Il lui proposa de lui montrer sa demeure. Certes uniquement de l'extérieur, mais c'étaient ce genre de détails qui prouvaient qu'il prenait leur relation au sérieux. Alors, évidemment, elle accepta la proposition. Elle était prête à tout pour le connaître un peu mieux.

Une fois attablés, il lui présenta un peu plus la propriétaire du restaurant. Elle ouvrit de grands yeux. Encore quelqu'un qui s'engageait pour les siens ? Oui, vraiment, les Reikois pouvaient être merveilleux.

- Je vois que tu sais t'entourer des bonnes personnes. Je pense que je peux cesser de m'inquiéter pour toi lorsque nous sommes séparés.

Elle rit doucement, la main devant la bouche. Elle le savait très bien, ce n'était pas une restauratrice qui pourrait le protéger en cas de danger. Mais il ne courrait pas de danger. Elle s'en assurerait, même depuis la République. Il ne lui arriverait rien tant qu'il lui permettrait de garder un oeil sur lui, directement ou non.

Puis il accepta qu'elle l'attende, et la fit rougir lorsqu'elle l'imagina l'attendre à la sortie des coulisses avec un immense bouquet. Comment ne pas passer inaperçus du tout... Pour autant, cela lui déplaisait-il vraiment ? Il affirmerait ainsi à la vue de tous qu'elle était sa compagne à lui et à personne d'autre. Cela la touchait et l'embarrassait à la fois. Néanmoins, elle devait lui répondre.

- Mais enfin, tu aurais pu le deviner tout seul ! Personne n'est vraiment romantique sans aimer les roses !

Elle lui sourit. Son ton affectueux et plaisantin démentait la possible violence de ses propos. Elle ne voulait pas le faire culpabiliser ou quoi que ce soit. Jamais elle ne voudrait créer d'émotion négative en lui. Sauf peut-être un peu de jalousie si à un moment elle commençait à douter... Mais ce ne serait pas dans l'immédiat. Elle espérait d'ailleurs qu'elle n'aurait jamais à créer une telle mise en scène. Puis le voilà qui lui parla du langage des fleurs... Une étincelle s'alluma dans son regard :

- Voilà l'un de mes sujets de prédilection ! Le langage des fleurs... Pour une rose en particulier, les significations des couleurs sont différentes. La rose blanche n'est pas si positive... c'est un amour malheureux. Par pitié, évite à tout prix la rose jaune, ou tu m'avouerais une infidélité. La rose rose... C'est nous actuellement. Un amour pur et innocent. Un engagement. Et la rose rouge, c'est le symbole par excellence, l'amour dont je rêve, le plus puissant de tous. Notre symbole, si tu l'acceptes.

Elle lui avait pris le mains, qui se trouvaient à présent au-dessus de la table, les coudes reposant sur le bord du meuble, comme si elle lui faisait une promesse, les yeux plantés bien droit dans les siens. On pourrait interpréter cela comme une promesse de l'aimer à jamais. Et elle avait bien envie de la lui faire, cette promesse. D'ailleurs... Pourquoi se retenir ?

- Notre rose rouge sera immortelle. Je t'aimerai jusqu'à ma mort, je t'en fais le serment aujourd'hui.

Il n'y avait pas à s'inquiéter pour sa sécurité, si elle comprenait bien. Mais ce n'était pas ce qu'elle voulait dire. Il lui semblait que Tagar voyait toujours les choses à travers un prisme pratique. Elle sourit doucement, avant de compléter :

- Quelle piètre compagne je ferais si je ne me souciais pas de toi ! Tu n'as pas le droit de m'empêcher de m'inquiéter pour toi. Car même si tu essaies, tu n'y arriveras pas. Tu es important pour moi, je tiens à ce que tu sois heureux... Et surtout en vie.

D'accord, ce dernier point semblait assuré. Mais cela ne coûtait pas grand-chose de le lui réaffirmer.

Elle resserrasa prise sur ses mains lorsqu'il lui promit l'exclusivité. Légèrement rougissante tant cela la touchait, elle lui fut reconnaissante de l'embrasser, pour détourner leur attention à tous les deux. Aussi, elle en profita au maximum. Elle lui rendit ensuite calmement son regard. Après tout, il n'était pas toujours nécessaire de parler. Elle sentait que même ainsi, ils partageaient. Pas des informations, mais un moment. Et qu'ils appréciaient simplement d'être ensemble.

Dès que le plat fut arrivé, elle ne put résister et goûta immédiatement, se demandant ensuite pourquoi elle était surprise de beaucoup apprécier. Néanmoins, son expérience dut s'abréger lorsqu'il lui reparla de ses parents. Décidemment, cela semblait vraiment l'inquiéter. Elle était sur le point de chercher des mots pour le rassurer, lorsqu'il sortit un objet qu'elle reconnut immédiatement. L'espace d'un instant, elle fut muette. Combien de ressources insoupçonnées cachait-il encore ?

