à rien de bon. Tout comme ses confrères, le lieutenant  devait se présenter devant le roi afin de plier genoux. Celui-ci était bien trop gardé pour tenter quoique ce soit, non, Tensai ne pouvait pas être vaincu si facilement après l'avancée qu'il venait de faire. L'elfe aurait besoin de complices, beaucoup, afin de tenter l'impossible. C'est ainsi qu'il fut le premier à genou, attendant patiemment et entraînant ses frères d'armes à faire de même. Cette guerre serait pour un autre jour.

Honteux et en colère, l'officier gardait un visage posé malgré tout. C'est à son retour au baraquement qu'il fut informé du décès de son paternel durant l'attaque qui avait eu lieu au palais. L'elfe n'exprimait aucune émotion devant une telle annonce. Il venait d'hériter de tous les avoirs de son père, incluant la maison de malheur dans laquelle il avait plus ou moins grandi. Une fois seul et à l'abri des regards un rire, un simple et franc rire, s'échappait finalement de lui... Il était temps. Non, Nikaerth n'allait pas être triste, il ressentait plutôt un énorme ressentiment. Comment osait-il être mort avant que celui-ci ne lui témoigne de ses erreurs du passé, mourir avant que le fils n'ait eu le temps de le briser de ses propres mains.