Lorsqu'enfin elle retrouva la voix, elle lui rendit l'objet.

- Ce n'est pas à moi de la leur montrer. Fais-le lorsque tu les rencontreras. Si tu arrives à la faire venir naturellement dans la conversation, ce sera encore mieux. Mais, crois-moi, une fois qu'ils l'auront vue, mes parents t'offriront probablement tout ce que tu demanderas. Ils ne prendront pas le risque de contrarier quelqu'un que la Présidente elle-même a distingué. Obtenir leur bénédiction pour le mariage ne sera qu'une formalité, crois-moi.

Elle laissa passer un moment, l'observant avec amour, avant de lancer :

- Tu es plein de ressources et de surprises... Tu es vraiment l'homme parfait.

Elle en avait oublié son assiette. Il devenait difficile à croire qu'elle n'avait pas mangé de la journée. Elle semblait se nourrir de la vue de son aimé. Et, visiblement, cela lui suffisait.

Il lui raconta l'histoire de la médaille. Il semblait malchanceux, alors... Enfin, malchanceux, vraiment ? Cette décoration lui ouvrirait de nombreuses portes, peu importait qu'elle ait été obtenue par hasard.

- Il y avait certainement une bonne raison... Mais réjouis-toi, tu dois avoir vu de nombreuses portes s'ouvrir grâce à cela. Peu importe comment tu l'as obtenue. Ce qui compte, c'est que tu l'aies. Je ne pense pas qu'on te demandera vraiment le détail de son obtention, tu sais.

Puis il la rappela à l'ordre. Elle rit.

- Bien Monsieur !

Puis elle obéit. En effet, il aurait été dommage de ne pas profiter d'un tel repas. Elle prit son temps pour en profiter le plus possible. Et ce ne fut que lorsqu'elle estima avoir terminé qu'elle répondit :

- Voyons, ne pensons pas encore à la retraite. Nous avons tout le temps ! Tu es si pressé de vieillir ?

Lorsqu'il proposa la glace, elle fut tentée d'accepter, mais se rétracta au dernier moment. Ah... Alcoolisé ? D'un coup, elle était moins motivée...

- Ont-ils autre chose ?

Elle croisa alors le regard de la tenancière, qui sembla comprendre son intention, puisqu'elle s'approcha.

- Puis-je vous proposer la carte des desserts ?

Ce fut avec une gratitude non feinte que Maria l'accepta. Puis elle tourna son regard vers son compagnon. La voulait-elle aussi ? Ou savait-il déjà ce qu'il voulait ? Ou ne voulait-il rien ? Ou...

- Pourquoi ne pas se partager quelque chose ?

Il lui expliqua mieux ce qu'il avait voulu dire. Elle hocha la tête. Elle-même ne se voyait pas abandonner la musique, mais elle pouvait comprendre que les métiers plus traditionnels puissent finir par être lassants. Mais prendre sa retraite ? Voilà qui pouvait attendre avant d'être discuté.

Puis vint une conversation beaucoup plus intéressante à ses yeux. Un nouveau dessert. Avec une symbolique forte, à ce qu'il semblait. Et visiblement sans alcool. Voilà qui l'intéressait bien plus.

- Je vais donc tester cela. Et... J'aimerais faire honneur à votre culture. Y a-t-il une manière traditionnelle de les consommer ? Je veux dire, une manière spécifique, différente de la simple table sur laquelle on consomme n'importe quel mets ?

Celui-ci était spécial pour ses créateurs, elle le sentait. Elle voulait donc le rendre spécial pour elle aussi. Puis elle rit à la nouvelle proposition de Tagar :

- Mais n'avions-nous pas déjà quelque chose de prévu ? D'un autre côté, si c'est le dernier jour, il ne faut pas manquer cette occasion. Disons que nous avons déjà le programme de demain matin !

Décidemment,avec lui, elle n'avait pas le temps de s'ennuyer.

Elle avait bien fait de choisir cela. Malgré quelques difficultés avec les baguettes, elle passait un agréable moment... Notant cependant mentalement qu'elle allait certainement avoir du mal à dormir. Mais le jeu en valait la chandelle. Elle avait tout apprécié, mais avait clairement abusé du caramel, qui s'était révélé son accompagnement préféré.

Lorsqu'ils sortirent, à l'augmentation d'allure qu'il imposa, elle comprit qu'ils risquaient d'être en retard. Voilà qui tombait bien, une petite marche rapide l'aiderait à digérer. Lorsqu'elle remarqua la foule, elle comprit. Et crut qu'ils ne trouveraient pas de place. Néanmoins, elle n'aurait pas dû oublier qu'elle se trouvait avec un homme aux multiples ressources. Il n'y avait pas de place au bord de l'eau ? Il les entraîna au-dessus. Puis elle se retrouva dans ses bras. Voilà le refuge qu'elle appréciait le plus. En guise de remerciement, elle l'embrassa avec fougue, puis, sans s'éloigner, laissa son regard voguer dans les airs avec les lumières.

- Je ne voudrais être nulle part ailleurs, ni avec personne d'autre.

Elle avait murmuré, comme si elle craignait de briser la magie du moment.

Pour toute réponse, elle se blottit plus étroitement contre lui. Rien ne pouvait lui arriver dans ses bras, elle se sentait en sécurité. Et dire qu'à peine quelques jours auparavant, ils n'étaient que des connaissances... Les choses avançaient vite. Mais ce n'était pas pour lui déplaire.

Lorsque le spectacle s'acheva, elle n'aurait su dire si celui dont elle avait le plus profité était celui des lumières ou celui du visage de son aimé, ainsi éclairé de manière si particulière. Il lui avait semblé découvrir un homme totalement différent... Mais tout aussi attirant.

Il lui fallut un moment pour se réveiller lorsqu'il lui fit signe de partir. Mais lorsqu'elle y parvint, elle répliqua :

- Inutile de le demander, je l'aurais fait de toute façon. J'ai confiance... D'ailleurs, je vais le prouver, regarde !

S'il pouvait voir dans le noir, il verrait qu'elle avait fermé les yeux et le laissait la guider. Honnêtement, les yeux ouverts ou fermés ne changeaient pas grand-chose quant à sa vision. Mais si elle pouvait lui donner une nouvelle preuve de confiance, elle n'allait pas reculer !
Elle ne rouvrit les paupières que lorsque les lumières de la ville la dérangèrent. Elle dut d'ailleurs papillonner des yeux pendant quelques longues secondes afin de se réhabituer à la lumière.

Puis, face à l'hôtel, il se disposa à s'en aller. Mais elle ne pouvait se résoudre à le laisser partir si facilement. Elle le serra contre elle :

- Encore un peu, s'il te plaît...

Néanmoins, après quelques minutes et un nouveau baiser, elle dut bien se forcer à le laisser partir.

- Je serai là. Je déverrouillerai la porte dès que je serai réveillée. Ainsi, même si je ne suis pas tout à fait prête à ton arrivée, tu pourras venir.

Puis elle dut bien le laisser. Elle se hâta donc vers sa chambre, bien décidée à dormir au plus vite pour hâter le retour du jour.

Lorsque l'homme arriva, elle n'était pas totalement prête. Elle terminait de se coiffer... Et cela lui donna une idée.

- Tiens, approche. Puisque c'est toi qui vas décider de mon habillage du jour... Qu'est-ce que tu aimerais que je fasse comme coiffure ? Ou alors, peut-être préfèrerais-tu essayer toi-même ?

Elle était curieuse de savoir ce qu'il répondrait à cette question... Sauterait-il sur l'occasion de s'amuser avec la blonde chevelure ?

Il avait l'habitude ? Cela ne lui importait pas. Après tout, qu'il soit expérimenté ou non, c'était sa sensibilité qu'elle voulait voir. Son talent n'avait aucune importance. Que le résultat soit beau ou non ne lui importait pas non plus. Elle ne voulait que lui donner une opportunité pour s'amuser, à lui qui était bien trop sérieux.

Puis il lui demanda son shampoing. Elle ferma un instant les yeux, tentant de se rappeler sa recette. Puis, face à l'échec qu'elle essuya, elle répondit simplement :

- C'est un mélange d'huile de fleurs, il y en a beaucoup, je ne sais plus exactement lesquelles entrent dans sa composition. Mais je peux aller me rafraîchir la mémoire si tu le veux.

Il eut l'air si fier lorsqu'il lui présenta le rendu, qu'elle prit le temps de l'observer et de le jauger, avant de rendre son verdict :

- C'est parfait ! Je ne porte pas souvent de chignon, mais faisons une exception ! C'est ce que tu as choisi, ce sera donc ma coiffure pour aujourd'hui !

Puis elle se leva, lui déposant un baiser au passage, comme pour lui demander de patienter, et alla récupérer ses affaires. Une fois prête, elle le rejoignit et déclara :

- Hier, tu as payé pour tout. Aujourd'hui, c'est mon tour. Et ce n'est pas négociable. Ceci étant dit... Où se trouve ce fameux magasin ?

Elle avait posé la question rapidement, afin de ne pas lui laisser le loisir de protester quant à l'argent.